• Aucun résultat trouvé

Pour la conception de situations d’apprentissage

Chapitre 3. Méthodes et outils pour l’assistance à la conception

3.1 Modèles de description de LG, de jeux, et de systèmes de RM

3.1.2 Pour la conception de situations d’apprentissage

La scénarisation pédagogique est utilisée par de nombreux enseignants pour partager et réutiliser des situations d’apprentissage. Ces scénarios peuvent être modélisés grâce à des formalismes de modélisation pédagogiques.

3.1.2.1 IMS-LD

IMS Global Learning a proposé en 2003 un langage nommé IMS-LD (Learning Design) (IMS Global Consortium, 2003). Ce langage permet d’articuler entre elles des activités d’enseignement sous forme d’un workflow, et d’y rattacher les objectifs d’apprentissage, les rôles de chacun et les ressources utilisées (Figure 59). Il utilise la métaphore du théâtre pour le découpage du scénario. Ainsi, un scénario est décomposé en pièces, actes et partitions, et l’unité « élémentaire » est l’activité. La description d’un scénario avec IMS-LD est donc formalisée de manière structurée. Elle donne lieu à des fichiers xml réutilisables et exécutables par des moteurs d’exécution adaptés.

Figure 59 - Le modèle IMS-LD (IMS Global Consortium, 2003)

IMS-LD illustre l’importance d’une structuration claire, qui donne lieu à des scénarios réutilisables. Pourtant, les concepteurs ont du mal à l’utiliser. De plus, nous rejoignons l’avis de Nodenot (2006) qui pointe certaines limites de ce langage :

• Dans le cadre d’apprentissages situés; car on ne peut exprimer le contexte, • Pour l’expression d’activités collaboratives ou menées en parallèle ; il est par exemple impossible d’exprimer de quelle façon sont réalisés les échanges entre deux activités dépendantes l’une de l’autre,

• Lorsqu’il s’agit de décrire la dynamique des situations d’apprentissage. L’utilisation de ce langage au travers de MOT+ lors de la conception de LeaRnIT (voir section 2.5.3.3) nous permet de compléter cette analyse en mentionnant que la granularité de la description, qui s’arrête à l’activité, ne permet pas de décrire comment l’apprenant doit la faire, c’est à dire avec quelles interactions ou sur quelles interfaces (ni dire si celles-ci sont réelles ou numériques). Or, cette précision peut être particulièrement importante lorsqu’il s’agit d’atteindre un objectif psychomoteur ou de jouer sur l’expérience ressentie par le joueur. Plus globalement, nous ne pouvons exprimer aucune règle générale régissant le jeu, ou aucun objectif global à atteindre qu’il soit pédagogique ou ludique.

3.1.2.2 LDL

Les limites sur le plan de la modélisation d’un scénario d’apprentissage collaboratif ainsi que la complexité du langage ont conduit une équipe de recherche à proposer une alternative à IMS-LD : Learning Design Language (Martel et al., 2006). LDL est destiné aux enseignants qui souhaitent concevoir et décrire des activités d’apprentissage. Une architecture d’opérationnalisation et d’exécution (LDI : Learning Design Infrastructure) est associée à LDL. LDL met en avant la modélisation des interactions entre participants au cours des activités plutôt que les activités elles-mêmes. Ces interactions sont organisées dans des structures en parallèle, en séquences ou sans ordre (Figure 60). Les participants interviennent dans des interactions au travers de leurs rôles, en un lieu précisé. Ils peuvent aussi adopter des positions. Enfin, les règles permettent de conditionner le début ou la fin d’interactions.

Figure 60 - Le méta-modèle LDL (Martel et al., 2006)

LDL apporte des réponses pour la scénarisation de Learning Games en Réalité Mixte puisqu’il permet d’exprimer le contexte, les interactivités et la dynamique au travers des positions ou des règles. En revanche, à l’instar d’IMS-LD, les interactions avec une interface matérielle/logicielle ne peuvent pas être décrites.

3.1.2.3 ISiS

Le modèle ISiS (Intentions-Strategies-interactional Situations) proposé par Emin (2010) vise principalement un public d’enseignants du secondaire, non experts en modélisation pédagogique. Ce modèle a la particularité de spécifier les intentions pédagogiques de l’enseignant et la méthode qu’il met en place dans l’unité d’apprentissage (Figure 61). Ainsi, dans ISiS, le concepteur commence par décrire ses intentions sous la forme de formulateur (personne qui formule l’intention), sujet, opération, objet et la stratégie qu’il souhaite adopter. Cette stratégie est découpée en différents cas ou phases, jusqu’au niveau des situations-types d’interaction à choisir parmi un répertoire de propositions. Emin distingue le scénario intentionnel ainsi créé d’un scénario d’interaction, qui instancie les situations-type d’interaction (STI) que l’on peut formuler avec un langage de modélisation pédagogique tel qu’IMS-LD ou LDL. ISiS est donc un méta-modèle qui peut compléter les langages précédents.

Figure 61 - Le modèle ISiS (Intentions, Strategies, interactional Situations)

Nous pensons que les apports d’ISiS en matière de précision des stratégies pédagogiques peuvent s’étendre à notre cas, par exemple en ajoutant en amont de la scénarisation des précisions sur les technologies utilisées ou sur les leviers de motivation utilisés.

3.1.2.4 Capacité des modèles de scénarisation à décrire un MRLG

Nous avons comparé la capacité des trois modèles décrits ci-dessus à formaliser un MRLG. Nous avons pour cela identifié, parmi les dimensions qu’un modèle de description de MRLG doit pouvoir modéliser (définies dans le chapitre 2), lesquelles sont prises en compte par ces modèles. Nous avons aussi précisé si le modèle est instrumenté par un éditeur informatisé, et qui sont les utilisateurs du modèle.

Dimensions à

modéliser IMS-LD LDL ISiS

Objectifs ou intentions pédagogiques

Objectif global à

atteindre Non Non Dans les intentions

Méthode ou

stratégie Non Non Dans les stratégies

Déroulement du scénario Niveau de description du workflow Découpage en trois niveaux : Pièce, actes, partition Découpage en structures. Les structures peuvent s’imbriquer. Découpage en cas ou phases jusqu’aux situations-type d’interaction (STI) Rôles des participants Oui

Oui, précisé par rapport à une

interaction

Dans les STI

Interactions entre

rôles Non Oui Oui

Dynamique

Conditions

d’exécution d’une activité

Règles de l’activité et

positions prises par les

participants Phases/cas soit séquentielles soit parallèles Environnement /contexte Technologies utilisées Dans environnement

Non (seuls les services tels que forum ou chat sont précisés dans les

enceintes) Non Ressources et outils utilisés Dans Ressources et services

Oui, précisé par rapport à une

interaction

Ressources et outils dans les STI

Interactions avec

le matériel Non Non Non

Maquette des interfaces (sketching)

Non Non Non

Lieu Non Dans l’enceinte Dans les STI

Eléments de jeu Règles de jeu (non prévu) Avec les conditions (non prévu) Avec les règles des

activités Non Principes ou mécaniques de jeu utilisées Non Non (non prévu) Dans les intentions ou les stratégies Autres éléments

de jeu Non Non Non

Instrumentation du formalisme

Editeurs Reload, MOT+,

Collage, ... Composant de LDI ScenEdit Type de fichier de

sortie

Fichier xml executable

Scénario exécutable par la pateforme LDI

Cahier des charges descriptif Utilisateurs visés Experts en modélisation/ ingénierie pédagogique Concepteurs pédagogiques experts Enseignant du secondaire, ingénieurs pédagogiques

Tableau 4 - Comparaison d’IMS-LD, de LDL, et d’ISiS

Les modèles comparés permettent tous de représenter la structure d’un enseignement en organisant les activités à la manière d’un workflow. Cependant,

ils ne décrivent pas le même niveau du scénario. ISiS reste à un niveau plus global du jeu, et s’arrête au niveau d’activités génériques, tandis qu’IMS-LD et LDL utilisent plusieurs niveaux de description pour permettre une description plus en profondeur. Dans le formalisme IMS-LD, le plus bas niveau de description est « activité », ce qui ne suffit pas à décrire de quelle façon l’apprenant doit réaliser l’activité ni avec quel dispositif. De plus, il n’est pas possible de spécifier le contexte de l’apprentissage, ce qui est un réel manque dans le cas d’apprentissage situé. De son côté, LDL se concentre sur les interactions entre apprenants, ce qui rend difficile la description d’autres types d’interactions, dont celles avec des technologies de Réalité Mixte.

Nous observons que la formalisation des objectifs et activités de jeu reste limitée pour la scénarisation des aspects ludiques. L’utilisation détournée des règles pour LDL et des conditions d’exécution pour IMS-LD permettraient d’exprimer des règles de jeu. D’autres éléments tels que le but du jeu ou les mécaniques de jeu peuvent être précisés à travers les intentions ou stratégies du modèle ISiS.

Enfin, la modélisation détaillée des activités réalisées avec des technologies de Réalité Mixte est impossible dans les formalismes présentés. Actuellement, ces derniers ne permettent que la modélisation de l’utilisateur et, de manière limitée, celle des ressources et outils utilisés. Il faudrait pouvoir représenter en plus du matériel nécessaire, la façon dont ce matériel est utilisé, en distinguant ce qui est tangible de ce qui est numérique.