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Chapitre II — Méthodologie

2.6. Sources médiatiques et post-vérité

Actuellement, il existe plusieurs sites internet prétendant donner une information véridique. Certains utilisateurs des médias sociaux republient des articles contenant des fausses nouvelles, souvent sans vérifier l’information. Dans d’autres cas, le travail de recherche derrière les articles publiés est impressionnant, offrant une bibliographie complète de sources crédibles. Or, les médias peuvent jouer un rôle important dans un travail de recherche, ce qui complexifie le travail de l’anthropologue. En fait, lorsque l’on travaille dans des contextes où l’espace médiatique nous aide à comprendre certains discours, certaines réalités, à les analyser et à enquêter plus en profondeur, cela nous permet d’établir la différence entre le journalisme et l’ethnographie.

Contrairement au journalisme, l’ethnographie n’est pas assujettie à l’effervescence du moment. Avec l’élection de Donald Trump, nous avons pu observer un phénomène que les médias de masse nomment aujourd’hui la post-vérité ou l’ère post-factuelle. Par contre, à l’intérieur des appareils d’État et à travers les compagnies privées de communication, comme Cambridge Analytica130, d’autres moyens de propagande et d’espionnage ont été présents dans un cadre où les enjeux politiques sont d’importance (l’affaire PRIMS, l’affaire Snowden et les dénonciations de Wikileaks

129En ce sens, il semble pertinent de citer ce qu’amène Agamben sur cette banalité du mal : « Plusieurs

témoignages, venant des bourreaux comme des victimes, arrivent d’hommes communs, et les gens « obscurs » étaient clairement la grande majorité de ceux qui se retrouvaient dans les camps. L’une des leçons d’Auschwitz c’est que, justement, comprendre la pensée d’un homme commun est infiniment plus ardu que de comprendre la pensée de Spinoza ou de Dante (c’est aussi dans ce sens qu’il faut comprendre l’affirmation d’Hannah Arendt, souvent mal interprétée, par rapport à la « banalité du mal ») ». (Traduction libre - Agamben 2009 : 09).

130Une compagnie impliquée dans une forme de propagande politique et qui utilisait les profils

Facebook pour envoyer des informations favorables aux campagnes politiques ayant un contrat avec celle-ci.

sont des exemples qui ont été mentionnés plus haut). En ce sens, j’ai évité de considérer certains médias dans mes recherches, les considérant trop politisés et j’ai utilisé des articles dont les sources sont vérifiées et confirmées par des rapports académiques ou soutenus par une base d’information rigoureuse.

Les médias ont vu leur méthodologie se faire remettre en question à plusieurs occasions dans les derniers temps à travers les réseaux sociaux. Un exemple récent est arrivé avec le contrôle qui a été posé envers une émission du El Espectador131, dans

laquelle le journal d’opinion nommé La Pulla n’a pas réalisé une enquête complète qui critiquait un candidat à la présidence, Gustavo Petro. La critique a visé un ancien fonctionnaire, Gustavo Asprilla, sous l’aile de Petro, qui visait à le dénigrer comme étant quelqu’un qui possédait des conflits d’intérêts. Les contradictions et le manque de rigueur ont été mis en évidence facilement par son fils, et conseiller de la mairie de Bogotá, Inti Asprilla quand celui-ci réalisa une enquête prouvant l’erreur des journalistes de l’émission132.

D’un autre côté, il existe des éditions qui visent à dénigrer un groupe social ou faire de la propagande anticommuniste et leur rôle social se fait vraiment critiquer. En fait, on peut trouver un portail semblable à Breitbart News133, Los Irreverentes, dans sa version colombienne et qui sont une source médiatique appuyée par certains politiciens d’extrême droite. Le fondateur du site, Ernesto Yamhure, a même reconnu dans l’émission Semana en vivo, s’être inspiré de Breitbart. Même s’il ne s’agit pas d’une recherche sur les discours médiatiques, j’aborderai dans le chapitre V les influences et le rôle central qu’ont joué les médias dans l’ouragan que la loi de Justice et de paix a produit. Il s’agit d’un enjeu qui se produit actuellement, et à la fois dans l’espace social et informatique. Aujourd’hui, l’espace virtuel est un réseau social qui

131Un quotidien de la Colombie.

132La vidéo de La Pulla, où elle critique le candidat Petro et nomme son ancien secrétaire, Guillermo

Asprilla : https://www.youtube.com/watch?v=szbjBDWeALQ et la vidéo de réponse venant du fils d’Asprilla, Inti Asprilla : https://www.youtube.com/watch?v=NTyhUP4qSi8

133Journal électronique de la « Alt-Right » états-unienne où l’on peut lire des figures de l’extrême

permet une meilleure circulation de l’information et, paradoxalement, une saturation de celle-ci. Enfin, ces dispositifs doivent être pris en compte afin d’éviter certains détours pouvant empêcher une analyse approfondie. De plus, ce sont des sources d’information qui expliquent une diversité de discours, tout en rendant possible la compréhension de certains phénomènes, où ce qui importe n’est pas seulement la « Vérité », mais plutôt les régimes de vérités au sein de ces discours134.

134C’est ici que Michel Foucault s’est intéressé à cette série de discours qui produisent une vérité. Il ne

cherchait pas la figure parfaite ou matérielle de la vérité, mais comment est produit un discours considéré alors comme vrai, comme scientifique ou qui est institué d’autorité (Foucault 1971). Un discours qui matérialise ce qu’il affirme « être vrai » à travers de rituels, des preuves et d’examens selon l’institution qui le produit.