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Risques et limites de l’intégration de Réalité Mixte dans les Learning Games . 58

Chapitre 1. Les Mixed Reality Learning Games

1.5 Les apports de la Réalité Mixte aux Learning Games

1.5.4 Risques et limites de l’intégration de Réalité Mixte dans les Learning Games . 58

En dehors des atouts qu’elle offre, l’utilisation de Réalité Mixte présente aussi un certain nombre d’inconvénients ou de limites.

1.5.4.1 Logistique (transportabilité, place)

Certains systèmes mixtes peuvent s’avérer contraignants car lourds, volumineux, ou simplement peu pratiques à utiliser. Haptic Workstation (Ott et al., 2007) est un exemple d’environnement particulièrement volumineux et lourd, mais d’autres dispositifs plus habituels tels que des tables interactives prennent aussi de la place et sont contraignants à déplacer.

1.5.4.2 Facteurs de motivation devenant facteurs de distraction

Certains facteurs de motivation peuvent aussi être des facteurs de distraction pour l’apprenant. En ce qui concerne les ressorts ludiques, si ces facteurs ne sont pas directement liés au contenu pédagogique, la motivation du joueur est extrinsèque (Asgari et Kaufman, 2004), comme par exemple lorsqu’une une animation apparaît en récompense de l’atteinte d’objectifs. Il est même possible de rendre plus intéressantes les conséquences d’une erreur que celles d’un succès. Avec pour effet pervers que si une animation amusante accompagne une erreur, elle peut donner envie au joueur de perdre pour la revoir.

Il en est de même pour la Réalité Mixte qui peut distraire l’apprenant de l’objectif d’apprentissage visé par le formateur. Cette facette est illustrée dans (Nilsen et al., 2004), qui ont réalisé un jeu Worms en Réalité Augmentée. Ces auteurs précisent que lors de l’expérimentation, de nombreux joueurs étaient plus intéressés par la technologie en elle-même que par le jeu, ce qui a faussé la situation d’évaluation.

1.5.4.3 Charge mentale

La Réalité Mixte multiplie les sources d’information pour l’utilisateur : réel et virtuel, images, sons, informations individuelles ou partagées, … Ce dernier peut donc être noyé sous cette masse d’informations, et se retrouver en situation de surcharge cognitive. Perry et al. (2008) ont observé ce phénomène lors de l’expérimentation de Zoo Scene Investigators.

1.5.4.4 Charge physique

Dans la plupart des études déjà réalisées, les modèles de visiocasques, et autres vidéoprojecteurs portables induisent volume et un poids empêchant une bonne utilisabilité du dispositif (Anastassova et al., 2007). Lors de la réalisation d’un système avec un poids important à porter, il est important que les différentes parties du dispositif soient réparties équitablement sur différentes parties du corps. Cet aspect est également souligné par les auteurs du jeu Human Pacman (Cheok et al., 2004).

Les désagréments de ces dispositifs portables sont aujourd’hui moins importants qu’il y a quelques années. Ils sont en général plus légers et moins volumineux, à l’image des tablettes tactiles. Ils restent néanmoins vrais dans le cas de dispositifs sur-mesure.

1.5.4.5 Non-maturité des systèmes de Réalité Mixte

La Réalité Mixte utilise un grand nombre de technologies, dont la plupart est encore peu mature et donc pas toujours fiable. Même des technologies aujourd’hui répandues dans notre quotidien montrent encore des faiblesses qui seront certainement améliorées dans les années à venir. Par exemple, les smartphones présentent une faible autonomie lors d’utilisation d’applications gourmandes (comme c’est le cas avec la Réalité Mixte), les HMD restent encombrants, les GPS sont peu fiables surtout en intérieur ou par mauvais temps,…

1.5.4.6 Coût des technologies

Le matériel de Réalité Mixte a un coût élevé, et cela d’autant plus s’il s’agit de technologies peu répandues. Squire et Jenkins (2003) soulignent les appréhensions liées au coût de ces technologies, qui constituent un frein aux ambitions des concepteurs. Les prix évoluent vite, et des dispositifs peu accessibles il y a encore quelques années deviennent abordables, ou devraient le devenir dans les mois ou années à venir.

1.5.4.7 Difficultés de conception

Compétences des concepteurs

La conception de MRLG requiert, pour les concepteurs, des compétences spécifiques diversifiées. Il faut à la fois être capable de :

• maitriser le domaine sur lequel porte l’apprentissage,

• utiliser à bon escient un environnement technologique varié, • construire un scénario crédible,

• choisir des ressorts pédagogiques et ludiques pertinents.

De plus, chacune des composantes des MRLG doit se marier harmonieusement avec les autres, afin de former un tout cohérent. Il est difficile à un seul concepteur d’être compétent dans tous ces domaines. Une équipe de concepteurs couvrant l’ensemble de ces compétences pose des problèmes de travail collaboratif, qui plus est interdisciplinaire.

Ces obstacles sont illustrés dans Zoo Scene Investigator (Perry et al., 2008), pour les problèmes liés aux multiples dimensions à prendre en compte, ou Playing with fire (Power et al., 2010) pour la conception collaborative.

Une ergonomie différente

Il faut prendre en compte les limites de chaque dispositif, et concevoir les MRLG en respectant les heuristiques adaptées. Par exemple, l’écran d’un dispositif mobile étant de taille réduite, il faut prévoir de n’afficher que peu d’informations

à la fois. Créer un MRLG n’est pas seulement rendre un LG existant exécutable sur une autre plateforme que l’ordinateur, il faut réellement concevoir les activités et les interfaces autrement. L’interaction avec ces interfaces peut aussi être plus complexe pour l’utilisateur, en particulier si on demande aux joueurs de retenir de nombreux nouveaux gestes. Il faudra donc veiller à garder une cohérence entre tous les gestes et permettre au plus grand nombre de pouvoir réaliser les gestes proposés.

Démarche et durée de conception :

La conception de MRLG n’est pour l’instant pas guidée par des méthodes, démarches, ou outils spécifiques. En conséquence, les concepteurs tâtonnent, ce qui implique un temps de conception plus long, et donc un coût global de conception plus élevé. De plus, la qualité du résultat n’est pas garantie car il n’y a pas systématiquement de vérification de la cohérence de l’ensemble par des experts de chaque domaine.

1.6 Conclusion et positionnement

Les MRLG présentés dans ce chapitre suivent en très grande majorité le même schéma : support mobile, contexte authentique, jeu de rôle et d’enquête. Pourtant, comme nous l’avons constaté au travers des autres environnements présentés dans ce chapitre il existe une grande variété de dispositifs technologiques, de types de jeu ou d’apprentissage. De plus, les motivations sont bien présentes au vu du nombre d’exemples utilisant des systèmes de RM, ou de l’émergence actuelle des Learning Games. Plusieurs facteurs peuvent expliquer la variété limitée des MRLG : coût de certains dispositifs, non maturité des technologies, complexité de la conception, manque d’informations à disposition du concepteur, etc. Il semble en effet plus lourd de concevoir un environnement si complexe, présentant des inconnues dans plusieurs domaines (en fonction du profil de l’équipe de conception), nécessitant des investissements financiers parfois importants, … De plus, les MRLG recensés sont tous très récents (le plus ancien date de 2003).

De nombreux MRLG seront créés dans les années à venir et seront de plus en plus diversifiés, tant au niveau des technologies utilisées que des apprentissages ou des ressorts de jeu. Le potentiel des MRLG est énorme, et certains facteurs bloquant leur conception devraient diminuer ou disparaître : les technologies seront de plus en plus matures, accessibles, et un plus grand nombre d’exemples d’utilisation devraient servir de source d’inspiration aux concepteurs. Il nous paraît donc particulièrement intéressant d’accompagner les concepteurs, que ce soit dans le but de rendre la conception de MRLG « classique » (mobile, jeu de rôle/enquête, contexte authentique) plus facile, ou d’accompagner celle de MRLG plus innovants. Notre problématique se concentre sur ce point : nous cherchons à guider les concepteurs dans les phases amont du processus de production de MRLG.

Nous détaillerons dans le chapitre suivant les difficultés spécifiques à la conception de MRLG au travers d’une analyse de ce processus. Nous verrons ensuite que nous pouvons proposer plusieurs types d’assistance afin de soutenir les différentes étapes de la conception.

SYNTHESE

Dans ce chapitre, nous avons défini les Learning Games, la Réalité Mixte, et les Learning Games utilisant de la Réalité Mixte, que nous appelons des Mixed Reality Learning Games. Nous avons présenté un échantillon représentatif de l’utilisation de Réalité Mixte dans les environnements pour l’apprentissage ou le jeu. À partir de cet état de l’art, nous avons discuté les apports possibles de la RM aux environnements d’apprentissage ou de jeux traditionnels (numériques ou non).

Enfin, nous avons présenté et analysé un certain nombre de MRLG. À l’heure actuelle, nous constatons que ces environnements sont peu diversifiés. En effet, la grande majorité d’entre eux sont des Learning Games utilisant des supports mobiles (PDA, smartphones) issus d’une volonté des concepteurs de profiter d’un contexte authentique, et des jeux de rôle ou d’enquête. Nous pensons qu’une plus grande diversité de MRLG devrait apparaître dans les années à venir. La dernière partie synthétise les apports et limites observés de l’intégration de Réalité Mixte dans les Learning Games, en s’appuyant à la fois sur la littérature et les exemples précédemment présentés. Nous soulignons en particulier les difficultés liées à la conception de ces environnements, qui constitue le cœur de notre problématique : les MRLG sont des environnements récents, qui nécessitent des compétences particulières de la part des concepteurs, des durées et des coûts de conception élevés. Nous détaillerons la conception de MRLG plus précisément dans le chapitre 2, afin d’en définir les besoins spécifiques et les possibilités d’assistance.

Chapitre 2. Analyse de l’activité de