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Une rentrée scolaire 2020 « de temps de crise » présentée comme un retour à la

B. UNE RENTRÉE SCOLAIRE 2020-2021 SOUS LE SIGNE DE

2. Une rentrée scolaire 2020 « de temps de crise » présentée comme un retour à la

a. Sortir du récit démobilisateur d’une prétendue normalité

La rentrée 2020 n’est pas une rentrée « normale ». Les enfants ne sont pas dupes et ont bien vu que ce n’était pas une rentrée comme les autres. Or, le discours est bien celui d’une rentrée normale. Les programmes n’ont pas été adaptés et même la réforme du baccalauréat, dont la mise en œuvre représente un véritable défi, n’a pas été différée.

Entre le discours de normalité, qui se justifie par une volonté de réassurance, et la réalité vécue, les enfants et les adolescents peuvent en déduire que les adultes ont voulu leur mentir. Le terme de rentrée « normale » a pu apparaître comme stigmatisant pour les enfants ainsi que pour les enseignants, dont certains ont mal vécu la rentrée.

Les manifestations de mal-être sont nombreuses chez les enseignants. Après les soignants, ceux-ci ont également été héroïsés. Il leur a été demandé d’enseigner, de protéger, de gérer leur stress, les injonctions contradictoires et les protocoles.

Parallèlement, selon une étude menée par le syndicat SNUipp auprès de ses adhérents, 81 % des répondants se sentent plutôt mal ou très mal protégés dans l’exercice de leurs fonctions au sein de l’institution Éducation nationale.

Le discours devrait être plus proche de la réalité : les enfants ont droit à une rentrée scolaire, même si celle-ci va être différente et innovante ; nous vivons une expérience inédite, et nous allons chercher à la dépasser de manière positive en réinventant l’école et l’apprentissage.

b. Adapter les programmes pour tenir compte du contexte

Cette sortie de l’illusion de la normalité doit s’accompagner d’une adéquation entre les objectifs et la réalité vécue dans les établissements, et notamment dans les lycées où un fonctionnement à 50 % à distance est prévu entre le 5 novembre 2020 et le 20 janvier 2021 au moins, soit près d’un tiers de l’année scolaire.

À cet égard, les programmes et leurs contenus doivent être adaptés afin de tenir compte du décalage dans les apprentissages survenus sur l’année scolaire 2019-2020. Une telle adaptation pourrait permettre de lisser le rattrapage sur plusieurs années. Cette demande a été exprimée à plusieurs reprises par les personnes auditionnées, qui ont souligné toutefois que le ministère de l’Éducation nationale n’y paraissait pas réceptif.

Mme Valérie Sipahimalani, secrétaire générale adjointe du Syndicat national des enseignants du second degré – Fédération syndicale unitaire (SNES-FSU), a ainsi souligné : « Dans la durée, nous devrons tenir compte de la fragilité des acquis pédagogiques. Nous avons collectivement demandé au ministre de tenir compte de l’année dernière et de ce début d’année pour aménager les programmes, en particulier les programmes d’examens. Non seulement nos demandes demeurent sans réponse, mais nous devons également digérer des contraintes supplémentaires, (…). Nous avons l’impression que le ministère n’a pas réellement pris la mesure de la situation. » Mme Claire Krepper, secrétaire nationale du Syndicat des enseignants de l’UNSA (SE-UNSA), a également souligné la nécessité, dans la perspective des examens, d’adapter les programmes et les contenus.

Les fédérations de parents d’élèves sont allées dans le même sens.

Mme Myriam Menez, présidente de la PEEP du département du Val-de-Marne, a souligné que tous les parents et tous les représentants de parents souhaitaient et demandaient une adaptation des programmes, relevant que, « dans certains établissements, « la course à l’échalote » a déjà débuté. Certains enfants décrochent non pas à cause du Covid-19, mais tout simplement parce que la quantité de travail qui leur est demandée s’avère proprement insoutenable. Un temps de réadaptation était nécessaire, encore plus au niveau des lycées, puisqu’aucun lycéen – du moins en région parisienne – n’a pu retourner dans son lycée, soit pratiquement six mois sans cours. (…) Nous sommes en train de gérer un décrochage qui pourrait être évité, si nous acceptions de reconnaître qu’il est nécessaire, pour cette année et les années suivantes, de revoir la progression des programmes en fonction des niveaux afin de retrouver un fonctionnement beaucoup plus doux. »

Proposition : Adapter et alléger les programmes pour tenir compte des retards d’apprentissage liés à la crise sanitaire, notamment pour les classes à examens

c. Maintenir la pratique sportive à l’école

L’éducation physique et sportive constitue un enseignement à part entière Il est donc essentiel de continuer à assurer les enseignements d’EPS quelles que soient les circonstances. Ces enseignements ne doivent pas servir de variable d’ajustement, notamment dans le cadre des 50 % du temps passé en établissement pour les lycéens.

La pratique sportive à l’école, une activité essentielle à maintenir quelles que soient les circonstances

La fermeture des établissements scolaires a imposé l’arrêt de l’éducation physique et sportive, pratique peu compatible avec le télé-enseignement. Les professeurs ont parfois eu l’impression de perdre le sens premier de leur métier. Parallèlement, les équipes, malgré les complexités avérées, ont réinventé leur pratique, mais sans installations. Les professeurs d’EPS ont fait preuve d’engagement et d’inventivité pour proposer des pratiques de type fitness, yoga, renforcement musculaire…

S’agissant du déconfinement, le texte spécifique relatif à ce que l’on a appelé « les repères pour l’EPS », dans le cadre de la reprise de l’EPS a été produit très tardivement, ce qui n’a pas permis les temps de concertation nécessaires à la reconstruction de l’ensemble des programmations adaptées, à l’adaptation des séances au contenu du protocole sanitaire, diversement interprété, ce qui a engendré des injonctions contradictoires entre les inspecteurs pédagogiques régionaux (IPR) et les recteurs, chefs de centre, etc.

L’usage du masque devra faire l’objet d’une réflexion s’il doit perdurer sur le long terme.

En effet, il n’est pas aisé de le prendre, de le remettre, de gérer les appréhensions de ceux qui souhaitent le garder en permanence et la légèreté de ceux qui refusent de le porter. En outre, le port du masque engendre une fatigabilité plus importante pour les professeurs comme pour les élèves et il convient de ne pas négliger cet aspect.

Par ailleurs, certains professeurs d’EPS ne peuvent plus dispenser les heures d’enseignement, faute de structures en bon état pour accueillir les élèves pendant les heures d’enseignement prévues. Il serait souhaitable de consentir un effort d’investissement dans les structures sportives, ce qui nécessite bien sûr des financements, notamment de la part des collectivités locales, qui doivent être soutenues par l’État.

d. Prévoir des moments de concertation dans les équipes pédagogiques Un réel défaut de concertation au sein de l’Éducation nationale pendant la crise sanitaire a été identifié par la rapporteure lors des auditions de la commission.

Ce constat a d’ailleurs été illustré à la rentrée des vacances de la Toussaint, le 2 novembre : alors que le Président de la République avait annoncé un second confinement le 30 octobre et qu’un hommage au professeur Samuel Paty devait être préparé par les équipes pédagogiques dans chaque établissement, ces dernières devaient disposer d’un temps de concertation de deux heures – ce qui était déjà peu ; ce temps de concertation a finalement été annulé.

Mme Claire Krepper, secrétaire nationale du Syndicat des enseignants de l’UNSA (SE-UNSA), a déclaré lors de son audition par la commission d’enquête :

« Dans la première enquête que nous avions conduite à la rentrée, les deux mots qui ressortaient étaient « stressé » et « motivé ». Désormais, le terme « stressé » est toujours le premier mot cité par nos collègues, tandis que le terme « motivé » a disparu de la liste des premiers mots retenus : « difficulté », « frustration »,

« insécurité », « désarroi ». À noter que le terme « désarroi » est particulièrement retenu par les directeurs et directrices d’école, qui sont quotidiennement confrontés à la gestion de la crise sanitaire, au repérage des cas positifs, et qui sont en grande difficulté pour parvenir à faire face à cette situation. ». Si cette étude n’a pas valeur scientifique, elle donne une tendance intéressante quant à l’état d’esprit des enseignants.

Là encore, seule la concertation et l’écoute sont capables d’apaiser les tensions et peuvent permettre de dégager des solutions innovantes et adaptées aux circonstances particulières de chaque bassin de vie. La rapporteure estime nécessaire de prévoir des temps de concertation aux niveaux des rectorats, des directions académiques des services de l’Éducation nationale (DASEN) et des établissements,

en associant l’ensemble des équipes pédagogiques, soit les personnels enseignants, sociaux et médicaux, les parents d’élèves et les collectivités, notamment les mairies pour les écoles.

Un tel temps d’échange et de concertation à la rentrée de septembre 2020 aurait été précieux pour permettre un partage d’expérience sur le confinement et le déconfinement, en tirer les enseignements et mieux préparer la rentrée des élèves et des enseignants.

Propositions :

Augmenter les temps de concertation à tous les niveaux de l’institution scolaire – établissements, DASEN, rectorats – afin de dégager des modus operandi adaptés et acceptés par tous

Renforcer le rôle des ressources humaines au sein de l’Éducation nationale afin d’améliorer la prise en compte de la parole de la communauté éducative

3. Faire face à la crise de façon durable et concertée, en ouvrant davantage