3.2 Influence de la structure des populations
3.2.1 Structure spatiale
Par structure spatiale, j’entends ici la « subdivision des populations en
groupes d’individus, ´echangeant des g`enes de fa¸con homog`ene dans l’espace».
Cette structure n’est donc pas spatialement explicite (voir la remarque faite
au d´ebut du § 2.2.2).
Présent
Passé
Population 1 Population 2
Figure 3.1: Un exemple de g´en´ealogie de g`enes dans deux
popula-tions connect´ees. Cette figure repr´esente une r´ealisation du processus
de coalescence pour un ´echantillon de 2× 5 g`enes, dans deux
po-pulations constitu´ees chacune de N = 100 individus haplo¨ıdes, qui
´echangent une proportionm = 0.01 de g`enes, par g´en´eration. Chaque
´ev´enement de migration est repr´esent´e par une ligne pointill´ee et fl´
e-ch´ee.
Esp`eces mono¨ıques
Dans un mod`ele `a nombre n d’ˆıles, on peut montrer que N
e= N n/(1−
F
ST) (voir, par exemple, Barton etWhitlock 1997;Whitlock et
Bar-ton 1997). Par cons´equent, l’effet de la subdivision des populations dans
ces mod`eles est de diminuer l’effet de la d´erive (la taille efficace est
aug-ment´ee d’un facteur 1/(1− FST) par rapport `a une population continue,
de mˆeme taille totale N n). Les lign´ees de g`enes diminuent en nombre dans
chaque sous-population, mais les all`eles fix´es dans chaque sous-population ne
sont pas n´ecessairement identiques et la d´erive g´en´etique sur l’ensemble de
la population est donc minimis´ee, par rapport `a une population continue de
mˆeme taille (Caballero 1994). Ce r´esultat est ´egalement valable pour un
mod`ele de migration par pas
9, dans une ou deux dimensions, `a condition que
9Terme traduit de l’anglaisstepping stone. Il s’agit d’une famille de mod`ele o`u la
dis-persion des individus (ou des g`enes) ne peut se faire qu’entre les sous-populations les plus
la taille des sous-populations soit constante dans le temps et dans l’espace
(Whitlock et Barton 1997). Wang (1997b) obtient des r´esultats tout `a
fait similaires dans le cas d’une esp`ece v´eg´etale avec migration du pollen et
dispersion des graines.
En revanche, ces mod`eles ne prennent pas en compte d’´eventuelles
varia-tions dans la contribution des sous-populavaria-tions `a la composition g´en´etique
future de la population dans son ensemble. Or des diff´erences de taille des
sous-populations, des taux d’immigration ou d’´emigration variables, ainsi que
les processus d’extinction et de recolonisation des sous-populations entraˆınent
de telles variations. Whitlock et Barton (1997) et Barton et
Whit-lock(1997) ont montr´e que l’effet de la subdivision des populations, lorsque
l’on tient compte de dynamiques d´emographiques explicites, est de r´eduire
la taille efficace par rapport au nombre total d’individus reproducteurs dans
la m´etapopulation. Ceci contredit donc les r´esultats attendus dans un simple
mod`ele `a nombre d’ˆıles fini.Whitlock etBarton (1997) distinguent
plu-sieurs effets pour interpr´eter leurs r´esultats. Tout d’abord, d’un point de vue
dynamique, les effets conjugu´es des extinctions locales et de la stochasticit´e
d´emographique dans des sous-populations de petite taille auront tendance
`
a r´eduire l’effectif total (et donc la taille efficace) de la m´etapopulation, en
comparaison avec une population unique non subdivis´ee qui occuperait le
mˆeme habitat. D’autre part, la variance des contributions des diff´erentes
sous-populations `a la composition g´en´etique future de la m´etapopulation r´eduit,
elle aussi, la taille efficace asymptotique (voir ´egalement Wakeley 2001).
Ces deux facteurs, qui ne sont pas pris en compte dans le mod`ele `a nombre
d’ˆıles fini, peuvent contre-balancer l’augmentation de la taille efficace due `a
la diff´erenciation g´en´etique entre sous-populations (Whitlock et Barton
1997).
Esp`eces dio¨ıques
Wang(1997a) a d´evelopp´e un mod`ele de population structur´ee pour une
esp`ece dio¨ıque, pour une distribution arbitraire du nombre de descendants
par individu reproducteur, et des taux de dispersion conditionnels au sexe des
Ne
Migration
mâle
Migration
femelle
0.05
0.1
0.15
0.2
0.05
0.1
0.15
0.2
400425
450
475
500
0.0
0.1
0.15
Figure 3.2: Taille efficace dans une population structur´ee d’une
es-p`ece dio¨ıque. La population est subdivis´ee en 20 sous-populations,
chacune ´etant compos´ee de 100 individus. Le sexe-ratio est biais´e en
faveur des femelles (95 : 5). La taille efficace asymptotique est donn´ee
en fonction des taux de migration des mˆales et des femelles.
individus. En cela, il a g´en´eralis´e le mod`ele deChesser et al. (1993) et y a
apport´e quelques corrections. Ces mod`eles font suite aux d´eveloppements de
Chesser(1991a,b), qui consid´erait une f´econdit´e fix´ee pour les femelles. Tout
comme les mod`eles adapt´es aux esp`eces mono¨ıques, ces mod`eles pr´edisent une
augmentation de la taille efficace asymptotique avec la diminution des taux
de dispersion (mais aucune dynamique d´emographique explicite n’est prise
en compte). En revanche les biais de sexe-ratio, tout comme des diff´erences
de la distribution du nombre de descendants par sexe, peuvent conduire `a
des effets asym´etriques de la dispersion limit´ee. La figure 3.2 montre une telle
asym´etrie. L’effet de la migration des mˆales pour de forts taux de migration
des femelles, y est beaucoup plus prononc´e que celui de la migration des
femelles pour de forts taux de migration des mˆales. Le biais de sexe-ratio
(tout comme la dispersion limit´ee) augmente l’effet de d´erive `a l’int´erieur des
sous-populations. Ici la dispersion limit´ee des mˆales, qui sont peu nombreux,
augmente l’effet de d´erive `a l’int´erieur des sous-populations, bien plus que la
dispersion limit´ee des femelles, qui sont plus nombreuses. Par cons´equent, la
d´erive `a l’´echelle de la m´etapopulation est d’autant plus faible que le sexe le
moins repr´esent´e est celui qui disperse ´egalement le moins (voir ´egalement
Wang 1997a, figure 4).
Dans le document
Génétique des populations subdivisées : théorie et applications
(Page 87-91)