2. Réhabilitation et remédiation des sites pollués
2.1. Techniques thermiques et physico-chimiques
2.1.1. Désorption thermique
La désorption thermique est un processus qui s’effectue en deux étapes : le sol est confiné dans une
enceinte chauffée à haute température qui permet de volatiliser les polluants puis les gaz extraits sont
traités. La température utilisée est de l’ordre de 250 à 500 °C et le temps de résidence à l’intérieur de l’unité
d’incinération est déterminé en fonction de la quantité et de la qualité des polluants à extraire (Lecomte,
1998). Cette méthode est généralement utilisée pour le traitement de sols contaminés par des polluants
organiques. Dans le cas des ETM, cette méthode permet de traiter uniquement la pollution au mercure.
Plusieurs études ont montré que l’efficacité de la désorption thermique du mercure augmente lorsque la
température est élevée (> 350 °C) (Lesa et al., 2009 ; Huang et al., 2011). Dans le cas d’une multi-pollution
par des ETM, il est nécessaire de s’assurer que le traitement thermique ne modifie pas la biodisponibilité des
éléments autres que le mercure (Bonnard et al., 2010).
2.1.2. Tris physiques ou physico-chimiques
Une première technique de remédiation des sols pollués par des ETM est la séparation par tris
physiques ou physico-chimiques. La mise en place de cette méthode nécessite l’excavation du sol à traiter.
Les procédés de traitement par tris physiques ou physico-chimiques se distinguent par la principale
propriété des contaminants du sol à traiter (ADEME, 2007 ; Dermont et al., 2008) :
- les séparations granulométriques permettent de séparer la fraction contaminée du reste du sol
par leurs tailles. La séparation peut se faire par centrifugation, élutriation (séparation de
particules à l’aide d’un fluide suivant la loi de Stokes) ou à l’aide de classificateurs mécaniques ;
- les séparations gravimétriques utilisent la gravité pour séparer la fraction contaminée du reste
du sol ; dans ce cas la séparation se fait en fonction de la densité des particules ;
- la flottation est une technique de séparation fondée sur des différences d'hydrophobicité des
surfaces des particules à séparer. En général, des bulles d’air sont injectées dans la zone à traiter
et les particules hydrophobes sont entrainées par les bulles. Un agent surfactant peut être
employé pour augmenter l’hydrophobicité des particules à retirer ;
- les séparations magnétiques ou électrostatiques sont rarement utilisées.
Cette méthode n’est pas utilisable si i) les ETM sont fortement liés aux particules du sol ; ii) les
différences de densité ou des propriétés de surface des particules contenant les ETM et la matrice du sol ne
sont pas significatives ; iii) les formes chimiques des ETM sont très variables ; iv) les ETM sont présents dans
toutes les fractions du sol ; v) le sol contient plus de 40 % d’argiles ; vi) le sol contient beaucoup d’humus ou
de composés organiques ayant une forte viscosité (Dermont et al., 2008).
2.1.3. Lavages par agents chimiques ou tensio-actifs
Le lavage par agents chimiques et tensio-actifs est une méthode qui consiste à extraire les
contaminants d’un sol par leur dissolution dans un réactif approprié. L’objectif est de laver le sol en
mobilisant le contaminant sans le détruire. Les réactifs utilisés sont très variés et choisis en fonction du type
de polluants ainsi que de sa spéciation (ADEME, 2007).
Dans le cas d’une contamination du sol par les ETM, plusieurs réactifs peuvent être
employés (Dermont et al., 2008) :
- des acides forts (acides chlorhydrique, sulfurique ou nitrique) qui permettent une désorption
des ETM par échange d’ions et dissolution des composés métalliques et composants minéraux
du sol (oxydes de fer et de manganèse) ; l’inconvénient de cette méthode est la baisse du pH et
la destruction de la structure du sol ;
- des solutions salines, notamment le CaCl
2qui permet d’échanger des ions Ca
2+contre des ions
Pb
2+ou Cd
2+par exemple et de créer des complexes solubles stables avec les ions chlorures ; la
gamme d’ETM traitable par cette méthode est moindre mais l’impact sur le sol est réduit
également ;
- des molécules chélatantes, notamment l’EDTA qui est utilisé pour le traitement de sol pollué
principalement avec du plomb, cuivre, cadmium et/ou zinc et qui permet de remobiliser les
éléments liés à la fraction échangeable liée à la matière organique ou aux carbonates ; cette
méthode n’est pas applicable si les ETM sont liés aux oxydes de fer ou de manganèse ;
- des surfactants, peu utilisés mais qui sont efficaces pour remobiliser des ETM fortement associés
- des agents oxydants ou réducteurs qui sont souvent associés à l’EDTA afin d’améliorer la
remobilisation des ETM liés au oxydes de fer ou de manganèse.
Le lavage par agents chimiques et tensio-actifs est réalisable in situ par lavage chimique (« soil
flushing ») et pompage des agents chimiques liés aux polluants mais nécessite de connaitre parfaitement les
caractéristiques de la zone à traiter pour éviter la contamination de la nappe souterraine par exemple. Cette
méthode est également applicable ex situ par agitation (agitation du sol à traiter en présence des réactifs
chimiques et séparation par centrifugation ou décantation), lixiviation (circulation des réactifs dans la
fraction de sol à traiter et récupération du produit, le lixiviat) et électrochimie (application d’un courant
continu permettant la migration des ions positifs vers la cathode) (Lestan et al., 2008). Plusieurs méthodes
peuvent également être combinées afin d’augmenter le potentiel d’extraction, par exemple, l’extraction par
électrochimie est souvent couplée à l’utilisation d’agents chélatants comme l’EDTA (Reddy et al., 2010).
2.1.4. Stabilisation physico-chimique
La stabilisation physico-chimique désigne l’ensemble des techniques qui consistent à réduire le
risque de dissémination d’éléments polluants, principalement en les immobilisant sous une forme moins
soluble et/ou moins toxique par la mise en œuvre de mécanismes physicochimiques (ADEME, 2007). Deux
méthodes sont employées : soit le sol à traiter est immobilisé par solidification en le mélangeant par
exemple avec du ciment et de l’eau ; soit par ajout d’amendements en surface ou mélangés au sol (Lecomte,
1998). Les amendements utilisés sont de natures et compositions très diverses : certains sont organiques
(fumiers, composts, boues d’épuration, déchets de pâte à papier, cendres), d’autres inorganiques
(phosphates, chaux, zéolithes, cendres volantes ou« fly ash ») (Adriano et al., 2004 ; Guo et al., 2006). Les
mécanismes impliqués dans l’immobilisation des ETM dépendent des propriétés physico-chimiques des
différents amendements.
Dans le document
Filtration biologique pour la réduction des éléments traces métalliques dans la biomasse du peuplier
(Page 53-57)