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CHAPITRE 2. CADRE DE RÉFÉRENCE

3.7 La stratégie de l’analyse des données

Notre analyse s’inscrit dans une approche inductive, étant donné que nos observations se sont déroulées en contexte naturel (Laperrière, 1997). Nous avons adopté le modèle

interactif de Huberman et Miles proposé en 1991 (Lessard-Hébert, Goyette et Boutin, 1996). Ce modèle consiste en trois mouvements : la condensation, l’organisation et l’interprétation. Pour la condensation des données, nous avons réduit le matériel recueilli par un processus de sélection, de centration, de simplification, d’abstraction et de transformation (Lessard-Hébert, Goyette et Boutin, 1996) afin d’éliminer les informations recueillies qui ne sont pas en lien avec notre étude (Van der Maren, 1996). Pour l’organisation et la présentation des données, nous avons structuré un ensemble d’informations selon un mode de représentation50 afin de

pouvoir tirer des conclusions et de prendre des décisions. Pour l’interprétation et la vérification des conclusions, nous avons attribué une signification aux données réduites et organisées (Lessard-Hébert, Goyette et Boutin, 1996). Ces mouvements ne sont pas linéaires, l’analyse qualitative est cyclique, supposant ainsi un va-et-vient entre les diverses étapes (Lessard-Hébert, Goyette et Boutin, 1996) comme nous allons tenter de le montrer dans les pages qui suivent.

Précisons tout d’abord que nous avons effectué séparément l’analyse de chaque cas. Ainsi, nous avons procédé en respectant la chronologie de la collecte, c’est-à-dire en procédant par les données de Kamila, puis celles de Wassila et finalement par celles de Marie- Rose. Précisons aussi qu’au tout début de notre recherche, nous avons déterminé, pour chaque objectif, ses instruments. Par exemple, nous pensions que la description du regroupement se basait sur les observations et les interactions enregistrées. C’est dans cet état d’esprit que, pour l’analyse, nous avons séparé les données selon les instruments. Ainsi, lors de la condensation et pour chaque cas, nous avons commencé par les données des observations en parallèle avec les données des interactions et en cours de route, nous avons entamé celles des entretiens. La condensation selon les instruments

Dès le début de l’analyse, la grille est devenue pour nous un outil de structuration des données d’observation. Rappelons qu’au cours de la collecte des données, nous avons modulé notre manière de prendre les notes d’observation avec cet instrument. Concrètement, pour

50 Il y a plusieurs modes de présentation qui sont regroupés en deux familles : les figures ou les graphiques et les

tableaux ou les matrices. Généralement, la première famille correspond bien aux données qualitatives, tandis que la deuxième est souvent utilisée pour présenter des données quantitatives. Pour chaque famille, la présentation peut être descriptive ou explicative (Lessard-Hébert, Goyette et Boutin, 1996).

chaque séance d’observation, nous avons transcrit les notes51 du terrain le plus rapidement

possible dans un format qui est celui de la grille d’observation. Cela nous a permis de sélectionner, comme prévu, toutes les séances d’observation durant lesquelles les élèves ont travaillé en sous-groupes au cours de la période d’enseignement et certaines séances que nous avons considérées comme étant importantes, comme nous l’avons déjà signalé dans ce chapitre52. Ces séances sont celles où il y a eu des imprévus sélectionnés comme étant des événements significatifs en lien avec nos objectifs de recherche.

En parallèle, nous avons commencé la transcription des interactions enregistrées. Le total de ces enregistrements correspondait environ à 1 144 minutes (19 heures). Cette transcription audio tient compte de toutes les situations dans lesquelles l’enseignante s’exprime au sujet du regroupement. En fait, même si les paroles des élèves ne font pas partie de notre intérêt de recherche, leur présence fait partie du contexte. Nous avons exploré les données d’interaction d’abord selon une stratégie de découpage temporel puis par catégories. Dans cette optique, la transcription narrative du début de la période a été effectuée pour toutes les séances de regroupement enregistrées. Pour nous, ce début de la période correspond au temps durant lequel l’enseignante introduit l’activité afin que les élèves puissent travailler par la suite en sous-groupes. Ainsi, ce temps d’introduction est variable selon les séances et selon l’enseignante. D’une manière générale, l’enseignante introduit l’activité au cours même de la séance, mais dans certains cas, l’introduction a été présentée à une séance antérieure, comme dans les cas de Kamila et de Marie-Rose. Quant au découpage par catégories, nous avons procédé de la manière suivante. La transcription a été subdivisée selon trois catégories qui distinguent les consignes de l’enseignante : quand elle s’adresse à un sous-groupe, quand elle vise le groupe-classe, quand ses consignes concernent juste un élève dans un sous-groupe. Ces trois catégories ont été par la suite subdivisées en sous-catégories visant à regrouper les consignes par rapport à l’activité au regard de notre grille d’analyse : ses différentes tâches, ses objectifs, le matériel et le temps alloué. D’autres sous-catégories ont aussi été dégagées au

51 Ces notes permettront, par la suite, de rendre compte des forces et des faiblesses de la recherche (Jaccoud et

Mayer, 1997).

cours de notre analyse, telles que les consignes de l’enseignante en relation avec ses intentions. Pour nous, ce travail nous a permis de posséder des pièces détachées à organiser après avoir terminé la condensation des entretiens.

En réalité, pour les données des entretiens, le fait de réaliser avec chaque enseignante plusieurs entretiens, dont chacun s’accorde à un thème en lien avec un objectif donné, nous a facilité la tâche au tout début de l’analyse. Nous avons d’abord transcrit, pour chaque cas, l’ensemble des entretiens réalisés. Par la suite, pour chaque thème, nous avons condensé les

verbatim afin de catégoriser les données en titres et en sous-titres selon notre compréhension

et notre interprétation du contenu. Cette catégorisation a été à la base de l’analyse qui nous a permis de constituer les grandes réponses à nos trois objectifs. Dans cette perspective, nous avons lu et relu les verbatim afin de sonder les propos qui correspondaient à nos réponses. Par la suite, nous avons structuré l’ensemble du texte condensé et les citations sous forme de réponses plus au moins complètes, mais surtout préalables à nos objectifs.

L’organisation et l’interprétation par l’écriture

Au cours de l’organisation des données, nous nous sommes rendu compte que chaque instrument fournissait un éclairage, d’une manière ou d’une autre, sur les trois objectifs de la recherche. Un aller-retour entre les données condensées afin de pouvoir faire surgir l’essentiel de substrat53 en lien avec les objectifs de départ nous semblait une tâche chronophage. De toutes ces pièces détachées, le façonnage est celui des données, mais aussi celui de notre manière de voir les choses afin de les communiquer. Effectivement, nous nous sommes basée sur les données d’interaction comme point de départ, avec toutes ses pièces qui présentaient pour nous plusieurs possibilités de structuration. Or, devant la réalité d’une thèse, nos objectifs ont été notre boussole. Comme le premier objectif visait la description du déroulement de regroupement d’élèves, nous avons remis en forme les différentes catégories en lien avec chaque objectif. Dans cette optique, nous avons intégré le discours de l’enseignante afin de nous baser sur ce qui a été dit au cours de chaque séance d’observation durant laquelle il y a eu un regroupement d’élèves. En effet, notre intention était d’amener le lecteur à saisir le

contexte du déroulement du regroupement. En ce sens, les données des observations constituaient un support complémentaire. Nous les avons structurées sous différentes formes de textes. Avec un style narratif, nous avons essayé de transcrire notre vision afin d’amener le lecteur comme s’il était avec nous sur le terrain. Ainsi, nous avons élaboré une description de chacune des séances d’observation. Cette description, particulièrement en lien avec le regroupement, est devenue progressivement plus détaillée d’une séance à l’autre. En effet, par ce changement, nous avons constaté le chevauchement des mouvements dans notre procédure d’analyse. C’est ainsi que nous avons réalisé la synthèse54 de l’ensemble des observations. Au

cours de cette démarche, nous avons décelé certains imprévus, les événements significatifs qui, selon notre regard, étaient en lien avec nos objectifs de recherche. Ces événements ont surgi parfois sur notre scène d’observation en classe comme dans le cas de Kamila et parfois à travers la structuration des données, comme dans les cas de Wassila et de Marie-Rose. Nous avons exploré ces événements significatifs au regard du contexte, c’est-à-dire en lien avec les éléments de la grille d’observation et de l’interaction de l’enseignante concernée ainsi que les données des entretiens. À cette intégration, la narration était pour nous encore une fois une manière de présenter ce contexte. À partir de ces traces, élaborer plusieurs versions de textes durant lesquelles nous avons effectués des vérifications par des allers-retours indéterminés avec les données condensées, certes, mais aussi un retour sur les données brutes. C’est dans cette optique que nous avons entamé la rédaction de la première version du texte en réponse à nos objectifs de recherche. Cette étape de l’analyse par l’écriture (Paillé et Mucchielli, 2006) nous a amenée à avoir un regard plus critique par rapport à l’analyse de départ, ce qui nous a permis de dégager les grandes lignes en réponse à nos trois objectifs.

Donc, l’écriture en plusieurs versions nous a permis d’être plus proche du matériel et de l’interpréter à la lumière de la signification donnée par chacune des trois enseignantes. Nous pouvons dire que les trois ou quatre versions d’écriture étaient des couches qui nous ont

54 Dans le cas de Kamila, nous avons choisi au début de procéder par phases d’observation, ce qui veut dire que

nous avons délimité trois phases séparées entre elles par deux entretiens. Ce choix allait de soi en tant que première tentative d’organiser les données. À ce moment, nous avions l’intention d’analyser la procédure de la collecte en lien avec celle de l’analyse. Nous pensions que le fait de nous entretenir avec l’enseignante pouvait influencer la collecte qui s’ensuivait. Effectivement, cela n’a pas été possible dans les autres cas étant donné les différences dans le déroulement de la collecte. Alors, par la suite, nous avons délaissé cette ambition, peut-être irréaliste avec les contraintes du temps que demande ce type de travail au cours d’une formation.

aidée à revoir et à comprendre plus en profondeur certains aspects qui ont été pour nous significatifs au cours de notre présence sur le terrain.