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CHAPITRE III MÉTHODOLOGIE

3.8 Le plan d’analyse des données

3.8.1 Les stratégies d’analyses quantitatives

En ce qui concerne les stratégies d’analyses quantitatives, dans cette recherche avec un protocole à cas unique, des analyses quantitatives des effets intraindividuels sont privilégiées. Elles sont en fait au cœur de toute recherche expérimentale avec un protocole à cas unique (Juhel, 2008; Kratochwill et al., 2013; Maggin, Briesch et Chafouleas, 2012). La façon dont elles s’actualisent pour vérifier les hypothèses de recherche est présentée dans cette section.

3.8.1.1 Les analyses quantitatives des effets intraindividuels

Selon ces mêmes auteurs, les analyses quantitatives des effets intraindividuels permettent d’une part, d’analyser les données issues des mesures normalisées dans une perspective normative et d’autre part, d’analyser celles issus des mesures continues dans une perspective idiographique, à partir de critères de vérification des hypothèses de recherche. Le tableau 3.3 reprend spécifiquement les critères confirmant ou infirmant les trois hypothèses formulées pour chaque type de mesure, en prenant en compte des résultats en particulier dans chaque épreuve. Ainsi, dans cette section, pour chaque type de mesure, les analyses menées pour les vérifier sont exposées.

Tableau 3.3

Critères infirmant ou confirmant les hypothèses, en fonction des épreuves Épreuves Critères confirmant ou infirmant les hypothèses

Première hypothèse : L’élève produit avec davantage de précision des mots écrits en français en production de mots isolés.

Dictée « Ortho 3 » de la Batterie d’Évaluation du Langage Écrit et de ses troubles

✓ Augmentation du résultat correspondant aux graphèmes et items produits en utilisant le traitement alphabétique, orthographique ou morphographique

(selon les graphèmes à travailler chez l’élève)

« Dictée de mots et de non-mots » de la Batterie Analytique du Langage Écrit

✓ Augmentation du résultat correspondant aux mots et non-mots produits en utilisant le traitement alphabétique ou orthographique

(selon les mots ou non-mots à travailler chez l’élève)

Deuxième hypothèse : L’élève produit avec davantage de précision des mots écrits en français en production de textes.

Épreuve « Production d’un paragraphe » du Test de rendement individuel de Wechsler

✓ Diminution du résultat correspondant au nombre d’erreurs en production des mots écrits en français (nombre d’erreurs)

Épreuve « La maison abandonnée » de l’Évaluation de la compétence en écriture

✓ Augmentation du résultat correspondant à la précision de la production de mots écrits en français (pourcentage d’erreurs)

Troisième hypothèse : L’élève produit avec davantage de fluidité des mots écrits en français en production de textes.

Épreuve expérimentale de production de mots en production textuelle

Pour les résultats correspondant au nombre de mots produits avec précision pour le niveau scolaire de l’élève par minute :

✓ Augmentation de la moyenne des résultats de la phase d’intervention (B : sessions rééducatives avec la synthèse vocale ; BC : sessions rééducatives avec la synthèse vocale et la prédiction de mots) et

d’observation des apprentissages (A) en comparaison au niveau de base (A)

✓ 2 résultats ou plus se situant à l’extérieur de la bande de confiance

3.8.1.1.2 Les analyses des données issus des mesures normalisées

D’abord, dans une perspective normative, afin de vérifier si l’élève produit avec davantage de précision des mots écrits en français en production de mots isolés (première hypothèse) et de textes (deuxième hypothèse), les données obtenues avant et après le programme dans les mesures normalisées sont comparées, en situant ces données par rapport aux normes disponibles. Si une augmentation ou une diminution du résultat correspondant aux résultats identifiés dans les critères de vérification de chaque hypothèse est observée, cette hypothèse est confirmée et, si elle ne l’est pas, elle est infirmée. De plus, dans le cas où la performance générale de l’élève était inférieure à celle attendue avant le programme et qu’elle s’en rapproche au terme de celui-ci, il est entendu qu’il a une contribution importante sur le plan de l’apprentissage visé. Ensuite, à des fins exploratoires, la comparaison de la performance de l’élève avec ces deux supports est réalisée afin d’évaluer sa capacité à transférer ses apprentissages et à compenser ses difficultés avec des outils conçus à cette fin.

3.8.1.1.2.1 Les analyses des données issues des mesures continues

Ensuite, dans une perspective idiographique, afin de vérifier si l’élève produit avec davantage de fluidité des mots écrits en français en production de textes (troisième hypothèse), l’analyse des données issues des mesures continues est réalisée, à partir des résultats obtenus à l’épreuve expérimentale de production de mots en production textuelle administrée sur une base hebdomadaire. Les résultats utilisés pour faire ces analyses sont le nombre de mots produits avec précision pour le niveau scolaire de l’élève par minute aux différentes phases de l’étude décrites dans le plan de recherche. Ces analyses sont réalisées à l’aide de méthodes complémentaires décrites dans cette section : l’inspection visuelle et la ligne de tendance ainsi que l’analyse de séries chronologiques interrompues courtes.

L’inspection visuelle et la ligne de tendance

L’inspection visuelle est une méthode d’analyse qui est généralement utilisée dans des recherches expérimentales avec un protocole à cas unique. Elle consiste en une inspection visuelle de la représentation graphique des résultats aux mesures continues. Ainsi, dans cette étude, la fréquence (nombre d’occurrences du comportement ciblé), la durée (temps pendant lequel ce comportement est adopté) et le niveau de performance de chaque élève au regard de la production des mots écrits sont examinés avec circonspection. Pour ce faire, l’examen simultané de différentes composantes est effectué, en portant attention au niveau médian ou à la moyenne de chaque phase de ce protocole A-B-BC-A, déjà décrits dans le plan de recherche. Ces composantes sont la variabilité et la tendance au sein d’une phase, la variabilité et le changement de tendance entre les différentes phases, le taux de recouvrement des données entre le niveau de base (A), les sessions rééducatives (B-BC) et la phase d’observation des apprentissages (A), considérant le nombre de mesures par phase. Cette procédure, qui implique l’obtention d’un niveau de base stable, a l’avantage de donner rapidement un aperçu de l’évolution des élèves durant les différentes phases de l’étude, sans pouvoir se prononcer avec certitude sur l’existence d’un effet, car les critères de décision ne sont pas univoques. En effet, il pourrait en résulter différentes erreurs, qui peuvent être des erreurs de type 1 (non-rejet de l’hypothèse nulle alors qu’elle est fausse) ou de type deux (vrais négatifs). De plus, un changement pourrait ne pas être détecté par cette inspection visuelle, mais être important au plan clinique.

Ainsi, pour bonifier l’inspection visuelle, une ligne de tendance est représentée dans le graphique à partir de la moyenne des résultats obtenus au niveau de base (A). Cette ligne, représentant la tendance du comportement ciblé sans l’effet du programme d’intervention orthopédagogique intégrant des aides technologiques, donne un meilleur aperçu de l’effet de ce programme, mais ne permet pas de se prononcer avec certitude

sur l’existence d’un effet. Pour cette raison, une méthode complémentaire à l’inspection visuelle et à la ligne de tendance est utilisée dans ce projet, soit l’analyse de séries chronologiques interrompues courtes.

3.8.1.1.1 L’analyse de séries chronologiques interrompues courtes

L’analyse de séries chronologiques interrompues courtes est réalisée avec différents types d’analyses statistiques qui facilitent la prise de décision et en améliore la fidélité, en plus d’être adaptées à ce contexte d’intervention orthopédagogique. Dans le cadre de ce projet, comme le suggèrent différents auteurs (Juhel, 2008; Rivard et Bouchard, 2006; Satake et al., 2008), les analyses qui sont menées pour corroborer les interprétations réalisées à partir de l’inspection visuelle sont la moyenne, la carte de contrôle et la statistique C, décrites dans la présente section.

3.8.1.1.2 La moyenne

Dans le but de confirmer la présence ou l’absence d’un effet à la suite de l’expérimentation, la moyenne des résultats aux mesures continues au niveau de base (A) est comparée à celles des phases d’intervention (B-BC) et d’observation des apprentissages (A). Cette représentation globale de ces données quantitatives permet d’identifier si une baisse, une augmentation ou une stabilité du comportement visé est observée chez l’élève ciblé lors des différentes phases et ainsi, confirmer, à l’aide d’une analyse descriptive, la tendance observée par l’inspection visuelle. Ainsi, conformément aux critères de vérification de la troisième hypothèse de recherche, si une augmentation de cette moyenne est observée, cela signifie que ce critère est atteint et, dans le cas d’une stabilité ou d’une diminution, il ne l’est pas.

3.8.1.1.3 La carte de contrôle

La carte de contrôle fournit une autre représentation intéressante pour évaluer la tendance observée. Cette dernière consiste en une bande de confiance dont les limites

supérieure et inférieure se situent à plus ou moins deux écarts types de la moyenne des données issues des mesures continues. Dans cette étude, la ligne centrale de cette bande de confiance est déterminée à partir de la moyenne des résultats obtenus au niveau de base (A) ainsi que des limites inférieures et supérieures des résultats issus du niveau de base (A) et des phases d’intervention (B-BC). Si deux résultats successifs se situent à l’extérieur de la bande de confiance ou si un résultat se situe à l’extérieur de cette bande à trois écarts-types, il est d’usage d’évaluer qu’un paramètre a changé et donc, de considérer qu’un effet positif du programme est observé au regard de la fluidité de la production de mots écrits en français en production textuelle. La présence de tels résultats signifie qu’un critère de vérification de la troisième hypothèse est atteint.

3.8.1.1.4 La statistique C

La statistique C fournit des informations complémentaires à la moyenne et à la carte de contrôle pour évaluer la tendance observée, en vérifiant si le comportement d’une série est aléatoire. L’utilisation de cette statistique, qui implique un minimum de 8 observations, est réalisée comme suit. D’abord, une formule mathématique (voir Annexe M) est appliquée pour vérifier si les données du niveau de base ont une tendance significative. Si la tendance est significative, les données du niveau de base (A) sont ajustées à l’aide d’une technique de régression, puis la statistique C est appliquée à l’ensemble des autres valeurs (valeurs estimées – valeurs observées). Dans le cas contraire, les données du niveau de base (A) et des phases d’intervention (B-BC) sont combinées. Si la statistique C est significative, un critère de vérification de la troisième hypothèse est atteint. En outre, afin d’observer le maintien de l’apprentissage ciblé, les résultats obtenus durant la phase d’observation des apprentissages (A) s’ajoutent à celles du niveau de base (A) et des phases d’intervention (B-BC). Ces résultats issus des mesures continues permettent de réaliser des analyses quantitatives complémentaires à celles issues de mesures normalisées, pour lesquelles une analyse qualitative des paragraphies est proposée.

En somme, pour atteindre l’objectif principal de recherche, l’analyse de séries chronologiques interrompues réalisée à l’aide de la moyenne, de la carte de contrôle et de la statistique C apporte des informations complémentaires pour corroborer les interprétations réalisées à partir de l’inspection visuelle et de la ligne de tendance. Ces analyses réalisées à partir des données issues des mesures continues permettent de vérifier la troisième hypothèse de recherche. Ces dernières, effectuées dans une perspective idiographique, sont combinées aux analyses quantitatives effectuées à partir des données issues des mesures normalisées, réalisées dans une perspective normative. Elles permettent de vérifier la première et la deuxième hypothèse de recherche. Celles-ci sont complétées par des stratégies d’analyse qualitative.