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Retour sur nos hypothèses

Dans le document L'évaluation dynamique du lexique (Page 67-70)

5.1.1 Hypothèse 1 : meilleurs résultats pour les enfants avec DT sur les mesures dynamiques

Notre première hypothèse spécifie que, si l’évaluation dynamique du lexique permet de distinguer les enfants au développement typique de ceux ayant un trouble développemental du

langage oral, qu’ils soient bilingues ou non, alors les enfants DT présenteront de meilleurs résultats sur les mesures langagières dynamiques comparés aux enfants avec un TDL.

Effectivement, pour les scores en productions immédiate et différée, nous observons bien cette asymétrie entre les deux groupes et ce de manière significative. Ce résultat va, en partie, dans le sens de celui obtenu par Hasson et al. (2012) pour qui le rappel expressif différé était particulièrement utile pour discriminer les enfants bilingues DT de ceux suivis en logopédie. Néanmoins, contrairement à nos résultats, les deux groupes de cette étude ne différaient pas pour le rappel immédiat. En outre, les auteurs évoquaient la difficulté de rétention des représentations phonologiques pour les enfants avec un trouble langagier, ce qui fait écho à notre étude puisque les scores des rappels expressifs phonologiques sont extrêmement faibles dans le groupe TDL.

Nous validons également cette hypothèse pour les échelles de modifiabilité qui permettent de discriminer les enfants avec DT de ceux avec TDL à l’instar de Peña (2000) et de Kapantzoglou et al. (2012).

En revanche, les scores en identifications immédiate comme différée ne distinguent pas de manière significative les deux groupes, bien que les résultats aillent dans le sens souhaité.

Cela va à l’encontre de Kapantzoglou et al. (2012) pour qui le score d’identification est le meilleur prédicteur du diagnostic langagier. Néanmoins, Maselli (2018) et Navarra (2018) obtiennent un résultat similaire au nôtre en ce qui concerne l’identification. Plusieurs auteurs, notamment Gray (2003), ont en effet mis en avant que, dans une tâche d’apprentissage de mots, la production est plus prédictive que l’identification pour détecter la présence d’un trouble.

De plus, le score relatif au niveau d’étayage ne s’avère pas être discriminant puisque nous observons un effet plafond dans l’ensemble des groupes d’intérêt, en l’occurrence les enfants DT et TDL, qu’ils soient monolingues ou bilingues. Il semblerait que la stratégie d’élimination déployée et servant de base à l’étayage ait été trop évidente, y compris pour les plus jeunes. Cette même stratégie a été mise en œuvre pour le DAPPLE (Hasson et al., 2012 ; Camilleri et al., 2014) et n’a pas conduit à un effet plafond. L’une des explications pourrait être que le DAPPLE vise l’apprentissage de nouveaux mots, contrairement à notre étude qui s’attache à l’apprentissage de pseudo-mots parmi des mots déjà connus. Il se pourrait donc que la forme des pseudo-objets contraste de manière trop forte avec les objets réels connus de l’enfant. La saillance visuelle des pseudo-objets serait alors elle-même un indice qui prendrait

le pas sur les autres aspects, notamment phonologiques et sémantiques. Nous avons en effet remarqué au cours des passations que certains enfants désignaient la carte avec le pseudo-objet avant même d’entendre entièrement le pseudo-mot.

5.1.2 Hypothèse 2 : différences entre tests statiques et tâche dynamique chez les enfants DT

La seconde hypothèse se centre sur le groupe DT et interroge la comparaison entre les tests statiques et les scores dynamiques. Si celle-ci aboutit à une différence d’évaluation, nous nous attendons alors à observer au sein du groupe DT : d’une part, une meilleure performance des monolingues par rapport aux bilingues pour les tests statiques, et d’autre part, des scores similaires entre les deux groupes sur les mesures dynamiques.

Premièrement, nous avons pu confirmer que les monolingues avec DT présentent des scores significativement plus élevés que les bilingues avec DT pour l’Evalo 2-6. En revanche pour la Bilo 3C, les résultats suivent le sens souhaité mais de manière non significative. Il semblerait que la tâche « Lexique en production » de cette batterie soit peu sensible, du fait qu’elle n’ait non plus pas discriminé les enfants avec DT de ceux ayant un TDL.

Deuxièmement, bien que les scores dynamiques des monolingues DT soient supérieurs aux bilingues DT, les deux groupes ne diffèrent pas de manière significative ni pour les scores en production et en identification, ni pour les échelles de modifiabilité.

Ces résultats indiquent ainsi des différences d’évaluation au sein du groupe DT : les tests statiques défavorisent les bilingues alors que leurs performances ne se péjorent pas significativement sur les mesures dynamiques. Nous validons ainsi notre seconde hypothèse en corroborant également les résultats obtenus par Camilleri et Law (2007) et Peña et al. (2001).

5.1.3 Hypothèse 3 : différences entre scores statiques et dynamiques chez les bilingues DT et monolingues TDL

La troisième hypothèse s’intéresse aux mesures statiques et dynamiques en prenant pour point de comparaison les enfants bilingues avec DT et les enfants monolingues avec TDL.

Ainsi, si des différences entre les deux types d’évaluation sont observées, alors nous attendons des scores équivalents entre les bilingues DT et les monolingues TDL pour les tests statiques, alors que pour les mesures dynamiques, les premiers auront des scores significativement plus élevés que les seconds.

D’une part, qu’il s’agisse des scores de l’Evalo 2-6 ou de la Bilo 3C, les mesures statiques ne parviennent pas à discriminer les enfants bilingues avec DT des enfants monolingues avec TDL. D’autre part, ces deux mêmes groupes ne diffèrent pas non plus de manière significative sur les mesures dynamiques, à l’exception des échelles de modifiabilité.

Ces dernières se révèlent ainsi être un outil diagnostic intéressant, comme avait pu le démontrer Peña (2000). Bien que ces résultats ne nous permettent pas de valider notre hypothèse, nous observons un effet marginal en production totale différée, et des résultats allant pour la plupart dans le sens souhaité bien que non-significatifs. Nous pourrions donc envisager d’obtenir des résultats plus probants en augmentant le nombre d’enfants bilingues.

En somme à travers cette étude, nous avons pu démontrer que l’évaluation dynamique permet de discriminer les enfants avec DT de ceux ayant un TDL, qu’ils soient monolingues ou bilingues (Hypothèse 1) et que, contrairement aux tests statiques, elle ne sanctionne pas les enfants bilingues avec DT par rapport aux enfants monolingues avec DT (Hypothèse 2). Par contre, notre étude n’a pas permis d’établir que l’évaluation dynamique pouvait distinguer significativement les enfants bilingues avec DT des enfants monolingues avec TDL (Hypothèse 3).

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