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Chapitre 6: Discussion générale

6.1 Introduction de nouvelles méthodes pour mettre en lien la structure et les propriétés de rétention d’eau

6.2.2 Synérèse et lien avec la microstructure

Comme pour la microstructure, les propriétés de synérèse du yogourt étaient très impactées par la température de lissage, mais uniquement lorsque les températures de lissage comparées avaient une différence d'au minimum 22 °C (Chapitre 2 : 20 versus 42 °C; Chapitre 5 : 4 versus 27 °C; Tableau 6.2). En effet, au chapitre 4, une différence de 10 °C n’avait induit aucune différence de synérèse que ce soit mesuré par synérèse induite ou par 1H-BF-RMN. Il semblerait également qu’il existe un optimum de température de lissage qui dépendrait de la formulation de départ et qui serait situé au-dessus de 4 °C et en dessous de 42 °C dans le cas de yogourts sans gras de 13 à 14 % de solides totaux et autour de 4 à 5 % de protéines. En effet, au chapitre 2 lorsque les yogourts étaient lissés à 20 °C, la synérèse induite était plus faible que celle du yogourt lissé à 42 °C. Par contre, la tendance s’inversait lorsque l’on comparait des yogourts lissés à 4 versus 27 °C. Lorsque le yogourt était lissé à 27 °C, la synérèse induite était plus faible.

Le lien entre synérèse et entreposage a été étudié aux chapitres 4 et 5 et il a été noté que la synérèse induite diminuait durant l’entreposage (Table 6.2). Grâce à la technique de 1H-BF-RMN présentée aux chapitres 3 et 4, nous sommes en mesure d’affirmer que les valeurs de synérèse induite caractérisent essentiellement la rétention du sérum dans le réseau du gel de yogourt. Au chapitre 4, lorsque l’on regarde les résultats du spectre 1H-BF-RMN durant l’entreposage, deux évolutions se produisaient simultanément. La synérèse spontanée (représentée par les valeurs de I2(4)) augmente fortement durant l’entreposage en particulier pour les yogourts avec le ratio CN:PS le plus haut, alors que la mobilité du sérum dans le réseau (représentée par les valeurs de T2(3)) diminue. Ainsi, durant l’entreposage, lorsque les phénomènes de post-acidification et de rebodying surviennent, le réseau de caséines se contracte et emprisonne le sérum de façon plus intense, limitant la quantité de sérum expulsé par centrifugation et expliquant les valeurs de synérèse induite plus faibles. Mais cette contraction du réseau génère aussi des phénomènes de synérèse spontanée, où le sérum est exsudé du réseau. Dans le cas où le ratio

CN:PS est le plus faible, l’augmentation de la synérèse spontanée s’explique par l’évolution de la microstructure durant l’entreposage comme nous allons le voir par la suite.

En ce qui concerne les choix de formulations, le choix d’ingrédients de protéines de lactosérum (IPL ou CPL) modifiait les valeurs de synérèse induite dépendamment de la température de lissage (Tableau 6.2). Cependant, nous ne disposions pas d’assez d’éléments pour comprendre ces changements et il aurait été intéressant de pouvoir les comparer à des résultats de 1H-BF-RMN. Sans surprise, lorsque le ratio CN:PS était réduit, les valeurs de synérèse induite et les valeurs de mobilité du sérum dans le réseau étaient réduites également. En effet, les protéines du lactosérum, une fois dénaturées par les traitements thermiques du lait, sont connues pour induire une plus grande capacité de rétention de l’eau dans les gels laitiers acides. De façon plus surprenante, le choix du ferment (texturants versus non-texturant) n’a pas eu d’effet sur les valeurs de synérèse induite au chapitre 5. Il se peut que ce résultat soit dû aux faibles valeurs de synérèse obtenues (<12 %) ou à la variabilité des mesures de synérèse induite durant le projet, car tel qu’indiqué dans la revue de littérature au chapitre 1, on se serait attendu à avoir plus de synérèse avec un ferment non-texturant.

Tout au long de cette thèse, la synérèse a été reliée à la microstructure des gels de yogourt. La taille des microgels et l’hétérogénéité du gel semblent très liées aux propriétés de synérèse du gel. Aux chapitres 2 et 3, que ce soit avec des yogourts expérimentaux, ou du commerce, de petites tailles de microgels étaient corrélées à une faible synérèse induite. Par contre, lorsque la taille des microgels était augmentée par la diminution du ratio CN:PS (chapitre 4) ou par l’augmentation de la température de lissage (chapitre 5), la synérèse induite diminuait. Dans le cas du chapitre 4, on s’aperçoit que diminuer le ratio CN:PS jusqu’à 1,5 a pour effet d’augmenter l’hétérogénéité du gel. Sur les images de microscopie, on observe très peu de gel réorganisé autour des microgels et la présence de nombreuses poches de sérum. Lorsque l’on regarde les valeurs de synérèse spontanée sur le spectre 1H-BF-RMN, celles-ci sont les plus élevées que celles de tous les yogourts dès J1 et augmentent au cours du temps. Cette synérèse spontanée correspondrait aux poches de sérum dans le gel et elle augmenterait à cause de la forte proportion des microgels à s’agréger durant l’entreposage alors que peu de gel réorganisé était présent. Une interprétation serait que le gel réorganisé fonctionnerait comme un « compartiment » pour retenir le sérum et lorsque ce gel réorganisé est absent la synérèse spontanée augmente. Dans le cas du chapitre 5, où les yogourts lissés à 4 °C présentaient une microstructure très homogène (faible valeur de NHI) avec un gel réorganisé très développé et des microgels plus petits, la synérèse induite était élevée par rapport aux yogourts lissés à 27 °C. On est cette fois dans le cas contraire, où le « compartiment » de gel réorganisé est plus grand que celui des microgels. Il est à noter qu’au chapitre 5, les fermentations étaient réalisées dans des conditions différentes des autres chapitres : la standardisation était faite sur le lait cru; les ferments étaient différents (producteur d’EPS); les temps de fermentation étaient plus longs et à plus basse température (39 versus 42 °C); la production de yogourt était réalisée à échelle semi

industrielle. Il l existe possiblement un optimum à viser entre la taille des microgels et le développement du gel réorganisé. Si les traitements mécaniques sont trop intenses, les microgels disparaissent et il y a moins de pores disponibles pour retenir le sérum.