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D. L’acquisition des compétences : La formation formelle et informelle

2. Théories explicatives du sujet de la thèse

Une recherche s’inscrit dans la perspective d’une filiation de référence qui lui assure objectivité et créativité. C’est ce nécessaire point de départ fondé sur les principes hypothétiques visant à l’explication générale d’un phénomène que l’on appelle théorie.

Parmi les obstacles que rencontre le champ des TIC, l’on peut citer les difficultés curriculaires, psychopédagogiques et l’absence de théories de référence qui s’expliqueraient par la relative jeunesse de cette science, et surtout par les questions posées qui sont récentes. Cependant, et malgré cette incertitude, des classifications des usages pédagogiques, quelques consensus se dégagent des usages que les institutions éducatives font de l’ordinateur. Parmi ces consensus se démarquent des usages des TIC en Éducation plusieurs approches :

• Une approche technicisée • Une approche médiatisée • Une approche instrumentée.

Cette dernière approche dans une perspective sociologique et historique est nous semble-t-il, au regard des possibilités pédagogiques qu’elle propose, la plus pertinente pour expliquer notre sujet.

.2.1. L’approche sociologique et les méthodes sociologiques d’analyse du travail.

La recherche Gautellier (2000) reconnait que les travaux centrés sur les apprentissages ne peuvent suffire aujourd’hui ; et que l’on ne peut se passer non plus d’une lecture sociologique des systèmes d’enseignement à l’ère des technologies. L’approche sociologique est centrée sur l’analyse des phénomènes sociaux en interactions ou en actions en situation innovante de pratiques professionnelles avec les technologiques. Ces phénomènes sont repérés à partir de certains critères.

1) Au plan micro : les acteurs professionnels : quelles sont les pratiques professionnelles des acteurs d’un système éducatif avec les TIC ?

L’approche sociologique distingue 3 familles d’interactions :

• Les interactions sociales qu’impliquent les dispositifs techno-pédagogiques par rapport aux politiques publiques des TIC.

• Les interactions et les actions impliquant les pratiques privées et les pratiques dans l’établissement des enseignants et des apprenants.

• Les interactions et les actions qu’impliquent les compétences des enseignants par rapport aux compétences des apprenants.

Selon le standard des compétences des enseignements en TIC Unesco (2008) il existe trois compétences :

• La culture technologique avec les TIC

• L’approfondissement des savoirs avec les TIC • La production des savoirs avec les TIC

Ces familles de compétences comprennent trois composantes chacune : La politique ou la vision, le curriculum, la pédagogie, les TIC, organisation et le management ; le développement professionnel de l’enseignant. (Unesco, 2008).

Et le dernier niveau concerne l’observation des pratiques des enseignants en dehors de l’école et à l’école.

Au niveau macro et méso nous avons les organisations, les systèmes, les institutions scolaires, les systèmes éducatifs. Sociologiquement, l’école est considérée comme un « système noétique », c’est-à-dire un système pour penser.

Au sein d’un tel système éducatif, la dialectique des acteurs et du système varie selon les époques et les pays. Cette dialectique de l’acteur et du système (Crozier et Friedberg, 1977) se décline diversement selon les niveaux de l’organisation, les enjeux et les contenus de l’innovation, les rapports qu’entretiennent les acteurs concernés. Prenons la profession enseignante en question dans cette étude et la problématique des pratiques pédagogiques avec les TIC. Comment les acteurs acquièrent les compétences TIC ? Quelles actions et interactions les infrastructures permettent- elles par rapport aux politiques publiques. Les politiques d’équipement, de maintenance ?

Quelles places accordées aux interactions et aux relations sociales dans ces formations ? Quelles sont enfin les interactions avec les dispositifs présentiels, hybride ou bimodaux, et à distance ; comment ceux-ci agissent-ils sur les relations entre les acteurs ? Les pratiques extrascolaires avec les TIC ou « les back offices » de la profession (préparation des cours, …);les pratiques extra scolaires des apprenants en famille dans les cybercentres et cybercafés et Quel impact des usages privés (enseignant et apprenant) d’utilisations des TIC sur l’institution en milieu scolaire ? Autant d’interactions que l’approche systémique nous permettre d’interroger.

Les technologies éducatives sont une innovation au Cameroun. L’innovation transforme un

système d’action. On ne peut donc la maîtriser qu’au prix d’une approche systémique. Elle

confronte au poids des rapports de pouvoir, des concurrences, des valeurs, des normes, des passions et de la mémoire qui caractérisent la vie d’une personne ou d’une collectivité humaine.

2.2. Les théories systémiques : le « fonctionnalisme systémique » de Parsons

(Telo, 2006), décrit les théories systémiques comme étant devenues un outil important pour les sociétés dans leurs relations professionnelles en particulier. Le modèle que nous adoptons est surtout celui de Parsons.

La théorie systémique selon Parsons ouvre la voie à une meilleure analyse du fonctionnement des sociétés. Ce mode de raisonnement, typique de la sociologie fonctionnaliste, consiste à prendre en compte des problèmes sociaux mais surtout à identifier les modes de fonctionnement susceptibles de les résoudre. Dans l’approche que nous cherchons à développer, la sociologie nous intéresse en tant qu’étude macroscopique des sociétés. La sociologie, étude scientifique des sociétés humaines et des faits sociaux, organise le réel à l’aide de modèles. Sans ces modèles, les faits sociaux constituent un univers chaotique sans signification pour l’esprit ». A partir de ce modèle systémique, nous essayons d’analyser les pratiques, les dispositifs et les compétences TIC chez les enseignants Camerounais et d’organiser de manière concréte des faits sociologiques sous la forme de ce « modèle ».

La sociologie de Parsons comporte essentiellement deux voies : d’une part il analyse l’action et montre comment celle-ci est structurée et régulée par le système, d’autre part il analyse le système et montre comment celui-ci est organisé et mobilise une multitude d’actions. Si Parsons souhaite donc saisir le fonctionnement de la société, il considère que celle-ci doit être appréhendée comme un système. L’ambition de Parsons est donc d’expliquer comment un ordre peut exister sur la base des actions individuelles.

Si le fonctionnalisme explique l’existence de pratiques par leur fonction, la théorie des systèmes veut rendre compte des relations existant entre différents sous-systèmes et permettant par là le fonctionnement du système dans son ensemble.

Le « fonctionnalisme systémique » permet à Parsons d’expliquer comment, dans une société, des échanges entre différentes entités permettent le fonctionnement d’une société.

Cet auteur définit quatre sous-systèmes qui répondent aux besoins de tout système :

Le sous-système d’adaptation (adaptation). Il établit les relations entre le système et son environnement, extrait des éléments hors du système et les échanges avec des produits du système.

Le sous-système de mobilisation (goal-attainment). Il définit les buts, mobilise et gère les énergies du système afin d’atteindre les buts définis.

Le sous-système d’intégration (integration). Il assure la stabilité du système et contrôle, modère l’activité à l’intérieur du système.

Le sous-système de motivation (latence). Il doit assurer la motivation des composants du système.

Pour Parsons, cette structure est une structure générale à tout système. Il considère qu’il est possible d’analyser aussi bien un petit groupe, une société, un sous-système d’une société ou même la personnalité d’un individu, à partir de ces quatre fonctions.

L’analyse de Parsons fait intervenir les notions de statut et de rôle : la notion de rôle permet par ailleurs de saisir que les différents sous-systèmes de l’action sont construits analytiquement : quand l’individu remplit son rôle, en même temps qu’il agit de façon volontaire, il se conforme à des règles et des valeurs. La notion de statut renvoie à la place qu’occupe un individu dans un système. Un individu prend connaissance des différents statuts existants dans sa société quand il rentre en contact avec des personnes les détenant ce qu’il a appelé « modèles de références ». Pour acquérir un statut, tout un processus ou mécanismes est mis en place par un système (système qui à travers les formations sélectionne et contrôle l’acquisition d’un statut).

Enfin, lors de l’exécution d’un rôle, les partenaires d’un individu auront tendance à ramener l’individu vers son rôle s’il s’en écarte. Les changements de statuts sont généralement progressifs et les statuts que les individus empruntent successivement sont en relative continuité. La notion de fonction a une place centrale dans la sociologie de Parsons

Ainsi énoncée, cette théorie nous permet d’explorer le fonctionnement du système éducatif Camerounais et particulièrement le système qui concerne les pratiques professionnelles des enseignants avec les TIC ; pour comprendre les interactions de ce système avec son environnement numérique, la gestion des énergies et des compétences des enseignants et des apprenants pour atteindre les objectifs et les buts en matière de politique de TIC ; d’explorer comment les pratiques des enseignants sont gérées pour assurer au système stabilité et continuité de l’action. La place des statuts et des rôles dans les pratiques pédagogiques avec les TIC. Et les motivations des enseignants pour les pratiques privées ou publiques avec les TIC. Les mécanismes du système éducatif permettant que les individus puissent acquérir un

statut qu’ils seront profitables pour agir efficacement, soutenir leur rôle, et surtout éviter des statuts incompatibles entre eux dans un même système.

Les théories de la scolarisation de Baron et Bruillard (2004) : Ces deux auteurs confient trois rôles principaux aux TIC dans l’éducation : le rôle de 1) technologies éducatives qui consiste aux manières d’enseigner et aux méthodes d’enseignement. Cet aspect est beaucoup mis en avant dans les discours officiels même si les analyses historiques sur l’impact des TIC en éducation montrent un gain faible de cette pratique des TIC ;

2) Le rôle de production et d’accès aux documents et communications en référence aux outils et à l’environnement de travail des enseignants et des élèves ;

3) Le rôle d’instrumentation disciplinaire qui permet des modifications non seulement sur les curricula des disciplines mais aussi sur les enseignements.

Et donc associés à ces rôles, les pratiques des enseignants et des apprenants sont différentes les processus étant eux-mêmes différents. Cette théorie nous permet de distinguer les utilisations de type technologie éducative et instrumentation dans les disciplines. De comprendre les nouvelles modalités de scolarisation dans ces contextes et les choix de pratiques des enseignants et les compétences des apprenants qui découlent de ces choix.

2.3. L’approche Historique

Une étude historique est une étude qui a pour objet les faits historiques : les événements, les faits sociaux, les personnages et les dates.

La critique historique est une méthode scientifique destinée à analyser les faits historiques. Or l’histoire ne se fait que sur la base des témoignages. Analyser l’histoire se ramènera donc à deux opérations fondamentales : contrôler d’abord les témoignages ensuite comprendre ce témoignage. (L.E Halkin, cahiers des annales)

Un fait historique ne peut recevoir cette qualification que s’il a exercé quelque influence, il n’entre dans l’histoire que lorsqu’il est connu et dans la mesure qu’il est connu… Lévy-Bruhl (1934)

« On exige des historiens modernes plus de détails, des faits plus constatés, des dates plus précises, des autorités, plus d’attention aux usages, aux lois, aux mœurs, aux commerces, à la population… » (Voltaire Dictionnaire philosophique, Histoire).

Cette approche doit nous permettre de comprendre les discours, les lois, les rôles historiques des autorités, les faits réalisés dans le domaine des pratiques avec les TIC au Cameroun à partir des sources documentaires et matérielles, des témoignages des acteurs : politiques, responsables d’établissements scolaires et d’institutions de formation formelle et informelle, des formateurs et des apprenants.

« Nous savons que le plus intime de nos gestes contribue à faire l’histoire… que nous appartenons à une époque qui aura plus tard un nom et une figure et dont les grands traits, les dates principales, la signification profonde se dégageront aisément : nous vivons dans l’histoire comme les poissons dans l’eau, nous avons une conscience aiguë de notre responsabilité historique » Sartre, Situations II, P 40 -41

Les pratiques pédagogiques des enseignants dans l’approche historique que nous avons adoptée pouranalyser les TIC en situation de classe, il s’agit bien de changer les paradigmes, mais ce changement et l’usage des technologies modifient aussi tous les temps qui rythment le système scolaire : temps de l’enseignement, temps de l’apprentissage, temps de l’institution (Baron, Bruillard, 1996). et la maîtrise de ce temps « C’est la responsabilité stratégique de tous les acteurs que de prendre la mesure de la situation actuelle et de savoir-faire du temps un allié et non un adversaire » (Chaptal, 2003).

Comment peut-on comprendre l’histoire des TIC au Cameroun ? Quelles dates, quels faits historiques, des personnages ayant joué un rôle déterminant dans l’adoption l’implémentation et l’intégration des TIC peut-on parler déjà de périodicité dans cette histoire de technologie dans l’éducation au Cameroun. Quel est le sens de l’histoire des TIC au Cameroun ? Quelle signification historique alors ? Enfin peut-on conclure en une avancée, de stabilité ou de régression ? C’est à tout cela que nous sert cette approche historique pour prendre la mesure de la situation des pratiques des enseignants avec les TIC.