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8 Conclusion générale

8.4 Signature des lancements

8.5.1 Rappel des perspectives par chapitres

Des éléments de perspectives concernant la poursuite des travaux ont été présentés en fin de chaque chapitre. Nous les rappelons d’abord simplement ci-après.

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8.5.1.1 Suivi cambial

Globalement, le suivi de croissance intra-annuel par les dendromètres est décevant, dans les conditions utilisées pour cette étude. Il peut être utile pour connaître la croissance annuelle entre deux dates au cœur de la saison des pluies (i.e. mai ou juin), quand les écorces sont dans un état de gonflement maximal (qui ne dépend plus à ce moment-là de l’humidité). Il serait utile dans tous les cas de doubler cette indication par une mesure plus fruste, au ruban, le long d’une ligne marquée sur l’écorce.

Il faut trouver le moyen de lever la difficulté d’identifier les parenchymes lors de la maturation cellulaire et de décider si l’on visualise une bande continue ou pas.

Une première approche, sur Parkia (les deux espèces étudiées ici pour éviter le cas trop particulier, en choisissant des arbres vigoureux) consisterait à revenir à des prélèvements réguliers plus conséquents de type carotte de diamètre 4 ou 5 mm et de longueur 20 à 30 mm et moins fréquents pour limiter les traumatismes (e.g. une fois par mois). L’analyse anatomique doit viser à déterminer les moments et les positions (i.e. distance à la zone de division cambiale) où la bande de parenchyme est bien visible et ceux où elle commence à être remplie de cristaux d’oxalate.

En parallèle, il faudra étudier les moyens techniques d’identification du parenchyme axial et faire une analyse systématique des ressemblances ou différences entre parenchyme isolé ou en petits amas, parenchyme en bande continue, parenchyme avec des cristaux d’oxalate ou pas. Cela peut se commencer sur des planchettes de la collection de la xylothèque de Kourou. Cela passera sans doute par une étude dédiée sur les deux espèces de

Parkia, utilisant des outils d’anatomie plus puissants (e.g. microscopie électronique à

transmission, immuno-localisation). Elle permettra d’identifier les phases d’évolution de ces parenchymes depuis la division cellulaire dans la zone cambiale jusqu’à la mort cellulaire en passant par la différentiation et les phases de synthèse, stockage/déstockage de nutriments et de produits de préservation (minéraux ou organiques). Un des objectifs d’une telle étude sera de fournir des outils et méthodes d’identification précoce robustes et rapides des bandes de parenchyme marginal très souvent trouvées comme marqueur de cerne annuel chez les bois tropicaux.

Il faudrait mettre en place une étude sur les rôles des parenchymes axiaux, notamment en matière de défense, et se poser les questions pertinentes sur les liens éventuels entre date de mise en place des parenchymes à oxalate et périodes de risque d’agression des agents xylophages en forêt.

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Il sera possible ensuite d’envisager l’étude du lien entre la dynamique de marquage (i.e. production de la bande puis mise en place des cristaux d’oxalate) et l’ensemble des évènements extérieurs.

La possibilité d’identifier dès le début (différenciation) la bande de parenchyme marginal permettrait d’obtenir des jeux des données utilisables dans les modèles développés sur des espèces tempérées et boréales afin de calculer les temps nécessaires dans chaque phase de l’activité cambiale (division, différenciation, maturation). Il sera possible alors de tenter de voir comment ces temps varient en fonction des espèces, du stade ontogénique du cambium, voire des différents milieux où l’arbre a poussé.

8.5.1.2 Etude dendrochronologique

Un premier complément à réaliser sur le jeu de données existants consisterait à pousser plus loin l’étude de la relation croissance cambiale-climat en utilisant des indicateurs plus pertinents issus des données climatiques brutes.

Une deuxième approche consisterait à se focaliser sur les années ou les périodes les plus caractéristiques de la courbe maîtresse de croissance. Certaines sont certainement corrélées (avec un décalage temporel possible) avec des évènements climatiques exceptionnels (e.g. El Niño, sécheresse longue et prolongée ou nébulosité annuelle cumulée particulièrement importante). D’autres pourraient être liées à des phénomènes d’invasion massive d’agresseurs (e.g. défoliateurs ou xylophages) et se retrouver sur des chronologies d’autres espèces ou figurer dans les suivis du dispositif de Paracou.

Une troisième voie consisterait à étendre cette étude à d’autres espèces faciles à dater dans la même zone, afin d’identifier des années caractéristiques communes à toutes les espèces étudiées, pouvant servir à des calages d’observations chronologiques futures.

8.5.1.3 Etude dendro-isotopique

Il est d’abord indispensable de mener jusqu’au bout les analyses sur les cinq angéliques, en ayant positionné les limites de cerne identifiables par l’anatomie. Cela permettra peut-être d’identifier les paramètres du signal dendro-isotopique reliés à cette datation (pour chaque isotope et communs aux deux).

A partir de ce résultat, il sera peut-être possible de positionner les 26 cernes annuels sur les trois autres arbres d’espèces différentes.

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Il faudrait réaliser une étude de ce type avec les isotopes du carbone sur les Parkia pour lesquels un moyen de datation existe, afin de valider une technique d’analyse du signal adaptée au contexte guyanais.

Pons et al. (2011), ont montré que le signal δ18O était peut-être plus pertinent pour

l’identification de cerne de croissance en milieu tropical humide, mais l’analyse des isotopes d’oxygène s’est révélée bien plus difficile que celle des isotopes de carbone. Si les résultats

sur Angélique confirmaient ce point de vue, il faudrait aussi utiliser δ18O pour la dendro-

isotopie sur Parkia.

8.5.1.4 Signature des lancements

Il n’a pas été surprenant de trouver une espèce accumulatrice d’aluminium. Le contexte forestier guyanais est favorable à la présence de ces espèces. Plusieurs familles fréquentes en Guyane française (e.g. Mélomastaceae et Vochysiaceae) font partie de celles qui ont été identifiées dans les accumulatrices d’aluminium (Jansen et al., 2002).

Il n’est pas certain que la différence très sensible de concentration en aluminium trouvée entre les deux arbres de l’espèce Miconia sp soit une signature du dépôt d’aluminium consécutif au lancement d’Ariane 5, mais la variation allait dans le sens attendu.

La même remarque pourrait être faite pour l’espèce Annona paludosa, est-elle vraiment une indicatrice Al au sens de Jansen, et la différence très sensible constatée dans le sens attendu est-elle reproductible ?

L’effet dépresseur significatif constaté chez toutes les espèces pour la concentration en fer et chrome au voisinage du lancement était intrigant. Il pouvait correspondre à une certaine compétition/inhibition entre métaux du point de vue de leur fixation dans le bois.

Les résultats synthétisaient des valeurs globales issues du broyat de toute la rondelle. Nous n’avons pas pu en inférer la distribution radiale et il était possible que les ratios soient encore plus élevés dans les zones radiales correspondant aux années de fabrication du bois sous influence des lancements de fusée.

Ces résultats étaient tout à fait encourageants et ont permis de dégager quelques perspectives immédiates concernant l’aluminium :

- L’accès à des méthodes plus fines permettrait de signer l’abondance en aluminium sur des échantillons de type carotte de sondage.

- Après avoir identifié l’espèce Miconia sp, il faudrait examiner son statut d’espèce accumulatrice d’aluminium sur une large zone géographique en Guyane française

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afin de disposer d’une référence des variations habituelles de concentration en aluminium.

- Il serait intéressant de vérifier sur un échantillonnage plus important (e.g. cinq arbres par zones) qu’il y a toujours une surexpression de l’élément Al dans la zone de lancement par rapport à la zone extérieure utilisée ici et examiner la distance d’impact.

- En disposant d’un accès à des outils performants (e.g. synchrotron), il faudrait lire la signature de l’élément Al le long d’un (ou plusieurs) rayons sur des arbres provenant des deux zones.

- Il faudra examiner s’il existe des marqueurs annuels du fonctionnement du cambium chez cette espèce et caler les signatures Al avec la chronologie des cernes.

- Il faudrait enfin, à une échelle encore plus fine (e.g. microscopie électronique avec microsonde), examiner où s’accumule l’aluminium dans le plan ligneux, à l’échelle du cerne et de la paroi cellulaire. La même approche pourrait être envisagée pour Annona paludosa s’il s’avère après une première campagne de vérification qu’elle mérite le statut d’espèce indicatrice pour l’élément Al.

Quant à l’effet dépresseur constaté pour les éléments Fe et Cr, il faudrait d’un côté vérifier sur carottes pour un plus grand nombre d’arbres qu’il s’agit bien d’une constante dans l’exposition des arbres aux effets du nuage post lancement, et d’un autre examiner s’il est localisé dans les années correspondant à la fabrication du bois pendant les lancements.

La compréhension de la physiologie générale de fixation des éléments métalliques dans le bois pouvant expliquer ces phénomènes dépasse le cadre des ambitions d’une étude centrée sur la xylogénèse et la datation du bois.

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