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Chapitre 4. Objectifs, hypothèses et méthodologie

4.4. Source de données et population à l’étude

L’étude s’appuie sur les microdonnées de l’Enquête longitudinale auprès des immigrants du Canada (ELIC), effectuée conjointement par Statistique Canada et Citoyenneté et immigration Canada20 entre 2001 et 2005. Les données

administratives de Citoyenneté et immigration Canada constituent la base de sondage de l’ELIC. La population cible comprend tous les immigrants arrivés au Canada entre le 1er octobre 2000 et le 30 septembre 2001, âgés de 15 ans ou plus

au moment de l’arrivée et qui ont présenté leur demande à l’extérieur du Canada, soit 165 012 personnes.

De type longitudinal, l’ELIC présente l’avantage de suivre les mêmes immigrants pendant une période de quatre ans. L’enquête consiste en trois vagues (ou cycles). La première a lieu six mois après l’arrivée, tandis que les deux autres ont lieu respectivement deux et quatre ans par la suite. La population d’intérêt de l’ELIC comprend alors les immigrants de la population cible qui habitaient toujours au Canada au moment de l’enquête de la dernière vague, soit la vague 3. Cette population comprend un effectif de 7716 immigrants21. Ainsi, en raison de la nature

longitudinale de l’enquête, le plan de l’échantillonnage de l’ELIC a été conçu de sorte que seuls les répondants de la première vague furent retracés pour la deuxième vague et seuls les répondants de la deuxième vague furent retracés pour la troisième vague. Dans cette perspective, l’échantillon de la vague 3 est un sous- ensemble de l’échantillon de la vague 2, qui est lui-même un sous-ensemble de l’échantillon de la vague 1.

20 Aujourd’hui Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC).

21 Répartis comme suit : 4509 dans la catégorie « économique », 1993 dans la catégorie « famille »,

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Au regard de nos objectifs de recherche, l’enquête présente plusieurs avantages. Tout d’abord, notons le fait que ce sont les mêmes immigrants qui ont été suivis pendant une période de quatre ans, ce qui offre une perspective plus pertinente pour comparer les immigrants par rapport à des échantillons différents de la même population qui seraient prélevés dans le temps. Pour nous, un autre avantage de l’ELIC réside dans le fait qu’elle fournit des renseignements sur la situation des immigrants avant et après leur arrivée au Canada. Ainsi, pour chaque immigrant, outre son lieu de naissance, l’enquête permet de retracer jusqu’à cinq expériences migratoires pré-Canada, c’est-à-dire cinq pays dans lesquels il aurait vécu six mois ou plus avant l’arrivée au Canada. Cette information servira à opérationnaliser notre variable indépendante principale, à savoir le parcours migratoire international pré- Canada. Un dernier avantage de l’ELIC repose sur le fait que l’enquête fournit de nombreuses informations sur les emplois occupés par les immigrants au moment de chaque vague, permettant ainsi d’appréhender plusieurs dimensions de la qualité de l’emploi comme le salaire, la surqualification, la durée des emplois (stabilité), les heures de travail, le genre de compétence, le niveau de qualification des emplois, la satisfaction ou encore la syndicalisation.

Par ailleurs, les avantages que nous venons d’énumérer ne doivent masquer certaines limites de l’enquête. D’abord, du point de vue de la qualité de l’emploi, le manque d’informations sur les conditions physiques et psychologiques du travail, les horaires de travail ou les avantages non monétaires liés à l’emploi occupé au moment de chaque vague pourrait constituer une limite pour étudier la qualité de l’emploi de manière plus détaillée. Ensuite, on peut se questionner sur la pertinence de ces données au regard de la situation des immigrants qui prévaut actuellement sur le marché du travail. Sur ce point, on peut mentionner que depuis les années 90, les grands axes de la politique canadienne de l’immigration n’ont pas beaucoup changé, du moins en ce qui concerne les critères de sélection des immigrants économiques (Boyd, 2000 ; Ferrer et al., 2014 ; Hou et Picot, 2016). Du point de vue des régions d’origine des immigrants par exemple, il est établi que l’Asie continue toujours à fournir le plus grand contingent d’immigrants au Canada durant les trente

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dernières années. Toutefois, il faut admettre sur le marché du travail que la situation des immigrants peut varier selon les cycles économiques. À titre d’exemple, comme l’indiquent Baldwin et Willox (2016) dans l’ensemble du Canada, le rendement de la productivité dans le secteur des entreprises (fabrication, finance, assurances et services immobiliers), ainsi que dans certaines activités primaires (extraction minière, extraction de pétrole et de gaz), a diminué de plus du quart dans les années 2000 (2000 à 2014) par rapport au rythme établi dans les années 90 (1990 à 1999). De la même manière, la part des emplois selon le secteur d’activité peut évoluer. Selon Statistique Canada (2007), depuis 1990, le secteur du commerce est l’employeur le plus important au Canada, suivi par le secteur de la fabrication alors que le secteur des soins de santé et de l’assistance sociale a augmenté de 3,4 % en 2007. En somme, ces aspects relevant du contexte économique peuvent faire en sorte que la situation qui prévalait chez les immigrants au début des années 2000 aurait certainement évolué par rapport à la situation actuelle. Ces aspects comprennent par exemple les taux d’emploi, les revenus d’emploi, le niveau de qualification des emplois et bien d’autres indicateurs de la qualité de l’emploi retenus dans le cadre de cette étude. On peut néanmoins considérer les changements qui se seraient produits comme minimes si on prend la situation dans son ensemble. Par exemple, le taux de chômage des immigrants du principal groupe d’âge actif (25 à 54 ans) a légèrement diminué de 0,5 point de pourcentage en 2017 par rapport à 2006 et le taux d’emploi a augmenté de seulement 1,3 point de pourcentage au cours de cette période (Yassaad et Fields, 2018). À la lumière de leurs résultats, on s’aperçoit chez les immigrants que les variations ou les écarts les plus importants s’observent davantage en fonction de la durée d’établissement des immigrants (reçus moins de 5 ans auparavant, 5 à 10 ans auparavant ou plus de 10 ans auparavant), ou de la province de résidence que les périodes elles-mêmes.

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4.4.2. Population à l’étude

Eu égard à l’objectif principal de cette étude, qui consiste à étudier la qualité de l’emploi, nous avons sélectionné notre population à l’étude en tenant compte des deux critères suivants :

– Avoir été sélectionné comme travailleur qualifié, demandeur principal. Nous avons exclu à la fois les autres catégories d’immigration (famille et réfugiés par exemple), mais aussi les investisseurs, les entrepreneurs et les travailleurs indépendants de la catégorie économique ;

– Avoir occupé un emploi rémunéré à au moins une des deux vagues de

l’enquête que sont la vague 2 et la vague 3. Ainsi, sont exclus de notre

échantillon ceux qui n’ont jamais occupé un emploi au cours de cette période ou qui ont travaillé dans des emplois non rémunérés.

Deux raisons ont motivé la sélection de cet échantillon. Concernant la catégorie d’immigration, nous savons par la littérature que le statut d’admission, c’est-à-dire le fait que l’immigrant soit demandeur principal ou personne à charge, a des effets sur certains aspects du marché du travail tels que le revenu et certaines caractéristiques des emplois. Les demandeurs principaux demeurent souvent avantagés sur ces aspects (Demsey, 2005; Kustec et Xue, 2009). Ainsi, pour écarter l’effet du statut d’admission sur la qualité de l’emploi, il nous a semblé pertinent de ne tenir compte que des immigrants ayant le même statut d’admission, à savoir des demandeurs principaux de la catégorie économique. À cela, il faut ajouter le fait que les critères de sélection s’appliquent avant tout aux demandeurs principaux, qui sont donc sélectionnés pour leurs compétences et leur niveau de qualification, et ayant, en principe, immigré en vue d’occuper un emploi. En ce qui concerne les investisseurs et les travailleurs autonomes, bien qu’ils relèvent aussi de la composante économique, nous considérons que leurs activités ne se prêtent pas à une étude sur la qualité de l’emploi au même titre que les salariés censés être en relation avec un employeur. Cela dit, il faut reconnaitre qu’à titre de consultant, un travailleur

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autonome peut être en relation avec un employeur. Cependant, certains indicateurs de la qualité de l’emploi que nous envisageons prendre en considération dans le cadre de cette étude, comme l’appartenance syndicale, les congés payés, le bénéfice d’une formation en cours d’emploi, etc., ne peuvent s’appliquer dans ce cas. Plusieurs travaux sur la qualité de l’emploi intègrent les travailleurs indépendants dans leurs échantillons, mais les traitent séparément des salariés à des fins de comparaison en termes de niveau de qualité de l’emploi (Farné et Vergara, 2015; Huneeus et al., 2015). Notre travail n’ayant pas cette ambition, nous limitons notre échantillon seulement aux immigrants qui occupent un emploi salarié.