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Face aux oppositions que suscite dans différents pays l'implantation de projets de stockage, les chercheurs et chercheuses en sciences sociales sont apparu.es comme des expert.es utiles pour analyser les causes des mobilisations et proposer des dispositifs à même de rendre gouvernable l'aval du cycle nucléaire. Comme les géologues sont spécialistes des sous-sols, les sociologues, en tant que spécialistes du social, sont devenu.es, surtout à partir des années 1990, des expert.es autorisé.es de la gestion des déchets nucléaires81. Un tel engagement des chercheurs et chercheuses en sciences sociales n'est pas spécifique à la gestion des déchets nucléaires. Bien au contraire, durant les années 2000, l'implication du public dans les décisions est fortement plébiscitée et des sociologues contribuent fréquemment à la mise en place de dispositifs participatifs82. Il me semble toutefois que l'engagement de chercheurs et chercheuses en sciences sociales par les institutions en charge de la gestion des déchets nucléaires a influé sur la manière dont le devenir de ces déchets a été appréhendée dans la littérature.

L'évacuation géologique a fait l'objet d'un nombre conséquent de travaux. Dans sa thèse, Grégoire Lits a étudié la manière dont les sciences sociales ont été mobilisées dans la gestion des déchets nucléaires83. Il montre que les sociologues ont notamment travaillé à reproblématiser cette question, d'une part contre la distinction entre aspects sociaux et aspects techniques de la gestion des déchets nucléaires, et d'autre part contre une psychologisation de l'appréhension des risques. G. Lits souligne également qu'une grande partie des productions est focalisée sur les processus de décision autour de l'implantation de sites de stockage, et particulièrement sur les procédures de dialogue permettant l'engagement de l'ensemble des « parties prenantes » dans les décisions84. Dans

81 Grégoire Lits, « Analyse du rôle des chercheurs en sciences sociales dans la gestion des déchets radioactifs »,

VertigO - la revue électronique en sciences de l’environnement, 2013, vol. 13, n° 2 ; Grégoire Lits, « Curiosité ou

engagement ? Panorama historique du rôle des chercheurs en sciences sociales dans la gestion des « aspects 

sociaux » du nucléaire  », in Être curieux en sociologie, Presses universitaires de Louvain, Louvain-la-Neuve, 2014, pp. 99-124.

82 Loïc Blondiaux et Yves Sintomer, « L’impératif délibératif », Politix, 2002, vol. 15, n° 57, pp. 17-35 ; Dominique Pestre, « Des sciences, des techniques et de l’ordre démocratique et participatif », Participations, 2011, n° 1, pp. 210-238 ; Cécile Blatrix, « Des sciences de la participation. Paysage participatif et marché des biens savants en France », Quaderni, 2012, vol. 79, n° 3, pp. 59-80 ; Sezin Topçu, La France nucléaire. op.cit. ; Sara Angeli Aguiton, « De la quête d’efficacité en contexte participatif. La démocratie technique et ses contestations », Hermès,

La Revue, 2015, vol. 3, n° 73, pp. 90-97.

83 Grégoire Lits, « La gestion des déchets hautement radioactifs belges à l’épreuve de la démocratie. Contribution à une sociologie des activités décisionnelles », Thèse de doctorat, Université catholique de Louvain, 2015.

84 Allan Mazur et Beverlie Conant, « Controversy over a Local Nuclear Waste Repository », Social Studies of Science, 1978, vol. 8, n° 2, pp. 235-243 ; Frans Berkhout, Radioactive Waste: Politics and Technology, London ; New York, 

Routledge, 1991 ; Michael E. Kraft et Bruce B. Clary, « Citizen Participation and the NIMBY Syndrome: Public Response to Radioactive Waste Disposal », Political Research Quarterly, 1991, vol. 44, n° 2, pp. 299-328 ; Jeffrey

ces publications, on retrouve les motifs classiques de l'étude des projets technoscientifiques en société : la difficulté à trouver un accord sur ce qui constitue un risque acceptable, le besoin de dialogue et de confiance, l'importance des procédures encadrant le processus de décision. En France, la réversibilité d'un éventuel dépôt, c'est-à-dire la possibilité de revenir sur les décisions prises et d'éventuellement ressortir du stockage les déchets qui y ont été déposés, a été particulièrement discutée85.

Parmi la masse de travaux sur la gestion des déchets nucléaires, je ne m'attarderai que sur quelques-uns d'entre eux. Le premier est le livre de Kristin S. Shrader-Frechette publié en 199386. Dans celui-ci, son auteure se penche sur les méthodes d'évaluation des risques (risk assessment) induits par la construction d'un dépôt de déchets nucléaires. Pour cela, K. Shrader-Frechette étudie les pratiques des ingénieur.es travaillant à caractériser un stockage géologique à Yucca Mountain aux États-Unis. Elle souligne l'existence inévitable d'incertitudes sur l'évolution d'un stockage durant plusieurs milliers d'années87. En effet, les extrapolations sur l'évolution géologique et le comportement des ouvrages ne peuvent constituer des certitudes.

S. Hill et Carol S. Weissert, « Implementation and the Irony of Delegation: The Politics of Low-Level Radioactive Waste Disposal », The Journal of Politics, 1995, vol. 57, n° 2, pp. 344-369 ; Göran Sundqvist, The Bedrock of

Opinion: Science, Technology and Society in the Siting of High-Level Nuclear Waste, Dordrecht, Springer

Netherlands, 2002 ; Göran Sundqvist, « Constrained Deliberation: Public Involvement in Swedish Nuclear Waste Management », Case study report, STAGE, 2004 ; Mark Elam et Göran Sundqvist, Stakeholder Involvement in

Swedish Nuclear Waste Management, Stockholm, Swedish Nuclear Power Inspectorate, 2006 ; Darrin Durant,

« Burying Globally, Acting Locally: Control and Co-Option in Nuclear Waste Management », Science and Public

Policy, 2007, vol. 34, n° 7, pp. 515-528 ; Lennart Sjöberg et Britt-Marie Drottz-Sjöberg, « Attitudes Toward

Nuclear Waste and Siting Policy: Experts and the Public », in Nuclear Waste Research: Siting, Technology and

Treatment, New York, Nova Science Publishers, 2008, pp. 47-74 ; Jonas Anshelm et Vasilis Galis, « The Politics of

High-Level Nuclear Waste Management in Sweden: Confined Research Versus Research in the Wild »,

Environmental Policy and Governance, 2009, vol. 19, n° 4, pp. 269-280 ; Darrin Durant et Genevieve Fuji

Johnson (ed.), Nuclear Waste Management in Canada: Critical Issues, Critical Perspectives, Vancouver, BC, University of British Columbia, 2009 ; Mark Elam, Maria Lidberg, Linda Soneryd et Göran Sundqvist, « Demonstration and Dialogue: Mediation in Swedish Nuclear Waste Management », 2009 ; Markku Lehtonen, « Deliberative Decision-Making on Radioactive Waste Management in Finland, France and the UK: Influence of Mixed Forms of Deliberation in the Macro Discursive Context », Journal of Integrative Environmental Sciences, 2010, vol. 7, n° 3, pp. 175-196 ; Jonas Anshelm et Vasilis Galis, « (Re-) Constructing Nuclear Waste Management in Sweden: The Involvement of Concerned Groups, 1970-2010 », Integrated Waste Management, 2011, vol. 2, pp. 401-430 ; Anne Bergmans, Göran Sundqvist, Drago Kos et Peter Simmons, « The Participatory Turn in Radioactive Waste Management: Deliberation and the Social-Technical Divide », Journal of Risk Research, 2015, vol. 18, n° 3, pp. 347-363.

85 Pierrick Cézanne-Bert et Francis Chateauraynaud, Les formes d’argumentation autour de la notion de réversibilité

dans la gestion des déchets radioactifs, GSPR EHESS, 15 décembre 2009 ; Yannick Barthe, « Les qualités

politiques des technologies. Irréversibilité et réversibilité dans la gestion des déchets nucléaires », Tracés, 2009, vol. 1, n° 16, pp. 119-137 ; Yannick Barthe, Pierrick Cézanne-Bert, Francis Chateauraynaud et Luis Aparicio,

Rendre gouvernable les déchets radioactifs. Le stockage profond à l’épreuve de la réversibilité, Andra, septembre

2010.

86 Kristin S. Shrader-Frechette, Burying Uncertainty: Risk and the Case against Geological Disposal of Nuclear

Waste, Berkeley, University of California Press, 1993.

K. Shrader-Frechette souligne que le recours à des jugements moraux afin de trancher si certaines incertitudes sont acceptables ou non n'est pas problématique en soi. Toutefois, elle note que, dans certaines situations, ce recours au jugement d'expert.es permet de justifier la sûreté du projet de stockage à Yucca Mountain malgré des controverses sur la caractérisation du site géologique et de son évolution88. Ainsi, K. Shrader-Frechette critique la rationalité du projet de stockage, notamment d'un point de vue éthique puisque les risques induits ne seront pas assumés par la génération qui décide de l'implantation de ce dépôt mais par des générations qui vivront bien longtemps après89. Burying Uncertainty pose la question de l'appréhension par les géologues et les ingénieur.es en risk assessment des longues échelles de temps en insistant sur les problèmes moraux qu'elles induisent.

Ce livre accorde une importance particulière au contexte dans lequel les recherches sur le stockage sont effectuées et notamment sur l'influence de la réglementation encadrant ce projet sur la forme des savoirs produits. Aux États-Unis, la réglementation impose en effet que la sûreté d'un stockage soit démontrée sur une période de 10 000 ans. Au regard de la nature des déchets destinés à être enfouis, cette limite temporelle semble purement arbitraire90. Toutefois, les analyses se limitent à montrer la sûreté d'un ouvrage sur cette période.

Uncertainty Underground, coordonné en 2006 par les géologues Allison Macfarlane et

Rodney Ewing, traite également de la question des incertitudes dans les études de la sûreté du projet de Yucca Mountain91. Cet ouvrage collectif, particulièrement précis, passe en revue les différents domaines scientifiques mobilisés pour l'étude de la sûreté du projet de Yucca Mountain : géologie, sismologie, hydrologie, thermique, science des matériaux... Les différents chapitres dressent un état des connaissances dans chaque domaine et soulignent les difficultés auxquelles se heurtent les études de l'évolution du stockage. En conclusion, A. Macfarlane – qui n'a alors pas encore été appelée à diriger l'autorité de sûreté nucléaire états-unienne, la Nuclear Regulatory Commission – souligne l'importance des modèles dans la production de savoirs sur l'évolution des différents sous-systèmes du stockage (les colis, les ouvrages, la roche)92. Renvoyant dos à dos une confiance aveugle dans ces modèles et une réticence à engager la moindre action tant qu'il subsiste des incertitudes, A. Macfarlane interroge ce que peut être une décision dans une situation où il existe

88 Ibid.

89 Ibid., pp. 101  -102.

90 Ibid., p. 73. 

91 Allison Macfarlane, Uncertainty Underground: Yucca Mountain and the Nation’s High-Level Nuclear Waste,

Cambridge, MIT Press, 2006.

tant d'incertitudes93. Ce livre est conçu comme un travail de vulgarisation scientifique à même d'éclairer les enjeux épistémiques présents dans l'étude de Yucca Mountain et de permettre une discussion large et informée sur ce projet94.

Le dernier ouvrage particulièrement heuristique à propos du projet de stockage états-unien est l'essai de John d'Agata, Yucca Mountain95. Déambulation à Las Vegas et dans le désert du Nevada tout proche où le projet est prévu, ce récit met en scène la difficulté anthropique d'appréhender l'effet des radiations, le projet de stockage et les échelles de temps particulièrement longues qu'il engage. J. d'Agata y décrit sa rencontre avec les salarié.es chargé.es de la présentation ludique du projet aux écolier.es de la région et l'angoisse ressentie lors de sa visite du site de Yucca Mountain. Cet essai est aussi une réflexion sur les représentations associées à cet enfouissement, façonnées par la culture états-unienne et les services de communication du projet. Ainsi notamment, J. d'Agata livre une analyse sur la communication avec les personnes qui vivront à proximité du stockage dans plusieurs millénaires à partir d'une réflexion autour des enseignes lumineuses de Las Vegas.

En France, plusieurs travaux ont pour objet l'histoire de la gestion des déchets nucléaires. La thèse de Jean-Claude Petit, tout d'abord, soutenue en 1993 au Centre de Sociologie de l'Innovation, propose une analyse sur une longue période de l'évolution des réflexions sur l'évacuation géologique des déchets nucléaires96. Mobilisant les concepts de la théorie de l'acteur-réseau, J.C. Petit montre que la solution de gestion qui s'impose parmi les expert.es au niveau international à la fin des années 1970 est l'implantation d'un stockage géologique « multi-barrières »97. Il souligne que les premiers travaux sur l'enfouissement reposaient sur l'espoir qu'il existe des formations géologiques permettant, à elles seules, de confiner les radionucléides et d'assurer la sûreté du dépôt. Néanmoins, les travaux des géologues, les critiques auxquels ils et elles se sont heurté.es et le besoin d'implanter des stockages géologiques dans des pays comme la Suède dont le sous-sol n'a pas de bonnes qualités de confinement, ont abouti à la stabilisation d'un concept de stockage dans lequel les ouvrages (la matrice de verre, les colis, les alvéoles de stockage bétonnées) assurent un rôle de confinement des radionucléides complémentaire à celui de la roche.

Pour J.C. Petit, cette solution « hybride » marque la fin d'une opposition entre celles et ceux qui préfèrent faire confiance à la « Nature » (la roche) ou à la « Société » (les colis, le béton) pour protéger l'humanité des radiations émises par les déchets nucléaires. Dans son histoire de la gestion

93 Ibid., p. 394. 

94 Ibid., p. 5. 

95 John D’Agata, Yucca Mountain, Bruxelles, Zones Sensibles Editions, 2012. 96 J.-C. Petit, Le stockage des déchets radioactifs, op. cit.

des déchets nucléaires, il distingue trois périodes : une période d'aventure entre les années 1940 et 1970, une période de crise entre les années 1970 et 1990, enfin une période de résolution des conflits autour de la gestion des déchets nucléaires, que J.C. Petit entrevoit à partir de 1990.

En 2000, Yannick Barthe soutient une seconde thèse au Centre de Sociologie de l'Innovation sur la gestion des déchets nucléaires, publiée en 2006 sous le titre Le Pouvoir d'indécision98. Ce travail est focalisé sur les transformations induites par la loi du 30 décembre 1991 sur la gestion de l'aval du cycle nucléaire. Au terme d'un moratoire sur l'évacuation géologique, cette loi ouvre une période de quinze ans consacrée à trois voies de recherche : le retraitement poussé et le conditionnement des déchets ; le stockage géologique ; l'entreposage des déchets en surface. Pour Y. Barthe, cette loi, en distinguant différentes voies de recherche, remet en cause l'inéluctabilité de l'évacuation géologique99. Jusqu'alors, plusieurs éléments avaient verrouillé le choix de l'enfouissement : l'abandon de l'immersion et l'absence de solution de gestion alternative tout d'abord puis la vitrification des déchets qui limite les possibilités de leur retraitement éventuel. À la fin des années 1980, l'évacuation géologique est ainsi la seule solution plébiscitée par les expert.es mais la recherche d'un site de stockage se heurte à l'opposition des habitant.es des départements choisis pour éventuellement l'accueillir.

Face à cette situation de blocage, la « mise en politique » des déchets nucléaires induite par la loi de 1991 et la transformation du mode de choix des sites où implanter des laboratoires souterrains, qui désormais s'appuie sur l'engagement des élu.es locaux, doit permettre de rendre gouvernable l'aval du cycle. La thèse de Y. Barthe est articulée autour de l'analyse symétrique de l'irréversibilisation technique de l'enfouissement et de la réversibilisation du choix de cette solution en 1991. Son travail est construit contre ce qu'Albert O. Hirschman appelle la « thèse de l'inanité », c'est-à-dire contre les analyses négligeant les changements pour souligner l'impuissance politique à influer, dans notre cas, sur la gestion des déchets nucléaires100. La « mise en politique » des déchets nucléaires induite par la loi de 1991, en rendant discutable la gestion de ces déchets, rouvrirait ainsi des choix technologiques et redonnerait une possibilité d'agir aux décideurs publics et aux élu.es locaux.

98 Yannick Barthe, « La mise en politique des déchets nucléaires. L’action publique aux prises avec les irréversibilités techniques », Thèse de doctorat, Ecole Nationale Supérieure des Mines de Paris, Paris, 2000 ; Y. Barthe, Le pouvoir d’indécision, op. cit.

99 Y. Barthe, Le pouvoir d’indécision, op. cit., pp. 125  -126. 100Ibid., p. 6. 

À la fin des années 1980, l'opposition entre l'Andra et les populations des zones où l'Agence souhaite étudier les possibilités d'implanter un stockage semble arrivée à une situation de blocage – Albert O. Hirschman parle de « conflit indivisible »101. L'après 1991 serait marqué par une division du conflit en plusieurs problématiques devenues gérables : les décisions sont fragmentées, l'implantation des laboratoires souterrains est concertée avec les élu.es locaux, le choix de la solution de gestion est réouvert, et il pourrait être éventuellement possible de ressortir du stockage les déchets qui y ont été déposés. De ce fait, pour Y. Barthe, la loi de 1991 aurait permis de rendre

« divisible » en différentes questions discutables un problème qui opposait jusqu'alors deux

positions antagonistes figées.

Au terme des quinze ans de recherche prévus par la loi de 1991, Yannick Barthe et Claude Gilbert publient un cahier Risques Collectifs et Situations de Crise consacré aux recherches sur la gestion des déchets nucléaires102. Cette publication est issue d'un séminaire ayant regroupé des chercheurs et chercheuses en sciences humaines et sociales ainsi qu'en sciences « dures ». Elle est organisée autour d'une série de huit questions problématisant celle de la gestion des déchets nucléaires et les recherches entreprises depuis la loi de 1991 sous des angles trop rarement considérés. Ainsi, ce texte interroge notamment la gestion des déchets en rapport avec leur production et le choix des filières de réacteurs103. Est-il possible de débattre de la gestion des déchets nucléaires sans s'interroger sur leur origine ? La séparation des radionucléides contenus dans le combustible usé pour isoler le plutonium pourrait-elle être plus poussée afin de mieux gérer les différents éléments qui sont aujourd'hui conditionnés ensemble ?

Ce cahier questionne également la fonction politique des recherches effectuées depuis 1991 et notamment la réouverture affichée du choix de l'évacuation géologique104. Ne sont-elles qu'un alibi destiné à apporter du crédit à l'Andra ? Quelles évolutions de la gestion des déchets nucléaires ont-elles permises ? En se détachant du cadrage des acteurs, ce cahier propose une confrontation de leurs discours avec leurs pratiques. En particulier, il interroge l'appropriation par l'Andra de

101 Albert O. Hirschman, Un certain penchant à l’autosubversion, Paris, Fayard, 1995 ; Yannick Barthe, « Mission

impossible » ? Retour sur la mission collégiale de concertation Granite  , École Nationale Supérieure des Mines de

Paris, 2002 ; Yannick Barthe, « Mobilisations et choix techniques. Le cas des déchets nucléaires », Lyon, 2005 ; Y. Barthe, « Les qualités politiques des technologies. Irréversibilité et réversibilité dans la gestion des déchets nucléaires », op. cit.

102 Yannick Barthe et Claude Gilbert, Recherche et déchets nucléaires. Une réflexion interdisciplinaire, Grenoble, Maison des Sciences de l’Homme-Alpes, 2006.

103Ibid., pp. 17  -24, 81-87.

l'exigence de réversibilité du stockage voulue par les opposant.es à toute solution de gestion définitive et l'apport réel de l'ouverture des recherches à d'autres acteurs scientifiques que l'Andra et le CEA105.

Très dernièrement, Julie Blanck a soutenu une thèse sur l'évolution de l'organisation de l'Andra en fonction des différentes manières dont la question des déchets nucléaires a été cadrée106. Dans un article de 2016, elle montre notamment comment un cadrage technique et un cadrage politique de la gestion des déchets nucléaires coexistent dans différentes arènes et fournissent des ressorts pour l'action107.