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2.2.1 R´eflecteurs sismiques

Les ´etudes sismiques r´ealis´ees au niveau des marges mettent en ´evidence un certain nombre de r´eflecteurs, pour certains tr`es marqu´es et observ´es sur de longues distances, mais dont l’in- terpr´etation est discut´ee. Par exemple, sur les marges de Galice et du Golfe de Gascogne, le ‘r´eflecteur S’ borde la base de la croˆute continentale ´etir´ee (Figure 2.2). de Charpal et al. (1978) l’interpr`etent comme la transition fragile-ductile, dans un mod`ele sym´etrique d’exten- sion lithosph´erique. Pour Boillot et al. (1988), Winterer et al. (1988) ou Reston et al. (1996), il s’agirait plutˆot du grand d´etachement `a faible pendage traversant la lithosph`ere dans un contexte d’extension asym´etrique. Ces ´etudes sont toutefois en d´esaccord sur le sens du pen- dage (vers l’est pour Boillot et al. (1988) et Reston et al. (1996), vers l’ouest pour Winterer

et al. (1988)). Sibuet (1992) consid`ere ´egalement le r´eflecteur S comme un d´etachement, mais

intra-crustal, alors que Boillot et al. (1989) met l’accent sur le fait que ce r´eflecteur marque une limite tectonique entre croˆute et manteau. Enfin, une toute autre hypoth`ese est propos´ee par Horsefield (1992) : il pourrait s’agir du toit d’une grande intrusion magmatique.

D’autres r´eflexions, plus profondes, sont observ´ees sous le moho de la marge continentale du Golfe de Gascogne. Une mod´elisation 3D des donn´ees sismologiques, publi´ee par Ayarza

et al. (2004), montre que ces r´eflexions seraient g´en´er´ees par une surface d’orientation est-

ouest, `a pendage vers le sud, qu’Ayarza et al. (2004) interpr`etent comme le dessus d’une plaque plongeante. Ils compl`etent leur ´etude par une mod´elisation `a l’´echelle lithosph´erique int´egrant des donn´ees de topographie, d’´el´evation du g´eo¨ıde et d’anomalies gravim´etriques. L’ensemble de ces donn´ees peut ˆetre expliqu´e par un mod`ele o`u la lithosph`ere oc´eanique du Golfe de Gascogne est chevauch´ee par la croˆute continentale de la p´eninsule ib´erique. Ces

conclusions semblent confirmer une hypoth`ese qui avait d´ej`a ´et´e avanc´ee par de pr´ec´edentes ´etudes (e.g., Masson et al., 1994).

La combinaison de donn´ees sismologiques et gravim´etriques met en ´evidence des structures particuli`eres sous de nombreuses marges, bien que celle du Golfe de Gascogne soit la seule pour laquelle un d´ebut de subduction est envisag´e.

2.2.2 Mat´eriel de nature ind´etermin´ee sous les marges continentales

Du mat´eriel de nature ind´etermin´ee `a la base de la marge continentale est par exemple observ´e dans la partie sud de la marge ib´erique par Afilhado et al. (2008). `A partir de pro- fils de sismique r´eflexion et r´efraction, ils ´etablissent un mod`ele de vitesse sismique puis le convertissent en mod`ele de densit´e. Ils v´erifient que ce mod`ele est coh´erent avec les donn´ees gravim´etriques, et le compl`etent par une ´etude des anomalies magn´etiques. Leur travail met en ´evidence deux r´esultats principaux : l’amincissement diff´erentiel de la croˆute continentale que nous avons d´ej`a ´evoqu´e (Section 2.1), et l’existence d’une zone transitionnelle d’une qua- rantaine de kilom`etres entre les domaines oc´eaniques et continentaux identifi´es avec certitude (Figure 2.5). Selon Afilhado et al. (2008), cette zone de transition serait constitu´ee de croˆute continentale tr`es amincie surplombant une couche de gabbros intrud´es ou de p´eridotites ser- pentinis´es intrud´ees. Ils notent que l’existence d’une magn´etisation ´elev´ee est plus en faveur de gabbros que de manteau serpentinis´e. Afilhado et al. (2008) sugg`erent que ces gabbros auraient ´et´e mis en place par intrusion lors de l’ouverture oc´eanique, mais ne d´etaillent pas pourquoi ni comment. 150 200 250 300 Distance (km) 2 3 4 5 6 7 8 km/s v e l TD 2 3 4 5 6 7 8 0 10 20 30 0 10 20 30 Profondeur(km) v e l OCT OD CC ThD TD CD OCT OD CC CD km/s ThD

Fig. 2.5: Mod`ele de vitesse sismique pour le sud de la marge ib´erique, extraite d’Afilhado

et al. (2008). L2 : croˆute oc´eanique sup´erieure ; L3 : croˆute inf´erieure des domaines oc´eanique

(OD) et transitionnel (TD) ; MSed : m´etas´ediments ; UCC, MCC et LCC : croˆute continentale

sup´erieure, interm´ediaire et inf´erieure. F0 `a F3 : failles. Pm1 `a Pm4 : r´eflecteurs. CD :

domaine continental. ThD : continent aminci. `A proximit´e de la transition oc´ean-continent

(OCT), la MCC repose directement sur le manteau. Au niveau mˆeme de la transition, la MCC et l’UCC chevauchent du mat´eriel de nature ind´etermin´ee, qui semble en continuit´e avec la

2.2. STRUCTURE DES MARGES PASSIVES 39

Nous nous sommes jusqu’alors essentiellement int´eress´es `a la marge ib´erique. La pr´esence de mat´eriel dont la nature et l’origine sont d´ebattues, sous une croˆute continentale tr`es amincie, est toutefois observ´ee au niveau de nombreuses autres marges. C’est notamment le cas pour la marge de Terre-Neuve, conjugu´ee de la marge ib´erique (Van Avendonk et al., 2009), mais surtout pour toutes les marges dites ‘volcaniques’. Une des caract´eristiques des marges volcaniques est en effet l’existence de corps `a forte vitesse sismique, de 10 `a 15 km d’´epaisseur, localis´es sous la croˆute continentale amincie, au niveau de la transition oc´ean- continent. On classe par exemple dans la cat´egorie des marges volcaniques celles de Norv`ege (Scheck-Wenderoth et al., 2007; Tsikalas et al., 2008) et d’Afrique du sud (e.g., Hirsch et al., 2009), alors que les marges ib´eriques et de Terre-Neuve sont qualifi´ees de non-volcaniques. En r´ealit´e, la distinction entre les deux types de marges est parfois difficile `a d´efinir (e.g., Blaich

et al., 2008). Les structures observ´ees `a la base des marges continentales sont classiquement

interpr´et´ees comme des intrusions mafiques mises en place avant l’ouverture oc´eanique. Tou- tefois, il n’y pas d’accord sur les processus `a l’origine de telles intrusions. Certain affirment que les m´ecanismes de rifting suffiraient `a g´en´erer des volumes magmatiques comparables `a ceux des corps observ´es sous les marges (e.g., van Wijk et al., 2001). Pour d’autres, le grand volume de ces corps n´ecessiterait d’invoquer des causes ext´erieures, par exemple, un point chaud (e.g., White et McKenzie, 1989). Cette hypoth`ese se heurte `a une difficult´e : toutes les marges dites volcaniques ne sont pas localis´ees `a proximit´e de points chauds. C’est le cas par exemple pour la marge ouest-australienne (e.g., Hopper et al., 1992). Une des autres th´eories envisag´ees met l’accent sur le rˆole du d´eveloppement d’une convection `a petite ´echelle, qui serait d´eclench´ee par l’amincissement continental pr´ec´edant l’ouverture oc´eanique (e.g., Bou-

tilier et Keen, 1999).

La structure des marges soul`eve donc encore des interrogations. Elle fait l’objet d’une multitude d’´etudes, mais qui reposent g´en´eralement sur les mˆemes concepts. En particulier, les ´etudes existantes consid`erent les marges comme des objets g´eologiques dont la structure varierait peu apr`es leur formation. Ainsi, l’amincissement continental, comme la pr´esence de mat´eriel `a forte vitesse sismique en base du continent aminci, sont toujours vus comme des cons´equences des phases de rifting pr´ec´edant ou pendant l’ouverture oc´eanique. Puisque cette approche ne donne pas de r´esultats enti`erement satisfaisants, pourquoi ne pas proposer une alternative o`u la structure des marges serait influenc´ee par l’´evolution post´erieure `a la rupture continentale ? Un argument en faveur de cela est que, comme nous allons le voir, les marges dites passives connaissent en fait des mouvements verticaux d’amplitude non n´egligeable sur des millions d’ann´ees. Des modifications structurelles pourraient ˆetre associ´ees `a cette dynamique.