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5.2.1 Définition

L’utilisation de systèmes de coordonnées locales guidées par les données fut initiée à la fin des années 1990 par Wolodkin et al. (1997) et McKelvey et Helmersson (1997). Cette approche, plus connue sous la dénomination anglaise de Data Driven Local Coordinates (DDLC) consiste à identifier des représentations d’état pleines mais en réduisant le nombre de dimensions de recherche durant la minimisation du critère d’identification. Cette réduc- tion est obtenue en réalisant l’optimisation selon les directions orthogonales au plan tangent à la classe d’équivalence des formes pleines. Ce faisant, le nombre de directions de recherche est réduit à un nombre minimum et seule- ment la partie de rang plein de la matrice Jacobienne est considérée. En pro- cédant ainsi, l’approche DDLC permet d’assurer que la représentation choisie est localement identifiable. Ainsi, ces paramétrages offrent donc l’avantage majeur lié à l’utilisation de formes canoniques et pseudo-canoniques. De plus, et contrairement aux formes canoniques et pseudo-canoniques, l’utilisation d’un paramétrage par DDLC profite également des bons conditionnements numériques des problèmes d’identification procurés par l’utilisation de formes pleines. Grâce à ces deux attributs, l’approche DDLC permet d’améliorer les performances des méthodes d’optimisation conventionnelles par rapport aux résultats qu’elles fournissent avec des paramétrages canoniques ou pseudo- canoniques (McKelvey et Helmersson, 1997; McKelvey et al., 2004). Pour cette raison, les méthodes reposant sur un paramétrage par DDLC ont ren- contré un vif intérêt de la part de la communauté scientifique en identi- fication. De nombreux travaux ont ainsi été réalisés sur la caractérisation formelle de l’approche DDLC et sur son usage pour améliorer les méthodes d’optimisation (voir par exemple (McKelvey et al., 2004; Ribarits et al., 2004; Wills et Ninness, 2008)).

La définition des FMG-P et l’étude de la structure des classes d’équiva- lence réalisée dans la Section 5.1 permettent d’étendre l’utilisation de cette approche aux fractions matricielles. Une conséquence directe du Lemme 5.1 est que les FMG-P possèdent Nsupparamètres non essentiels pour décrire la fonction de transfert. Considérer l’ensemble des paramètres θΥ des FMG-P se traduirait donc par nx(nu + ny) + nuny + Nsup directions de recherche lors de l’optimisation. Or, en utilisant un système de coordonnées locales de θΥ, le nombre de dimensions de l’espace de recherche peut être réduit à un nombre minimal Nmin = nx(nu+ ny) + nuny. Ces directions sont données par les colonnes du complément orthogonal Π⊥

F(θΥ) de l’espace tangent à la classe d’équivalence E(θΥ). Π

F(θΥ) est obtenu, par exemple, par une décom- position en valeurs singulières ou une factorisation QR de ΠF(θ). D’après le Lemme 5.2, l’espace de recherche engendré par les colonnes de Π⊥

5.2 Systèmes de coordonnées locales guidées par les données 101

toujours de dimension Nmin, donc toujours égal au nombre minimal de coor- données nécessaires pour représenter la fonction de transfert. Comme nous allons le voir, le vecteur de paramètres θΥ d’une FMG-P considérée joue le rôle de valeur nominale pour le paramétrage par coordonnées locales. Cette approche est donc parfaitement adaptée à une utilisation itérative où chaque nouvelle FMG-P identifiée devient la FMG-P nominale pour l’itération sui- vante.

5.2.2 Interprétation géométrique

On note ϕΥ l’application qui associe à θΥ une FMG-P (D(s), N(s)), soit

ϕΥ: TΥ −→ Si(nx)

θΥ �−→ (D(s), N(s)) , (5.46)

où TΥ⊆ RNmin+Nsup est l’ensemble des coefficients non fixés à 0 des FMG-P d’indices de structure Υ. Notons que ϕΥ peut se décomposer en deux appli- cations. La première, quasi-directe, est l’application qui insère les paramètres θΥdans les matrices de coefficients1D et N de (D(s), N(s)). La deuxième ap- plication multiplie D et N par les matrices de Vandermonde des puissances de s pour construire D(s) et N(s). Ces deux applications étant continues,

bijectives et d’inverse continues, ϕΥ est un homéomorphisme (Hannan et

Deistler, 1988). On peut désormais introduire la définition des coordonnées locales des FMG-P guidées par les données.

Définition 5.3 (Coordonnées locales des FMG-P guidées par les données).

Soit θΥ ∈ TΥ, le vecteur des coefficients non nuls d’une FMG-P de Si(nx). L’application δΥ suivante

δΥ: PdΥ −→ TΥ

θΥd �−→ θΥΥ

d) = θΥ+ Π⊥F(θΥ) θdΥ,

(5.47) transfère les coordonnées θdΥ des points de δΥ−1(TΥ) à ceux de l’ensemble des coefficients TΥ. On dit que le vecteur θΥd devient un vecteur de coordonnées locales dans TΥ. L’ensemble PdΥ ⊂ RNmin devient l’espace des paramètres, autrement dit l’ensemble des coordonnées θdΥ telles que ϕΥ(θΥ(θdΥ)) soit une FMG irréductible d’ordre nx. On note VdΥ l’ensemble des fonctions de trans- fert dont les coordonnées locales sont θΥ

d ∈ PdΥ, c.-à-d., VdΥ = π(ϕΥ(δΥ(PdΥ))).

On note ψΥ

d le paramétrage par DDLC qui associe le transfert H(s) d’in- dices de structure Υ aux paramètres libres θΥ

d de la FMG (D(s), N(s)), soit 1 ψdΥ: VdΥ −→ PdΥ H(s) �−→ θΥ d . (5.48)

1La définition de D et N est donnée à la page 40.

Le théorème suivant donne les principales propriétés de ce paramétrage.

Théorème 5.1(Paramétrage par DDLC des FMG-P). Le paramétrage par

DDLC ψΥ

d, avec Υ = �

ρ1 . . . ρny

, possède les propriétés suivantes : (i) PdΥ est un sous-ensemble ouvert et dense de Rnθ, avec

nθ = nx(nu+ ny) + nuny, (5.49)

(ii) ψdΥ est un homéomorphisme, (iii) �(VdΥ, ψΥd) | |Υ| = nx

est un système de coordonnées locales de M(nx).

Démonstration 5.3. (ii) Nous devons montrer que ψΥ

d est une applica- tion bijective, continue et d’inverse continue. Pour cela, nous utilisons le fait que ψdΥ = (δΥ◦ ϕΥ◦ π)−1. δΥ est une application affine qui est donc continue et bijective. Les colonnes de Π⊥

F(θΥ) formant une base du complément orthogonal à la classe d’équivalence EΥ(θ), Π⊥F(θΥ) est de rang plein. δΥ−1 est donc continue. Ceci montre que δΥ est un ho-

méomorphisme. Les applications π et ϕΥ étant des homéomorphismes,

ψdΥ est donc un homéomorphisme.

(i) Pour montrer que PdΥ est un sous-ensemble ouvert et dense de Rnθ,

nous nous inspirons de la démonstration du point (i) du Théorème 4.9.1 dans (Ribarits, 2002). Pour cela, nous introduisons l’application

∆ : Rnθ −→ R

θeΥ �−→ det(Wnx

o (θΥe) Wcnx(θeΥ)) ,

(5.50) avec Wnx

o (θeΥ) = On�xOnx ∈ Rnx×nx où Onx est la matrice d’observa-

bilité du système correspondant. Wnx

c (θeΥ) est définie de manière ana- logue d’après la matrice de contrôlabilité. Notons que θΥ

e est à la fois le vecteur des coefficients d’une FMG et d’une représentation d’état sous forme échelon (Hannan et Deistler, 1988). D’après Hannan et Deistler (1988), ∆ est une fonction analytique. Pd

Υ= (∆ ◦ ψeΥ◦ (ψΥd)−1)−1(R \ {0}) est donc l’antécédent d’un ensemble ouvert par une fonction conti- nue. Donc PdΥ est un sous-ensemble ouvert de Rnθ. La densité de Pd

Υ dans Rnθ découle d’un résultat connu pour les fonctions analytiques

(Hannan et Deistler, 1988) : ∆(θΥ

e) = 0 ne peut être vrai que sur un sous-ensemble restreint de Rnθ. Vu que θΥ

e = (ψeΥ◦ (ψdΥ)−1)(θΥd) et que ψeΥ et ψΥd sont des homéomorphismes (d’après le Théorème (3.1) et le résultat précédent), Pd

Υ est donc un sous-ensemble dense de Rnθ. (iii) Clairement, l’ensemble�Vd

Υ, |Υ| = nx �

couvre l’espace M(nx) des fonc- tions de transfert d’ordre nx. Les propriétés (i) et (ii) précédemment démontrées associées au fait que les transformations de coordonnées sont des fonctions analytiques impliquent ce résultat.

5.2 Systèmes de coordonnées locales guidées par les données 103

De même que pour les paramétrages canoniques et pseudo-canoniques vus précédemment, nous commentons brièvement les résultats de ce Théorème : (i) Là encore, cela signifie que les paramètres sont totalement libres et que presque tout point de Rnθ correspond à une fonction de transfert de

M(nx).

(ii) Assure la bijectivité et la continuité du paramétrage ψΥ

d. Notons qu’ici, ψdΥ est défini localement, i.e. pour un voisinage ouvert de θΥ dans TΥ. En effet, ψΥ

d = (δΥ◦ ϕΥ◦ πi)−1 avec δΥdéfinie localement pour une va- leur θΥ donnée. On dit que ψΥ

d est un paramétrage local d’un voisinage ouvert local dans Vd

Υ. Comme mentionné dans (Ribarits, 2002) pour le paramétrage par DDLC des représentations d’état, l’exactitude des ré- sultats d’identification étant conservée par des applications continues, l’exactitude de l’identification en terme d’estimation des fonctions de transfert impliquera donc l’exactitude en terme d’estimation des para- mètres θΥ

d. Le problème d’estimation est donc localement bien posé. (iii) Pour une valeur nominale de θΥ, ψΥ

d est un paramétrage d’un voisinage local dans Vd

Υ. Cependant, au cours d’un processus d’optimisation, la valeur nominale change à chaque itération, impliquant un voisinage local différent dans Vd

Υ. Ainsi, sauf pour de rares cas particuliers (voir (Ribarits, 2002)), l’ensemble Vd

Υ peut être atteint par des changements successifs de coordonnées locales.

La figure (5.1) donne une interprétation géométrique du paramétrage par DDLC des fractions matricielles.

H(s) θΥ θΥ d TΥ Pd Υ Vd Υ

R

Nmin+Nsup δΥ ϕΥ◦ πi

R

Figure 5.1 – Représentation d’un système de coordonnées lo-

cales pour les FMG-P.

D’après l’analyse menée à la Section (5.1.3) où nous avons montré que l’ordre des indices dans Υ n’a pas d’importance pour les FMG-P, on peut re-

marquer que chaque ensemble Vd

Υ englobe ny! partitions1 VeΥ de M(nx). En effet, ce sont les ny! ensembles de fonctions de transfert définies par |Υ| = nx, c.-à-d., ayant les mêmes indices de Kronecker mais ordonnés différemment. Cela signifie que par rapport aux paramétrages canoniques échelon, ny! fois moins de paramétrages par DDLC des FMG-P sont nécessaires pour repré- senter l’ensemble des fonctions de transfert d’ordre nx.

5.3

Cas particuliers des FMG-P et des sur-paramé-