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Chapitre 2 Les conceptions « des » étudiants

2.2. Tests conceptuels en mécanique « élémentaire »

Il existe quelques tests conceptuels en mécanique élémentaire de natures assez variées.

En Amérique du nord, deux tests conceptuels (type papier-crayon à l’origine) sur la mécanique sont largement utilisés pour sonder les modes de raisonnements des étudiants : le « Force Concept Inventory (F.C.I.) » (Hestenes et al. ,1992) et le « Force and Motion Conceptual Evaluation (F.M.C.E.) » (Thornton et Sokoloff, 1998).

En Europe, un test d’évaluation des concepts en mécanique (T.E.C.M.) (Lopes et al., 1999) a été utilisé pour déterminer sur quels aspects des concepts, les changements cognitifs interviennent chez des élèves du secondaire, des étudiants universitaires et enseignants. Ce troisième test (T.C.E.M.) repose sur le cadre théorique développé par Vergnaud en prenant en compte la nature relationnelle des concepts scientifiques.

« Un concept ne peut être réduit à sa définition, du moins si l’on s’intéresse à son apprentissage

et à son enseignement. C’est à travers des situations et des problèmes à résoudre qu’un concept acquiert du sens » (Vergnaud, 1990)

 Cette définition de Vergnaud, résonne avec une mise en garde effectuée par Smith et Wittmann (2008) sur les « faux positifs » qui peuvent être inférés par le chercheur lors de l’interprétation des résultats d’un test conceptuel. Nous y revenons plus tard.

En France, un test conceptuel de mécanique, basé sur des exercices informatisés, à destination de lycéens a été développé afin d’aider les enseignants à prendre en compte les conceptions attribuées à leurs élèves (Coppens, 1997). La construction de ces exercices informatisés sur « ForEvaNet » permettrait une utilisation sur le plan national au niveau de l’enseignement supérieur, à condition de l’adapter à la plateforme informatique « Moodle » qui est majoritairement utilisée. La vocation de ce test est d’attribuer « automatiquement » des conceptions aux élèves afin de venir en aide aux enseignants sans que cela ne leur demande un investissement important. Cette démarche nous semble intéressante et pourrait être adaptée pour l’enseignement supérieur. Les travaux précédents prennent appui sur les tests américains : nous prenons donc comme origine de nos travaux ces tests. Nous donnons dans les deux paragraphes suivants quelques caractéristiques des deux tests conceptuels nord- américains.

2.2.1. Force Concept Inventory

C’est le test qui a été le plus utilisé aux Etats-Unis et qui couvre le plus large domaine en mécanique. Ce test permet de sonder les étudiants sur plusieurs parties de la mécanique dite « élémentaire ». Ces résultats sont souvent utilisés pour attribuer un score à l’étudiant et éventuellement pour évaluer une séquence pédagogique avec pré-test et post-test. En outre le chercheur peut s’en servir pour inférer les conceptions « des » étudiants sondés. Les différents items du test sont répertoriés dans le Tableau 1 (extrait de Hestenes et al. 1992) :

Ainsi que les conceptions attribuées aux étudiants inférés par le chercheur pour chaque item dans le Tableau 2 :

Tableau 2 : Extrait de Hestènes et al., 1992

On remarquera que dans cet extrait, le terme « misconceptions » que nous pouvons traduire par « conceptions erronées » est utilisé. Nous rappelons que nous utilisons, autant que

(« conceptions erronées » etc., et donc à la place de « misconceptions ») que nous pouvons rencontrer dans les articles de recherche.

Par rapport à notre étude que l’on souhaite restreinte quant aux « raisonnements spontanés » sondées, on peut retenir, de ce test conceptuel, les quelques points suivants :

 La cinématique (confusions entre vitesse et position, entre accélération et vitesse, non-reconnaissance de la nature vectorielle de la vitesse et de l’accélération)

 Première et deuxième lois de Newton (nécessité d’une force pour entretenir un mouvement, idée d’un capital force dans l’objet, proportionnalité entre force et vitesse, une force est issue d’un agent actif)

 Troisième loi de Newton (dominance masse = l’objet de plus grande masse exerce la force la plus importante, ou dominance vitesse = l’objet le plus rapide exerce la force la plus importante)

Cependant, deux obstacles nous orientent plutôt vers le FMCE : le FCI n’est pas en accès libre et ne fait pas appel, à chaque fois, à des classes de situations (contenant des situations différentes avec des registres sémiotiques différents) pour attribuer des conceptions de manière plus fiable et éviter des « faux positifs » (Smith et Wittmann, 2008). En effet, il est imprudent d’attribuer une conception à un étudiant en le soumettant à la résolution d’une seule situation physique. Comme le dit Vergnaud (1990), « C’est à travers des situations et des problèmes à résoudre qu’un concept acquiert du sens ».

 C’est donc à travers des situations et des problèmes à résoudre que les conceptions attribuées à l’étudiant prennent de la valeur.

2.2.2. Force and Motion Conceptual Evaluation

Ce test est plus récent et semble plus efficace pour la mise en relief de conceptions par l’utilisation de plusieurs registres sémiotiques pour des situations physiques semblables. D’une part, c’est ce que tend à montrer Thornton et al. (2009) en effectuant une étude comparative entre les utilisations du FCI et du FMCE. D’autre part, c’est ce que prétendent Smith et Wittmann (2008). Son champ d’investigation est par contre plus réduit, notamment réduit aux problèmes unidimensionnels. Cela convient à notre étude qui se veut restreinte à quelques « raisonnements spontanés ».

Les différentes classes de situations sont illustrées dans le tableau suivant (extrait de l’étude de Smith et Wittmann, 2008) :

Tableau 3 : Extrait de Smith et Wittman, 2008

Dans ce tableau, on peut lire que quatre questions ont pour objet d’interroger uniquement le concept de vitesse, huit questions pour le concept d’accélération, des groupes de questions (de quatre à huit) pour les deux premières lois de Newton, six questions pour la troisième loi de Newton et quatre questions sur le concept d’énergie que nous n’étudions pas ici.

L’intérêt principal de ce test est lié au travail réalisé par Smith et Wittmann (2008) afin d’éviter les « faux-positifs ». Interroger un concept en utilisant plusieurs registres sémiotiques revient à renforcer l’inférence du chercheur quant aux modes de raisonnement mobilisés par les étudiants et ainsi d’attribuer des conceptions aux étudiants de façon plus fiable.

De plus, ce test est en accès libre, ce qui nous permet de l’adapter librement à notre population française. Une simple traduction ne suffit pas pour notre étude (nous y revenons dans la deuxième partie).

 Notre choix concernant l’outil de diagnostic afin d’attribuer des conceptions aux étudiants sondés, est l’utilisation du test conceptuel « FMCE », qui nécessite néanmoins une réelle adaptation pour nos étudiants et enseignants français.