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2. CONTEXTES À PRIVILÉGIER POUR UNE ÉDUCATION POUR UN AVENIR

3.2 Dispositifs intégrés à la FIE: survol de la situation

4.2.1 Temps disponible et composante pratique

Les étudiants des universités québécoises des programmes de FIE doivent effectuer minimalement 700 heures de stage pendant leurs quatre années de formation universitaire. Ces heures sont réparties de manière graduée entre quatre stages qui sont généralement réalisés à raison d’un par année et font partie des heures attribuées à l’actualisation de la composante pratique (Gouvernement du Québec, 2002, 2008). À la suite de la consultation des différents programmes des universités québécoises, des périodes de séminaire répartis également sur quatre années peuvent venir ajouter de 80 à 200 heures supplémentaires à la formation pratique selon les universités. Cependant, ce n’est pas le nombre d’heures attribué à la composante pratique de la FIE qui crée de plus grandes possibilités d’intégrer l’EAV, ni le nombre d’étudiantes et d’étudiants attribué par personne superviseuse lors des stages et parfois de séminaires (volet composante pratique = généralement entre 8 et 25 stagiaires selon les programmes et année du cycle; composante théorique = généralement entre 35 et 75 stagiaires) même si ces deux conditions créent des ouvertures non négligeables pour intégrer le domaine de l’EAV. C’est plutôt le temps disponible pour

apprendre en expérimentant, « en faisant, en mettant « la main à la pâte », en s’inscrivant « en vrai » dans des relations professionnelles […] mais aussi en observant et en ayant un recul réflexif » (Glaymann, 2014, p. 163).

De ce fait, le contexte de stage est particulièrement propice pour accompagner le futur personnel enseignant dans sa démarche réflexive afin que celui-ci puisse élaborer et partager des réflexions sur, pour et dans l’action (Schön, 1994) pouvant permettre la transformation de son répertoire d’actions en plus de favoriser son adaptation aux contextes de la pratique en enseignement (Malo, 2011) dont celle en EAV (Ärlemalm-Hagsér, 2017;

Boutet, 2000; Fortuin et Van Koppen, 2016).

De surcroît, parce que les stages inscrivent l’expérience en temps réel, ils permettent une plus grande prise en compte de la réalité temporelle et du caractère multidimensionnel du temps en plus d’établir des contacts directs avec l’environnement scolaire (Glaymann, 2014). Par conséquent, le contexte de stage offre un grand potentiel pour prendre en compte le concept de complexité qui implique « le sens du caractère multidimensionnel de toute réalité » (Morin, 2005, p. 92) impliqué dans les savoirs nécessaires pour le futur de l’humanité et de notre planète (Morin, 1999). Le concept de complexité occupe une place centrale en EAV du fait qu’il permet de prendre en compte divers systèmes dont les systèmes biologiques (vivants) en mettant l’accent sur les différentes composantes des systèmes et leurs connexions (Diemer, 2014; Kupers, Hipkins et Drake, 2017). Selon Morin (2005), le concept de complexité implique :

l’union de la simplicité et de la complexité; c’est l’union des processus de simplification qui sont sélection, hiérarchisation, séparation, réduction, avec les autres contre-processus qui sont la communication, qui sont l’articulation de ce qui est dissocié et distingué; et c’est d’échapper à l’alternative entre la pensée réductrice qui ne voit que les éléments et la pensée globaliste qui ne voit que le tout. (p. 135)

Le contexte de stage pourrait être favorable à l’union de ces processus notamment si, à l’instar d’un groupe d’écoles australiennes en association avec une équipe de recherche de l’Université d’Harvard, la mise en place de routines de réflexion en contexte scolaire pour explorer l’appropriation du concept de complexité par les apprenants était favorisée (Kupers et al., 2017).

Par ailleurs, selon Van Petegem et al. (2007), qui se sont intéressés à l’évaluation de la mise en œuvre d’une éducation tournée vers la viabilité dans deux institutions de formation du personnel enseignant au secondaire en Belgique, l’insécurité et la résistance active ou passive sont des obstacles au processus de changement dont celui impliqué dans l’intégration de l’EAV en formation initiale des futures enseignantes et futurs enseignants. Pour contrer ces obstacles, Van Petegem et al. (2007) recommandent entre autres, de mettre l’accent sur l’intégration de l’EAV dans la pratique enseignante quotidienne et de favoriser une structure coopérative à l’échelle de l’école. Donc, un espace-temps ancré dans le réel tel celui des stages en FIE est un contexte propice pour favoriser l’intégration de l’EAV à

la pratique quotidienne en enseignement et pour favoriser le développement d’un esprit coopératif entre les futures enseignantes, futurs enseignants ainsi que les principales actrices et principaux acteurs du milieu scolaire. Ces recommandations de Van Petegem et al. (2007) appliquées au contexte de stage en enseignement pourraient atténuer, voire éradiquer, le sentiment d’insécurité ou la résistance à la transformation de pratique au regard de l’intégration de l’EAV visée. De plus, selon Van Petegem et al. (2007), permettre aux futures enseignantes et futurs enseignants de s’impliquer dans des situations réelles de la vie concèderait une plus grande convergence entre la théorie et la pratique et permettrait d’accroître la confiance en soi du futur personnel enseignant au regard de l’acquisition des compétences en EAV. De ce fait, le contexte de la formation pratique, dont celui des stages, ne peut être ignoré afin de favoriser le passage à l’action en EAV.

Par ailleurs, la composante pratique offre des possibilités plus vastes pour intégrer non seulement les disciplines délaissées, mais offre également de manière plus fréquente, des possibilités de développement de pratiques de décloisonnement favorables à l’interdisciplinarité, selon les modalités et approches mises en place (Pellaud, 2014). Cela s’explique, d’une part, parce que la composante pratique offre un aménagement temporel plus vaste qui octroie plus de temps au futur personnel enseignant pour créer des liens et échanger avec différentes actrices et acteurs du milieu scolaire œuvrant dans différentes disciplines comme il nous a été possible de l’observer lors des diverses accompagnements offerts en stage; d’autre part, ce temps disponible à l’intérieur de la composante pratique offre de plus grandes possibilités d’intégration d’approches pédagogiques favorables à

l’interdisciplinarité, tout en permettant la mise en place d’un processus d’accompagnement pouvant soutenir cette intégration (Pellaud et al., 2013).

De plus, les enseignantes et enseignants du préscolaire et du primaire doivent enseigner plusieurs disciplines et doivent accompagner leurs élèves dans le développement des compétences associées puisqu’ils jouent un rôle d’enseignant généraliste sur le terrain (Pellaud et al., 2013). Ainsi, le contexte de la formation pratique favorise une certaine recherche chez le futur personnel enseignant de mise en relation de savoirs provenant de différentes disciplines comme il nous a été possible de l’observer lors de l’accompagnement de stagiaires. De manière plus concrète, il est possible d’observer très souvent, lors des stages, des futures enseignantes et futurs enseignants recherchant la collaboration de certaines personnes détentrices de savoirs provenant de différentes disciplines (professeures et professeurs, personnes chargées de cours, personnel enseignant ayant développé des savoirs et pratiques multidisciplinaires, dont des pratiques liées à la pédagogie par projet). Toutefois, le développement de pratiques enseignantes interdisciplinaires nécessite un accompagnement en ce sens et exige du temps et parfois une formation spécifique des futures enseignantes et futurs enseignants comme de certaines personnes formatrices impliquées (personnel enseignant associé, personnel superviseur, personnel chargé de cours, professeures et professeurs) (Girault et al., 2007; Pellaud et al., 2013). Ces observations s’appliquent également au domaine de l’EAV comme le démontrent les travaux de certains dont ceux de Girault et al. (2007).

il faut prendre en compte une demande importante d’accompagnement des enseignants qui était déjà exprimée dans le cadre de l’éducation à l’environnement et qui, selon le bilan des expérimentations EEDD 2003-2004 […] reste très prégnante chez les enseignants. L’ensemble de la communauté des chercheurs et des praticiens ont également diagnostiqué divers dysfonctionnements : le manque de formation des enseignants et surtout l’absence d’accompagnement pédagogique pour une forme exigeante de l’éducation contemporaine (Sauvé, 1997) qui implique une approche pluridisciplinaire, une approche critique et réflexive, une pédagogie de projet, etc. (p. 121)

L’intégration d’un accompagnement et d’une formation spécifique en EAV du futur personnel enseignant et du personnel formateur impliqué est nécessaire pour créer des ouvertures entre les disciplines. Cette intégration requiert un espace-temps assez vaste pour mettre en place de tels dispositifs d’accompagnement. Actuellement, dans les universités québécoises, le contexte de la formation pratique en FIE à l’éducation préscolaire et à l’enseignement primaire offre de grandes possibilités pour mettre en place de tels dispositifs d’accompagnement en EAV.