ambitions d’envergure et changements ratés
Paragraphe 1 L’état de santé des Libanais
La géographie des territoires libanaise, ajoutée aux habitudes et mœurs des Libanais ont, entre autres, doté le Liban de certaines caractéristiques dont on présente les plus importants ci-dessous.
A. Les grands traits de la morbidité
Les territoires libanais jouissaient toujours, en dehors des périodes d’épidémies, d’un niveau sanitaire généralement appréciable, dû à sa nature et climat, ajouté à la mode de vie de ses habitants qui respectaient, intentionnellement ou pas, certaines conditions de salubrité et d’hygiène dans leurs habitats.
Toutefois, la géographie de ces territoires, nécessairement accompagnée par des caractéristiques climatiques propres à chaque région, a rendu vulnérable aux maladies des régions froides les villages de la montagne, et aux maladies des régions chaudes les villes côtières. En plus, compte tenu des formes des montagnes et la diversité des vallées et pentes, ajouté parfois à l’imperméabilité des roches, Tout ceci a conduit à la formation de marécages dans certains endroits qui sont généralement accompagnés par des maladies, notamment le paludisme 126.
En 1897, le docteur Benoît Boyer alors professeur à la faculté française de médecine à Beyrouth a dressé une classification des maladies répandues à Beyrouth et ses environs immédiats (dont la
Mutassarifiya et la plupart des territoires libanais) entre 1885 et 1896 par ordre de fréquence127, dont on
note ci-dessous:
126 Ismail Bek Haki, Liban études scientifiques et sociales, Dar Lahd Khater, Beyrouth, 1993, p. 263. 127 Benoit Boyer, Conditions hygiéniques actuelles de Beyrouth et de ses environs immédiats, Paris, 1897, pp. 98-99.
Extrêmement fréquentes Peu fréquentes Maladie Nb des malades Maladie Nb. des malades Paludisme 2937 Endométrite128 98 Conjonctivite granuleuse 1276 Néphrite129 chronique 96
Embarras gastrique 1145 Lymphangite130 93
Tuberculose 876 Cataracte131 92
Bronchite aiguë 858 Aménorrhée132 85
Bronchite chronique 687 Pleurésie 133 85 Dyspepsie 664 Gale 84 Névralgie 652 Grippe 82 Rhumatisme 640 Leucorrhée134 79 Syphilis 632 Phlegmon 79 Lumbago 77
128L'endométrite est une infection de l'endomètre. Elle fait le plus souvent suite à l'accouchement, mais elle peut aussi être causée
par un geste endo-utérin (interruption volontaire de grossesse).
129La néphrite est une inflammation du rein.
130La lymphangite est une inflammation des vaisseaux lymphatiques.
131La cataracte est l'opacification partielle ou totale du cristallin, lentille convergente située à l'intérieur de l'œil.
132L'aménorrhée est l'absence des règles ou menstruation. Le plus souvent, la grossesse en est la cause. Dans les autres cas,
l’aménorrhée peut être l'unique symptôme d'une pathologie ou au contraire, un parmi de nombreux autres.
133La pleurésie est une inflammation aiguë ou chronique de la plèvre, avec ou sans épanchement. 134Une leucorrhée est un écoulement non sanglant provenant de l'appareil génital féminin.
Très fréquentes Prolapsus utérin 75
Maladie Nb, des
malades Stérilité 70
Diarrhée 466 Antéflexion 70
Hystérie 417 Fracture simple 69
Tænia 315 Épilepsie 67
Abcès chaud 312 Pharyngite
granuleuse 66
Métrite du col 249 Hydrocèle vaginale 66
Impétigo135 211 Hernie136 65
Dysenterie 205 Rhinite chronique 64
Otite137 moyenne 64
Fréquentes Ménorragie 63
Maladie Nb. des
malades Otite externe 61
Amygdalite aiguë 184 Fibrome utérin138 60
Eczéma 178 Alcoolisme 58
Anémie 175 Hémorroïdes 57
Cancer 173 Érysipèle 57
Gastralgie 164 Salpingite 56
135L'impétigo est une infection cutanée superficielle bactérienne.
136Une hernie désigne en médecine le déplacement de tout ou partie d'un organe hors de la cavité qui le contient normalement,
par un passage naturel.
137Les otites sont des inflammations de peau ou de muqueuse de l'oreille.
138Un léiomyome utérin (également nommé fibrome ou fibromyome utérin) est un myome (tumeur bénigne de tissu musculaire)
Blennorragie139 163 Amygdalite
chronique 55
Cardiopathie 161 Arthrite aiguë 54
Rétroversion140 159 Scrofule141 53
Conjonctive aiguë 158 Blépharites142 51
Dysménorrhée 157 Neurasthénie143 53
Tumeur bénigne 141 Fièvre typhoïde 50
Dengue 133 Plaies diverses 129 Coqueluche 123 Contusion 119 Métrite parenchymateuse 114 Constipation 113 Lombric 106 Antéversion144 104
Tableau 3: Classification des maladies par ordre de fréquences entre 1885 et 1896.
139La blennorragie ou gonorrhée est une infection sexuellement transmissible. 140Rétroversion est l’Inclinaison vers l’arrière de l'axe vertical d'un organe.
141Scrofule ou Écrouelles est le nom désuet d’une maladie d’origine tuberculeuse provoquant des fistulespurulentes localisées sur
les ganglions lymphatiques du cou.
142Une blépharite est une inflammation du revêtement cutané des paupières.
143La neurasthénie est un terme psychopathologique utilisé pour désigner une condition dont les symptômes incluent la fatigue,
l'anxiété, les maux de tête, la névralgie et la déprime.
Fig. 3: Représentation graphique des maladies par catégories ou par appareils
B. Des disparités géographiques de santé
Plusieurs facteurs ont contribué à cette disparité, précisément entre la côte et la montagne. Bien que les villes côtières étaient plus avancées et ouvertes, et elles comprenaient parfois des médecins et établissements sanitaires qui fiaient défaut dans les régions de la montagne, les conditions sanitaires restaient meilleures dans ces dernières145. On peut attribuer cette disparité aux raisons suivantes:
- Les conditions climatiques favorables à la montagne.
- Le surpeuplement des villes côtières.
- Les logements et les habitudes et comportements individuels, qui variaient entre les villes côtières et celles de la montagne.
145 C’est ce qu’on a pu conclure à partir de: • Ismail Bek Haki, Op. Cit.
• Riyad Ghannam, Les districts du Mont-Liban au XIXe siècle (Moukataat Jabal Loubnan fi al-Karn al-Tasee achar), Bissam, Beyrouth, 1 edition, 2000. 468 pages.
- Les villes côtières sont considérées comme les portes de l’Asie, ce qui engendre un mouvement continu des voyageurs avec les risques sanitaires qui peuvent présenter.
- La nature et les conditions du travail propre à chaque région.
Tout cela a permis dans les régions de la montagne un environnement plus sain et a influencé positivement l’état sanitaire général de la population poussant l’espérance de vie jusqu’à quatre-vingt voir quatre-vingt-dix ans146.