3.5 Conclusions
4.1.1.3 Simulations num´eriques
R1
R2
5
≈2.2 (4.5)
Finalement, on peut estimer le rapport des temps de d´ephasage des deux plan`etes `a partir des valeurs de l’´equation (4.3) :
650. ∆t2
∆t1 .3200 (4.6)
Ceci implique que la plan`ete externe dissipe beaucoup plus fortement que la plan`ete interne. On peut donc en conclure que le scenario de formation du syst`eme envisag´e ici n’est possible que si la plan`ete b (interne) est gazeuse (dissipation faible) et la plan`ete c (externe) est rocheuse (dissipation forte). Ces contraintes sont compatibles avec les masses minimales des plan`etes. Notons que la masse minimale (msini) de la plan`ete c est de l’ordre de 7 M⊕. Le fait que cette plan`ete soit rocheuse pourrait impliquer que sa masse ne soit pas beaucoup plus ´elev´ee que cette valeur minimale et que son inclinaison soit donc proche de 90◦. Cependant, la d´ecouverte r´ecente de la plan`ete Kepler-10c pr´esentant une masse de 17 M⊕pour un rayon de 2.35R⊕et qui est donc solide (Dumusque et al., 2014) remet en cause une telle conclusion et laisse une marge importante pour l’inclinaison et la masse r´eelle de GJ 163c.
4.1.1.3 Simulations num´eriques
Pour v´erifier la validit´e de nos raisonnements et des contraintes obtenues sur la dissipation dans les deux plan`etes, nous avons r´ealis´e des simulations num´eriques de l’´evolution des deux plan`etes en pr´esence de dis-sipation par effet de mar´ee. Nous int´egrons les ´equations du mouvement du probl`eme complet (simulations N-corps avec dissipation) en utilisant un programme d´evelopp´e par Alexandre Correia (voir Correia et al., 2011). La dissipation par effet de mar´ee est mod´elis´ee en utilisant un mod`ele lin´eaire `a∆tconstant (Singer, 1968; Mignard, 1979). L’int´egrateur ODEX (e.g., Hairer et al., 2010) est utilis´e pour int´egrer les ´equations du
M1(◦ )
∆t2/κ∆t1
∆t2/∆t1
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 0 500 1000 1500 2000 2500 3000
2.8 2.9 3 3.1 3.2 3.3
(P2/P1)f
EXT INT
RES
Figure4.2 – Rapport de p´eriode des plan`etes GJ 163b, c (r´esonance 3:1) `a la fin des simulations en fonction du rapport des temps de d´ephasage dans les deux plan`etes (∆t2/∆t1) et de l’amplitude initiale de libration dans la r´esonance (M1). Le coefficientκqui apparaˆıt sur l’axe inf´erieur de la figure (∆t2/κ∆t1) est d´efini par κ = k2,1/k2,2(R1/R2)5 et n’est pas connu pour le syst`eme GJ 163. Il peut ˆetre estim´e en utilisant la relation empirique entre rayons et masses des plan`etes obtenue par Weiss et al. (2013) :κ≈ 2.2 (voir ´equation (4.5)).
L’axe sup´erieur de la figure (∆t2/∆t1) est ajust´e en utilisant cette valeur deκ. L’amplitude de libration dans la r´esonance est d´etermin´ee par la valeur deM1(voir figure 4.1). Lorsque l’on aM1=0◦, le syst`eme d´emarre au centre de libration de la r´esonance, lorsqueM1 =180◦il d´emarre `a la s´eparatrice. Le temps de d´ephasage dans la plan`ete interne est fix´e `a∆t1 = 107s dans toutes les simulations. Cette valeur n’est pas r´ealiste mais elle permet d’acc´el´erer les simulations. Ainsi, le syst`eme est int´egr´e pendant 0.1 Ma ce qui correspond approxi-mativement `a 10 Ga pour une valeur plus r´ealiste de∆t1(100 s). De plus, on n´eglige ici l’effet de la troisi`eme plan`ete pr´esente dans le syst`eme. Nous avons test´e la validit´e de ces deux approximations sur un ensemble restreint de simulations (voir figure 4.3). Les deux lignes horizontales grises correspondent aux conditions initiales utilis´ees pour cette v´erification (figure 4.3). Les deux lignes verticales blanches donnent l’intervalle du rapport des temps de d´ephasage∆t2/∆t1 obtenu avec le mod`ele analytique pour que le syst`eme finisse en circulation interne (´equations (4.3) et (4.6)).
mouvement. Nous avons choisi les ´el´ements elliptiques initiaux des plan`etes de fac¸on `a ce que le syst`eme soit initialement dans la r´esonance. Nous avons effectu´e un grand nombre de simulations en faisant varier l’ampli-tude initiale de libration dans la r´esonance et le rapport des temps de d´ephasage∆t2/κ∆t1. L’amplitude initiale est produite en faisant varier l’anomalie moyenne de la plan`ete int´erieure tandis que tous les autres ´el´ements elliptiques correspondent au centre de libration. PourM1 =0◦, le syst`eme est initialement au centre de libra-tion tandis que pour M1 = 180◦, il commence `a la s´eparatrice. La figure 4.1 donne une vision sch´ematique de ces conditions initiales. Les excentricit´es initiales des plan`etes sont fix´ees `a environ 0.16 et 0.11 (pour ˆetre proches du centre de libration), les p´erih´elies des plan`etes sont anti-align´es et M2 = 0◦. Nous avons fix´e a1 = 0.062 UA de sorte que lorsque les excentricit´es sont compl`etement amorties (e1 = 0), le syst`eme finit approximativement `a sa position actuelle (a1≈0.0607 UA).
Le temps de d´ephasage∆td´epend de la composition de la plan`ete consid´er´ee et peut ˆetre reli´e au facteur de qualit´e Q par la relation Q ≈ 1/(n∆t) (avec n le moyen mouvement de la plan`ete, e.g. Bonfils et al., 2013). Les plan`etes gazeuses ont des facteurs de qualit´e de dissipation de l’ordre deQ ∼ 103−104, tandis que pour les plan`etes rocheuses on a Q ∼ 10 −100. Ces valeurs du facteur de qualit´e correspondent `a un temps de d´ephasage de l’ordre de ∆t ∼ 10−100 s pour les plan`etes gazeuses et ∆t ∼ 103 −104 s pour les rocheuses. Puisque la plan`ete interne est probablement gazeuse, son temps de d´ephasage devrait ˆetre de
4.1. CONTRAINTES SUR LA STRUCTURE INTERNE DES PLAN `ETES 51
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 (P2/P1)f
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 (P2/P1)f
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 (P2/P1)f
0 200 400 600 800 1000 1200 1400 (P2/P1)f
∆t2/κ∆t1 2 planets 3 planets
Figure4.3 – V´erification de l’impact des deux approximations utilis´ees pour la figure 4.2 : acc´el´eration des si-mulations num´eriques en augmentant les temps de d´ephasage dans les plan`etes et absence de la troisi`eme plan`ete d´etect´ee dans le syst`eme (Bonfils et al., 2013). On trace le rapport final de p´eriode des plan`etes GJ 163b, c (r´esonance 3:1) en fonction du rapport des temps de d´ephasages (∆t2/κ∆t1). L’amplitude initiale de libration dans la r´esonance est fix´ee parM1=100◦(gauche) et 140◦(droite). Ces conditions initiales cor-respondent aux deux lignes grises de la figure 4.2. On compare les r´esultats obtenus avec∆t1= 107, 106, 105 et 104s (haut) et des temps d’int´egration de respectivement 0.1, 1, 1 et 100 Ma, ce qui est approximativement
´equivalent `a 10 Ga pour une valeur plus r´ealiste de∆t1(100 s). On compare aussi les r´esultats des int´egrations
`a deux et trois plan`etes (bas) avec∆t1 = 107s. Lorsque l’on modifie la valeur de∆t1, on observe seulement de petites variations mais pas d’effet syst´ematique dans un sens. De mˆeme la troisi`eme plan`ete ne semble pas perturber fortement les r´esultats. Le trait plein vert marque la limite entre les simulations pour lesquelles le syst`eme finit en circulation externe et celles pour lesquelles on obtient une circulation interne. Il est plac´e `a
∆t2/κ∆t1 = 260 pour les simulations avecM1 =100◦(graphiques degauche) et `a 240 pourM1= 140◦ (gra-phiques dedroite). Le trait pointill´e vert marque la limite entre circulation interne et r´esonance. Il est plac´e
`a 750 (gauche) et 900 (droite). Les traits verticaux noirs marque les mˆemes limites obtenues avec le mod`ele analytique (´equation (4.3)).
l’ordre de ∆t1 ∼ 10 − 100 s. Cependant, pour acc´el´erer les simulations, nous avons utilis´e un temps de d´ephasage plus ´elev´e. Comme expliqu´e par Bonfils et al. (2013), l’´echelle de temps de l’´evolution du syst`eme est approximativement inversement proportionnelle `a∆t.
La figure 4.2 donne le rapport de p´eriodes final du syst`eme en fonction du rapport des temps de d´ephasage et de l’amplitude initiale de libration. Pour cette figure nous avons pris k2 = 0.5 pour les deux plan`etes,
∆t1 = 107 s (5 ordres de grandeur au dessus de la valeur attendue) et int´egr´e le syst`eme sur 0.1 Ma, ce qui correspond en principe `a 10 Ga avec∆t1 = 100 s. `A titre de comparaison, l’ˆage du syst`eme est estim´e
`a 1−10 Ga (Bonfils et al., 2013). Pour v´erifier que cette approximation n’alt`ere pas significativement nos r´esultats nous avons r´ealis´e des simulations pour un nombre r´eduit de conditions initiales avec∆t1 = 107, 106, 105 et 104 s (respectivement 5, 4, 3 et 2 ordres de grandeur au dessus de la valeur attendue) et sur respectivement 0.1, 1, 10 et 100 Ma (´equivalent `a 10 Ga avec∆t1= 100 s). La figure 4.3 montre les r´esultats obtenus avec ces diff´erentes ´echelles de temps ainsi que les r´esultats obtenus en ajoutant la troisi`eme plan`ete d´etect´ee dans le syst`eme (voir Bonfils et al., 2013, et tableau 4.1). Aucune de ces deux approximations ne
2.98
Figure 4.4 – ´Evolution du rapport de p´eriode (gauche), des excentricit´es (milieu), et des angles r´esonants (droite) de GJ 163b et c. L’amplitude initiale de libration est fix´ee `a M1 = 100◦ et le rapport des temps de d´ephasage est fix´e `a∆t2/κ∆t1 =100 (haut, sortie de la r´esonance en circulation externe), 400 (milieu, sortie de la r´esonance en circulation interne), et 1000 (bas, syst`eme restant en r´esonance). Dans les colonnes dumilieu et dedroite, les points rouges correspondent `a la plan`ete b (interne, 1) et les points vers `a la plan`ete c (externe, 2). Le temps est donn´e en Ma, mais on a fix´e∆t1 = 105s dans toutes ces simulations. Pour une dissipation plus r´ealiste (∆t1=100 s), le temps devrait ˆetre lu en Ga.
semble impacter significativement les r´esultats des simulations. Dans la figure 4.2, on observe bien les trois
´etats finaux pr´evus par le mod`ele analytique (circulation externe/interne et r´esonance). La figure 4.4 montre l’´evolution temporelle du rapport de p´eriodes, des excentricit´es et des angles r´esonants pour trois simulations num´eriques correspondant `a ces trois ´etats finaux possibles. La limite entre circulation externe (en rouge/jaune dans la figure 4.2) et circulation interne (en bleu dans la figure 4.2) correspond `a un rapport de temps de d´ephasage de l’ordre de∆t2/κ∆t1 ≈ 250. Cette valeur est relativement proche de la valeur th´eorique obtenue
`a l’´equation (4.3) (300). La limite entre circulation interne et r´esonance (en vert dans la figure 4.2) d´epend fortement de l’amplitude initiale de libration. Lorsque l’amplitude initiale de libration est faible (M1.20◦) le syst`eme reste toujours en r´esonance. Lorsque l’amplitude initiale est importante (M1proche de 180◦), la limite entre les zones de circulation interne et de r´esonance tend vers∆t2/κ∆t1 ≈ 1100. Cette valeur est l´eg`erement inf´erieure mais du mˆeme ordre de grandeur que la pr´evision th´eorique (1450, ´equation (4.3)). Cette limite th´eorique correspond `a la limite entre une amplitude de libration croissante et une amplitude d´ecroissante.
Pour∆t2/κ∆t1 = 1450, l’amplitude reste constante. Pour∆t2/κ∆t1 > 1450, le syst`eme se rapproche de plus en plus du centre de libration et ne sort donc jamais de la r´esonance. Enfin, plus∆t2/κ∆t1 est petit devant 1450, plus l’amplitude de libration croˆıt rapidement. Si le syst`eme a initialement une amplitude de libration faible, il faut que l’amplitude croisse rapidement pour pouvoir atteindre la s´eparatrice de la r´esonance avant que les excentricit´es des plan`etes ne soient compl`etement amorties. Ainsi la limite∆t2/κ∆t1 = 1450 est une borne sup´erieur correspondant au cas o`u le syst`eme commencerait au voisinage de la s´eparatrice et o`u une tr`es faible augmentation de l’amplitude de libration suffirait pour la franchir. Ce ph´enom`ene explique bien la d´ependance observ´ee (figure 4.2) de la limite entre les syst`emes finissant en circulation interne et ceux finissant en circulation externe par rapport `a l’amplitude initiale de libration. Notons que si l’on avait choisi
4.1. CONTRAINTES SUR LA STRUCTURE INTERNE DES PLAN `ETES 53 des excentricit´es initiales des plan`etes plus petites, l’amplitude aurait eu moins de temps pour croˆıtre et il aurait donc fallu des amplitudes initiales plus importantes pour pouvoir sortir de la r´esonance. Au contraire, avec des excentricit´es initiales plus importantes, une plus faible amplitude initiale serait suffisante pour sortir de la r´esonance avant que les excentricit´es ne soient compl`etement amorties. La valeur de l’amplitude initiale n’a donc de sens que lorsqu’elle est accompagn´ee des valeurs initiales des excentricit´es.
On peut remarquer que pour M1 ≈ 120◦, quelques syst`emes que l’on pouvait s’attendre `a observer en r´esonance se sont retrouv´es en circulation interne `a la fin de la simulation (points bleus dans la zone verte de la figure 4.2). Ceci s’explique par la pr´esence de la s´eparatrice de la r´esonance s´eculaire `a l’int´erieur de la r´esonance de moyen mouvement. Des r´esonances de ce type on d´ej`a ´et´e ´etudi´ees en d´etail dans le cas des r´esonances de moyen mouvement 2:1 et 3:2 par Callegari et al. (2004, 2006). Comme d´ecrit dans ces ´etudes, la fr´equence s´eculaire (qui domine l’´evolution de∆$) chute `a z´ero au voisinage de cette s´eparatrice et l’angle
∆$libre dans des directions oppos´ees de part et d’autre de la s´eparatrice. Notre mod`ele analytique simplifi´e des r´esonances ne peut pas pr´edire ce type de comportement qui est r´ev´el´e par l’int´egration num´erique du probl`eme complet. Cependant, ce mod`ele permet de pr´evoir et de comprendre les principales caract´eristiques de la dynamique r´esonante en pr´esence de dissipation. De mani`ere plus sp´ecifique au syst`eme GJ 163, les simulations num´eriques confirment la principale conclusion obtenue grˆace `a notre mod`ele simplifi´e : si les plan`etes GJ 163b et c ´etaient initialement en r´esonance (3:1) et ont atteint leur rapport de p´eriodes actuel (2.97)
`a cause de la dissipation par effet de mar´ee, la plan`ete externe a subi une dissipation beaucoup plus forte que la plan`ete interne. Ceci impliquerait que la plan`ete externe soit rocheuse et la plan`ete interne gazeuse.