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L’image du titre relookée par l’apprentissage, l’apprentissage boosté par le titre ? 

Dans le document Le titre et le marché (Page 73-75)

Le cas d’une entreprise de matériaux composites créant un titre de chef de projet d’une valeur de licence professionnelle

5.  LE CFA, nouvel acteur des titres ? 

5.3.  L’image du titre relookée par l’apprentissage, l’apprentissage boosté par le titre ? 

Dans  la  plupart  des  cas,  l’usage  des  titres  en  apprentissage  est  perçu  de  manière  positive  par  les  responsables de CFA. Ils y retrouvent des possibilités d’orientation plus élargies pour leurs apprentis  et peut être plus conformes à leurs aspirations par de moindres exigences scolaires et théoriques au  profit d’une maîtrise de savoir‐faire opérationnels plus attrayants.  

 

Certains  d’entre  eux  insistent  sur  le  bénéfice  de  cette  diversification  des  certifications  pour  la  réalisation  du  parcours  du  jeune  apprenti :  «  pour  certains  jeunes  qui  appréhendent  leur  métier  de 

manière plus pragmatique, le titre va leur plaire, aussi pour d'autres qui étaient en délicatesse avec  les  enseignements  généraux  par  exemple  histoire‐géo,  ceux‐là  vont  gagner  du  temps  avec  des  formations au titre plus courtes que s’ils devaient passer un diplôme ».  

 

Mais le fait de pouvoir préparer un titre professionnel comme on prépare un CAP tout en restant en  apprentissage provoque des débats autour d’une définition pouvant être partagée par tous, acteurs  de  l’éducation  et  de  la  formation  continue,  d’un  prérequis  commun  pour  les  savoirs  généraux  qui  pour les titres ne sont ni identifiés en tant que tels ni a fortiori prescrits.  

 

C’est  la  raison  probable  pour  laquelle  sur  le  terrain  les  avis  convergent  pour  dire  qu’un  titre  ne  remplacera jamais un diplôme mais qu’il peut faciliter davantage que celui‐ci l’accès à l’emploi pour  certains  jeunes.  La  reconnaissance  par  les  entreprises  de  la  valeur  du  titre  à  l’embauche  est  présentée  comme  une  contrepartie  valorisante  à  la  faiblesse  de  ses  contenus  en  enseignements  généraux. Par ailleurs, les acteurs travaillent ensemble à des expérimentations pour conjuguer titre  et  renforcement  des  savoirs  généraux,  comme  l’évoque  un  responsable  des  services  de  l’Etat  en  région : « on est collectivement convaincu que pour des jeunes de niveau V avoir un socle minimum 

d'enseignement  général,  c'est  quand  même  utile  sur  le  marché  du  travail.  C'est  pour  cela  qu'on  travaille avec le Conseil régional et cinq CFA partenaires à une expérimentation d’un développement  du  titre  au  niveau  V  de  certaines  formations  en  apprentissage  incluant  un  socle  commun,  sur  une  durée très courte pour ne pas démotiver le jeune, soit un module CLéA par exemple soit d'autres types  de modules de formation complémentaire qui lui permettent d'avoir quand même un socle minimum  d'enseignement  général  à  la  fin  de  son  titre ».  Les  personnes  enquêtées  en  région  insistent 

cependant  sur  le  fait  que  pour  voir  le  jour,  de  telles  expérimentations,  sortant  des  pratiques  courantes  et  de  la  routine  institutionnelle,  nécessitent  une  conviction  et  un  portage  politique  affirmés.  Sur  ce  plan,  l’engagement  du  Conseil  régional  est  jugé  essentiel,  avec  sa  volonté  de        

rechercher  des  complémentarités  entre  certifications,  en  abandonnant  l’idée  du  « tout  diplôme »  pour les formations. Comme l’indique un chargé de la formation en Conseil régional : « plus que les  services de la région, si je puis dire, le politique doit être convaincu que le titre c’est l’avenir, sans que  cela entre en concurrence avec le diplôme, vraiment en complément, en diversifiant, un titre pour les  bas niveaux parce que cela va attirer d’autres jeunes ».   

Du  côté  des  branches  professionnelles  pour  lesquelles  l’apprentissage  tient  une  place  très  importante  dans  la  production  des  compétences  sectorielles,  les  attentes  sont  tournées  vers  la  réforme  à  venir.  Durant  la  période  où  se  déroule  l’enquête  auprès  des  CFA,  le  recul  est  insuffisant  pour  recueillir  des  points  de  vue  définitifs  sur  le  sujet.  Parmi  les  acteurs  de  branche  interrogés,  certains responsables de fédérations professionnelles évoquent  en premier lieu les difficultés de la  mixité des publics dans les CFA, jeunes comme adultes désormais candidats au titre au sein de même  formations y conduisant : « il y a malgré tout une problématique autour de la question de la mixité : 

quand vous avez des élèves de 14‐15 ans, vous pouvez difficilement faire une mixité avec un salarié  qui  a  une  trentaine  d’années  et  qui  viendra  chercher  une  compétence.  Pour  moi,  les  quelques  exemples  que  j’ai  pu  voir  n’étaient  pas  très  positifs,  parce  que  ce  n’est  pas  le  même  univers ;  les  intérêts,  les  choses  qui  intéressent  les  uns  et  les  autres  sont  complètement  opposées ;  quand  vous  avez un gars qui est père de famille et les autres entrés dans l’adolescence…».  

 

L’introduction  d’une  nouvelle  certification  validant  les  formations  par  apprentissage  pourrait‐elle,  comme cela a été dit, offrir aux jeunes d’autres choix d’orientation, d’autres champs des possibles ?  Cela  ouvrira‐t‐il  d’autres  parcours  vertueux  pour  ceux  qui  sont  les  plus  éloignés  de  l’exigence  scolaire ?  Cela  pourrait‐il  combattre  efficacement  les  images  collant  à  l’apprentissage  longtemps  perçu comme une voie de relégation ?  

 

Bon nombre d’acteurs enquêtés expriment leur incertitude à l’égard de ces questions. Ils pointent la  ténacité  des  représentations  sociales  et  éducatives  autour  des  publics  des  CFA  et  de  la  hiérarchie  scolaire  qui  joue  à  la  négative  d’une  part  pour  l’enseignement  professionnel  par  rapport  à  l’enseignement  général  et  d’autre  part  pour  le  titre  par  rapport  au  diplôme.  Les  entretiens  témoignent  de  cela de  manière  parfois  rude  :  « aux  dernières  statistiques,  les  CFA  accueillent  17  % 

d’enfants  illettrés  à  l’entrée,  et  ils  sortent,  normalement,  en  ayant  comblé  toutes  leurs  lacunes,  y  compris de savoirs généraux, on est très contents que les CFA fassent œuvre sociale, on peut le dire  comme  ça,  on  lutte  contre  les  inégalités ;  on  constate  que  le  CFA  remplit  tout  à  fait  bien  sa  mission mais  on  constate  avec  un  peu  d’amertume  que  les  différentes  réformes,  y  compris  de  l’apprentissage, visent plutôt à favoriser les filières de l’Education nationale ; dans notre beau pays,  contrairement  à  d’autres  pays  plus  à  l’Est,  la  formation  professionnelle  n’a  pas  encore  atteint  vraiment le seuil de reconnaissance qu’elle devrait avoir ; c’est‐à‐dire si on questionne un parent qui a  un enfant de 14 ans et qu’on lui dit vers quoi il faut aller, aujourd’hui dans notre pays, un bac S c’est  bien, un bac littéraire c’est moins bien, un bac ES c’est moins bien aussi et un bac pro on ne connaît  pas ».  Au‐delà  des  visions  sociales  dévalorisées  de  l’apprentissage  mais  plus  généralement  des 

filières de formation professionnelle initiale, le titre en tant que certification alternative au diplôme  semble  rester  dans  les  esprits  associé  à  une  formation  « de  second  ordre »  souvent  destinée  au  demandeur d’emploi.  

 

Comme le rappelle un responsable des services de l’Etat « le titre renvoie à l’image de personnes qui 

n’ont pas de travail ni de diplôme de l’Education nationale. Alors, est‐ce que l’ouverture des titres à la  voie  de  l’apprentissage  va  renverser  ça ?  L’ouverture  des  titres  à  la  voie  de  l’apprentissage  faisait  partie des mesures, pas la seule, mais de l’une des mesures qui pouvaient booster l’apprentissage en  France ; la question est de savoir si cela sera le cas ». Inversement, la question pour l’avenir est aussi 

de savoir si l’apprentissage aura un effet induit sur la notoriété des titres et dans quel sens il sera.   

Au‐delà  de  ces  difficultés,  les  CFA  déclinent  néanmoins  leur  offre  de  titres  articulée  à  d’autres  certifications. Les raisons pour en faire usage diffèrent d’un CFA à l’autre, chacun s’appropriant les  certifications en fonction de contraintes de gestion ou pédagogiques particulières.   

5.4. Aperçu de la variété d’usages des titres par les CFA 

La façon dont les CFA intègrent le cadre règlementaire et développent les titres professionnels par  rapport  aux  autres  certifications  (diplôme  et  CQP)  dépend  en  grande  partie  de  leur  statut  (CFA  de  branche,  consulaire,  CFA  académique,  CFA  privé    etc.),  de  leurs  modes  de  constitution  et  de  leur  propre histoire. Cela dépend aussi d’une série d’autres paramètres liés à leur place d’offreur sur le  marché de la formation et de la certification. Cette variété d’usage renvoie principalement à deux cas  de  figure,  celui  des  précurseurs  et  des  réfractaires  à  l’ouverture  aux  titres.  Au‐delà  de  ces  deux  catégories,  l’échantillon  des  CFA  enquêtés  réclamerait  surement  d’être  consolidé  pour  prétendre  représenter de manière plus exhaustive leur réalité actuelle.  

 

Dans le document Le titre et le marché (Page 73-75)

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