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Le cas d’une société d’intérim formant aux titres ses personnels missionnés à la place de l’entreprise‐cliente 

Dans le document Le titre et le marché (Page 58-60)

Agir  en  fonction  de  la  conjoncture  du  marché  du  travail  est  au  cœur  des  activités  de  la  société  Intérimust,  appartenant  à  un  groupe  international  de  l’intérim,  et  de  son  organisme  Intérimust  Formation, créé à la fin des années quatre‐vingt, et constitué d’un réseau assez dense de centres de  formation en France.  

 

C’est  essentiellement  à  partir  d’une  demande  interne  qu’il  est  décidé  de  créer  ce  centre  de  formation. Il répond à l’exigence de couvrir les besoins du groupe en formation de ses intérimaires  mis  à  disposition  des  entreprises.  A  l’époque,  les  besoins  internes  suivent  la  demande  des  clients.  Celle‐ci porte massivement sur les emplois tertiaires, également en FLE (français langue étrangère).  Les  premiers  sites  de  formation  d’Intérimust  sont  donc  nettement  orientés  vers  la  bureautique.  Le  personnel des années quatre‐vingt‐dix n’y est pas obligatoirement formé durant son cursus scolaire,  encore moins aux logiciels qui ont cours au sein des grandes entreprises à l’époque (Mac, Windows  95, maitrise du multi plan etc.). Pour être délégués auprès de celles‐ci, les intérimaires doivent suivre  d’abord une mise à niveau, et passer par le centre pour une formation courte de quelques jours afin  de se qualifier dans le domaine informatique.     Cette dimension bureautique est fondatrice de l’activité du centre de formation. Elle demeure une  spécialité privilégiée même si au cours des années suivantes la demande se diversifie d’une part en  s’ouvrant  à  des  clients  externes  au  groupe  et  d’autre  part  en  répondant  à  de  nouveaux  besoins,  comme les formations à la prévention en raison des nouvelles obligations découlant de la législation.  Un  responsable  formation  résume  la  philosophie  de  cette  expansion  :  « nous  sommes  davantage 

dans  une  culture  d’entreprise  qu’une  culture  institutionnelle,  notre  croissance  ne  part  pas  d’un  positionnement sur les appels d’offre des prescripteurs comme les Conseils régionaux comme d’autres  organismes de formation ; le développement de nos formations par le titre correspond à une stratégie  locale, et puis il fallait tirer profit de notre outil de formation ‐ nous avons de très belles plateformes ‐  en le rentabilisant, en ouvrant à d’autres clients que nous‐mêmes ».    Sous l’effet de cette diversification, l’offre d’Intérimust Formation aborde désormais un éventail très  large  de  services  :  conseil  en  management  de  la  formation  pour  les  entreprises,  ingénierie  pédagogique, formative et financière, programmes de formation dont ceux préparant à de nombreux  titres  professionnels.  La  variété  des  services  va  de  pair  avec  celle  de  la  clientèle,  qui  peut  être  constituée  des  agences  d’intérim  du  groupe  mais  aussi  (le  plus  souvent)  des  entreprises,  ou  ponctuellement de Pole emploi pour lequel les formations sont organisées en délégation de service.  Pour le groupe, la formation reste une branche rentable. Elle est en outre reconnue être un élément  distinctif  par  rapport  aux  autres  concurrents  du  marché  de  l’intérim,  qui  possèdent  aussi  des  organismes de formation, toutefois plus modestes. L’offre du centre de formation est complétée en  2016  par  l’ouverture  d’une  grande  école  de  l’alternance  destinée  à  former  à  des  métiers  « pénuriques »  (conducteurs  de  train  par  exemple…),  qui  totalise  plus  de  deux  mille  contrats  en  alternance conclus.  

 

Pour les publics jeunes venant principalement des Missions locales et les plus éloignés de l’emploi,  c’est  le  contrat  CIPI  (contrat  d’insertion  professionnelle  intérimaire)  qui  sert  de  support  à  une  formation au titre ‐ pour répondre à une demande nationale et non d’un bassin d’emploi ‐ pour des  métiers  comme  préparateur  de  commande  par  exemple.  Une  fois  la  formation  achevée,  les  personnes  formées  sont  employées  dans  l’entreprise‐cliente,  celle‐ci  s’engageant  à  les  garder  plusieurs  mois.  Pour  faire  évoluer  les  intérimaires  les  plus  faiblement  qualifiés,  par  exemple  un  préparateur de commande vers le métier de cariste, le CQPI (contrat de qualification professionnelle  intérimaire) est employé, et la formation dispensée est dans la plupart des cas qualifiante via le titre  ou par un CQP. La POE (préparation opérationnelle à l’emploi) est destinée aux demandeurs d’emploi  pour lesquels, après une formation certifiée par exemple par un titre de préparateur de commande,  l’entreprise a obligation de proposer un contrat de travail, d’apprentissage, de professionnalisation  etc.     Si, pour ses formations, la société Intérimust a privilégié le titre professionnel, aujourd’hui la logique  d’adaptation  rapide  à  la  demande  la  pousse  à  préférer  les  CQP  estimés  « moins  compliqués  à 

organiser ». La demande actuelle se porte sur les formations qualifiantes de  téléconseillers mais le 

constat  des  responsables‐formation  « est  que  celles  conduisant  au  titre  professionnel  requierent 

beaucoup trop de temps ».  

 

Qu’en  est‐il  de  la  perception  de  l’utilité  des  titres  lors  de  l’embauche  par  les  entreprises‐clientes ?         

« L’entreprise fait la différence non pas entre le diplôme et le titre mais entre la personne qui a une  expérience et celle qui a validé l’expérience par le titre ». Cela confirme les observations antérieures 

soulignant  la  primauté  de  l’expérience  professionnelle  sur  d’autres  critères  de  recrutement,  avec  cependant une appréciation positive de la formalisation des acquis par une certification qualifiante.    

La certification par le titre est présentée comme inscrite dans une politique sociale de l’entreprise,  s’adressant avant tout aux bas niveaux de qualification. Le recours au titre est également cité pour  les  cas  où  l’on  propose  une  montée  en  compétences  à  des  personnes  peu  qualifiées  via  des  formations financées par l’Opca.  

 

Enfin,  les  efforts  actuels  de  la  société  d’intérim  portent  sur  le  développement  de  la  VAE  visant  l’acquisition d’un titre, en tentant de casser les préjugés consistant à penser que seul un diplôme de  l’Education nationale peut valider l’acquisition de compétences. Comme le précise un formateur du 

centre, « pour beaucoup la VAE, c’est diplômant sur un diplôme scolaire ; or un dossier en VAE pour 

un  bac  pro  logistique  par  exemple  est  une  erreur,  c’est  d’une  grande  lourdeur   alors  que  l’on  peut  passer  un  titre  ;  le  titre  est  plus  adapté ;  il  faut  informer  les  entreprises,  tout  passe  par  la  communication qui n’est pas bonne pour les titres et encore moins lorsqu’il s’agit d’un dossier VAE ;  aux  entreprises,  le  titre  ça  leur  parle  pour  la  VAE,  le  diplôme  pas  du  tout ».  Un  autre  élément  de 

complexité pointé par cette même personne a trait à l’évolution du système de financement, et à la  suppression de l’obligation du 0,9 % issu de la loi de 2014, pour laquelle la profession s’interroge sur  son  impact  sur  les  choix  de  certification :  « s’il  y  a  suppression  de  l’obligation  du  0,9 %,  comment 

l’entreprise  va‐t‐elle  financer  le  titre  professionnel ?  Soit  par  le  Fongécif,  soit  dans  le  cadre  de  sa  GPEC,    soit  en  s’adressant  à  l’Opca  qui  lui,  de  son  côté,  a  tendance  à  « vendre »  des  CQP  qui  rentreraient  en  concurrence  avec  les  titres,  qui  eux  ne  sont  pas  une  certification  de  branche...  les  financements et la certification sont devenus de vraies nébuleuses ».   

4.3. Produire une qualification sur mesure  

Troisième cas de figure de la typologie, celui des entreprises qui décident de former elles‐mêmes au  titre pour élaborer des « qualifications sur mesure » à destination de leur marché interne.    

Le  cas  d’un  centre  agréé  des  parcs  de  loisirs  formant  aux  titres  pour  spécialiser  leurs 

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