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Une situation économique et démographique unique dans le pays

L’alimentation à Dakar, ville côtière du Sud

1 Le Sénégal et Dakar

1.2.3 Une situation économique et démographique unique dans le pays

Au XVIIe siècle déjà, les colons anglais d’abord, puis français, étaient installés sur l’île de Gorée (0,182 km2) et l’idée d’occuper la presqu’île du Cap-Vert faisait son chemin. Face au développement de l’activité sur l’île de Gorée (augmentation de la population, développement économique, puissance militaire), la nécessité d’accroître le territoire est apparue et, petit à petit, l’extension a eu lieu à partir du début du XIXe siècle. La prise de possession de la presqu’île par la France a eu lieu en 1857 et Dakar est officiellement déclarée soumise aux mêmes règles et lois que Gorée en 1861 (Charpy, 1958). À partir de ce moment, le développement de la ville était amorcé et perdure encore aujourd’hui, au moins sur le plan de la démographie.

Selon le rapport définitif RGPHAE 2013 (Recensement Général de la Population et de l’Habitat, de l’Agriculture et de l’Élevage), la population du Sénégal est estimée à 13 508 715 d’habitants en 2013 (ANSD, 2014 : 50). Cette population a presque doublé en 25 ans puisqu’elle était estimée à 6 896 800 d’habitants en 1988 et à 7 884 257 d’habitants en 1994 par l’Enquête Sénégalaise auprès des ménages (DPS, 1997 : 21). En 1994, 39 % de la population était urbaine, dont 21 % à Dakar (DPS, 1997 : 22). La population urbaine est estimée en 2013 à 45,2 % de la population totale dont 23,2 % se trouvent à Dakar (ANSD,

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Le terme « ethnie » est employé ici par commodité bien qu’il soit sujet à controverse dans la communauté scientifique. Pour plus de clarté, nous retiendrons ici le sens commun : « Groupe d'êtres humains qui possède, en plus ou moins grande part, un héritage socio-culturel commun, en particulier la langue » (CNRTL, 2016).

2014 : 67). Cette répartition spatiale de la population induit des problèmes d’aménagement du territoire et d’infrastructures au sein de la ville de Dakar. Les conditions de vie sur la presqu’île sont difficiles en particulier dans les quartiers populaires tels que la Médina ou les banlieues proches. Le déséquilibre existant entre les zones rurales et les zones urbaines, dont Dakar, pose le problème de l’approvisionnement du marché de l’alimentation dans les villes. La capitale est un pôle d’attraction important pour les populations rurales à la recherche d’un emploi, d’une stabilité ou d’une opportunité d’émigration. Sa population connaît donc une forte progression et sa densité de population continue d’augmenter ces dernières années. Elle est passée de 4 646 habitants/km2 en 2009 (ANSD, 2010 : 29) à 5 739 habitants/km2 en 2013 (ANSD, 2014 : 67).

La poursuite de l’accroissement de la population de Dakar s’explique par plusieurs raisons : « - démographiques (explosion démographique, croissance naturelle de la population urbaine, exode rural important entraînant une évolution rapide du rapport entre la population rurale et la population urbaine) ; - économiques (opportunités d’emplois plus importantes en ville, systèmes agraires qui peinent à absorber des générations de ruraux plus nombreuses et à nourrir des unités familiales plus grandes, d’où un départ des zones rurales pour des stratégies individuelles de réussite et/ou de survie, et des stratégies familiales de diversification des types d’activités et de revenus) ; - sociologiques (attrait de la ville et de la modernité, aménités plus grandes, stratégies éducatives des ménages…) ; - conjoncturelles (conflits, sécheresses, cataclysmes divers) » (Antil, 2010 : 2).

Les raisons des flux migratoires vers les villes sont diverses : perspectives d’émigration, recherche d’emploi en ville avec idée d’installation temporaire, voire saisonnière, installation définitive. Ces flux migratoires sont continus et sont parfois plus importants lors d’accidents climatiques ou de crises économiques (Antil, 2010).

La situation économique de la ville liée à cette expansion démographique permet à certains de développer leurs activités, notamment commerciales, et de s’enrichir, quand d’autres tentent de gagner de quoi se nourrir et se loger eux-mêmes et parfois leur famille. L’analyse proposée par Gwenn Pulliat (2012) de la situation à Hanoï semble correspondre tout à fait à la situation à Dakar. La proportion de personnes en situation instable et ayant des revenus fluctuants est très importante et les inégalités augmentent entre des riches toujours plus riches et une population en situation de forte précarité. En moyenne, à Dakar, l’alimentation représente 45 % du budget total et constitue le premier poste de dépense. Face à des difficultés financières, l’alimentation est donc la première variable d’ajustement (DPS, 2005).

et complexes en matière d’alimentation. Les influences de la colonisation, de l’Occident et des différentes ethnies se font sentir au quotidien et rendent à la fois difficile et passionnante la compréhension des phénomènes d’adaptation, d’appropriation, d’innovation, etc. en matière d’alimentation. La très forte densité de population de la ville de Dakar éloigne ses habitants de l’agriculture. Ainsi, l’économie de la ville est une économie de marché. Les Dakarois tentent de gagner l’argent nécessaire pour faire vivre leur famille en effectuant divers emplois tant dans le secteur formel (administration, salariés, etc.) qu’informel (vendeurs de rue, gargotes, etc.). L’approvisionnement du marché dakarois en produits alimentaires provient pour partie des productions nationales en provenance des zones rurales mais, pour la majeure partie, du marché alimentaire international à travers les importations.

1.3 La pêche et l’alimentation au Sénégal

1.3.1 Brève description

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des pêcheries sénégalaises

Deux types de pêches se côtoient : la pêche dite artisanale ou piroguière qui correspond à la « pêche utilisant la pirogue comme moyen essentiel de production » (Chauveau, 1984 : 1) ; et la pêche industrielle qui est caractérisée par l’utilisation de bateaux autres et en particulier des chalutiers. En 2005, le pays comptait 13 903 unités de pêche et un Sénégalais sur 6 travaillait dans le secteur de la pêche (FAO, 2008 : 7). Le parc piroguier était constitué de 7 903 pirogues en 2008 (ANSD, 2009). Les acteurs-clés du secteur de la pêche artisanale sont :

- Les propriétaires de pirogues qui peuvent être pêcheurs, anciens pêcheurs ou simples investisseurs. Ils détiennent le pouvoir de décision quant au devenir de la cargaison.

- Les pêcheurs, acteurs centraux du secteur, en leur qualité d’extracteurs de la nature. Chacun, avec une organisation différente selon le type de pirogue, le type de poisson recherché et les techniques utilisées, sillonne la mer afin de capturer le poisson tant convoité.

- Les mareyeurs et les crieuses qui gèrent les prises à l’arrivée des pêcheurs. Les mareyeurs achètent une grande partie des débarquements pour les revendre aux hôtels et restaurants locaux ou aux usines de transformations et aux entreprises d’export. Ils détiennent un pouvoir important sur la fixation des prix. Les crieuses, quant à elles,

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Pour plus de détails sur le secteur de la pêche au Sénégal, son organisation, sa place, les différents acteurs, nous invitons le lecteur à se référer à l’annexe 1 présentant un extrait de notre mémoire de Master 2 – Sciences sociales appliquées à l’alimentation.

revendent la marchandise achetée aux pêcheurs directement aux consommateurs locaux (Lecarme-Frassy, 2000).

L’organisation du secteur de la pêche est résumée sur la Figure 1.

Figure 1 : Organisation de la filière de la pêche au Sénégal – réalisé par l’auteur d’après Failler (2005 : 13) – Réalisation graphique de Maud Gobilliard

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