• Aucun résultat trouvé

L’expérience décrite dans ce chapitre souligne que les pré-sets définis pour le contrôle de MSS dans DS/DM, génèrent des comportements perceptive-ment similaires aux qualités de mouveperceptive-ment de DS/DM. Et cela à l’exception des pré-sets de type E, conçus pour rendre une qualité d’expanding, qui sont globalement plus assimilés à du breathing, et cela à cause d’une certaine confusion entre ces deux composants. Cette confusion a été soulevée dans les expériences présentées dans le chapitre 8. Effectivement, les étudiants en danse considèrent que l’expanding est la qualité de DS/DM la plus dif-ficile à distinguer et à maitriser intellectuellement et corporellement. Ceci s’explique par les similarités entre le breathing et l’expanding qui reposent sur des extensions (l’une verticale, l’autre dans l’espace 3D) et s’appuient sur l’inspiration et l’expiration pour rythmer le mouvement.

L’expérience décrite dans ce chapitre a d’abord permis de valider la légiti-mité du choix de l’utilisation d’un modèle « léger » de type masses-ressorts pour créer un retour visuel réflexif dans le contexte de la pédagogie de la danse et de DS/DM en particulier.

En plus de valider les capacités des MSS à représenter les composants de DS/DM, cette expérience a évalué le paramétrage de ces MSS. Elle a mon-tré qu’en plus des pré-sets développés pour DS/DM, certains pré-sets en dehors des intervalles définis génèrent des comportements qui sont tout de même perçus comme les qualités de DS/DM par les participants. Cela indique qu’il est possible d’assouplir les paramètres du contrôle gestuel dans DS/DM sans affecter la perception de la réponse visuelle. L’évalua-tion a permis de déterminer les condiL’évalua-tions suivantes, requises lors du para-métrage du MSS afin d’obtenir des comportements perçus comme « simi-laires » à ceux des utilisateurs qui exécutent les qualités de DS/DM : • La représentation du breathing nécessite des extensions et réductions

ex-clusivement verticales et lentes. Nous obtenons cela grâce à des raideurs horizontales nulles, une viscosité importante et des raideurs verticales faibles.

• La représentation du jumping nécessite des oscillations verticales (mais aussi éventuellement horizontales), rapides et amples. Nous pouvons obtenir cela grâce à une viscosité faible et des raideurs et longueurs au repos verticales fortes.

• La représentation de l’expanding nécessite une extension ample et éner-gique qui se déploie dans toutes les directions. Nous obtenons cela grâce à une viscosité faible et des raideurs et des longueurs au repos fortes et différentes pour chaque ressort du modèle. Les longueurs au repos doivent cependant être contrôlées afin de veiller à ce que les masses ne divergent pas.

• La représentation du reducing nécessite une réduction du modèle sous forme d’un rapprochement lent des masses vers le centre. Nous obtenons cela grâce à une viscosité forte et des longueurs au repos nulles.

Les conditions sur les pré-sets du MSS qui ressortent de notre évaluation sont moins restrictives que celles que nous avons adoptées pour DS/DM. Cela indique qu’un concepteur de MSS qui s’intéresse à la visualisation de comportement similaires aux qualités de mouvement peut éventuelle-ment disposer d’intervalles de variation des paramètres assez grands en valeur relative. En d’autres termes, pour la représentation de qualités de mouvement par des comportements dynamiques, une erreur relative sur la définition des valeurs optimales du MSS est autorisée.

Evaluations de DS/DM

8.1 Question de recherche

La question de recherche que nous examinons dans ce chapitre est : dans un contexte de pédagogie de la danse, quel est l’apport d’une interaction ba-sée sur les qualités de mouvement avec des visuels par modèles physiques masses-ressorts (MSS) ?

L’hypothèse générale concernant l’utilisation de tels visuels interactifs dans un contexte pédagogique est qu’ils pourraient correspondre à un dispositif de médiation du processus de régulation de l’apprentissage. Selon l’ap-proche constructive de la connaissance de Piaget (1974), tout processus d’apprentissage implique des processus de régulation relevant du retour réflexif (ang. feedback) permettant de situer son action par rapport au but fixé et d’une guidage permettant d’adapter l’action au but visé.

Nous avons pu aborder cette question à travers trois évaluations utilisa-teurs de l’installation interactive Double Skin/Double Mind (DS/DM), que nous avons élaborées dans le cadre de notre collaboration avec la com-pagnie de danse EG | PC et que nous décrivons dans le présent chapitre. Nous invitons le lecteur à se référer à la section 3.5 pour plus de détails concernant l’installation DS/DM. Cette installation a été développée afin de permettre aux participants d’apprendre, d’expérimenter, de s’entrainer au vocabulaire de la compagnie. Les photos de la figure 8.1 représentent une danseuse qui exécute les composants de DS/DM et interagit avec les visuels dans l’installation.

Le tableau 8.1 résume les différents aspects liés aux dimensions évaluées dans nos trois études. Plus précisément, la première étude, menée avec 4 danseuses (dont une danseuse professionnelle d’EG|PC), a pour objec-tif d’observer le comportement des danseuses dans l’interaction avec les visuels proposés. De plus, elle examine leur perception de la dimension

interactive, rétroactive et réflexive des visuels.

La deuxième étude a pour but d’évaluer le système avec un plus grand échantillon de participants, composé exclusivement de danseurs experts en DS/DM. Elle permet aussi de vérifier la consistance des résultats de la première expérience en termes de perception de l’interaction et de la rétro-action, avec des participants experts.

Enfin, la troisième étude menée a pour but d’évaluer l’installation dans un contexte pédagogique. En plus des dimensions évaluées lors de la première étude, cette troisième étude examine l’expérience utilisateur (UX) de l’inter-action et sa valeur pédagogique, et ce auprès d’un plus grand échantillon de participants, composé d’étudiants en danse, non experts en DS/DM.

Evaluation de ... Etude 1 Etude 2 Etude 3 Comportement des danseurs pendant

l’in-teraction

X Interaction : influence du danseur sur les vi-suels

X X X

Rétroaction : influence des visuels sur le danseur

X X X

Réflexivité : les visuels reflètent les QM X X

Expérience Utilisateur (UX) X

La compréhension des utilisateurs des QM X

Reconnaissance des QM par le système X

Temps passé dans l’interaction X

TABLE8.1 – Tableau récapitulatif de l’ensemble des dimensions abordées par les trois évaluations de DS/DM.

8.2 Implémentation

Dans l’installation DS/DM, nous avons implémenté un système reposant sur les deux couches logicielles : la captation et reconnaissance des compo-sants de DS/DM, puis le rendu visuel par MSS fins. Nous les détaillons tour à tout.

Captation et reconnaissance des composants de DS/DM

L’étape de captation video du mouvement est décrite dans la section 4.4.1. Elle permet d’obtenir la silhouette du participant à partir d’une caméra infra-rouge et de calculer la largeur, la hauteur, le centre de gravité et la boîte englobante de cette silhouette captée ainsi que les positions de la tête, des mains et des pieds. A partir des données issues de l’étape de captation,

FIGURE 8.1 – Une danseuse qui interagit avec les visuels de DS/DM en exécutant le breathing, jumping, expanding et reducing

nous calculons un ensemble de descripteurs de qualités de mouvement. Afin de reconnaître automatiquement les composants de DS/DM qui en-globent différentes qualités de mouvement, nous avons combiné un algo-rithme de suivi et de reconnaissance de geste appelé Gesture Follower (GF) avec, en entrée, nos descripteurs du mouvement décrivant les qualités étu-diées. L’ensemble de ce système est décrit dans la section 4.4 de ce manus-crit.

Le GF requiert une phase off line dite d’entrainement de modèles de Mar-kov cachés, reposant sur des exemples représentatifs de chaque composant

du vocabulaire. Nous avons donc enregistré un ensemble de 11 exemples de référence correspondant aux 11 nuances des composants de DS/DM exé-cutés par Bertha Bermudez. Ces nuances sont décrites dans la section 3.5 et sont les growing, ramification, exploring, gentle rebounding, shoulder breathing, breaking action, open boundaries, transfer of balance, articulated rhythm, thick air et freeze.

La phase de reconnaissance, estime en temps réel les valeurs de vraisem-blance, qui représentent les similarités entre le mouvement réalisé par l’uti-lisateur et chaque nuance de DS/DM préenregistrée pendant la phase d’en-trainement. La classe qui obtient la vraisemblance la plus élevée est consi-dérée comme étant la classe du geste réalisé par le participant.

Contrôle des visuels par MSS fins

Nous nous basons sur les résultats de l’expérience décrite dans le chapitre7 qui a montré que, selon leurs paramétrages, les MSS sont capables de gé-nérer des comportements dynamiques perceptivement similaires (au sens de similarité « physico-réaliste ») à des qualités de mouvement. Ainsi, pour que les comportements des visuels de DS/DM reflètent les qualités de mou-vement des participants, nous avons développé un contrôle gestuel qui as-socie certains paramètres de MSS à ceux décrivant les qualités de mouve-ment détectées. Ce contrôle gestuel est décrit dans la section 5.6.1 de ce manuscrit.

Dans l’installation, les participants contrôlent des visuels basés sur des MSS d’échelle fine et de topologie carrée, à partir de leur exécution des quali-tés de mouvement de DS/DM. La visualisation et le contrôle de ces MSS sont présentés dans le paragraphe 5.5. Ce contrôle, décrit en section 5.6.1, consiste à associer les descripteurs des gestes aux paramètres des MSS afin de générer des comportements dynamiques « similaires » aux composants de DS/DM exécutés. Nous avons conçu quatre différents « mappings » qui sont appliqués suivant le composant de DS/DM exécuté par l’utilisateur qui est estimé par la couche de reconnaissance de qualités de mouvement.