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LA THÉOLOGIE, PARTIE INTÉGRALE DE LA VIE DE FOI

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 51-56)

Les articles rassemblés dans ce dossier retracent et reflètent un parcours spirituel, humain et théologique de plusieurs années, marqué par le désir de ne rien perdre de la foi catholique et de ne rien renier de ce qui est humain. Chercher Dieu, c’est célébrer, vivre, penser, préserver, développer et transmettre « […] la foi catholique reçue des Apôtres1 » et savoir en même temps affirmer avec Térence « homo sum : humani nil a me alienum puto2 ». Aussi les diffé-rents textes se sont-ils intéressés à l’intégration de l’apport des sciences humaines, et en parti-culier de l’esthétique littéraire. Quels aspects se dégagent donc de cette démarche à la fois existentielle et intellectuelle et qui pourraient servir de point de repère pour rendre compte de la foi aujourd’hui de façon convaincante3, pour contribuer à la mission de l’Église de donner

« […] une nouvelle force à la spiritualité, à la présence de Dieu dans notre cœur […]4 » sans négliger la nécessité d’une transformation, d’une conversion humaine ?

1. L’exigence de préserver le rapport essentiel entre les deux pôles divin et humain est une conséquence de la foi que le Christ, vrai Dieu et vrai homme, fonde l’alliance nouvelle et éternelle. Elle suppose que l’on approfondisse la connaissance de Dieu et des réalités

1 « Prière eucharistique I (Canon Romain) », in : Missel Romain, Paris, Desclée, Mame, 1978, p. 412.

2 Térence, Heautontimoroumenos, I, 1. http://remacle.org/bloodwolf/comediens/Terence/eauton.htm (Site consulté le 10 octobre 2009.)

3 Voir Mc 1, 15par. ; 1 P 3, 15s. ; 2 Tim 4, 2 ; 2 Tim 4, 7.

4 Benoît XVI, « Entretien accordé aux journalistes au cours du vol en Afrique », 17 mars 2009, http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/speeches/2009/march/documents/hf_ben-xvi_spe_20090317_

africa-interview_fr.html. (Site consulté le 10 octobre 2009)

nes par les moyens et les sciences spécifiques respectifs. La tentation de considérer un des deux pôles comme la référence exclusive est toujours grande. On pourrait dire qu’une théolo-gie qui y succombe est borgne et que la représentation de la Vie chrétienne vient à manquer de profondeur. En fait, elle est aveugle et ne vit que dans ses propres phantasmes. Elle esquive en même temps la quatrième dimension, le temps comme « lieu » de rencontre avec Dieu qui, se révélant, transforme le temps en histoire, et en histoire du salut.

2. L’importance de l’histoire comme lieu herméneutique de l’alliance que Dieu a conclue avec son peuple. Dès que l’on redécouvre la relation avec Dieu, créateur et sauveur, comme un chemin1, comme un parcours historique, individuel et communautaire à la fois, tout ce qui est humain, y compris le péché, peut y trouver sa place. Dieu demande à l’être humain de ré-pondre à son amour et d’apporter tout ce qui fait partie de lui pour le purifier, élever, trans-former et faire entrer dans la création telle que Dieu l’a imaginée. L’histoire du peuple d’Israël, que Balthasar a si bien su dramatiser par son écriture, le destin des patriarches, pro-phètes et pauvres du Seigneur, ou encore l’histoire plus individuelle d’un Saint Pierre où les reniements vont de pair avec le grand amour du Christ, et aussi la conversion miraculeuse de Saint Paul, ne témoignent-elles pas que la connaissance (intime) de Dieu et la connaissance de soi-même vont de pair ? On ne peut séparer les deux pôles du cor ad cor loquitur. De plus, cette histoire n’est pas terminée ; elle continue au présent. Encore faut-il l’articuler, la ra-conter, la dire. C’est un élément fondamental de sa constitution, de son appropriation et de sa transmission.

3. L’importance d’un style théologique adapté à l’histoire de Dieu et des hommes.

L’expérience de Dieu doit se dire dans une langue et avec des formes qui sachent rendre compte des mouvements apparemment les plus incohérents, de l’éloignement le plus grand

1 Voir l’exode, mais aussi le Christ qui dit de lui-même qu’il est le chemin (Jn 14, 6), qui est conçu, naît, grandit, devient adulte, travaille, part en mission et meurt d’une mort violente.

séparant Dieu et l’être humain comme de leur intimité, de la colère noire et de l’amour fou de Dieu et de l’être humain. C’est pourquoi l’Écriture sainte témoigne d’une très grande diversité des formes ; elle joint l’expression artistique au jargon juridique, la réflexion philosophique rationnelle à la narration d’une parabole. Elle exprime le doute, rapporte la quête de Dieu et trouve son sommet toujours dans la parole qui se fait louange de Dieu. Elle connaît les gran-des fresques historiques et contient gran-des collections de proverbes ; elle ne refuse ni la formule de profession de foi, ni la narration. La pensée systématique y va de pair avec le fragment.

Tout ceci en fait partie. Aussi ne peut-on jamais considérer un seul genre littéraire comme norme de la théologie ; on redécouvrira, inventera et intégrera toutes les approches capables de rendre compte d’aspects variés de la réalité humaine et de la figure de la révélation. Si la Bible forme en tant que livre une unité, il revient cependant au théologien d’articuler plus expressément le rapport de ses travaux fragmentaires à l’ensemble de l’expérience chrétienne.

Enfin, la théologie reste toujours un discours inachevé parce qu’elle rend compte d’une aven-ture qui n’est pas terminée non plus.

4. L’inachèvement du travail théologique. Une telle affirmation semble être un lieu commun.

Si les uns disent que l’être humain a besoin de dire la foi toujours de façon nouvelle parce que le monde dans lequel les chrétiens vivent, la langue qu’ils utilisent et leur propre personne évoluent constamment, ils n’ont pas tort. Si d’autres affirment que le travail théologique est un exercice infini parce que nous n’épuiserons jamais la plénitude divine, ils n’ont pas tort non plus. En fait, la théologie qui se fonde sur l’alliance que Dieu a conclue avec son peuple et qui n’ignore pas que la connaissance de Dieu et de soi-même vont de pair, n’entre pas dans le cercle herméneutique, mais dans une ellipse herméneutique dont les deux pôles sont Dieu et le peuple de Dieu, notion qui inclut la référence aux individus et à la communauté. Ainsi il ne s’agit pas de déterminer, de mesurer, de fixer (et figer) avec précision un écart – en fait infini – et un rapport – si intime qu’il ne donne accès à aucune démarche extérieure – mais de

ren-dre compte par un travail réflexif de l’échange vivant, continu, historique entre les deux pô-les1. Certes, décrire ainsi une « vie » suppose que l’on en donne des repères concrets ; mais ils sont précisément des repères et non pas l’alliance vécue elle-même. Or c’est celle-ci qui compte.

Quand le concile Vatican II a appelé l’Écriture sainte l’âme de la théologie, il a voulu redon-ner à celle-ci son dynamisme propre pour qu’elle contribue à dire cet Amour infini qui a per-mis notre liberté. Nourrie de l’expérience spirituelle, intégrant la réalité humaine, elle est donc un des langages de l’Église pour louer Dieu, nourrir son peuple et témoigner de l’espérance pour tous.

1 Voir aussi C. DAHLGRÜN, Christliche Spiritualität, p. 159 : « Das Leben prägt mittels Erfahrungen die Spiritua-lität, die kulturabhängige Theologie prägt die Spiritualität ebenso. Aber zugleich prägt die Spiritualität als geleb-ter Glaube das Leben und nimmt entscheidenden Einfluss auf die Theologie ». (« La vie donne son empreinte à la spiritualité à travers des expériences, la théologie qui dépend de la culture en fait pareil. Mais en même temps, en tant que foi vécue, la spiritualité donne son empreinte à la vie et prend une influence décisive sur la théolo-gie. » (Traduction Jean Ehret)

1 BIBLE ET SPIRITUALITÉ

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