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Spectroscopie de photoassociation

figurent les objectifs à long terme que je poursuis, comme le condensat de Bose-Einstein molécu-laire, le laser à molécules, la chimie ultra-froide ou l’étude des collisions froides (atome/molécule) à travers la formation par photoassociation, le piégeage et le refroidissement vibrationnel de molécules froides. Je vais à présent décrire quelques-uns de mes travaux les plus marquants.

8.2 Spectroscopie de photoassociation

Mes travaux concernant la spectroscopie de photoassociation ont essentiellement consisté en l’étude des potentiels moléculaires du césium, que ce soit dans l’étude de la partie longue dis-tance des états excités [Comparat et al., 1999, Fioretti et al., 1999] ou des états fondamentaux [Lisdat et al., 2002, Vanhaecke et al., 2004], de couplages (tunnel, prédissociation, spin-orbite, ...) moléculaires [Vatasescu et al., 2000, Dion et al., 2001], ou de la modification par une réso-nance de Feshbach [Laburthe Tolra et al., 2003].

Ces études nous ont principalement permis de trouver des schémas de formation de molé-cules froides de plus en plus efficaces, et ont finalement permis la réalisation du refroidissement vibrationnel des molécules. La spectroscopie moléculaire par photoassociation est aussi un outil de diagnostic essentiel des expériences de molécules froides. L’interprétation des données s’ef-fectue souvent en collaboration avec les théoriciens du laboratoire (O. Dulieu, A. Crubellier, F. Masnou, N. Bouloufa, ...).

Le processus de photoassociation (PA), puis de désexcitation spontanée formant des molé-cules froides, est le suivant (avec des notations spectroscopiques que je ne détaille pas ici) :

Cs + Cs + hνPA −→ Cs2 2S+1±g,u(v, J ) spont. −→ Cs2 2S+1 Σ±g,u(v0, J0) + hνspont.

Les molécules froides que nous formons proviennent donc d’une désexcitation spontanée et sont donc formées dans plusieurs niveaux de vibration v0 et dans quelques niveaux de rotation bas J0 = J ± 1, 0. En effet J reflète essentiellement l’onde partielle de collision ` (couplée éventuellement à d’autres moments angulaires faibles comme le spin), qui est faible vues les basses températures considérées.

8.2.1 Photoassociation à deux photons

Afin de former directement les molécules froides dans un seul niveau de vibration il est ten-tant de stimuler l’émission en faisant de la photoassociation Raman stimulée. Nous avons étudié ce processus de photoassociation à 2 photons en détail au cours de l’année 2002 [Lisdat et al., 2002]. Il permet de former seulement 1000 molécules froides par seconde, les mécanismes de réabsorp-tion par la molécule formée ne permettant pas d’accumuler un plus grand nombre de molécules froides. Cette technique a par contre permis d’étudier les formes de raie (effet Autler - Townes, profil de Fano) et d’observer pour la première fois un effet de résonance noire sur une transition "deux atomes vers une molécule". Cette propriété a permis de réaliser une spectroscopie dite de frustration de polarisation de l’état fondamental de la molécule. Cette spectroscopie s’est ré-vélée être un outil de diagnostic important pour la compréhension de la formation de molécules froides et pour la connaissance des phénomènes de collision. Nous avons réalisé la spectrosco-pie, de frustration de polarisation, à deux photons, d’une centaine des derniers niveaux liés des puits de potentiel fondamentaux de la molécule dimère de césium. L’interprétation des

spectres fut compliquée par la présence dominante de la structure hyperfine. Pour interpréter les données, Nicolas Vanhaecke a développé un programme en C++ basé sur un programme de Anne Crubellier à plusieurs voies couplées mais qui n’utilise uniquement que la partie asympto-tique (principalement en Cn/Rn) des potentiels ; la partie interne étant introduite que par une condition de nullité des fonction d’onde sur une "ligne nodale" placée à la limite de la partie asymptotique. C’est une méthode simple et efficace, bien adaptée aux situations rencontrées dans nos expériences, où les phénomènes intéressants ont lieu à des distances interatomiques assez grandes. Bien souvent, les molécules vibrent en restant à grande distance interatomique et ressemblent à des paires d’atomes en interaction, dont la description se situe à la frontière entre physique moléculaire et physique atomique.

Nos résultats ont permis de déterminer pour la première fois l’amplitude de l’énergie d’échange et d’améliorer notre connaissance du coefficient de Van der Waals C6 [Vanhaecke et al., 2004]. Les résultats obtenus fournissent un ensemble de paramètres aisément utilisables qui per-mettent, en principe, de calculer la fonction d’onde de n’importe quel état proche du seuil, lié ou continu, des potentiels fondamentaux 6s+6s de Cs2. Ce calcul peut être généralisé au cas où les atomes se trouvent en présence d’un champ magnétique.

8.2.2 Étude d’une résonance de Feshbach par photoassociation

Avec l’aide de ce programme, nous avons réalisé l’expérience de formation de molécules froides via la photoassociation au voisinage d’une résonance de Feshbach [Laburthe Tolra et al., 2003]. En jouant avec le champ magnétique, et en effectuant une photoassociation avec des atomes temporairement polarisés, nous montrons ainsi qu’il est possible de sonder la fonction d’onde de collision (voir la figure 8.1) et qu’il est possible de changer les taux de formation de molécules.

Fig. 8.1 – Taux de photoassociation en fonction du décalage du laser de photoassociation de la résonance 6s→ 6p3/2 du Cs pour différents champs magnétiques. Comparaison entre un spectre expérimental (à gauche) partant d’atomes polarisés dans f = 4, mf = 4 et le calcul théorique (à droite) effectué par Anne Crubellier.

8.2. SPECTROSCOPIE DE PHOTOASSOCIATION 109

8.2.3 Amélioration de la loi de LeRoy-Bernstein J. Chem. Phys 120

1318 (2004)

Je profitai aussi de ces travaux de spectroscopie pour finir la rédaction d’une théorie, déjà présente dans ma thèse, dite de LeRoy-Bernstein [Leroy and Bernstein, 1970] améliorée et qui relie l’énergie Ev d’un état vibrationel v (avec la valeur vD non entière à la limite de dissociation) lorsque le potentiel a une forme asymptotique en D + Cn/Rn. L’amélioration prend en compte les autres termes en Cm/Rm mais surtout la partie non asymptotique [Comparat, 2004]. Dans son expression la plus simple, cela revient à ajouter un simple terme γ(D− Ev) à la formule classique de LeRoy-Bernstein qui devient :

vD− v ≈ r 2µ π (−Cn)1/n ~(n − 2) Γ(1/2 + 1/n) Γ(1 + 1/n) (D− Ev)n−22n + γ(D− Ev) (8.2.1) L’amélioration est sensible et permet d’utiliser cette formule pour extraire le coefficient Cn avec une précision de 1% environ contre 10-20% environ pour la théorie usuelle utilisant γ = 0. Ce travail a ensuite été repris au sein du laboratoire par le groupe de Laurence Pruvost [Jelassi et al., 2006b, Jelassi et al., 2006a].

8.2.4 Nouvelle spectroscopie

L’achat d’un lambdamètre de très grande précision en 2004 nous a permis de gagner plus d’un ordre de grandeur en précision absolue (15 MHz contre 150 MHz) par rapport à ce que nous avions pu réaliser en spectroscopie de photoassociation jusque-là et qui provenait d’une calibration basée sur les raies d’absorption de la molécule d’iode. En 2007 nous reprîmes alors la spectroscopie des états 0g(6s + 6p3/2) qui permettent de déterminer la durée de vie de l’état atomique 6p3/2 qui est un paramètre important pour les mesures de violation de la parité effectuées avec l’atome de césium [Bouloufa et al., 2007]. Les données, que je ne présentent pas ici sont en cours d’études par Nadia Bouloufa et devraient bientôt améliorer la valeur de la durée de vie de l’état atomique 6p3/2.

8.2.5 Détection de la photoassociation par ionisation

Je voudrais mentionner dans cette section ”spectroscopique” mes travaux liés à la détection des molécules froides. Les spectres d’ions moléculaires Cs+2 enregistrés en fonction de la longueur d’onde du photon d’ionisation (effectuée selon un processus résonnant à 2 photons) fournissent de nombreuses informations spectroscopiques sur des états moléculaires de Cs2 difficilement accessibles par les méthodes usuelles de spectroscopie, comme par exemple les états triplets. Le processus est le suivant :

Cs2 (a)3Σ+u(v0, J0) + 2hνionisation −→ Cs2  (2)3Πu(v00, J00) + hνionisation−→ Cs+2

Dès 1998 nous avons essayé d’attribuer les raies présentes dans ces spectres. La complexité des spectres ne nous a permis que de comprendre globalement le processus sans être capables de dé-terminer précisément les niveaux vibrationnels observés [Dion et al., 2002]. En 2007, lorsque j’ai fait reprendre les expériences de photoassociation en vue de l’étude du refroidissement vibratio-nel des molécules avec le laser femtoseconde, nous avons repris cette spectroscopie d’ionisation. Avec l’aide de Nadia Bouloufa et de Olivier Dulieu, nous commençons à connaître les états

v0 formés suite aux étapes de photoassociation. Par exemple nous formons assez efficacement v0 = 12− 16 (voir figure 8.2) lors d’une photoassociation du niveau v = 103 du 0

g(6s + 6p3/2) [Vatasescu et al., 2000].

Fig. 8.2 – Haut : Nombre d’ions observés en fonction de la fréquence du laser d’ionisation suite à une photoassociation du niveau v = 103 du potentiel moléculaire Cs2[0g(6s + 6p3/2)]. Bas : Spectre simulé prenant en compte le recouvrement entre l’état initial supposé équipeuplé et l’état intermédiaire de ionisation. Malgré les différences en intensité, liées notamment à des effets de saturation, on déduit de cette comparaison que la photoassociation forme des molécules (a)3Σ+u(v0) avec v0 = 12− 16.

Comme décrit ci-après, nous avons surtout étendu cette spectroscopie d’ionisation pour permettre la détection de l’état électronique fondamental X1Σ+g(v0, J0) à l’aide des états inter-médiaires B1Πu et C1Πu dont la spectroscopie est connue.

8.3 Piégeage et étude des collisions avec des molécules froides :