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Chapitre 3 Mise en place et paramétrage du suivi Raman pour

2 Détermination du temps d’acquisition Raman optimal

2.2 Temps d’acquisition pour les cultures de cellules CHO

Pour l’étude du temps d’acquisition total des cellules CHO, les essais portent sur une culture de cellules de plus de 330 h durant laquelle près de 70 prélèvements ont été réalisés. Cependant, suite à certaines contraintes temporelles, seules 63 mesures de référence ont été prises en compte. Les gammes de concentration de chaque biomarqueur sont présentées Tableau 3.1.

Tableau 3.1 Paramètres obtenus pour les modèles PLS les plus performants par biomarqueur dans l’étude du temps d’acquisition d’une culture de cellules CHO.

Biomarqueur (unité) Temps R2 LV RMSEP Gamme

Glucose (mM) 5 min 0,983 4 2,03 11,54 – 58,70 Glutamine (mM) 5 min 0,924 3 0,19 0,00 – 1,66 Glutamate (mM) 5 min 0,967 3 0,27 1,85 – 6,82 Lactate (mM) 5 min 0,969 5 0,70 0,00 – 10,06 Ammonium (mM) 2 min 0,970 3 0,74 0,61 – 16,97 VCD (106 cell/mL) 10 min 0,964 3 0,52 0,27 – 13,21 TCD (106 cell/mL) 10 min 0,969 3 0,51 0,27 – 16,50

Les spectres de 1 × 30 s ont été acquis en continu tout au long de la culture afin d’appliquer le précédent protocole. Six jeux de données à différents temps ont alors été générés. Pour chaque jeu, les spectres ont été prétraités de la même manière : afin d’éliminer l’effet additif de la fluorescence sur la ligne de base des spectres, ces-derniers ont été dérivés. L’algorithme de Savitzky-Golay a été employé en prenant une taille de fenêtre mobile de 15 points (soit ici 15 cm-1), et ajustant un polynôme d’ordre 2 sur chaque portion. L’effet correctif apporté par ce prétraitement est représenté sur la Figure 3.5. Il faut

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également noter que les spectres ont été acquis sur 3425–100 cm-1. Toutefois, la totalité du spectre n’est pas utile pour réaliser des modèles de régression performants. En effet, l’empreinte spectrale des composés organiques est manifeste de 1800 cm-1 à 365 cm-1 [137]. Ainsi, en travaillant uniquement sur ce domaine spectral, il est possible de réduire préférentiellement le domaine d’étude et donc améliorer les performances des modèles de régression. Dans notre cas, nous sélectionnons uniquement la région comprise entre 1775 cm-1 et 350 cm-1, telle qu’il est indiqué sur la Figure 3.5.

Figure 3.5 Représentation de l'effet de la correction de ligne de base par la dérivée première sur la région 1775–350 cm-1

. Les spectres utilisés sont les mêmes que Figure 3.2.

Nous disposons alors de six jeux de données (pour six temps d’acquisition différents) possédant tous 63 mesures de référence et 63 spectres Raman associés. Chaque jeu a été traité indépendamment. Pour cela, les données ont été séparées en deux ensembles distincts à savoir un ensemble de calibration et un ensemble test. Le modèle de régression PLS de chaque biomarqueur est réalisé sur l’ensemble de calibration (ou ensemble d’apprentissage), tandis que l’ensemble test sert uniquement à évaluer les capacités prédictives du modèle et calculer l’erreur RMSEP. Néanmoins, pour chaque modèle calculé, une première validation (validation croisée) est effectuée pour notamment déterminer le nombre de variables latentes à prendre en compte (dans notre cas, une « 10-fold

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recherche (glucose, glutamine, glutamate, lactate, ammonium, TCD, VCD), nous évaluons les différents modèles PLS obtenus et comparons les erreurs RMSEP des 6 jeux de données. Les résultats obtenus pour les cultures de cellules CHO sont représentés Figure 3.6.

Figure 3.6 Erreurs RMSEP obtenues pour chacun des jeux de données construits (en fonction du temps d’acquisition) sur la base de spectres d’une culture CHO et pour chaque paramètre biochimique étudié.

Nous pouvons observer sur ces résultats que les erreurs RMSEP présentent une tendance pour chaque biomarqueur qui ressort un temps d’acquisition optimal, c’est-à-dire celui dont l’erreur RMSEP est la plus faible. Les caractéristiques de chacun de ces modèles optimaux sont reprises dans le Tableau 3.1. Cependant, il convient ensuite d’analyser les résultats obtenus et interpréter les modèles déterminés.

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2.2.1 Modèles pour les concentrations en glucose et lactate

Deux des métabolites les plus importants lors des cultures CHO sont les métabolites glucose et lactate. En effet, le glucose est le produit consommé par les cellules pour entamer la reproduction cellulaire, tandis que le lactate peut être considéré comme le déchet majeur produit par la multiplication des cellules CHO. Pour ces deux paramètres biochimiques, un temps de 5 min d’acquisition a été déterminé. Les graphiques présentés Figure 3.7 permettent d’interpréter les modèles obtenus.

Sur les modèles du glucose et du lactate, les niveaux d’erreurs obtenus sont acceptables par rapport aux gammes de concentration. L’erreur RMSEP du modèle glucose est calculée à 2,03 mM pour une gamme de concentration comprise entre 11,54 mM et 58,70 mM. Pour le modèle lactate, nous déterminons l’erreur RMSEP à 0,70 mM pour une gamme 0,00–10,06 mM. Nous pouvons clairement observer Figure 3.7, sur les graphiques des concentrations prédites par rapport aux concentrations calculées, que les modèles calculés permettent bien de prédire les concentrations en glucose et lactate respectivement. En observant les coefficients de régression, nous pouvons observer un fort niveau de bruit pour les différents modèles, dû aux faibles intensités des signaux et au faible nombre d’échantillons pour construire les modèles (42 échantillons).

Figure 3.7 Représentations graphiques des modèles calculés lors de la détermination du temps d’acquisition pour a) le glucose et b) le lactate d’une culture de cellules CHO. Les spectres des deux modèles possèdent des temps d’acquisition de 10 × 30 s. Les points noirs représentent les échantillons

de calibration, les triangles rouges les échantillons du jeu test.

Nous pouvons toutefois interpréter les modèles à travers les coefficients obtenus. Pour le glucose d’une part, nous observons trois régions importantes discriminant la molécule de

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glucose. D’une part, la zone 1200–1010 cm-1 présente des coefficients de régression importants et peut être attribuée aux élongations ν(C–C) et ν(C–O) de la molécule [137]. La région 910–812 cm-1 est assignée aux déformations δ(COH), δ(CCH) et δ(OCH) [137]. Enfin, la région spectrale entre 540 cm-1 et 400 cm-1 désigne les déformations exocycliques (autour de 520 cm-1) et endocycliques (autour de 450 cm-1) de la molécule [137]. Enfin, les bandes autour de 1400 cm-1 peuvent être assignées aux déformations δ(CH2) et δ(CH2OH) [137], que nous retrouvons également sur les coefficients de régression du modèle lactate. Sur ces derniers pour finir, une bande principale ressort autour de 860 cm-1 qui traduit l’élongation ν(C–CO2-), caractéristique de la molécule de lactate [138].

2.2.2 Modèles pour les niveaux en glutamine, glutamate et ammonium Ces trois métabolites présentent également un intérêt pour le suivi de cultures cellulaires. Cependant, dans le cas des cellules CHO, leur action est moins déterminante que le glucose ou le lactate, dont les niveaux de concentration restent plus élevés. Les modèles calculés pour ces trois paramètres biochimiques sont présentés Figure 3.8.

D’après la Figure 3.8 et les erreurs RMSEP présentées Tableau 3.1, nous pouvons dire à première vue que les modèles calculés sont acceptables. En effet, pour la glutamine d’abord, bien que le graphique des concentrations prédites contre les concentrations mesurées (Figure 3.8a) présente des résidus plus importants que les modèles lactate et glucose, l’erreur RMSEP de 0,19 mM reste faible compte tenu de la gamme d’étalonnage (0,00–1,66 mM). En observant les coefficients de régression, nous pouvons voir que deux contributions principales ressortent à 850 cm-1 et 1020 cm-1. Elles peuvent être attribuées aux vibrations ν(C–C) de la chaine carbonée [139,140]. De plus, nous pouvons observer des bandes importantes entre 1350 cm-1 et 1450 cm-1 pouvant être assignées aux groupements amide (élongations ν(C–N) et déformations δ(N–H)), aux groupements carboxyle ainsi qu’aux déformations de la chaine carbonée δ(CH2) [139,140]. En ce qui concerne le modèle glutamate (Figure 3.8b), le modèle obtenu permet de prédire les échantillons test convenablement avec une faible erreur RMSEP (0,27 mM) par rapport à la gamme d’étalonnage (1,85–6,82 mM). Par rapport à la glutamine, le graphique des concentrations prédites par rapport aux concentrations mesurées présente moins de résidus dans les prédictions, notamment grâce à une gamme de concentration plus élevée et qui varie de manière plus prononcée. Le glutamate est donc plus facile à détecter en spectroscopie Raman. Les molécules de glutamine et glutamate présentant des structures proches, les coefficients de régression sont similaires. Cependant, les signaux observés entre 1350 cm-1

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sont attribués non pas aux groupements amide, mais plutôt aux vibrations ν(CO2-) des groupements carboxylate [137].

Figure 3.8 Représentations graphiques des modèles calculés lors de la détermination du temps d’acquisition pour a) la glutamine, b) le glutamate et c) l’ammonium d’une culture de cellules CHO. Les spectres des modèles glutamine et glutamate possèdent des temps d’acquisition de 10 × 30 s tandis que

les spectres du modèle ammonium sont acquis sur 2 × 30 s. Les points noirs représentent les échantillons de calibration, les triangles rouges les échantillons du jeu test.

En ce qui concerne le modèle de régression pour l’ammonium, en prenant en compte le graphique des concentrations prédites par rapport aux concentrations calculées (Figure 3.8c) et l’erreur RMSEP calculée (Tableau 3.1), nous pouvons voir que le modèle est acceptable. Toutefois, les travaux de T. Ujike et Y. Tominaga [141] ont permis de montrer que la molécule d’ammonium (NH +) en solution aqueuse présentait deux bandes spectrales autour

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de 1040 cm-1 et 1650 cm-1. Hors, les coefficients de régression obtenus ici présentent uniquement une bande caractéristique de la molécule, autour de 1020 cm-1. Nous observons cependant un groupe de bandes autour de 1400 cm-1, similaire à ce que nous avions obtenu pour les molécules de glutamine et glutamate. Ceci traduit la difficulté à modéliser chimiométriquement les teneurs en ammonium pour les suivis de cultures de cellules CHO. Les modèles s’appuient non seulement sur une bande caractéristique de l’ammonium, mais aussi sur celles d’autres produits présents en solution pour les prédictions, ce qui peut devenir problématique par la suite dans la recherche de modèles de régression robustes.

2.2.3 Modèles pour les densités TCD et VCD

Les déterminations des densités cellulaires sont des modèles distincts. En effet, ces-derniers ne se basent pas uniquement sur la seule structure chimique de la molécule tels que les biomarqueurs présentés jusque là, mais sur un ensemble biologique singulier traduisant la présence de cellules ou non. Les caractéristiques des modèles optimaux obtenus pour TCD et VCD sont reprises dans le Tableau 3.1. Les temps d’acquisition permettant d’avoir les erreurs RMSEP les plus faibles proviennent des jeux dont les spectres sont acquis sur 10 min (20 × 30 s). Les représentations de ces modèles chimiométriques sont disponibles Figure 3.9.

Figure 3.9 Représentations graphiques des modèles calculés lors de la détermination du temps d’acquisition pour les paramètres a) TCD et b) VCD d’une culture de cellules CHO. Les spectres des deux

modèles possèdent des temps d’acquisition de 20 × 30 s. Les points noirs représentent les échantillons de calibration, les triangles rouges les échantillons du jeu test.

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Nous pouvons voir que les modèles parviennent tous deux à modéliser les paramètres. De plus, les erreurs RMSEP calculées pour TCD et VCD (0,51·106 cell/mL et 0,52·106

cell/mL respectivement) sont faibles comparées aux gammes de densité (0,27·106–16,50·106

cell/mL et 0,27·106–13,21·106 cell/mL respectivement). Toutefois, nous pouvons noter des résidus plus importants pour les fortes densités sur les graphiques des densités prédites en fonction des densités mesurées. Ceci provient du grand nombre d’échantillons dans ces fortes gammes. En effet, nous disposons d’un grand nombre de mesures de prélèvement pour les fortes densités cellulaires puisqu’il s’agit de la phase de plateau durant laquelle la viabilité au sein du bioréacteur stagne à son plus haut niveau (Figure 1.5, page 31, pour les tendances des densités cellulaires pour les cultures de cellules CHO). De ce fait, le nombre de répétitions présentant des spectres différents exalte la variabilité de la méthode de référence sur le modèle de régression, ce qui se traduit par des résidus plus importants Figure 3.9.

En ce qui concerne les coefficients de régression sur lesquels se reposent les deux modèles calculés pour les densités cellulaires, nous pouvons voir que les résultats sont similaires. Tout d’abord, une bande majoritaire ressort autour de 1000 cm-1. Celle-ci est assignée à la respiration du cycle benzénique (élongations ν(C–C)) de la molécule de phénylalanine, molécule omniprésente dans les cellules cultivées qui en fait donc un très bon traceur [137,142]. De plus, les bandes observées entre 1450 cm-1 et 1300 cm-1 peuvent être attribuées aux respirations des cycles des molécules adénine et guanine, constitutives des chaines d’ADN ou d’ARN [137,142]. La différence notable qui peut être observée entre les coefficients de régression des deux modèles provient de la bande à 850 cm-1. Cette dernière est plus importante pour le modèle calculé pour le paramètre VCD (Figure 3.9b) tandis qu’elle ne présente pas d’impact majeur sur les coefficients du modèle TCD (Figure 3.9a). Certains travaux permettent d’attribuer cette bande à la molécule de tyrosine [142], dont l’effet bénéfique sur la survie cellulaire a été démontré [143]. L’attribution de cette bande est donc cohérente quant à la différenciation entre les deux modèles par rapport à la viabilité des cellules.

Finalement, la détermination du temps d’acquisition des spectres Raman pour les cultures de cellules CHO fait ressortir deux temps : 5 min et 10 min (le modèle ammonium n’étant pas pris en compte puisque les coefficients de régression ne traduisent pas tout à fait la nature de la molécule). Cependant, d’un point de vue pratique, il est plus simple d’utiliser un seul temps d’acquisition. Ainsi, nous avons établi le temps d’acquisition des spectres Raman à 5 min (10 × 30 s) puisque d’une part, quatre des sept paramètres métaboliques présentent les modèles les plus performants pour ce temps d’acquisition. D’autre part, les modèles pour les densités cellulaires (seuls modèles à 10 min d’acquisition) présentent tout

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de même des modèles suffisamment prédictifs pour réaliser un suivi de culture de cellules CHO à 5 min d’acquisition. Néanmoins, si nous avions besoin de temps d’acquisition différents, nous pourrions générer numériquement n’importe quel temps d’acquisition sur la base de spectres acquis toutes les 30 s.