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B.4.3 Le cas équidimensionnel

Cette méthode, bien plus élégante que celle présentée ci-avant, est décrite dans [Jin20, Alg. 8.5]. Soit X = Speck[x1, . . . , xn]/(f1, . . . , fm) un schéma affine de type fini surk dont toutes les composantes irréductibles sont de même dimensionr. Soitν:X →Ark une normalisation de Noether deX. Lemme B.4.10. La restriction deν à toute composante irréductible deX est encore surjective.

Démonstration. SiCest une composante irréductible deX alorsν|C est encore un morphisme fini, et doncdim(ν(C)) = dim(C) = dim(X) =rpar équidimensionnalité deX. De plus, encore par finitude, ν(C)est un fermé deArk de dimensionr, il est donc égal àArk.

La fibreν−1(0) = : SpecRintersecte donc chaque composante irréductible deX. Une décomposition primaire deR (présenté par générateurs et relations), qui est unek-algèbre finie, fournit pour chaque composante primaireCune base de Gröbner de son réduit. Ceci permet d’obtenir par factorisation une liste dek¯-points, qui contient au moins un élément de chaque composante irréductible. L’algorithme est donc composé de 4 étapes : un calcul de normalisation de Noether, une décomposition primaire, des calculs de bases de Gröbner d’idéaux zéro-dimensionnels puis des factorisations.

Nous n’avons pas précisé, dans la section sur les bases de Gröbner, la complexité des différents algorithmes ; cependant, la complexité de la normalisation de Noether décrite dans [Dic+91, Alg. 1.13]

est déjà, pour un idéal dek[x1, . . . , xn] engendré par m équations de degré maximal d, de l’ordre de m3dO(n2). Il n’y a donc pas de gain de complexité notable par rapport à la méthode par recherche de points isolés d’intersections avec des hyperplans présentée dans la sectionB.4.2.2.

La restriction de WeilRY→X(V)est alorsSpeck[wij]/(fαβ). Le morphisme d’adjonction V →RY→X(V)×XY

est donné par k[vi]/(hγ) → k[wij]/(fαβ), vi 7→ P

jwijbj. De même, si V = U ×X Y, le morphisme d’adjonctionU →RY→X(V) est donné en écrivant1 =P

jajbj avecaj ∈A, et en envoyant wij sur ajvi∈A[vi].

La restriction RY→X(φ)d’un morphisme φ:V → V0 de Y-schémas se calcule par la même mé-thode. De plus, siV est un schéma en groupes surY, la même méthode permet de calculer la loi de groupe surRY→X(V). En effet, comme la restriction de Weil est un adjoint à droite, elle commute aux limites, etRY→X(V×YV) =RY→X(V)×XRY→X(V). Il suffit donc de déterminer le morphisme RY→X(V ×Y V →V).

ANNEXE C

Algorithmique des courbes

C.1 Représentations des courbes lisses

Par défaut, une courbe sur un corpsk0est représentée par un recollement de courbes affines comme décrit dans l’annexeB.1.1. Une courbe intègre surk0étant toujours isomorphe à un ouvert d’un fermé d’un espace projectif [Stacks, 0A27], d’autres représentations des courbes seront données ici.

C.1.1 Courbes singulières, compactification lisse

C.1.1.1 Résolution des singularités d’une courbe plane

Soit k0 un corps. Soit C = Projk0[x, y, z]/(f) une courbe projective plane intègre de normalisée X. Notonsd= deg(f). La courbeCa au plus (d−1)(d−2)2 points singuliers [Fis01, Th. 3.8].

Définition C.1.1. Un pointP d’une courbe planeC est dit ordinaire si le nombre de tangentes à C enP est égal à la multiplicité deC enP.

Par moins ded2 transformations quadratiques, il est possible [FW89, 7.4, Th. 2] de construire une courbeX0 birationnelle àX ayant uniquement des singularités ordinaires. Le degré de la courbe X0 estO(2d2).

La méthode classique de résolution des singularités sur une variété quelconque procède par éclatements successifs ; elle a l’avantage de construire directement un plongement projectif deX, mais l’inconvénient que l’espace projectif dans lequelXest plongée est de grande dimension. En partant deX0à singularités ordinaires, il suffit d’un seul éclatement par singularité. Les algorithmes n’ont souvent pas besoin de connaître un plongement projectif deX, mais simplement une description des points de X au-dessus de chaque singularité deC.

Proposition C.1.2. [Koz94, §5] Il existe un algorithme déterministe qui prend en entrée une courbe C ⊂A2Fq (resp.A2Q) définie par un polynôme f = P

i,jaijxiyj ∈ Fq[x, y] (resp. Z[x, y]) de degré d tel que(0,0)∈C, et retourne l’arbre de désingularisation de C en(0,0), en un nombre d’opérations polynomial endet en logq(resp. enlog max|aij|).

C.1.1.2 Compactification lisse

Soitk0un corps parfait. SoitX= Speck0[x1, . . . , xm]/(f1, . . . , fr)une courbe affine lisse surk0. En homogénéisant lesfi, on obtient l’adhérenceY deX dansPmk0. La courbeY est possiblement singulière en-dehors de son ouvert isomorphe àX. La normalisationX¯ deY est une courbe projective lisse dont un ouvert est isomorphe àX. Cette courbeX¯ est appelée compactification lisse deX; elle est unique à isomorphisme près. Étant donné un morphisme de courbes affines lissesX1→X2surk0, le morphisme composéX1→X2→X¯2 s’étend àX¯1 par régularité [Har08, I, Prop. 6.8].

C.1.2 Corps de fonctions, modèle plan birationnel

Soitk0 un corps. Rappelons que le foncteur qui à une courbe associe son corps de fonctions définit une équivalence entre la catégorie des courbes projectives régulières surk0munie des morphismes non constants, et la catégorie des extensions dek0de degré de transcendance 1 [Stacks, 0BY1]. Une courbe projective régulière peut donc être définie par son corps de fonctions.

Proposition C.1.3. [Sti09, Prop. 3.10.2.(a)] SoitX une courbe connexe lisse sur un corps parfaitk0. SoientP ∈X(k0)et t une uniformisante en P. Alors le corps des fonctionsk0(X) est une extension finie séparable dek0(t).

Étant donné une telle courbeX plongée dansPnk0, un morphismeX →P1k0 fini génériquement étale se calcule donc en cherchant une uniformisantet en un point P ∈X(k0). Si X(k0)est vide, il suffit de remplacer k0 par une extension k00 (de degré O(degX)) sur laquelle X a un point pour obtenir un morphisme Xk0

0 → P1k00. Sans perte de généralité, supposons que P se situe dans l’ouvert affine U0 = {x0 6= 0} de Pn. La courbe X est donnée par des polynômes f1, . . . , fm ∈ k[x1, . . . , xn] avec m>n−1. CommeX est lisse surk0, la matrice(∂x∂fi

j)i,jest de rangn−1. Il existe doncj∈ {1, . . . , n}

tel que le morphismexj−xj(P) :X∩U0→A1 soit étale en P, et donc quet:=xj−xj(P)soit une uniformisante enP. Le degré du morphismeX→P1induit partest donc de degré au plusdegX, qui est le nombre maximal de points d’intersection deH avec un hyperplan de Pn.

Afin de travailler avec un modèle birationnel plan de X, il suffit de chercher un élément primitif u de l’extension finie séparable k0(X)/k0(t) à l’aide de l’algorithme décrit dans la section A.3.2.2.

Rappelons que sik(X)est engendré par(x1, x2, . . . , xn), un tel élément primitif s’obtient sous la forme u=t+P

i6=jλixi avecλi ∈k. Alorsk0(X) = k0(t, u) =k0(t)[u]/(f), où f est le polynôme minimal deusur k0(t). Ceci définit un morphisme birationnel X →C, où C est une courbe projective plane d’équation dans une carte affinef(t, u) = 0. Supposons, quitte à le multiplier par un élément dek0[t], quef est un polynôme primitif dansk0[t][u]. Le lemme de Gauss assure alors que f est irréductible dansk0[t, u]et dansk0(u)[t]; par conséquent,deg(f) = [k0(X) :k0(u)]. De même que ci-dessus, comme u=t+P

iλixi est de degré 1, le degré du morphismeX →P1engendré par cette fonction est majoré pardegX. Or degt(f) = [k0(X) : k0(u)]6degX, et degu(f) = [k0(X) :k0(t)]6degX. Par consé-quent,deg(C)6deg(X)2.

De plus, le degré d’un modèle plan peut être borné en fonction du genre de la courbeX. SiX est hyperelliptique, il est connu qu’elle admet un modèle plan de la forme

y2+h(x)y=f(x)

avec degh,degf 6 2g + 2. Ce modèle s’obtient grâce au revêtement double X → P1. Si X n’est pas hyperelliptique, son diviseur canonique K est très ample, et le choix de g−3 points généraux P1, . . . , Pg−3 de X permet d’obtenir un diviseur D =K−P

iPi birationnellement très ample dont l’espace de Riemann-RochL(D)est de dimension 3 [KM08, §1]. Dans tous les cas, il est possible de construire explicitement un modèle birationnel plan deX de degréO(g).

Par conséquent, toute courbe projective lisse admet un modèle plan à singularités ordinaires de degré O(2g).

C.1.3 Représentation comme O

P1

-algèbre

C.1.3.1 Description

Cette description est celle employée par Jin dans [Jin20]. SoitX une courbe intègre projective lisse sur un corps parfaitk0. Supposons-la décrite comme fermé d’un espace projectif surk0. D’après la pro-positionC.1.3, le calcul d’une uniformisante permet d’obtenir un morphismeX→P1dont l’extension de corps de fonctions correspondante est séparable. Le morphismeX → P1 est donc génériquement étale par [Mum15, 5.4.3].

Lemme C.1.4. Le faisceauφ?OX est un fibré vectoriel surP1.

Démonstration. Le morphismeφest un morphisme non constant d’une courbe vers une courbe régu-lière, il est donc plat par [Stacks, 0CCK]. Un module de présentation finie est localement libre si et seulement si il est plat [Stacks, 00NX] ; par conséquent,φ?OXest unOP1-module localement libre.

NotonsU0= Speck0[x]etU1= Speck0[x−1]les ouverts standard de P1.

Lemme C.1.5. SiF est unOP1-module localement libre de type fini alorsF(U0)est unk0[x]-module libre de rang fini, etF(U1)est unk0[x−1]-module libre de rang fini.

Démonstration. CommeF est un module localement libre de type fini, il est projectif [Stacks, 00NX].

En particulier,F|U0 est encore projectif, il est donc libre puisquek0[x]est principal.

Un fibré vectorielF de rangrsurP1 est défini par la donnée duk0[x]-moduleF(U0), duk0[x−1] -moduleF(U1)et d’un isomorphisme dek0[x±1]-modules

F(U0)⊗k0[x]k0[x±1]→ F(U1)⊗k0[x−1]k0[x±1].

Ces deux modules étant libres de rang r, cet isomorphisme se représente par une matrice MF à coefficients dansk0[x±1]qui dépend des bases choisies pour ces modules libres.

Calcul de φ?OX(U0) La préimage φ−1Speck0[x] est la normalisation dek0[x] dans l’extension de corps de fonctionsφ?:k0(x)→k0(C). Commek0est parfait, on sait calculer un modèle plan deCpar le théorème de l’élément primitif, et ainsi présenterk0(C)commek0(x)[y]/(f). Ensuite, on calcule la normalisation dans une extension de corps de la façon usuelle ; elle a dans ce cas précis une complexité plus abordable, comme décrit dans [Die08, Prop. 2.127]. D’après le théorème de Dedekind-Weber-Grothendieck [GW10, Th. 11.50], un fibré vectoriel surP1est isomorphe à une somme directe de fibrés en droites :

F ' OP1(n1)⊕ · · · ⊕ OP1(nr)

où lesni sont uniques à l’ordre près. De façon concrète, cela signifie qu’il existe des bases des modules libresF(U0)et F(U1)explicitement calculables telles que la matriceMF soit égale à

 xn1

. .. xnr

.

Cette somme de fibrés en droites est munie d’une structure de OP1-algèbre de la façon suivante.

D’une part, le morphisme canoniqueOP1→φ?OXdéfinit un morphismeOP1 → OP1(n1)⊕· · ·⊕OP1(nr). D’autre part, le morphisme de multiplication

(M

i

O(ni))⊗O

P1 (M

i

O(ni))→M

i

O(ni)

est défini sur U0 par la multiplication dans la k0[x]-algèbre F(U0) écrite dans la base choisie pour F(U0), et sur U1 par la multiplication dans lak0[x−1]-algèbreF(U1)écrite dans la base choisie pour F(U1). Par l’isomorphisme

(M

i

O(ni))⊗O

P1 (M

i

O(ni))−→M

i,j

O(ni+nj) cette multiplication équivaut à la donnée d’un morphisme

M

i,j

O(ni+nj)→M

i

O(ni).

CommeHomO

P1(OP1(a),OP1(b))' OP1(b−a), il y a des morphismes non triviauxOP1(a)→ OP1(b) si et seulement sib>a. Dans ce cas, un tel morphisme est défini par un polynôme homogène dek0[X, Y] de degréb−a. La multiplication est donc définie par une matrice de tailler×r2 dont les coefficients sont des polynômes homogènes de k0[X, Y]. Pour que la multiplication soit commutative, il faut et il suffit que les colonnes correspondant à (ni, nj) et (nj, ni) soient égales. SiX est géométriquement réduite alorsni60pour touti[Jin20, Lem. 6.17].

Notons qu’un morphisme deOP1-modulesLs

j=1OP1(bj)→Lr

i=1OP1(ai)est donné par une matrice de taille r×s à coefficients dans k0[X, Y], dont le coefficient en position (i, j)est nul si bj > ai, et homogène de degré ai−bj ou nul sinon. La composition de deux tels morphismes est définie par la multiplication matricielle. Un endomorphisme d’unOP1-module est inversible si et seulement si la matrice qui le décrit l’est.

Reconstruction de la courbe La courbeX peut être reconstruite à partir de la structure deOP1 -algèbre surL

iO(ni)induite par celle deφ?OX. En effet, le morphismeφ: X→P1 est un morphisme fini localement libre, il est donc affine, et par conséquentSpec

P1?OX)'X, oùSpecdésigne le spectre relatif. Il suffit donc de déterminer les courbes affinesSpec(⊕OP1(ni)(U0))et Spec(⊕OP1(ni)(U1))et de les recoller.

Remarque C.1.6. Certains couples (fibré, matrice de multiplication) ne définissent pas une courbe.

Par exemple, le fibréO ⊕ O(−1)⊕ O(−2)avec la matrice

1 Z3 Z4

1 2Z

1

définirait au-dessus de l’ouvertZ6= 0deP1 le schémaSpeck0[x, u, v]/(u2−2, uv−1, v2−1), qui est vide. De plus, rien ne garantit a priori la lissité du schéma obtenu.

Afin de s’assurer qu’un couple (fibré, matrice de multiplication) définit une courbe lisse, il convient de tester séparément si le schéma obtenu est de dimension 1 surk0 (voirB.2) et s’il est lisse (à l’aide du critère jacobien).

Remarque C.1.7. La même description est encore valable pour des courbes propres lisses qui ne sont pas nécessairement connexes : il suffit de faire la somme directe des fibrés obtenus pour chaque composante connexe. Cette remarque sert dans la sectionIV.4.