2.3 Hamiltonien r´esonant
2.3.2 R´eductions et int´egrales premi`eres
Le Hamiltonien (2.9) poss`ede quatre degr´es de libert´e puisqu’il d´epend des huit coordonn´ees canoniques : (λi,Λi,xi,ix¯i). Toutefois, il est ais´e de r´eduire ce probl`eme `a deux degr´es de libert´e. En effet, un premier degr´e de libert´e peut ˆetre ´elimin´e en utilisant l’invariance du probl`eme par rotation qui est associ´ee `a la conservation du moment cin´etique total. Le second degr´e de libert´e provient de la moyennisation par rapport aux longitudes moyennes. Dans le cas s´eculaire, le Hamiltonien moyenn´e ne d´epend d’aucune des deux longitudes moyennes des plan`etes et les deux moments cin´etiques circulaires moyens (Λi) sont donc constants. On obtient ainsi deux nouvelles int´egrales premi`eres, et on ´elimine donc deux degr´es de libert´e. Le probl`eme s´eculaire (plan) de deux plan`etes peut donc ˆetre r´eduit `a un seul degr´e de libert´e et est int´egrable. Dans le cas r´esonant, le Hamiltonien d´epend toujours des longitudes moyennes mais seulement au travers de la combinaisonk.λ. On peut alors ´eliminer un degr´e de libert´e (au lieu de deux dans le cas s´eculaire) et obtenir un syst`eme `a deux degr´es de libert´e.
Il est possible d’effectuer ces r´eductions directement `a partir des coordonn´ees elliptiques complexes de Poincar´e (λ,Λ,x,i¯x). Cependant, il est plus facile de bien distinguer le rˆole de chaque r´eduction (moment cin´etique et moyennisation) en revenant temporairement aux coordonn´ees actions-angles de Delaunay (M,Λ,
$,G).
2.3. HAMILTONIEN R ´ESONANT 13
2.3.2.1 R´eduction du moment cin´etique
La r´eduction du moment cin´etique provient de l’invariance du probl`eme par rotation. Dans les coordonn´ees de Delaunay, cela ce traduit par le fait que le Hamiltonien d´epend uniquement de la diff´erence des longitudes des p´erih´elies∆$=$1−$2. On introduit le changement de coordonn´ees angulaires ($1,$2)→(∆$,$2) qui est g´en´er´e par :
∆$
$2
!
= 1 −1
0 1
! $1
$2
!
Les variables d’action canoniquement conjugu´ees `a ces angles sont donn´ees par la transformation suivante (transpos´ee de la matrice inverse) :
A∆$ A$2
!
=
t 1 −1
0 1
!−1
G1
G2
!
= 1 0 1 1
! G1
G2
!
On obtient ainsi le syst`eme de coordonn´ees canoniques (Mi,Λi,∆$,G1,$2,G=G1+G2). Le Hamiltonien ne d´epend alors que de∆$et pas de$2. L’action conjugu´ee `a$2(G) est une quantit´e conserv´ee (int´egrale premi`ere). Cette quantit´e est comme attendu le moment cin´etique total :G =G1+G2. On obtient finalement un syst`eme `a trois degr´es de libert´e : (Mi, Λi,∆$, G1) d´ependant du param`etre (constant)G. Notons que cette r´eduction peut aussi ˆetre r´ealis´ee dans les variables non-moyenn´ees et queG∼est donc aussi une int´egrale premi`ere du probl`eme initial (non-moyenn´e).
2.3.2.2 R´eduction due `a la moyennisation
Le Hamiltonien moyenn´e (´equation (2.9)) ne d´epend pas des valeurs individuelles des longitudes moyennes mais seulement de la combinaison (k1λ1+k2λ2) et ses harmoniques. Rappelons la relation d´efinissant les lon-gitudes moyennes :λi = Mi+$i. L’expression du Hamiltonien moyenn´e dans les coordonn´ees de Delaunay ne fait donc apparaˆıtre que la combinaisonσ = k1M1+k2M2 des anomalies moyennes et ses harmoniques.
En suivant l’exemple de la r´eduction du moment cin´etique, on r´ealise le changement de coordonn´ees : σ
M2
!
= k1 k2
0 1
! M1
M2
!
σetM2sont canoniquement conjugu´es `aIetΓd´efinis par : I
Γ
!
=
t k1 k2
0 1
!−1
Λ1
Λ2
!
= 1/k1 0
−k2/k1 1
! Λ1
Λ2
!
(2.10) Le Hamiltonien moyenn´e ne d´ependant pas de M2, l’actionΓ =|k2/k1|Λ1+ Λ2(e.g. Michtchenko & Ferraz-Mello, 2001) est une int´egrale premi`ere. Contrairement `a G, Γ n’est une constante que dans le probl`eme moyen car∼Γexhibe des variations rapides li´ees aux variations de courte p´eriode des longitudes moyennes (ou anomalies moyennes). Finalement le probl`eme est r´eduit aux deux degr´es de libert´e suivant : (σ,I = Λ1/k1,
∆$,G1) et param´etr´e par les int´egrales premi`eresGetΓ.
2.3.2.3 Coordonn´ees complexes de Poincar´e
Les coordonn´ees obtenues apr`es les deux r´eductions (moment cin´etique et moyennisation), sont proches de celles de Delaunay et ne sont pas tr`es adapt´ees `a un d´eveloppement en puissance des excentricit´es. On leur pr´ef´erera dans la suite des coordonn´ees plus proches des variables canoniques complexes de Poincar´e. Ces derni`eres ont en outre l’avantage d’ˆetre sym´etriques par rapport aux deux plan`etes. On introduit pour cela les
coordonn´ees angulaires (appel´ees angles r´esonants, e.g. Ferraz-Mello et al., 1993) : σ1 = 1
q(σ−k2∆$)= 1 q
k1λ1+k2λ2
−$1 (2.11)
σ2 = 1
q(σ+k1∆$)= 1 q
k1λ1+k2λ2
−$2 (2.12)
avecq = k1+k2, le degr´e de la r´esonance. Notons que ces angles sont de caract´eristique nulle, c’est-`a-dire qu’ils respectent la r`egle de D’Alembert. Les actions canoniquement associ´ees `a ces angles sont :
Σ1 = k1I−G1= Λ1−G1 =D1
Σ2 = k2I+G1= Λ2−G2+G−Γ =D2+G−Γ
Les actionsΣine sont pas sym´etriques,Σ1 est le d´eficit de moment cin´etique de la plan`ete 1 (D1), alors que Σ2fait intervenirD2mais aussiGetΓ. Il est donc naturel d’introduire le changement de variablesΣi → Di. Celui-ci doit ˆetre compl´et´e par un changement des coordonn´ees angulaires. Les anglesσine sont pas affect´es par cette transformation qui ne modifie que les angles conjugu´es aux variablesG etΓ. Ces derniers ne sont plus$2etM2mais respectivementθGetθΓ, d´efinis par :
θG = σ2+$2= 1
q(k1λ1+k2λ2) θΓ = M2−σ2= k1
q(λ2−λ1)
Finalement, le syst`eme de coordonn´ees canoniques complet est : (θG,G, θΓ, Γ, σi, Di). Rappelons que le HamiltonienH∼ exprim´e dans ce syst`eme de coordonn´ees ne fait pas apparaˆıtre l’angle∼θG(G∼est une int´egrale premi`ere) qui est le seul angle de caract´eristique non-nulle. Enfin, le Hamiltonien moyenn´e H ne fait pas apparaˆıtre non-plus l’angleθΓ(Γest une constante).
Les coordonn´ees r´esonantes cart´esiennes complexes sont alors simplement d´efinies par (e.g. Michtchenko
& Ferraz-Mello, 2001) :
xi = √ Dieiσi
Et le syst`eme de coordonn´ees canonique complet est (θG,G,θΓ,Γ, xi,−i¯xi). Ces variables sont tr`es proches des coordonn´ees elliptiques complexes de Poincar´e. En effet, on a :
xi = ¯xieiθG
Pour obtenir le Hamiltonien r´esonant dans ces coordonn´ees, il faut remplacer dans l’expression (2.9) lesxipar
¯
xieiθG. En faisant cette substitution, le Hamiltonien ne doit plus d´ependre des longitudes moyennesλi. Ceci est garanti par la r`egle de D’Alembert et le fait que les anglesσi sont de caract´eristique nulle. De plus par sym´etrie du probl`eme, on aCl,l,k¯ =Cl,l,¯ −k. Le Hamiltonien r´esonant s’´ecrit donc :
H =− X2
i=1
µ2iβ3i 2Λ2i + X
l,l¯∈N2
Cl,l,¯jk(Λ) Y2
i=1
xliix¯¯lii (2.13) avec
j= X2
i=1
l¯i−li
k1+k2 ∈Z
2.3. HAMILTONIEN R ´ESONANT 15 Notons que les moments cin´etiques circulaires moyens (Λi) apparaissent toujours dans la partie Keplerienne et dans les coefficientsCl,l,¯jkde la partie perturbative. Cependant, on peut ais´ement exprimer lesΛien fonction des coordonn´ees complexesxiet des deux actionsGetΓ. En effet, on a :
Λ1 = k1
q(D+G−Γ) Λ2 = k2
q(D+G)+ k1
qΓ
o`uD=D1+D2=x1¯x1+x2x¯2= x1x¯1+x2¯x2, est le d´eficit de moment cin´etique total (cf. Laskar, 2000).
2.3.2.4 Renormalisation
Le Hamiltonien (2.13) d´epend de deux param`etres G et Γ au travers des variables Λi. Pour ´etudier la dynamique dans les coordonn´ees xi, il faut donc fixer la valeur de ces deux constantes. Cependant, il est possible d’´eliminer une de ces deux constantes en renormalisant le probl`eme. En effet, il existe une invariance du probl`eme par changement d’´echelle. Si l’on divise toutes les actions par la constante Γ (Delisle et al., 2012) :
Λi = Λi Γ
Gi = Gi
Γ
G = G
Γ =G1+G2
Di = Di
Γ = Λi−Gi
xi = xi
√Γ = p
Dieiσi (σi=σi) xi = xi
√Γ = p
Diei$i ($i=$i)
les ´equations de Hamilton restent correctes `a condition de diviser aussi le Hamiltonien parΓ: Hˇ = H
Γ
Cependant le Hamiltonien ˇH d´epend toujours de la valeur deΓ. Pour ´eliminer totalement ce param`etre, il faut renormaliser l’´echelle de temps par un facteurΓ3:
t = ∼t Γ3
H = Γ3Hˇ = Γ2H
Apr`es ces deux renormalisations (´echelles d’espace et de temps), le Hamiltonien (H) ne d´epend plus de la constanteΓet le probl`eme ne d´epend plus que d’un param`etre : G = G/Γ, le moment cin´etique total renormalis´e. Pour ´etudier la dynamique il faudra donc fixer la valeur de ce param`etre. On peut estimer un
ordre de grandeur r´ealiste pourGen supposant que les plan`etes sont, dans l’approximation Keplerienne, `a la r´esonance exacte (la combinaison des moyens mouvements Kepleriens est nulle :k.n=0) :
n1,0
En supposant, de plus, que les plan`etes ont des excentricit´es faibles, on a : G0≈Λ1,0+ Λ2,0
et par d´efinition (´equation (2.10)) :
Γ0=
On utilise cette valeur comme r´ef´erence pourGet on note :
∆G=G0−G (2.15)