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La thèse d’un déclin du vote de classe

Dans le document Comprendre les mutations du vote des ouvriers (Page 124-133)

Le concept de vote de classe en débat

R. Alford et le vote de classe dans les démocraties anglo-américaines

2.2. Les débats sur les évolutions du vote de classe

2.2.1. La thèse d’un déclin du vote de classe

Les travaux concluant au déclin du vote de classe dans les démocraties occidentales ne forment pas un ensemble homogène, loin s’en faut. Plusieurs questions de recherche ont, séparément, conduit à poser le diagnostic d’un affaiblissement du lien entre classe sociale et vote. Cette situation pourrait, a priori, être considérée comme une force : la thèse d’un déclin du vote de classe ne repose pas sur un seul indice. Elle constitue cependant une faiblesse : les différentes formes que prend cette thèse doivent absolument être spécifiées car ce ne sont pas

1 Le plus souvent, il s’agit de travaux routiniers, s’interrogeant à chaque nouvelle élection sur les

évolutions de la relation statistique entre classe sociale et vote. Ils ne seront évoqués par la suite que s’ils se distinguent par une innovation théorique ou méthodologique.

2 EVANS Geoffrey, « The Continued Significance of Class Voting », Annual Review of Political

toujours les mêmes phénomènes électoraux qui sont visés. De ce point de vue, la distinction entre les deux niveaux d’analyse du vote de classe est très éclairante. La thèse d’un déclin du vote de classe est d’abord envisagée au niveau des groupes sociaux et de leurs alignements électoraux (en particulier du côté des ouvriers), afin d’expliquer les profondes mutations des systèmes partisans occidentaux à partir des années 1960. Elle est par la suite mobilisée au niveau de l’électeur et conduit à réévaluer le poids des caractéristiques sociales sur le vote. Déclin du vote de classe et changement électoral

La thèse d’un déclin du vote de classe est apparue au Royaume-Uni, au milieu des années 1970. Elle est alors associée aux bouleversements du paysage politique britannique, et notamment au recul du Parti travailliste. Puis, au début des années 1980, elle est généralisée à toutes les démocraties industrialisées : le déclin du vote de classe s’impose alors comme un élément incontournable pour comprendre les mutations des systèmes de partis occidentaux. De fait, les évolutions du vote de classe intéressent, dans un premier temps, des spécialistes de science politique : elles permettent d’expliquer des changements électoraux.

Le déclin du vote de classe et les transformations du paysage politique britannique

Il n’est pas surprenant que le Royaume-Uni soit le premier pays dans lequel ait été postulé un déclin du vote de classe : compte tenu du poids des divisions de classe dans la structuration du système partisan britannique depuis la percée du Labour dans l’entre-deux-guerres, il paraît naturel que les puissantes évolutions électorales des années 1970 aient été associées à des évolutions du vote de classe. Après tout, suite aux travaux de R.R. Alford, la Grande-Bretagne est considérée comme un cas de « relatively ‘pure’ class politics »1. Et à la fin des années 1960, P. Pulzer peut affirmer, sans aucune autre forme de précaution : « Class is the basis of British party politics; all else is embellishment and details »2.

D.E. Butler et D.E. Stokes proposent toutefois une description plus nuancée de la vie politique britannique. Utilisant la théorie des réalignements3 pour comprendre les différentes phases de l’histoire électorale du pays, ils montrent que la domination du « class alignment »

1 ALFORD Robert R., Party and Society, 1964, p. 289-290. Cette conclusion a été très peu discutée, à

l’exception de SARTORI Giovanni, « From the Sociology of Politics to Political Sociology », in

LIPSET S.M. (dir.), Politics and the Social Sciences, 1969, p. 75. Or, en moyenne, l’indice du vote de classe s’élève à 40 sur la période 1952-1962, alors qu’il peut théoriquement atteindre 100. Certes, une valeur de 100 est improbable car elle signifierait une situation de guerre civile. Il n’en reste pas moins qu’une valeur de 40 est, relativement ou non, loin d’un cas de « pure class politics ». 2 PULZER Peter, Political Representation and Elections in Britain, Londres, George Allen and Unwin,

1967, p. 98. Cette phrase est si souvent citée dans la littérature qu’elle en est déformée, « British party politics » devenant simplement « British politics ».

3 Cette théorie, qui vise à rendre compte des grandes discontinuités dans l’histoire électorale d’un

pays, est exposée dans le chapitre 1. Elle est ensuite utilisée pour périodiser la vie politique en France et en Allemagne depuis 1945.

n’est qu’un état récent du système partisan, qui s’est cristallisé après le déclin du Parti libéral et l’affaiblissement des divisions religieuses dans les années 19201. Ils ne contestent donc pas que le Royaume-Uni traverse une ère de stabilité depuis l’entre-deux-guerres, caractérisée par un « alignement de classe » (l’identification du Parti conservateur aux classes moyennes et du Parti travailliste à la classe ouvrière) et un « alignement partisan » (l’attachement très fort des électeurs au parti naturel de leur classe), mais ils rappellent que cela n’a pas toujours été le cas. Mieux, à la fin des années 1960, ils signalent les premiers signes de déstabilisation de cet ordre électoral2 : l’embourgeoisement de la classe ouvrière suite à l’élévation générale du niveau de vie depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale, l’arrivée progressive dans le corps électoral d’une nouvelle génération d’électeurs moins enclins à penser la compétition politique comme une opposition entre des intérêts de classe, la désouvriérisation des élites du Parti travailliste, ainsi que le relâchement des liens entre le Labour et les syndicats sous le gouvernement Wilson ont commencé à éroder l’alignement de classe.

Cependant, les évolutions électorales britanniques dans les années 1970 sont bien plus brutales que celles suggérées par les dynamiques de changement identifiées par D.E. Butler et D.E. Stokes. Alors que le Labour et les Tories rassemblaient régulièrement plus de 90 % des suffrages exprimés depuis les années 1930, cette proportion tombe subitement à 75,1 % lors des élections générales de février 1974. Pour la première fois depuis 1945, le premier parti à la Chambre des Communes n’obtient pas la majorité absolue des sièges ; les travaillistes sont contraints de s’allier aux libéraux pour former un gouvernement. Evidemment, ce recul des deux grands partis correspond à une poussée des tiers partis : il profite essentiellement aux libéraux, mais aussi aux nationalistes en Ecosse, en Irlande-du-Nord et au Pays-de-Galles. Il est ensuite confirmé lors des élections d’octobre 1974, et à l’exception du scrutin de 1979, le total des deux grands partis n’a plus jamais dépassé la barre des 80 % à ce jour.

Ce recul brutal de la proportion des suffrages rassemblés par le Parti travailliste et le Parti conservateur lors des élections de février 1974 a évidemment intrigué les observateurs. L’enjeu est de taille : depuis l’entre-deux-guerres, le bipartisme est un des traits distinctifs du système partisan britannique. Pour comprendre cette évolution, I. Crewe, B. Särlvik et J. Alt élaborent le concept de « désalignement partisan », car ils estiment que le phénomène qu’ils

1 « The decline of religion as a basis for partisanship was closely linked with the rise of the new

class alignment. The emergence of Labour as a strong and explicit class-based party was both a

consequence of the decline of the religious alignment ».BUTLER David E., STOKES Donald E.,

Political Change in Britain: The Evolution of Electoral Choice, Londres, MacMillan, 1974, p. 172. Cette phase de réalignement est d’ailleurs plus complexe que la substitution du Parti travailliste au Parti libéral, la redistribution de l’électorat libéral suivant la nouvelle ligne de clivage profitant

autant aux Tories qu’au Labour. Si le Labour progresse subitement de 7,3 % des exprimés en 1910

à 26,8 % en 1918, c’est aussi parce qu’il bénéficie du quasi triplement du corps électoral faisant

suite au Representation of the People Act 1918 pour mobiliser des électeurs, qui ne votaient pas ou

n’avaient pas le droit de vote jusque là (en particulier des ouvriers).

2 BUTLER David E., STOKES Donald E., Political Change in Britain, 1969, p. 115-122. L’argument est

développé et précisé dans BUTLER David E., STOKES Donald E., Political Change in Britain, 1974,

p. 193-208 (chapitre 9, « The Aging of the Class Alignment »). Ils soulignent alors le rôle central du renouvellement physique du corps électoral dans le changement des alignements électoraux.

observent n’est pas une redistribution de l’électorat entre les deux grands partis comme dans le cas classique d’un réalignement, mais bien un recul conjoint des deux grands partis1. Ils en concluent que les élections générales de février 1974 marquent le début d’une nouvelle phase dans l’histoire électorale britannique, caractérisée par le recul de l’identification des électeurs au Labour ou aux Tories. Plus important encore, ils indiquent que ce désalignement partisan va de pair avec un désalignement de classe2, dont témoigne le recul de l’indice d’Alford de 44 en 1966 à 32 en octobre 1974. Un déclin du vote de classe qu’ils confirment définitivement après la victoire des conservateurs lors des élections de 1979, en utilisant cette fois un nouvel instrument : l’indice du vote de classe absolu. Obtenu en additionnant la part de l’électorat que représentent respectivement les travailleurs manuels votant travailliste et les travailleurs non manuels votant conservateur3, cet indice est une mesure de la proportion de l’électorat alignée sur le parti naturel de sa classe. Son évolution est éloquente : d’une moyenne de 65 au cours des années 1960, il tombe à 55 lors des deux scrutins de 1974 et en 1979.

Un autre bouleversement du paysage politique britannique, non moins spectaculaire, est également associé à un déclin du vote de classe dans les années 1970 : l’effondrement du Labour. Le mouvement est impressionnant : après avoir frôlé son plus haut niveau historique en 1966 avec 48,1 % des exprimés, le Labour entame une longue période de reflux (43,1 % en 1970, 37,2 % en février 1974, 39,2 % en octobre 1974, 37 % en 1979) pour finalement atteindre en 1983 son niveau plancher depuis 1918, avec 27,6 %. Le lien entre les évolutions du vote de classe et le destin électoral du Labour n’est pas nouveau : dès les années 1950, le tassement du Parti travailliste avait été expliqué par l’affaiblissement des divisions de classe4. Cependant, cette fois-ci, le recul n’est pas conjoncturel. Au contraire, I. Crewe juge que la poursuite du déclin du vote de classe contribue fortement à une quatrième défaite de rang du Labour face aux Tories en 1992, alors même que le gouvernement Major ne parvient pas à sortir le pays de sa plus longue période de récession depuis les années 19305. Ce qui lui permet de confirmer, en filigrane, le diagnostic établi quelques années plus tôt : « Most of Labour’s decline since 1964 arises from the changing behaviour, not the changing size, of the classes »6.

1 CREWE Ivor, SÄRLVIK Bo, ALT James, « Partisan Dealignment in Britain 1964-1974 », British

Journal of Political Science, 7 (2), 1977, p. 134.

2 Ce point est clairement explicité par I. Crewe dans un article ultérieur : « The period of partisan

dealignment is also one of class dealignment: it is easier to vote against one’s class once party

loyalties weaken, easier to abandon one’s party once class loyalties wither ». CREWE Ivor, « The

Electorate: Partisan Dealignment Ten Years On », West European Politics, 6 (4), 1983, p. 193.

3 SÄRLVIK Bo, CREWE Ivor, Decade of Dealignment: The Conservative Victory of 1979 and Electoral Trends in the 1970s, Cambridge, Cambridge University Press, 1983, p. 87.

4 ABRAMS Mark, « Social Class and British Politics », Public Opinion Quarterly, 25 (3), 1961. Pour la première fois depuis sa percée électorale de 1918, le Parti travailliste voit ses résultats décliner deux fois consécutivement : il obtient 48,8 % en 1951, 46,4 % en 1955 et 43,9 % en 1959.

5 CREWE Ivor, « Pourquoi les travaillistes ont-ils (à nouveau) perdu ? », Revue française de science

politique, 43 (2), 1993. Sur ces élections, on peut aussi lire GRUNBERG Gérard, « Sur l’analyse des

élections britanniques de 1992 », Revue française de science politique, 43 (2), 1993, p. 330.

6 CREWE Ivor, « On the Death and Resurrection of Class Voting: Some Comments on How Britain

Le déclin du vote de classe et les mutations des systèmes partisans occidentaux

Le Royaume-Uni n’est pas le seul pays à connaître de telles évolutions électorales au cours des années 1970. Tous les systèmes partisans occidentaux traversent alors une période de turbulences et d’incertitudes, dont se dégagent deux traits communs : d’une part, de très fortes variations du niveau de la volatilité électorale et d’autre part, l’apparition de nouvelles forces politiques. Le constat de stabilité des systèmes de partis européens, que S.M. Lipset et S. Rokkan avaient associé à la persistance des alternatives politiques qui s’étaient constituées dans les années 19201, est brutalement remis en cause.

Une nouvelle fois, les débats se cristallisent autour des mutations du vote de classe. Et paradoxalement, S.M. Lipset est le premier à ouvrir les hostilités, dans l’édition actualisée de son Political Man : en comparant les évolutions de l’indice d’Alford sur la période 1948-1980 en Allemagne de l’Ouest, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et en Suède, il met à jour une tendance générale au recul du vote de classe2 et à l’affaiblissement des oppositions de classe traditionnelles. Pour autant, il ne renonce pas à son interprétation d’inspiration marxiste des structures de la compétition politique, en indiquant que ces deux mouvements résultent de la transition des démocraties occidentales vers des sociétés post-industrielles, dans lesquelles la connaissance scientifique est appelée à se substituer à la propriété privée des moyens de production comme principale origine des inégalités sociales.

Plus important, S.M. Lipset reprend à son compte la théorie de la mutation culturelle esquissée par R. Inglehart3 et montre que la montée des aspirations post-matérialistes est une source supplémentaire d’affaiblissement du vote de classe : « These concerns have produced new bases for political cleavage which vary from those of industrial society and have given rise to a variety of “single-issue” protest movements. Since the existing political parties have found it difficult to link positions on the new issues to their traditional socioeconomic bases of support, party loyalties and even rates of voting participation have declined in many countries. […] There are now two Lefts, the “materialist” and the “postmaterialist“, which are rooted in different classes »4. En clair, les valeurs portées par la révolution post-matérialiste (la défense de l’environnement, la valorisation des formes non conventionnelles de participation politique, la promotion des droits des femmes, des immigrés et des homosexuels) façonnent de nouvelles divisions sociales, qui aboutissent

1 La question du « gel des alternatives partisanes » et les nombreux malentendus qu’elle véhicule

sont abordés en détail dans le chapitre 1.

2 LIPSET Seymour M., Political Man, 1981, p. 503-505.

3 INGLEHART Ronald, The Silent Revolution: Changing Values and Political Styles among Western Publics, Princeton, Princeton University Press, 1977. Les conséquences politiques de la mutation

culturelle ont été détaillées dans INGLEHART Ronald, Culture Shift in Advanced Industrial Society,

Princeton, Princeton University Press, 1990, p. 259-288.

4 LIPSET Seymour M., Political Man, 1981, p. 510-511. Cette idée est précisée dansCLARK Terry N., LIPSET Seymour M, « Are Social Class Dying? », International Sociology, 6 (4), 1991, p. 403. « There are now two Lefts, with distinct social bases. The traditional Left is blue-collar based and stresses class-related issues. But a second Left is emerging in Western societies (sometimes termed New Politics, New Left, Post-Bourgeois or Post-Materialist), which increasingly stresses social issues ».

à une profonde transformation de la gauche européenne1 et à sa division entre un versant matérialiste attaché aux enjeux de classe et un versant post-matérialiste attaché aux enjeux sociétaux (une division qui peut soit traverser les partis établis, soit conduire à la constitution de partis écologistes). Quelques années plus tard, ce tableau est complété par R.J. Dalton : la coexistence de ces deux gauches révèle, au même titre que l’émergence d’une nouvelle droite conservatrice, un « new politics cleavage » caractéristique des sociétés contemporaines2.

En revanche, l’instabilité qui caractérise les systèmes de partis européens à la fin des années 1970, et dont témoigne la forte variation des niveaux de volatilité électorale, ne peut pas être associée aussi clairement au déclin du vote de classe car la direction du changement n’est pas la même dans tous les pays. Ainsi, en Allemagne de l’Ouest, en France ou en Italie, la volatilité nette est plus faible sur la période 1970-1977 qu’elle ne l’était sur la période 1948-1969, alors qu’elle augmente au Danemark, en Norvège ou au Royaume-Uni3. Pour autant, le cas britannique s’impose comme un modèle du lien entre déclin du vote de classe, montée de la volatilité électorale et instabilité des systèmes partisans. De ce point de vue, les travaux de M.N. Franklin sont très clairs : « In fact the only change that is likely to result immediately from the decline of class voting has already come about. The decline has led to an era of uncertainty in electoral outcomes unparalleled in fifty years »4. D’ailleurs, cette progression de la volatilité électorale est rapidement associée à des changements au niveau individuel : elle correspond à l’émergence d’un nouvel électeur, « libéré » de ses appartenances de classe.

Déclin du vote de classe et émergence d’un nouvel électeur

La thèse d’un déclin du vote de classe puise ses racines dans la période d’instabilité que traversent les systèmes de partis occidentaux à partir des années 1960, instabilité dont les principaux outils théoriques disponibles à l’époque pour expliquer le vote des électeurs et les résultats des élections peinent à rendre compte. Initialement, elle permet de donner du sens aux dynamiques de recomposition des électorats partisans à l’œuvre dans les démocraties

1 A la fin des années 1990, la « troisième voie » (third way) de Tony Blair et le « nouveau centre »

(Neue Mitte) de Gerhard Schröder ont conduit S.M. Lipset à établir un nouveau diagnostic : celui

d’une américanisation de la gauche européenne, refusant de politiser le conflit de classe. LIPSET

Seymour M., « The Americanization of the European Left », Journal of Democracy, 12 (2), 2001.

2 DALTON Russell J., Citizen Politics: Public Opinion and Political Parties in Advanced Industrial Democracies, Chatham, Chatham House, 1996, p. 187-194.

3 PEDERSEN Mogens N., « The Dynamics of European Party Systems: Changing Patterns of

Electoral Volatility », European Journal of Political Research, 7 (1), 1979, p. 9. La notion de volatilité

électorale n’est pas aisée à définir. Elle implique évidemment des changements de préférence de la part des électeurs entre deux élections, mais peut désigner la volatilité totale (l’ensemble des déplacements d’électeurs) ou la volatilité nette (le résultat final des chassés-croisés individuels sur le score des partis). Les travaux de M.N. Pedersen s’inscrivent clairement dans la seconde

perspective. Sur ce point, on peut aussi lire CREWE Ivor,DENVER David (dir.), Electoral Change in

Western Democracies: Patterns and Sources of Electoral Volatility, Londres, Croom Helm, 1985. 4 FRANKLIN Mark N., « How the Decline of Class Voting Opened the Way to Radical Change in

occidentales, et aux évolutions électorales qui en résultent1. Cependant, sous l’impulsion de M.N. Franklin, elle est progressivement envisagée au niveau de l’électeur. Dans un premier temps, elle se traduit par la remise en cause des modèles sociologiques d’explication du vote, qu’il s’agisse du modèle de Columbia ou de la théorie des clivages, et par la mise en évidence d’une montée du vote sur enjeux. Puis, dans un second temps, elle débouche sur le portrait d’un électeur désaligné, un électeur qui ne s’identifie plus à un parti ou à un groupe social, et dont le comportement est de moins en moins prévisible en raison de sa sensibilité aux forces de court terme propres à chaque scrutin (enjeux, situation économique, etc.).

Le déclin du vote de classe et la montée du vote sur enjeux

Les travaux de M.N. Franklin sur les évolutions du vote de classe au Royaume-Uni2 constituent un tournant dans la manière d’analyser les relations entre classe sociale et vote. La rupture ne renvoie pas à leur verdict : comme I. Crewe, B. Särlvik et J. Alt un peu plus tôt, M.N. Franklin met en évidence un sévère déclin du vote de classe au Royaume-Uni au cours des années 1970. En revanche, les méthodes employées et la posture théorique adoptée pour interpréter cette tendance marquent des inflexions majeures. Contrairement à ses devanciers, M.N. Franklin fonde son diagnostic sur des outils statistiques avancés encore peu répandus à

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