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C.2.1 Méthode numérique

Modélisation de la dilatation des grains

Les simulations numériques effectuées afin de modéliser l’effet des variations de température sur un empilement 2D de grains reposent sur un code similaire à celui uti-lisé pour modéliser la vidange d’un silo. Il s’agit de dynamique moléculaire de sphères molles où le frottement entre les grains est modélisé par la méthode des ressorts tan-gentiels de Cundall (Cundall et Strack [1979]). Les grains sont disposés dans une boîte rectangulaire dont les parois sont élastiques et possèdent le même coefficient d’élasticité que les grains. L’état initial est réalisé de manière identique à celui de la vidange du silo, la compacité initiale est comprise entre 0.8 et 0.81. Nous avons choisi de modéliser l’effet de la température de la manière la plus simple qui soit. En effet, nous n’avons pas cherché à modéliser le transport de chaleur à l’intérieur de la colonne. Dès lors, l’effet de la température se traduit par une simple dilatation ou contraction des grains. Concrètement, le rayon des grains devient une fonction du temps :

ri(t) = r0

i(1 + α∆T sin (ωt)) (C.2) Dans les simulations, nous avons fixé le coefficient de dilatation thermique des grains, noté α à 1. Dans la suite, un cycle de température avec une amplitude ∆T correspond à une dilatation d’une quantité α∆T d. La dilatation des grains peut se faire de manière homogène ou hétérogène dans l’empilement. Il suffit pour cela d’adapter l’équation C.2 en choisissant un coefficient de dilatation thermique différent pour chaque grain. Sauf mention contraire, dans la suite nous avons toujours opté pour une dilatation homogène des grains. Bien que ceci ne soit pas exactement ce que l’on observe expérimentalement, une dilatation homogène permet de simplifier le problème. Cela permet également de considérer les cycles de température sous un angle différent : celui d’un empilement soumis à une simple perturbation géométrique et homogène. De plus, sauf mention contraire, les parois du réservoir contenant les grains ne sont pas dilatées. Leur position est fixe.

Premiers essais

Avant de réaliser une simulation numérique, il convient de donner aux paramètres

ω et ∆T des valeurs pertinentes. Expérimentalement, l’amplitude des cycles de tem-pérature est typiquement de l’ordre de 10C et le coefficient de dilatation thermique de grains de sable est de l’ordre 10−6, si bien que l’on peut s’attendre, pour des billes d’un millimètre de diamètre à une dilatation de l’ordre de 1% de leur diamètre. Pour ce premier essais nous avons fixé le paramètre ∆T à 10−2. La durée d’un cycle doit être choisie avec précaution. En effet, il faut que cette durée soit grande devant les autres temps caractéristiques du système. Elle doit notamment être grande devantqd/g, mais également devant la période d’oscillation de l’empilement. En effet, comme les grains que l’on simule sont beaucoup plus mous (k = 105 mg/d) que des grains en matériaux usuels, l’empilement possède une élasticité globale dont l’effet n’est pas négligeable. Ainsi, lorsque l’on crée l’empilement, les grains initialement placés sur une grille carrée

C.2. SIMULATIONS NUMÉRIQUES DU CYCLAGE THERMIQUE197

tombent sous l’effet de la gravité. On peut alors clairement observer le sommet de la colonne décrire des oscillations amorties. La période de ces oscillations vaut environ 2q

d/g. Nous avons alors choisi une période de

ω = 10q

d/g. Celle-ci correspond alors à 100000 pas de temps (dt = 10−4qg/d). Nous avons réalisé une simulation avec une cuve d’une largeur de 40d et contenant 7500 grains. Cette simulation a tourné pendant environ deux semaines sur un ordinateur de bureau, ce qui correspond à 1000 cycles de température. À l’issue de chaque cycle la position de chaque grain est sauvegardée, si bien que nous avons une vision stroboscopique de la dynamique de l’empilement. La figure C.6 présente alors l’altitude h de la colonne en fonction du nombre de cycles n.

0 200 400 600 800 1000 248.4 248.8 249.2 249.6 250 n h /d

Figure C.6 – Évolution de la hauteur de l’empilement de grains simulé. On

re-marque un lent fluage continu de la colonne qui peut être modélisé par l’équation C.1 avec les paramètres ne= 10,he= 0.5, h0 = 249.7 d, hl= 0.2.

On note très clairement que l’on retrouve le comportement attendu, à savoir que la colonne se compacte. Contrairement aux simulations de Vargas et McCarthy [2007], la dynamique de la compaction obtenue dans nos simulations est lente. En effet, après mille pas de temps, la hauteur de la colonne n’a toujours pas atteint de valeur sta-tionnaire. On retrouve le même comportement que celui obtenu lors de la compaction d’un empilement par secousses lorsque le rapport d’aspect de la colonne empêche la formation de rouleaux de convection Knight et al. [1995]. Dans une telle expérience la compacité évolue en 1/ log (n). On peut d’ailleurs retrouver cette dynamique de fluage dans nos simulations. En effet, la hauteur de la colonne peut être modélisée par l’ex-pression donnée dans l’équation C.1. Cette exl’ex-pression prédit que le comportement de la hauteur est initialement exponentiel pendant un nombre ne de cycle, puis après ce transitoire la hauteur évolue de façon logarithmique. Nous obtenons un ajustement des données correct avec un coefficient ne = 10 qui est comparable aux coefficients trouvés expérimentalement (voir la figure C.5).

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ANNEXE C. FLUAGE D’UNE COLONNE DE GRAINS SOUS L’EFFET DE VARIATION DE TEMPÉRATURE

Retour sur la méthode numérique

Nous voyons, ainsi, qu’une simple variation sinusoïdale de la taille des grains, faite de façon homogène sur l’empilement, permet de reproduire, de manière fidèle, la dyna-mique globale d’un colonne de grains soumise à des cycles de température. Nous avons également testé une dilatation non-homogène des grains. Les grains situés au centre ont été dilatés de α∆T d et les grains a l’extérieur ne l’ont pas été. Nous avons aussi, dans d’autres simulations, translaté légèrement, de manière homothétique à la colonne, les parois du silo pendant un cycle de température. Dans ces deux cas nous n’avons pas observé de différence flagrante de comportement des grains. Nous avons donc utilisé une dilatation homogène des grain pour étudier l’effet de la température sur un em-pilement. L’objectif est alors d’étudier les effets de paramètres difficilement pilotables expérimentalement comme par exemple la raideur ou la rugosité des grains. On cher-cher également à retrouver les deux régimes de compaction observés par Divoux et al. [2008]. Un second objectif est de décrire le comportement individuel des grains dans l’ensemble de la colonne. Ceci n’a, à notre connaissance, jamais été réalisé dans le cas d’une colonne de grains sec, l’étude de Slotterback et al. [2008] en milieu immergé semble indiquer la présence de mouvements collectifs appelés string like motion.

C.2.2 Régimes de compaction

Afin de retrouver les deux régimes de compaction observés expérimentalement, nous avons voulu répéter la simulation précédente pour différentes amplitudes de cycle ∆T . Cependant, avant de commencer une étude systématique sur l’influence de l’amplitude des cycles, nous avons quantifié l’influence de la fréquence de la sollicitation.

Étude fréquentielle

Nous avons donc simulé des cycles de températures à différentes fréquences de for-çage sans toutefois prendre en compte les effets dus à la diffusion de la chaleur (effet de peau, déphasage etc.). En effet, la dilatation des grains reste homogène dans la colonne. Celle-ci possède, comme précédemment, une largeur L = 40d contient 7500 grains et dont l’amplitude de dilatation est ∆T = 10−3. La pulsation de forçage a été variée de 0.3q

g/dà 3.1q

g/d. Dans toutes ces situations une compaction lente est observée. Afin de les comparer, on mesure le tassement ∆h de la colonne, défini comme sa différence de hauteur entre le premier et le nieme cycle de température. La figure C.7 présente alors ∆h en fonction de la pulsation ω à l’issue du cycle n = 400.

On constate alors que le fluage de la colonne dépend de la fréquence de la sollicitation qu’on lui impose. Cette réponse présente un maximum pour une pulsation ω = 2.3q

g/d. Cette pulsation correspond à la pulsation d’oscillation de la colonne. Comme prévu, on observe que si l’on impose une période d’excitation trop courte, on sonde l’élasticité des grains. Ainsi, dans toutes les simulations décrites plus loin, nous imposerons une pulsation d’oscillation ω = 0.8q

g/d, soit une période de 7.5q

d/g. Autour de cette pulsation la réponse de la colonne est plate, on peut donc supposer que l’évolution de l’empilement se fait de manière quasi-statique.

C.2. SIMULATIONS NUMÉRIQUES DU CYCLAGE THERMIQUE199 0 1 2 3 4 0 2 4 6 ω/pg/d ∆ h /d

Figure C.7 – Différence de hauteur de la colonne en fonction de la pulsation de forçage entre l’état initial et l’état après 1000 cycles de température. On observe une

résonance autour de ω = 2.3p

g/d qui est proche de la pulsation d’oscillation de la colonne.

Pour des pulsations en dessous de 1.5p

g/d, la réponse est plate, on travaillera alors par la

suite à des pulsations inférieures à 1.5p

g/d.

Amplitude des cycles

Une fois la période des cycles de température fixée, nous avons effectué des simula-tions avec des amplitudes variant de ∆T = 10−6 à ∆T = 0.1. Chacune des simulations effectue 1000 cycles de température et on mesure comme précédemment le tassement de la colonne à la fin des 1000 cycles. Sur la figure C.8 présentant ∆h en fonction de ∆T on distingue clairement trois régimes.

Tout d’abord, pour de faibles amplitudes de température, la hauteur de la colonne présente un plateau et donc ne dépend pas de l’amplitude de la sollicitation. En effet, on imagine bien que de très faibles variations du rayon des grains ne fassent que sonder l’élasticité du milieu (élasticité des grains et des ressorts tangentiels). On s’attend à ce que l’évolution soit réversible, toutefois un lent fluage de l’empilement est observé. On peut alors se demander d’où provient cette compaction et où sont localisés les réarrangements de grains. La figure C.8b) montre un exemple de l’altitude la colonne en fonction du nombre de cycles. Dans ce premier régime la compaction se fait par sauts comme l’ont observé Divoux et al. [2008]; Géminard et Gayvallet [2001].

En augmentant l’amplitude des cycles, on voit apparaître un deuxième régime dans lequel le tassement de la colonne augmente avec l’amplitude. Un exemple de la dyna-mique de fluage dans ce régime a été représenté sur la figure C.6 et dont le fluage est continu. On retrouve alors les deux comportements décrits par Divoux et al. [2008]. On appelle alors ∆Tc l’amplitude critique séparant les deux régimes de compaction. L’enjeu est alors de comprendre quel sont les paramètres physiques qui fixent la valeur de ∆Tc.

En augmentant encore la température, on trouve un troisième régime dans lequel la compaction est une fonction décroissante de l’amplitude. Dans ce troisième régime la dilatation des grains apporte tellement d’énergie au système que celui-ci n’évolue plus de manière quasi-statique. On observe d’ailleurs des rouleaux de convection. Ceux-ci