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L ' IMPLANTATION DES LABORATOIRES SOUTERRAINS

I. P RENDRE UNE DÉCISION AU BON MOMENT

Le 20 décembre 1993, Christian Bataille remet à Gérard Longuet, ministre de l'Industrie, des Postes et des Télécommunications et du Commerce Extérieur d'une part, à Michel Barnier, ministre de l'Environnement d'autre part et enfin à Charles Pasqua, ministre de l'Intérieur et de l'Aménagement du Territoire, le rapport de sa médiation destinée à trouver des départements dont les élu.es sont potentiellement favorables à l'implantation d'un laboratoire souterrain et où le risque d'opposition à ce projet est a priori faible. Le député du Nord a sélectionné quatre départements : le Gard, la Haute-Marne, la Meuse et la Vienne.

Le 6 janvier 1994, les trois ministres du Gouvernement d'Édouard Balladur autorisent l'Andra à effectuer des reconnaissances géologiques dans ces quatre départements afin de « vérifier

la qualité géologique des sites » et de « préciser l'implantation possible des laboratoires »360. Le

communiqué des ministres précise qu'à l'issue d'une phase de reconnaissance, deux sites seront sélectionnés pour implanter des laboratoires361. Ni cette déclaration des ministres, ni les décrets d'application de la loi de 1991 ne donnent d'indication sur les modalités de sélection de ces deux

360 « Communiqué de presse commun du ministre d’État, ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire, du ministre de l’Industrie, des Postes et Télécommunications et du Commerce extérieur, et du ministre de l’Environnement. Laboratoires souterrains de recherche pour la gestion des déchets radioactifs : quatre départements retenus pour les travaux de reconnaissance », 1994.

sites. Le communiqué des ministres stipule uniquement que la période de reconnaissance peut durer jusqu'à deux ans. Une enquête publique et une consultation des collectivités locales doivent précéder les choix d'implantation de ces laboratoires362.

Les reconnaissances géologiques débutent durant l'été 1994. Ce même été, le choix des sites où implanter les laboratoires souterrains est au cœur de trois notes : une première de la Cellule d'Observation et de Conseil sur l'Implantation de Laboratoires de Recherche Souterrains signée le 24 juin par Jacques Monestier, une deuxième d'Yves Kaluzny, directeur général de l'Andra, en date du 5 juillet et enfin une dernière de la Direction Générale de l'Énergie et des Matières Premières (DGEMP) qui arrive à l'Andra le 5 septembre. Avant d'être sollicité comme conseiller sur l'implantation des laboratoires souterrains, le préfet J. Monestier a été la cheville ouvrière de l'équipe de médiation pilotée par le député C. Bataille.

Ces trois notes révèlent le caractère stratégique de l'implantation des laboratoires souterrains et l'adaptation de la direction de l'Andra et de ses interlocuteurs à la DGEMP au nouveau contexte induit par la loi Bataille. La qualité géologique des quatre départements sélectionnés par C. Bataille n'est pas l'unique critère de décision de la localisation des laboratoires. En effet, l'inscription de ces installations dans le monde du nucléaire les rend vulnérables à l'action de militant.es anti-nucléaires. Le moratoire de 1990 est encore dans tous les esprits. De plus, la loi de 1991 et le rôle donné aux élu.es dans le processus de choix de site a transformé le gouvernement de l'aval du cycle. Le CEA, les cabinets ministériels et le corps préfectoral ne sont plus les seuls acteurs de l'implantation des laboratoires souterrains. Néanmoins, durant cet été 1994, aucune raison permet de justifier le choix d'un site plutôt qu'un autre.

Dans ces notes, leurs auteurs s'interrogent sur le moment le plus opportun pour sélectionner deux sites où implanter des laboratoires souterrains. Les reconnaissances géologiques ont alors à peine débuté mais assurément, pour J. Monestier, Y. Kaluzny et la DGEMP, elles ne poseront pas de problème. Ils estiment alors peu probable que des éléments techniques permettent de choisir les sites les plus favorables pour accueillir un hypothétique stockage. Yves Kaluzny déclare ainsi :

« L'objectif de ces travaux [de reconnaissance préalable à l'implantation des laboratoires

souterrains] n'est pas de démontrer que les sites sont acceptables au regard de la RFS III.2.f pour un stockage de déchets radioactifs : c'est là l'objectif du programme complet prévu par la loi du 30 décembre 1991. Il ne s'agit pas non plus d'essayer de classer les quatre zones faisant l'objet de ces travaux préliminaires. En effet, d'une part le niveau de connaissance est très variable d'une zone à l'autre et d'autre part le déroulement des travaux est et sera encore

très variable d'une zone à l'autre : il nous paraît illusoire de penser pouvoir juger dans l'absolu des sites sur la base de critères purement techniques. Ces travaux doivent permettre de confirmer l’intérêt de poursuivre les recherches en laboratoires souterrains sur les zones

issues de la médiation363. »

Dans les notes qui s'échangent durant l'été 1994, le moment de la décision et sa forme occupent les débats. Faut-il décider rapidement de l'implantation des laboratoires alors que rien ne permet a priori de retenir ou disqualifier un site plutôt qu'un autre ? Comment serait alors perçue une telle décision précipitée ? Faut-il au contraire attendre que le temps fasse son effet et permette aux différences entre les contextes locaux de s'exprimer ? Dans ce cas, comment réagiront les élu.es à qui on a fait miroiter plus longtemps l'implantation d'un laboratoire ? N'est-il pas un peu risqué de reculer la décision alors qu'en cet été 1994 aucune opposition aux projets de laboratoire n'est encore menaçante ?

Le choix de l'implantation des laboratoires souterrains sera assurément un moment difficile et décisif364. J. Monestier précise :

« le moment du choix de deux départements sur les quatre peut se révéler délicat. De

multiples difficultés pourront surgir auxquelles il convient d'ores et déjà de réfléchir. La décision à prendre sera sans doute tout le contraire d'une décision d'autorité simple. Elle sera vraisemblablement et pour une part contestée. Elle interviendra au milieu de données politiques multiples et complexes, au cœur d'une réalité qui ne cessera, les 12 ou 15 derniers

mois l'attestent suffisamment, d'être évolutive et aléatoire365. »

La période des premiers travaux de reconnaissance depuis la surface est particulièrement importante dans le dispositif mis en place par Bataille. Alors que tous les choix semblent encore ouverts et possibles, la mémoire des mésaventures passées a enseigné au préfet J. Monestier que les choses peuvent changer vite et que le moindre événement peut avoir des conséquences politiques importantes. Ainsi, le calme de la période pourrait n'être que de courte durée. J. Monestier note :

« La manière dont sera gérée la période dans laquelle nous nous trouvons influencera la

suite. Il s'agit d'une période de reconnaissances, d'essais, d'approches, de mise en place de structures provisoires, de réflexion sur ce qui devra intervenir, pour une longue période cette fois, après les décrets en Conseil d'État. Cette période que l'on peut qualifier de probatoire, a 363 Yves Kaluzny, Construction des laboratoires souterrains de recherche. Quel processus de décision ?  , Andra,

5 juillet 1994.

364 Jacques Monestier, Note prospective sur les décisions d’ouverture en matière de construction des laboratoires

souterrains, Cellule d’Observation et de Conseil sur l’Implantation de Laboratoires de Recherche Souterrains,

24 juin 1994, p. 8. 

commencé avec les décisions de janvier dernier et sera, sans doute, lourde de conséquences par les habitudes qu'elle permettra de prendre, les précédents qu'elle créera ou évitera, la nature des informations et des éclairages qu'elle saura dispenser, les structures qu'elle verra mettre en place, préfiguration de structures plus durables, en même temps que par l'acquisition d'un savoir-faire précieux pour l'avenir. En un mot, dans tous les sens du terme,

il s'agira d'occuper utilement le terrain et cela aussi longtemps que nécessaire366. »

Cet extrait de la note stratégique de Jacques Monestier résume assez bien la multiplicité des enjeux placés dans les recherches sur le stockage géologique et notamment sur l'implantation des laboratoires souterrains. Dans cette analyse stratégique que l'on retrouve au ministère de l'Industrie et à la tête de l'Andra, la maîtrise de la gestion de l'aval du cycle nécessite l'engagement de différents acteurs, dont l'implication nouvelle dans la gestion des déchets radioactifs est nécessaire mais pas encore routinière deux ans après le vote de la loi Bataille. L'implication des élu.es et le rôle de premier plan accordé à l'activité scientifique constituent deux nœuds du nouveau mode de gouvernement des déchets nucléaires. Si ces deux éléments sont des ressources pour l'action publique, ils représentent également des sources de débordements potentiels qui pourraient échapper au contrôle du ministère et de l'Andra.

I.1. D

ÉCIDER RAPIDEMENT OU ATTENDRE UN PEU

Les géologues de l'Andra débutent les travaux de reconnaissance dans les quatre départements sélectionnés durant l'été 1994. Ce même été, J. Monestier, Y. Kaluzny et la DGEMP distinguent deux moments opportuns auxquels pourrait être décidée l'implantation des laboratoires souterrains. Soit cette décision est prise rapidement, c'est-à-dire au début de l'année 1995. Soit cette décision est repoussée à plus tard. Différents éléments interviennent dans les arguments en faveur d'un calendrier optimal mais leur importance varie chez Jacques Monestier, Yves Kaluzny ou à la DGEMP. Si la structure des trois notes diffère, toutes pointent à des degrés divers les mêmes éléments. De plus, tous les participants à ces discussions excluent que des critères techniques puissent permettre de guider le choix des sites. Plutôt que de relever les divergences entre les positions de chacun, l'objectif de cette partie est de mettre en évidence le cœur de la pensée stratégique sur l'implantation des laboratoires souterrains telle qu'elle est discutée entre Y. Kaluzny, J. Monestier et la DGEMP.

I.1.1. LESÉLECTIONS ETLE CLIMATPOLITIQUE

Le premier argument en faveur d'une décision rapide est l'agenda électoral de 1995. En effet, des élections municipales et présidentielles sont prévues au printemps 1995, auxquelles pourraient s'ajouter des élections législatives. S'il semble peu probable que les laboratoires souterrains deviennent des objets de débats durant la campagne présidentielle, ils pourraient l'être pour les scrutins locaux. Dans la Meuse, l'implantation d'un laboratoire a été l'objet de débats durant les élections cantonales de 1994367. Par ailleurs, les périodes électorales gèlent de fait toute possibilité d'une décision durant le printemps 1995368. Si l'implantation des laboratoires n'est pas décidée avant février 1995, cette décision sera alors repoussée, au plus tôt, à la rentrée de septembre 1995369.

Par ailleurs, il ne faudrait pas que le changement de personnel politique à la tête de l'État remette en cause le dispositif engagé avec la loi Bataille370. Durant ce début d'année 1994, les projets de laboratoires souterrains jouissent d'une bonne acceptation dans chacun des quatre départements. Jacques Monestier remarque :

« Elle [une décision rapide] interviendrait au milieu d'un concours de circonstances favorables, dans le prolongement de la situation que nous connaissons et qui est exceptionnellement calme. La volonté du Gouvernement est clairement affirmée. Elle se manifeste, au plan interministériel, de manière parfaitement concertée. Si les travaux de vérification ne déclenchent pas d'oppositions violentes du type 1987/1990, on peut penser que la fin de l'année marquera un moment propice. La solution rapide présente, en outre, l'avantage de prendre de vitesse les opposants dont la mobilisation est encore incomplète et

peu efficace371. »

Prendre une décision rapide, avant les échéances électorales, permettrait de profiter de ce climat calme dont il n'est pas exclu qu'il soit de courte durée. Les heurts violents de l'année 1989 sont encore dans toutes les têtes. Décider rapidement permettrait de « prendre de vitesse » des

367 Yves Kaluzny, Note à l’attention de M. le Directeur du Cabinet du Ministre de l’Industrie, des Postes et

Télécommunications et du Commerce extérieur. Laboratoire Souterrain. Situation dans la Meuse, Andra,

2 septembre 1994.

368 Philippe Kahn et Xavier Ouin, Note à l’attention d’Antoine Blanc. Implantation de laboratoires souterrains de

recherche sur le stockage de déchets radioactifs à vie longue et à haute activité : le processus de décision  , Direction

Générale de l’Énergie et des Matières Premières, Service des Affaires Nucléaires, 5 septembre 1994, p. 4. 

369 J. Monestier, Note prospective sur les décisions d’ouverture en matière de construction des laboratoires

souterrains, op. cit., p. 3. 

370 Y. Kaluzny, Construction des laboratoires souterrains de recherche. Quel processus de décision ?, op.  cit.

371 J. Monestier, Note prospective sur les décisions d’ouverture en matière de construction des laboratoires

opposant.es qui, si elles et ils ne se sont pas encore montré.es, pourraient éventuellement se mobiliser. L'attente est propice à l'avènement d'événements inconnus qui pourraient perturber le choix des sites.

I.1.2. LA FRUSTRATIONDESÉLU.ESET LESRESSOURCES IMPRÉVUESDEL'ATTENTE

Seuls deux départements parmi les quatre sélectionnés par C. Bataille accueilleront un laboratoire souterrain. Pendant sa mission de médiation, C. Bataille a pris contact avec des élu.es afin de trouver des départements où le contexte politique est plutôt favorable à la présence d'un laboratoire souterrain. Certain.es élu.es se sont fortement impliqué.es pour porter les projets de laboratoires dans les différentes instances locales et départementales (intercommunalités, chambres de commerce, conseils généraux...) Toutefois, tou.tes les élu.es qui se sont engagé.es localement n'accueilleront pas un laboratoire sur le territoire qu'ils et elles administrent. Pour les auteurs des rapports de l'été 1994, plus le choix des deux sites est effectué tardivement, plus la frustration des élu.es dont les candidatures ne seront pas retenues risque d'être grande372. Au contraire, une décision rapide limiterait les faux espoirs et les déceptions. Cependant, la frustration des élu.es pourrait être aussi forte si la décision est perçue comme « brusquée » ou « prématurée ». J. Monestier souligne :

« nombreux sont les élus qui considèrent leur département comme remplissant d'ores et déjà

toutes les conditions pour accueillir un laboratoire (la Haute-Marne faisant, ici, par timidité, quelque peu exception). Une décision qui serait prématurée, à plus forte raison brusquée, laisserait, dans les départements non choisis, l'impression d'une frustration avec les risques récurrents qui en découleraient. Le sentiment de rupture à craindre peut s'évaluer à la mesure des réactions prévisibles de personnalités politiques marquantes ou de forces économiques et

sociales actives (la Haute-Marne pouvant, ici encore, constituer une exception)373. »

L'implantation des laboratoires souterrains doit pouvoir être justifiée. Pour les auteurs des trois notes, les premières reconnaissances effectuées par l'Andra ne mettront vraisemblablement pas à jour d'éléments techniques qui permettront de choisir où implanter des laboratoires souterrains. Y. Kaluzny estime :

« Sauf facteurs techniques rédhibitoires [qu'il ne peut] pas exclure totalement, le dossier de

fin 95 ne permettra pas plus de faire un choix sur des bases techniques : on constatera que les

sites sont ''bons'' sans qu'une hiérarchisation entre eux ait un sens particulier374. »

372 Y. Kaluzny, Construction des laboratoires souterrains de recherche. Quel processus de décision ?, op.  cit., p. 3. 

373 J. Monestier, Note prospective sur les décisions d’ouverture en matière de construction des laboratoires

souterrains, op. cit., p. 7. 

Dès lors, attendre un peu pourrait, selon J. Monestier, permettre de laisser au temps le soin de faire advenir des éléments qui justifieraient un choix375. Néanmoins, si la venue d'éléments nouveaux peut constituer une ressource argumentaire, des éléments imprévus peuvent également complexifier la situation et gêner le choix des sites. Ainsi, le préfet précise :

« Aussi bien, plus on attendra, plus sera forte la présomption d'accidents ou risques

conjoncturels, qu'ils soient de nature politique ou technique, qui pourraient peser sur le projet (pensons à des rebondissements du type Superphénix ou à tout accident nucléaire d'une certaine gravité traumatisant pour l'opinion). En bref, aller vite présente toujours un avantage dans des situations délicates dont l'évolution sur la durée d'une année est incertaine

et peut rebondir d'un moment à l'autre376. »

La décision d'implantation des laboratoires doit ainsi être justifiable et rien ne le permet en cet été 1994. Cependant, l'attente d'éléments qui pourraient justifier cette décision implique d'une part d'accepter le risque que des événements imprévus adviennent, et d'autre part de ne pas profiter d'un climat politique étonnement calme qui pourrait n'être que de courte durée.

I.1.3. LE TEMPSDESRECHERCHES ETCELUI DELADÉCISION

L'accord du gouvernement autorisant l'Andra à débuter des reconnaissances géologiques prévoit que cette période d'étude puisse durer jusqu'à deux ans. Cependant, le calendrier induit par la loi est extrêmement serré. L'instruction des demandes d'autorisation des laboratoires doit durer environ deux ans et les travaux de creusement trois ans. Si la procédure d'autorisation est engagée en 1996, les recherches en profondeur ne pourront durer que cinq ans, entre 2001 et 2006. Tout retard dans l'implantation des laboratoires réduit de facto la durée des recherches en profondeur pouvant être effectuées avant 2006.

Néanmoins, durant l'été 1994, envisager de décider de l'implantation des laboratoires souterrains avant février 1995 impose un calendrier particulièrement tendu. L'Andra doit rendre au gouvernement un premier bilan de ses travaux fin 1994 dans lequel elle proposera des zones d'implantation pour les laboratoires souterrains. Or, ce rapport n'apportera vraisemblablement pas d'élément de choix. Jacques Monestier considère que le choix de l'implantation des laboratoires ne

375 J. Monestier, Note prospective sur les décisions d’ouverture en matière de construction des laboratoires

souterrains, op. cit., p. 8. 

pourra matériellement pas être pris avant janvier 1995. Le début de la campagne présidentielle bloque toute décision après février 1995377. Entre fin janvier et début février 1995, le temps d'instruction paraît trop court pour pouvoir s'orienter vers une décision rapide.

I.1.4. ATTENDRELES AVIS DELA CNE ETDELA DSIN

La Commission Nationale d'Évaluation (CNE) commence à travailler en 1994. Son premier rapport est prévu pour 1995. Les auteurs des notes de l'été 1994 estiment qu'il portera notamment sur les premières reconnaissances géologiques effectuées par l'Andra depuis la surface. Prendre la décision d'implanter les laboratoires avant le premier rapport de la CNE évite tout commentaire de cette Commission nouvellement créée sur ce choix. La CNE a pour mission d'évaluer les programmes de recherche. Son avis pourrait influencer les élu.es et ainsi complexifier la prise de décision378. Toutefois, les membres de la CNE pourraient aussi être contrariés que l'implantation des laboratoires soit décidée avant qu'ils n'aient rendu leur premier rapport. La Direction de la Sûreté des Installations Nucléaires (DSIN) pourrait également vouloir être consultée sur le choix de l'implantation des laboratoires souterrains. Attendre un avis de cette institution repousserait inévitablement la décision. La CNE comme la DSIN n'ont pas formellement à être consultées pour ce choix mais elles le souhaiteront peut-être. Pour la DGEMP, il conviendra alors de leur rappeler leurs rôles379. Quant à lui, Y. Kaluzny écrit :

« Faire entrer ces deux entités dans le processus de décision ne peut que repousser les délais

de façon inconsidérée. Le rôle de la DSIN nous paraît être de veiller à la qualité des dossiers techniques qui seront établis pour la procédure d'autorisation mais pas de se substituer à l'Andra et au Gouvernement pour choisir les sites. Il lui appartiendra ensuite dans le cadre des procédures réglementaires d'apporter un jugement sur le choix. De même, la Commission Nationale d'Évaluation doit veiller au bon équilibre des efforts sur les trois voies de

recherche et ne pas entrer dans un processus opérationnel380. »

Néanmoins, pour la DGEMP, décider de l'implantation des laboratoires souterrains avant le premier rapport de la CNE pourrait donner l'impression que le gouvernement « passe en force »381.

377Ibid., p. 6. 

378Ibid., p. 5. 

379 P. Kahn et X. Ouin, Note à l’attention d’Antoine Blanc, op. cit., p. 3. 

380 Y. Kaluzny, Construction des laboratoires souterrains de recherche. Quel processus de décision ?, op.  cit., p. 2. 

I.1.5. LA DIFFICULTÉDOCCUPER LETERRAIN »

Jusqu'au choix de la localisation des deux laboratoires souterrains, l'Andra restera présente