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3.7 Simulations numériques

3.7.2 Simulation numérique avec différenciation du coût fixe

Nous cherchons ici à analyser les conditions de stabilité de l’équilibre concentré lorsque les firmes ne disposent pas des mêmes technologies de production selon la région où elles sont implantées. On s’intéresse ici particulièrement à la structure centre-périphérie car il

0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 φ -0.01 -0.0075 -0.005 -0.0025 0.0025 0.005 d∆v dλ

Fig. 3-7 — Seuil critique en terme d’ouverture économique (φb)pour la stabilité de l’équi-

libre symétrique.

s’agit de déterminer si une région peut conserver le capital concentré dans sa localité alors que les entreprises supportent davantage des coûts fixes plus élevés. Il est assez intuitif de penser que la région qui disposera de la technologie de production la moins coûteuse sera plus attractive pour le capital et permettra donc aux forces d’agglomération de jouer favorablement.

Afin d’étudier l’impact d’une variation des coûts de production sur la stabilité de l’équilibre, nous supposons que les firmes supportent un coût fixe différent dans la localité 1 et dans la localité 2. Nous supposerons successivement que la région centre où se concentre le capital dispose d’une technologie de production qui requiert un coût fixe équivalent à une unité de capital par unité produite ; alors que la région 2 utilise moins d’une unité de capital pour le même niveau de production. Nous supposerons ensuite la situation inverse où la région centre offre une technologie de production plus intéressante en terme de coût fixe pour les entreprises.

Les simulations numériques sont résumées dans le tableau suivant :

Il apparaît clairement que lorsque le coût fixe supporté par les firmes est plus faible dans la localité centre que dans la localité périphérique, l’équilibre concentré reste stable

α1>α2 (α1=1 et α2=0,8) α1<α2 (α1=0,8 et α2=1) α1=α2 (α1=1 et α2=1) φs Ts φs Ts φs Ts µ=0.3 et σ=4 0,850 1,055 0,400 1,356 0,702 1,125 µ=0.4 et σ=5 0,846 1,043 0,398 1,259 0,695 1,095 µ=0.5 et σ=5 0,810 1,054 0,372 1,280 0,634 1,121 µ=0.6 et σ=7 0,841 1,029 0,395 1,167 0,687 1,064

Fig. 3-8 — Valeurs seuil pour la stabilité de l’équilibre concentré lorsque le coût fixe varie d’une région à l’autre

pour des niveaux élevés de coûts de transport. Il est donc beaucoup plus difficile pour la région périphérique de capter les industries du centre lorsque celle-ci offre une technologie de production moins coûteuse aux firmes localisées sur son territoire.

A l’inverse, si la région périphérique permet aux firmes de réaliser des économies de coût de production, il lui sera facile d’attirer le secteur industriel. La stabilité de la structure centre-périphérie n’est plus garantie que pour des niveaux presque nuls de coûts de transport (T proche de 1).

Formellement, lorsque le capital est concentré dans la localité 1, on observe que l’équa- tion de migration ∆v dépend négativement du coût fixe en capital supporté par les firmes dans cette région. En effet, lorsque le coût fixe en capital augmente, ∆v décroît, cela pro- voque un différentiel d’utilité défavorable aux entreprises de la région centre, qui peuvent alors être incitées à migrer vers la région périphérique. Néanmoins, l’impact négatif du coût fixe sur le capital s’estompe à mesure que celui-ci augmente.

Proposition 3 Lorsque le capital est concentré dans la localité 1 (λ = 1), l’équation de

migration est une fonction décroissante du coût fixe en capital supporté par les firmes dans cette localité, et une fonction croissante du coût fixe en capital de la région périphérique.

A mesure que le coût fixe de la région centre augmente, les entreprises sont incitées à migrer de la région centre vers la région périphérique.

∂∆v ∂α1 < 0 et ∂ 2∆v ∂α2 1 > 0 (3.64) ∂∆v ∂α2 > 0 et ∂ 2∆v ∂α2 2 < 0 (3.65)

3.8

Conclusion

Le modèle développé dans ce chapitre présente le cadre d’analyse d’économie géogra- phique que nous développerons dans la seconde partie de la thèse. Il laisse apparaître de façon formalisée les effets d’entraînement amont et aval à l’origine de l’agglomération des facteurs de production mobiles.

Etant donné la présence de rendements croissants dans la production industrielle, les entrepreneurs mobiles cherchent à concentrer leur production sur un nombre limité de sites. Les rendements d’échelle sont internes à l’entreprise et sont dus à la l’existence d’un coût fixe en capital dans le processus de production.

La préférence pour la variété des consommateurs associée aux rendements croissants expliquent qu’aucune firme ne produise un bien déjà présent sur le marché. Chaque entreprise s’engage dans la production d’une variété différente. L’absence de barrières à l’entrée ou à la sortie du marché implique que le prix de vente des biens différenciés soit celui qui permette juste de couvrir les coûts. Par conséquent, les firmes évoluent dans un contexte de concurrence monopolistique de type Dixit-Stiglitz (1977).

En outre, les rendements croissants et le goût des consommateurs pour les biens différenciés poussent les firmes à localiser leur production en un seul lieu et donc dans la région qui leur offre le maximum de débouchés. Le producteur décide donc de s’implanter dans la localité où la demande est la plus élevée, c’est-à-dire la région qui compte le plus de consommateurs. C’est l’effet marché domestique désigné par Krugman (1991).

Toutefois, les consommateurs mobiles sont, eux aussi, incités à s’installer dans la région la plus peuplée car celle-ci propose une grande diversité de biens différenciés et un vaste marché du travail. De plus, la localité qui concentre la production est aussi celle qui offre un meilleur rendement réel du capital car les biens de consommation y sont disponibles sans avoir à supporter de coûts de transport. Le coût de la vie y est donc moins cher. Cet effet d’entraînement est l’effet indice de prix habituellement présent dans les modèles d’économie géographique.

Ces deux effets sont à l’origine d’un processus cumulatif de concentration des firmes et des travailleurs mobiles. Ils représentent donc les forces d’agglomération.

La présence de coûts de transport pour les biens industriels vient contrer le processus cumulatif et jouer le rôle de force de dispersion. C’est, en effet, parce qu’il existe le groupe des agriculteurs sédentaires et donc plusieurs marchés à couvrir que les firmes et les travailleurs ne se concentrent pas tous dans la même localité. Les entrepreneurs doivent donc décider de leur implantation en considérant le niveau des coûts de transport à supporter pour acheminer leur production jusqu’aux lieux de consommation.

A long terme, les propriétaires de capitaux mobiles (assimilés aux firmes) migrent entre les régions en fonction de l’utilité relative proposée par les différentes localités. C’est-à-dire celle qui leur offre le rendement réel le plus élevé. L’équilibre spatial émerge alors lorsqu’il n’existe pas de différentiel d’utilité entre les régions.

Le jeu entre forces d’agglomération et force de dispersion va donc conditionner la distribution spatiale des firmes. Si les premières dominent les secondes, le capital sera concentré dans une localité centre A l’inverse, si les coûts de transport sont élevés, les forces de dispersion sont plus puissantes et le capital est réparti de façon symétrique entre les régions.

L’étude de la stabilité des équilibres montre que pour des coûts de transport élevés, il existe un seul équilibre stable où le capital est distribué symétriquement entre les

deux localités. Lorsque ces coûts baissent et passent en dessous du seuil critique (Tb)

l’équilibre symétrique devient instable. Enfin, une réduction des coûts de transport en

deçà d’un second point critique (Ts) permet l’émergence d’un nouvel équilibre avec une

concentration du capital dans une seule des régions.

Le modèle a permis l’élaboration d’un cadre conceptuel d’économie spatiale. Celui-ci permet de mettre en lumière les mécanismes d’agglomération mais sa complexité le rend difficile à manipuler. Dans ce chapitre, nous avons fait le choix de décrire précisemment les hypothèses et les méthodes de résolution analytique du modèle afin de s’affranchir d’un certain nombre de calculs et de pouvoir ensuite directement concentrer notre réflexion sur l’objectif théorique de la thèse.

En effet, l’objet théorique de notre étude est de fournir une modélisation spatiale de la concurrence fiscale qui intègre à la fois les taux de taxe comme force de dispersion et les dépenses publiques comme force d’agglomération. Il s’agira donc, dans la seconde partie de la thèse, de focaliser notre attention sur l’équilibrage de ces deux forces et sur le jeu des gouvernements entre politique de dépenses publiques et fiscalité.