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2.2.)Schizophrénie)et)cognition):)Hétérogénéité)des)troubles)cognitifs) ) En effet, si les fonctions cognitives semblent être perturbées dans leur ensemble (Saykin

et al., 1991 ; Saykin et al., 1994), certaines le seraient davantage que d’autres (Levin, 1984).

C’est le cas notamment de la mémoire verbale, des fonctions exécutives et de l’attention (Saykin et al. 1994 ; Bilder, 1996 ; Albus et al., 1997 ; Aleman et al., 1999 ; Sitskoorn et al., 2002). Par ailleurs, alors que certaines composantes semblent perturbées, au sein d’une même fonction d’autres seraient intactes ; et seules certaines formes de mémoire seraient perturbées.

Ainsi, les performances aux tests de mémoire implicite des personnes souffrant d’une schizophrénie semblent épargnées (Gras-Vincendon et al., 1994 ; Danion et al., 1999, 2001, 2003 ; Achim et Lepage, 2003). Ces données sont d’autant plus importantes qu’elles représentent une voie d’exploitation potentielle des capacités préservées pour transmettre des apprentissages et des connaissances relatives aux domaines de la vie quotidienne, sociale et professionnelle des patients que perturbent les troubles cognitifs.

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S’il est donc indéniable que les déficits cognitifs constituent une des caractéristiques fondamentales et des plus invalidantes de la schizophrénie, il subsiste néanmoins une importante hétérogénéité cognitive (Shallice et al., 1991 ; Seaton et al., 2001 ; Chan et al., 2006) qui concerne certes les domaines cognitifs altérés, mais également l’ampleur et la nature des déficits cognitifs.

2.2.1.)ExisteUtUil)des)sousUtypes)cognitifs)distincts)?)

Shallice et al. (1991), ont montré un type d’hétérogénéité concernant la nature des déficits cognitifs à partir d’analyses de cas unique de cinq patients souffrant d’une schizophrénie.

L’administration d’un nombre important d’épreuves cognitives (évaluant le fonctionnement intellectuel général, les fonctions perceptives et langagières, les fonctions mnésiques et les fonctions exécutives) leur a permis de dégager trois profils cognitifs qualitativement différents chez ces cinq sujets : (1) un profil de dysfonctionnement frontal (deux personnes) et (2) un profil de dysfonctionnement cognitif plus généralisé (trois personnes). En outre, (3) une de ces trois personnes souffrait en plus d’un déficit perceptif spécifique (agnosie visuelle).

Seaton et al. (2001) ont également tenté, à partir d’études ayant identifié des sous-groupes de patients selon leur niveau de performance cognitive, de répondre à la question controversée de savoir si la schizophrénie reflètait plutôt un continuum de sévérité ou un certain nombre de sous-types distincts.

A partir de efforts visant à valider différents sous-types stables et significatifs de la schizophrénie, ils ont proposé un modèle qui inclut les causes, les caractéristiques, l'évolution et les résultats de l'hétérogénéité – Tableau 3.

Tableau 3. Modèle de l’hétérogénéité cognitive, symptomatique et neurologique de la schizophrénie -Seaton et al., 2001.

Bien que cette recherche ait typiquement généré des sous-types cognitifs significatifs, les auteurs n’ont pas été en mesure de distinguer les correspondances qui pourraient exister entre les différents profils cognitifs et les profils symptomatiques (plus d’une centaine de relations possibles). Ils ont ainsi conclu qu’il est probable qu’il puisse y avoir des mécanismes différents pour la production d'hétérogénéité cognitive et symptomatique, et que la diversité dans les présentations de la schizophrénie reflète une combinaison des continuités dans la sévérité de la maladie avec un certain nombre de sous-types significatifs et stables.

En employant une méthodologie en cas multiples, Chan et al. (2006) ont, pour leur part, examiné différentes composantes du fonctionnement exécutif chez 90 patients souffrant d’une schizophrénie. Ils ont examiné cinq composantes exécutives : l'initiation, la flexibilité, la désinhibition, la planification et l'attention soutenue. Les participants ont également été soumis à des tests d'intelligence générale et de mémoire. Ils ont été classés comme obtenant en moyenne une différence d’un écart-type et demi ou plus par rapport aux normes des tests. Six profils différents illustrent l’hétérogénéité des résultats :

- chez 27,8 % (n = 25) des sujets, les six composantes exécutives sont altérées ;

Dans la mesure où les deux groupes de patients qui se situent aux extrêmes du continuum observé étaient par ailleurs homogènes sur le plan du fonctionnement intellectuel, l’hétérogénéité exécutive relevée ne constituait pas un artefact. Cependant, les auteurs ont observé une hétérogénéité dans l’expression des symptômes psychotiques mise en lien avec un dysfonctionnement exécutif. En effet, les patients les plus déficitaires d’un point de vue exécutif étaient également caractérisés par une symptomatologie négative plus sévère comparés aux participants des autres groupes.

La majorité des études, qu’elles soient menées auprès de sujets présentant un premier épisode psychotique ou auprès de patients chroniques (Joyce et al., 2005 ; Joyce & Roiser, 2007), objectivent fréquemment des sous-groupes de patients présentant des profils cognitifs différents, allant de performances dans les normes (Heinrichs & Awad, 1993 ; Palmer et al., 1997 ; Kremen et al., 2000 ; Vinogradov et al., 2000 ; Allen et al., 2003 ; Wexler et al., 2009), à

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une atteinte sévère (Snitz et al., 2006), confirmant par là-même une évidente hétérogénéité cognitive dans la schizophrénie (Shallice, et al., 1991 ; Joyce et al., 2005 ; Bruder et al., 2011).

Parmi les troubles cognitifs observés dans la schizophrénie, certains sont considérés comme étant des déficits traits de la pathologie (Reichenberg et al., 2007) et apparaissent comme étant relativement stables dans le temps (Halari et al, 2006), d’autres apparaissent juste avant l’apparition des troubles et restent présents même en phase de rémission, d’autres encore ne sont associés qu’à la phase aiguë de la pathologie. De fait, Wykes et van der Gaag (2001) distinguent trois types de déficits cognitifs :

1. Les déficits(traits (p. ex. : les déficits de l’attention soutenue mis en évidence par le Continuous Performance Test3) présents avant le déclenchement de la pathologie, ils ne s’aggravent pas (ou peu) au cours de celle-ci.

2. Les déficits(acquis, (p. ex. : les troubles de la mémoire épisodique) apparaissent juste avant et pendant le premier épisode, restent stables au cours de la maladie, et sont encore présents lors des phases de rémission.

3. Les déficits(transitoires (p.ex. : les déficits d’attention sélective) associés à la phase aiguë, diminuent ou disparaissent au cours de la période de rémission des symptômes.

2.2.2.) Etude) de) l’hétérogénéité) des) troubles) cognitifs) par) analyse) en)