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Partie I. : État des lieux de l’accès au marché et stratégies d’accès précoce à l’innovation

3. Des systèmes de prix et de remboursement différents mais mobilisés pour l’accès à

3.1. Systèmes de santé des pays EU-5

3.1.3. Royaume-Uni

3.1.3.1. Présentation du système (45)

Le Royaume-Uni est constitué de l’Angleterre, l’Ecosse, le pays de Galles et l’Irlande du Nord, ainsi que de 14 territoires d’Outre-Mer. Le National Health System (NHS) est partout présent au Royaume-Uni, bien que chaque pays de celui-ci ait son propre système de santé. Le NHS est principalement financé par l’impôt et ses budgets sont approuvés par le Parlement.

En 2013, le système de santé a été réformé : le Health and Social Care Act (loi sur la santé et les services sociaux) a mis en place la décentralisation du système vers un service plus local. Dans cette réforme ont été créés 211 Clinical Commissioning Group (CCG), supervisés par le NHS, qui allouent les budgets décidés par le NHS aux établissements de santé publics et privés par des contrats annuels. Le NHS a en revanche conservé la responsabilité des soins primaires et de l’amélioration de la qualité des soins.

L’évaluation d’un produit en vue de son remboursement n’est pas systématique au Royaume-Uni. En effet, le NICE sélectionne certains produits en fonction de leurs enjeux économiques ou de santé publique. Le dossier est évalué par l’Evidence Review Group (ERG) du NICE. L’évaluation peut porter sur un seul produit ou bien sur plusieurs produits d’une même aire thérapeutique ou encore sur plusieurs indications pour un même produit.

L’étude du rapport coût/efficacité a une place importante au Royaume-Uni : l’Incremental cost-effectiveness ratio (ICER) mesuré en coût par Quality-Ajusted Life Year (année de vie pondérée par la qualité ; QALY) est conditionné par la sévérité de la pathologie, le coût de la pathologie ainsi que le besoin médical. Un produit ayant

un ICER inférieur à £20 000/QALY est considéré comme coût-efficace par le NICE

et se verra généralement attribuer une recommandation positive au remboursement (sauf en cas de faiblesse méthodologique par exemple). Cependant, les technologies ayant un ICER au-delà de £20 000/QALY peuvent toujours être recommandées par le NICE à condition que les laboratoires aient une argumentation convaincante pour sa prise en charge et plus particulièrement pour les médicaments ayant un ICER supérieur à £30 000/QALY (46).

54 Lorsque le NICE recommande le médicament, le NHS est obligé de le financer. Dans le cas où le produit n’est pas recommandé, le traitement peut être fourni aux CCG qui assurent le financement par leurs propres fonds. Enfin, le médicament peut être temporairement refusé. Ces recommandations ont un poids obligatoire en Angleterre et au Pays de Galle alors qu’en Ecosse, la décision du Scottish Medicines Consortium (SMC) (autre organisation d’évaluation pour le remboursement des médicaments par le NHS) prévaut sur celle du NICE. En Irlande du Nord, en revanche, la décision du NICE doit obtenir une autorisation avant implémentation. En l’absence d’évaluation du NICE, il revient aux CCG de décider de la prise en charge de la technologie médicale.

Figure 7 : Système de remboursement du Royaume-Uni

Obtention de l’AMM par le MHRA/EMA

Classification du médicament : prescription

only medicine, pharmacy only, general sale list

Évaluation médico-économique par le NICE

Dossier préalable de l’industriel : information sur le médicament, la population cible et les

données cliniques

Dossier complet : données cliniques et économiques et modèle économique

Évaluation par ERG et rapport au NICE

Appraisal Commitee Meeting : présentation et

décision/discussion

Prise charge recommandée

Prise en charge non recommandée

Refus temporaire

Obligation de financement et de prise en charge par

les CCG

Mise à disposition possible par les CCG mais doivent

financer le produit

55 Au niveau pricing, la décision se prend entre le NICE, au niveau national et les CCG ou les hôpitaux pour un médicament non évalué par le NICE. Le prix des médicaments brevetés est librement fixé par l’industriel (« free pricing ») pour être ensuite indirectement contrôlé par le Pharmaceutical Price Regulation Scheme (PPRS). Ce dernier est un accord de contrôle volontaire (non obligatoire) de la déclaration de

prix faite au NICE par l’industriel ayant obtenu une AMM, opérationnel entre janvier

2014 et décembre 2018. En d’autres termes, le PPRS régule le profit que les industriels peuvent engendrer par les ventes au lieu de réguler les prix directement. La détermination du prix libre par le fabricant permet donc d’éviter les retards

d’accès des traitements pour les patients, à la différence des pays où le prix doit

être négocié avant d’arriver sur le marché. En revanche, si le prix est trop élevé, l’industriel risque de dépasser son plafond de profit. Il est à noter que le NICE évalue le ratio coût-efficacité de nombreux nouveaux produits, avec comme conséquence une restriction supplémentaire sur le pricing : un médicament jugé non coût-efficace ne sera pas recommandé pour une prise en charge par le NHS (47).

La mise en place d’un Value based pricing est en cours : il s’agit d’élargir le jugement du NICE avec des critères supplémentaires tels que le bénéfice social, les valeurs attendues. Ceci constitue une première approche afin de remplacer le système d’évaluation du remboursement basé sur le seuil du rapport coût-efficacité par un système d’appréciation du prix global.

Depuis 2009, deux mécanismes de risk sharing ont été mis en place au Royaume-Uni, il s’agit du Patient Access Schemes (PAS) et du flexible pricing. Le PAS est généralement proposé par le laboratoire lorsqu’il existe un risque d’évaluation négative par le NICE. La stratégie est alors de proposer une réduction du coût du médicament par des PAS financiers : discounts, rabais, accords prix/volume ou des PAS liés aux résultats : accords sur les résultats cliniques ou l’adhérence du patient. Par ailleurs, le flexible price est un accord entre le NICE et le laboratoire, ce dernier devant entreprendre la collecte de données supplémentaires dans le but d’analyser des résultats en vie réelle, le prix est susceptible de varier en fonction de ces résultats.

3.1.3.2. Laisser place à l’innovation : le Cancer Drugs Fund

A la suite des critiques faites au NICE par rapport à la non recommandation de prise en charge de médicaments pourtant innovants, notamment en oncologie et dans l’attente de l’instauration du Value based pricing, le Cancer Drugs Fund (CDF) a été mis en place en 2011. Le CDF a été réformé par la suite, en 2016 puis a été intégré dans le processus NICE.

56 Le nouveau CDF prévoit une évaluation systématique de tous les nouveaux anticancéreux par le NICE. Une première évaluation transitoire est menée après l’obtention de l’AMM et dans l’attente de la recommandation finale du NICE. Celle-ci permettra éventuellement le financement temporaire des anticancéreux en cas de recommandation à priori positive.

Trois types de recommandations finales peuvent être émis :

• Recommandation pour utilisation standard : médicament coût efficace (£20 000 à £30 000/QALY), financé par le CCG ;

• Non recommandation pour utilisation standard : médicament n’ayant pas démontré d’efficacité clinique et économique ;

• Recommandation de prise en charge par le CDF : prise en charge jusqu’à 2 ans. Chaque médicament dans le CDF sera réévalué sur base de collecte de données en vie réelle financée par l’industriel pour décider si la prise en charge s’effectuera à terme par le CCG, ou de l’absence de prise en charge. Les patients déjà couverts et dont le traitement est finalement retiré de la liste de la prise en charge du CDF, continueront à l’être.

La nouvelle réforme du CDF inclut un meilleur contrôle budgétaire avec un budget maximum de 340 millions de livres et des contrôles financiers importants (utilisation de provisions en cas de dépassement du budget et mesures exceptionnelles de rabais).