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La solidarité musulmane

ambitions d’envergure et changements ratés

Paragraphe 1 la voie altruiste

A. Les principes religieux dans une société multiconfessionnelle

2. La solidarité musulmane

La Religion, dans sa véritable signification générale, étudie les relations de l’homme avec son Dieu, avec lui-même et avec son frère l’homme. C’est pourquoi la Religion islamique s’est occupée des fondements mêmes de la vie sociale et de ses problèmes pratiques se rapportant à la fois aux mœurs et aux relations. Elle n’est donc pas une religion théorique traitant uniquement de la doctrine et du culte, mais aussi un ordre social complet s’étendant à la fois aux règles morales et à la législation.

Ainsi le caractère social est un des faits saillants de l’Islam, et il se manifeste particulièrement dans trois principes fondamentaux, qui sont: la limitation des droits individuels par les droits de la société et par le Bien Public ; la connexion des règles de la justice avec les règles des mœurs et de la bienfaisance ; la réalisation de la solidarité sociale et la justice sociale261.

Premier principe : la limitation des droits individuels par les droits de la société et par le Bien Public.

L’Islam a beaucoup insisté sur la dignité de l’homme et a reconnu les droits fondamentaux de l’homme à la liberté et à l’égalité. Mais il n’a pas laissé ces droits absolument dégagés de toute restriction ; bien au contraire, il les a tous considérés sous leur aspect social et en a limité l’usage par les droits supérieurs de la Société. Le but des droits est le bien et le bonheur des hommes, ce qui ne peut se réaliser qu’en fonction du bien de l’ensemble.

260 Ibid. p. 15.

261 Sauf mention contraire, nous nous appuyons dans cette section sur : Soubhi Mahmassani, « l’action sociale dans le Coran », dans : Semaines sociales du Liban, 1955, pp. 197-206, et Saad Habib, « Al takafol wal daman al ijtima’i fil islam : La solidarité et l’assurance sociale dans l’Islam », Série : Koutob Islamiya, Cairo : Al majless al a’la lil chou’oun al silamiya, 1963.

Cette vérité se trouve établie et illustrée par les exemples et les dispositions suivantes:

• L’Islam a proclamé la nécessité de l’entraide et de la fraternité entre tous les hommes, en vue de l’institution d’une universelle fraternité humaine et d’une permanente paix mondiale.

• La loi islamique, bien qu’elle protège l’homme dans l’exercice de ses droits, interdit cependant l’abus de ces droits, c’est-à-dire qu’elle en interdit l’exercice lorsqu’il est arbitraire ou vise à nuire à autrui ou lorsqu’il en doit résulter un grand mal. Or ce principe est aujourd’hui reconnu par la plupart des législations modernes ; il trouve sa justification en ce que les droits sont fondés sur des buts sociaux et que par suite, leur exercice ne saurait être en contradiction avec ces buts.

• La Loi Islamique a confirmé le principe de libre propriété et reconnu l’inviolabilité de la propriété individuelle, conformément à la Défense du Coran262 : « Ne mangez pas injustement les biens les uns

des autres »263. De ce verset coranique découlent ces deux règles absolues de la loi islamique: « Personne

n’a le droit de s’approprier le bien d’autrui sans motif légitime », et « Personne n’a le droit d’user de la propriété d’autrui sans la permission de ce dernier ».

Cependant cette propriété individuelle est soumise à des restrictions d’ordre social ; parmi ces dernières, on note le fait que les juristes de l’Islam ont autorisé la levée de l’impôt pour les besoins et les nécessités de l’État et ont permis à l’État d’opérer des expropriations sur les biens des particuliers dans l’intérêt du Bien Public.

• La Loi Islamique a reconnu la liberté de contracter. Néanmoins les juristes de l’Islam ont condamné unanimement la monopolisation et quelques-uns ont reconnu à l’État le droit d’imposer des tarifs aux produits nécessaires d’usage courant. D’une manière générale ces exemples et d’autres semblables nous permettent de constater que l’Islam, bien qu’il ait reconnu les droits individuels de l’homme, les a cependant limités par les droits de la Société et par les besoins du Bien Public, conformément à la règle générale de la jurisprudence islamique qui dispose : « Un mal d’ordre particulier doit être toléré pour empêcher un mal d’ordre public».

262 Pour les musulmans le Coran a été révélé par Dieu ce qui en fait la première source de législation dans l’islam. Les hadiths, l’ensemble des dires et faits du Prophète, est la seconde source de législation. La sunna (« tradition ») a été rassemblée et classée par les savants sunnites dans plusieurs œuvres comme Mohammed al-Bukhari.

La troisième source de législation est l’unanimité, al ijmaa. Cela en se référant à une citation de Mahomet qui dit que les musulmans ne font pas l’unanimité sur quelque chose de faux.

La quatrième source est l’analogie, al-qiyâs, qui permet de tirer le jugement d’une chose pour laquelle il n’y a pas de législation à partir du jugement d’une chose analogue.

Voir : François-Paul Blanc, Le droit musulman, 2ème éd., Paris, Dalloz, 2007. 263 Coran, An-Nissaa : 29.

Deuxième principe: la connexion des règles de la Justice avec les règles des mœurs et de la bienfaisance.

Le Coran déclare « Dieu commande la justice et la bienfaisance». Ce verset sacré est d’une très grande importance, car il met en évidence la connexion des règles de la justice dans l’Islam avec les enseignements spirituels de la Religion et avec les règles de la morale. Sans doute beaucoup de philosophes de la jurisprudence en Occident ont étudié la Loi révélée, le Droit naturel et les principes de la morale en tant que fondements de la législation positive. Néanmoins chez eux la distinction est demeurée manifeste entre les règles de la loi positive et les règles de la religion et de la morale. C’est pourquoi les législations occidentales ont conservé leur caractère purement civil264.

Il n’en est pas de même dans la loi islamique qui a unifié toutes ces règles de sorte que leur définition est devenue vaste et comprend à la fois les préceptes du culte et des relations humaines. Ainsi la religion, les mœurs et la législation, se sont trouvées réunies dans une même science qui est la science du «Fikh» ou jurisprudence islamique, et toutes ont des origines communes et des principes communs.

La conséquence en est une influence profonde des dispositions de la religion sur les dispositions concernant les relations humaines. C’est ce qu’il nous faut illustrer à présent par quelques exemples:

• La loi islamique défend la fraude dans les relations humaines ; car il est dit dans la tradition des paroles du Prophète : « Celui qui nous trompe n’est pas des nôtres ». La loi islamique défend donc la fraude par action ou par parole et la dissimulation ; elle considère la tromperie comme une cause d’annulation des contrats. De même elle interdit le commerce illégitime ou malhonnête en raison de la déviation qu’elle implique de la concurrence normale.

• La loi islamique a défendu l’exploitation de l’homme par l’homme. Elle a ainsi interdit d’une manière absolue le prêt à usure et a considéré le dommage excessif comme une cause d’annulation des contrats.

• La loi islamique inclut dans la justice. Que l’homme ne nuise pas à l’homme ; elle considère le conseil, la sincérité, la fidélité à l’engagement, la restitution d’un dépôt comme des obligations s’imposant dans les relations humaines. Le Coran proclame en effet : « O les croyants ! Remplissez

264 Mahmassani, op. cit, p. 199.

fidèlement vos engagements »265; «Et remplissez l’engagement, car on sera interrogé au sujet des

engagements. »266; « Certes, Allah vous commande de rendre les dépôts à leurs ayants droit »267.

• La loi islamique considère la bienfaisance, l’exemption, l’octroi de délai et autres actes semblables comme des corollaires ou des suites de la réclamation de ce qui est dû. Le Coran a affirmé ce devoir à propos de la manière de traiter le débiteur, lorsqu’il a dit : « A celui qui est dans la gêne, accordez un sursis jusqu’à ce qu’il soit dans l’aisance.»268. Dans ce sens nous avons dans le Hadith « Dieu fait

miséricorde à l’homme conciliant, dans la vente, conciliant dans l’achat, conciliant dans le règlement des affaires, conciliant dans le recours au juge»; sur quoi les savants de la jurisprudence islamique ont fondé, pour le juge, le droit d’accorder au débiteur dans la gêne des délais pour s’acquitter de sa dette, ainsi que d’autres règles.

• L’Islam ordonne la bienfaisance et les bonnes œuvres, dans de nombreux versets du Coran et de nombreuses paroles du Prophète. En voici, pris dans le Coran:

- «Si vous donnez ouvertement vos aumônes, c’est bien ; c’est mieux encore, pour vous, si vous êtes discrets avec elles et vous les donniez aux indigents. Dieu effacera une partie de vos méfaits. Dieu est Parfaitement Connaisseur de ce que vous faites.»269

- «Ils t’interrogent : «Qu’est-ce qu’on doit dépenser ?» - Dis : «Ce que vous dépensez de bien devrait être pour les pères et mère, les proches, les orphelins, les pauvres et les voyageurs indigents. Et tout ce que vous faites de bien, vraiment Dieu le sait». »270

- «Adorez Dieu et ne Lui donnez aucun associé. Agissez avec bonté envers (vos) père et mère, les proches, les orphelins, les pauvres, le proche voisin, le voisin lointain, le collègue et le voyageur, et les esclaves en votre possession, car Dieu n’aime pas, en vérité, le présomptueux, l’arrogant,»271

- «Les Sadaqats272 ne sont destinés que pour les pauvres, les indigents, ceux qui travaillent à les

percevoir, ceux dont les cœurs sont à gagner (à l’Islam), l’affranchissement des jougs, ceux qui sont

265 Coran, 5:1. 266 Coran, 17:34. 267 Coran, 4:58. 268 Coran, 2:280. 269 Coran, 2:271. 270 Coran, 2:215. 271 Coran, 4:36.

lourdement endettés, dans le sentier de Dieu, et pour le voyageur (en détresse). C’est un décret de Dieu ! Et Dieu est Omniscient et Sage.»273

- «Et donne au proche parent ce qui lui est dû ainsi qu’au pauvre et au voyageur (en détresse). Et ne gaspille pas indûment»274

- «Et que les détenteurs de richesse et d’aisance parmi vous, ne jurent pas de ne plus faire des dons aux proches, aux pauvres, et à ceux qui émigrent dans le sentier de Dieu. Qu’ils pardonnent et absolvent. N’aimez-vous pas que Dieu vous pardonne ? Et Dieu est Pardonneur et Miséricordieux !»275

- «Donne donc au proche parent son dû, ainsi qu’au pauvre, et au voyageur en détresse. Cela est meilleur pour ceux qui recherchent la face de Dieu (Sa satisfaction) ; et ce sont eux qui réussissent.»276

- «15. Quant à l’homme, lorsque son Seigneur l’éprouve en l’honorant et en le comblant de bienfaits, il dit : "Mon Seigneur m’a honoré". 16. Mais par contre, quand Il l’éprouve en lui restreignant sa subsistance, il dit : "Mon Seigneur m’a avili". 17. Mais non ! C’est vous plutôt, qui n’êtes pas généreux envers les orphelins ; 18. Qui ne vous incitez pas mutuellement à nourrir le pauvre »277

Et quelques exemples du Hadith:

- «Le Prophète a dit: "Tout musulman est tenu de faire l’aumône". - "Mais, objecta-t-on, et s’il ne trouve pas (d’argent) pour la faire ?". - "Qu’il travaille de ses mains, répondit le Prophète, pour gagner sa vie et faire l’aumône". - "Mais s’il ne le peut pas ?". - "Qu’il prête une main secourable à un besogneux victime d’une affliction". - "Et s’il ne le peut pas non plus ?". - "Alors qu’il préconise le bien". - "Qu’en est-il s’il ne le fait pas ?". - "Qu’il s’abstienne de faire le mal, ce qui lui sera compté pour aumône"»278. 273 Coran, 9:60. 274 Coran, 17:26. 275 Coran, 24:22. 276 Coran, 30:38. 277 Coran, 89.

278 Al Imam Abi Al Hussayn Muslim Ibn Al-Hajjaj Al Kachiri Al-Nisabouri, “Sahih Mouslem: L’authentic de Muslim”, 1ère ed, Beyrouth: Nobilis, 2008, N. 1008, p. 242.

- «Au matin de chaque jour, deux anges descendent du ciel. L’un dit: "O Seigneur ! Compense celui qui fait l’aumône". - "O Seigneur ! Inflige une perte à celui qui s’abstient de faire l’aumône", dit l’autre»279.

- «Toute aumône faite d’un argent licite -et Allah n’accepte que le licite-, tombera dans la main droite du Miséricordieux. Même si elle était une datte, celle-ci augmenterait au creux de la main du Miséricordieux jusqu’à ce qu’elle devienne plus grande encore qu’une montagne»280.

- «Dépense en aumône, fais des dons et sois charitable. Ne lésine pas pour que Allah ne te rende pas impécunieuse»281.

- «O femmes musulmanes ! Qu’aucune de vous ne dédaigne de faire don à sa voisine, fût-ce d’un sabot de mouton»282.

- «Sept personnes seront à l’ombre d’Allah le Jour où il n’y aura plus d’ombre que la Sienne: le souverain équitable ; le jeune homme qui a éteint l’ardeur de sa jeunesse dans l’adoration d’Allah ; l’homme dont le cœur est attaché aux mosquées (qui tient à s’y rendre et à y attendre la prière) ; deux hommes qui, s’aimant en Allah, se réunissent pour Allah et se séparent selon Son décret (par la mort) ; l’homme qui refuse l’invitation à la fornication offerte par une belle femme de haute naissance, en disant: "Je crains Allah"; l’homme qui fait l’aumône en secret au point que sa main droite ignore ce que vient de dépenser sa main gauche ; et l’homme, en retraite spirituelle, qui invoque Allah et a, par attendrissement, les larmes aux yeux»283.

• La loi islamique reconnaît la légitimité du wakf de bienfaisance ; c’est une institution ayant pour but de bloquer un fonds à perpétuité pour en utiliser la rente à quelque œuvre de piété ou de bienfaisance. Cette institution se fonde sur cette parole du Prophète dans le Hadith « Lorsque meurt l’homme, son action cesse, sauf en trois choses : aumône courante, science dont on puisse se servir, fils bon qui prie pour lui ». L’aumône courante passe avant toutes les bonnes œuvres284.

279 Idem, N. 1010, p.242. 280 Idem, N. 1014, p.243. 281 Idem, N. 1029, p.247. 282 Idem, N. 1030, p.247. 283 Idem, N. 1031, p.247.

284 Sur la propriété dans l’Islam voir : Abdul Salam Al-Abbady, « Al milkiya fi al-chariaa al islamiya » La propriété dans l’Islam, Dar Fourkan, 2000, 1418 pages.

• La loi islamique ne se contente pas d’ordonner la bienfaisance ; beaucoup de ses dispositions en facilitent l’accomplissement. Ainsi en est-il par exemple, du legs qu’elle autorise dans des conditions et des limites déterminées. Bien que le legs soit une libéralité, il exige, selon la loi islamique, une capacité spéciale, nécessaire pour la conclusion des contrats de donation. Le legs de bienfaisance est permis, dans le système chafiite, si le légataire est un mineur doué de discernement ; dans le système d’idonéité hanéfite il est permis au légataire ignorant, objet d’un interdit.

Tous ces exemples et d’autres analogues prouvent l’intervention de la bienfaisance dans les principes de justice, et montrent le caractère social que présente l’Islam sous cet aspect.

Troisième principe: la garantie de la solidarité sociale et de la justice sociale par le moyen du

zakât ou don d’une part de son bien aux pauvres, par le moyen d’autres réglementations légales

On sait, d’abord, que le devoir de pension alimentaire en Islam se fonde sur le lien de mariage ou de parenté. Mais ce devoir a pour but et fondement, d’assurer l’entraide entre riches et pauvres d’une même famille, et donc d’assurer une solidarité familiale solide et certaine.

De même les savants de la jurisprudence islamique ont disposé que si un vieillard malade ou impotent n’a pas d’ascendance, de descendance ou de parenté à qui incombe le devoir de la pension alimentaire, son entretien doit être à la charge de l’État et du Trésor. Cette obligation vient contrebalancer l’avantage que recueille l’État lorsqu’il prend l’héritage de celui qui n’a pas d’héritier.

De plus, la loi islamique établit le devoir du zakât285 ou don d’une part de son bien aux pauvres, comme

un des cinq devoirs fondamentaux de l’Islam. Au début, le zakât était Une aumône. Il a été organisé,

loi islamique, Al Maktaba Al tawfikiya, 1977, 240 pages.

- Fouad Abdul Meneem Ahmad, Les droits de propriété entre le droit islamique et le droit statutaire, Academy arabe Nayef, Riyad, 2001, 78 pages.

285 Le premier sens du mot arabe zakât est purification. En effet, la zakât est le troisième pilier de l’Islam et est une manière, dans sa signification première, de purifier les biens légaux que l’on a acquis.

Le zakât est une obligation pour tous les musulmans qui en ont les moyens. Il convient de rappeler que la Zakât a été mentionnée 32 fois dans le Coran dont 27 fois citée en même temps que la prière, et des dizaines de fois dans le Hadith. Ceci montre la place fondamentale qu’occupe la Zakât dans les prescriptions religieuses du musulman.

La Zakât est un groupement d’impôts obligatoires, dont le musulman est tenu de calculer chaque année lunaire (hégire) ce montant et le donner aux gens les plus pauvres de sa communauté en commençant par sa famille (à l’exception de ceux qui sont à sa charge) et ses voisins, dans le but de:

• Purifier l’âme humaine de l’avarice, de l’avidité et de la convoitise

• Subvenir aux besoins des pauvres et nécessiteux ce qui était un droit dans le cadre de la responsabilité collective prônée par l’islam.

• Rallier le coeur des fidèles

• Instaurer les oeuvres d’utilité publique (écoles, hôpitaux).

ensuite, comme un impôt en faveur des pauvres. C’est une contribution financière frappant le musulman dans quelques-uns de ses biens en des quantités déterminées conformément à des règles établies par la jurisprudence: «Fiqh». Les différents cas de dépense du Zakât en montrent le but et la sagesse. Ils sont indiqués dans le Coran. Le Zakât est divisé en huit parts qui sont réparties à égalité ; ce sont : l’aide aux pauvres, l’assistance aux impotents, l’acquittement des dettes de ceux qui sont dans la gêne, le secours aux étrangers privés de ressources, l’affranchissement des prisonniers ou otages, et des esclaves, le travail à la propagation de l’Islam, la défense de la religion (dépenses de l’armée), le paiement des salaires des percepteurs du zakât.

La plupart des cas de la répartition du zakât visent à faire le bien, à aider les pauvres, les indigents et ceux qui sont dans la gêne. Le zakât est une contribution obligatoire imposée aux riches en faveur des pauvres ; il constitue donc une institution pratique de solidarité sociale. De fait l’État islamique levait le

zakât comme un impôt général et le distribuait dans le cadre de ses dépenses légales. Il en était ainsi du

temps du Prophète et de ses califes (successeurs), Abi Bakr et Omar. Cependant depuis le temps du troisième calife, Osman ben Affan, le soin du zakât a été laissé aux contribuables eux-mêmes et à leur zèle religieux ; à eux de prélever le zakât sur leurs biens et de le distribuer. Mais ce relâchement dans la perception n’en modifie pas moins le caractère fondamental de contribution obligatoire en faveur des pauvres286.

On voit que le zakât, tout en étant une prescription de dévotion religieuse, est en même temps un devoir imposé par la loi islamique et un droit de l’être humain. Le verset coranique suivant en témoigne «Dans leurs biens mêmes se trouve un droit pour celui qui sollicite et pour celui qui est dans la privation». Le zakât n’est donc pas un acte libre de bienfaisance, mais c’est, pour les pauvres, un droit auquel correspond un devoir pour les riches, ayant sa source dans la «chari’a» (loi islamique). Dans