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1.4 Principales formes d'intervention sur les traductions spécialisées

2.1.4 Révision, temps et coûts

L'aspect nancier de la révision, nous allons maintenant l'aborder en rapport avec un autre facteur indissociable : le temps nécessaire à la révision.

La révision est une démarche de recherche de la qualité et comme le dit Brian Mossop :  There is no getting around the fact that quality takes time 34. Or, le réviseur, comme le traducteur, travaille souvent dans une relation tendue entre temps disponible et qualité recherchée. Ces facteurs, qui s'ajoutent à la qualité du travail produit par le traducteur et au type de révision eectuée (unilingue / bilingue, avec intégration ou non des corrections, etc.), font varier le temps de révision d'un projet à l'autre. Sur le sujet du temps de révision, nous disposons d'une enquête eectuée auprès de réviseurs canadiens et publiée dans la revue québécoise Circuit. Malheureusement, nous ne connaissons pas le nombre de réviseurs sondés et ne pouvons juger de sa représentativité. Selon cette enquête, la révision prendrait entre 10 et 30 % du temps nécessaire à la traduction35. Juan C. Sager, quant à lui, estime très globalement la part de la révision à un tiers de l'eort de traduction :  some organisations are said to have one revisor for every two translators. This would signify that revision regularly constitutes one third of the total translation eort. 36. Daniel Gouadec conrme cette estimation, tout en recommandant la prudence face aux calculs hâtifs :  Il est de tradition de considérer qu'un réviseur doit avoir une productivité égale à trois fois celle du traducteur : là où le traducteur traduit dix pages, le réviseur révise 30 pages. 37. Georey Samuelsson-Brown, quant à lui, parle en termes de production horaire :  It takes about an hour to proof read about 5 pages of translated text and compare it with the original (assuming about 300 words 33 Ibid.

34 op.cit. 2001

35 OUEILLET SIMARD, J. Les secrets de la révision, Circuit, 1984 in op.cit. Sedon-Strutt 1990 36 op.cit. Sager

37 GOUADEC, Daniel. Rémunération du réviseur, 2005, (page consultée le 28 juillet 2008) < http ://www.qualitrad.net/volume_5/537_questions_pratiques.htm >

per page). . Étant donné qu'il est d'usage de considérer qu'un traducteur traduit en moyenne 1 page par heure, ce chire peut paraître un peu optimiste. Encore une fois, ces données peuvent varier grandement selon la diculté de la traduction, les moyens et outils de traduction mis en ÷uvre, le type de révision, etc. Nous retiendrons à titre indicatif le chire d'un tiers du temps de la traduction.

Pour essayer de limiter le temps d'intervention du réviseur et répondre aux contraintes de rentabilité du marché de la traduction, tout en maintenant les mêmes exigences de qualité, Gouadec propose plusieurs solutions : la première est  d'éduquer  le traducteur à élucider toutes les dicultés du document à traduire (compréhension, terminologie, phraséologie, etc.) avant la révision, et à signaler les doutes éventuels et les informations utiles au réviseur. La deuxième consiste à  faire intervenir le réviseur en amont de la phase de traduction-transfert 38, en l'impliquant le plus possible dans la préparation de la traduction. Il joue alors le rôle de préparateur, d'informateur et de valideur au début de la traduction. Enn, Gouadec compare deux procédures de révision et mesure le gain de temps que peut représenter la deuxième : l' option 1  consiste en une révision de tous les aspects de la traduction par un réviseur unique et l' option 2  fait intervenir un réviseur diérent pour chaque contrôle. Voici comment Gouadec décrit la deuxième option :

 un premier opérateur [sans compétence particulière] pointe la traduction ;  un deuxième opérateur [maîtrisant la langue de traduction] contrôle la

qualité linguistique ;

 un troisième opérateur [maîtrisant le sujet] contrôle la qualité technique / factuelle ;

 un quatrième opérateur [traducteur] contrôle la qualité des transferts ;  un cinquième opérateur [...] qualie la traduction.39

Selon des tests eectués sur ces deux méthodes,  cinq personnes eectuant un contrôle ciblé et étroit sur un même matériau vont plus vite qu'une seule et même personne eectuant simultanément les cinq contrôles requis. 40. Le problème de cette méthode est évidemment la disponibilité simultanée des réviseurs compétents. Ce type de mesure sera plus facilement envisageable dans des grandes structures ayant un réseau étendu de prestataires que dans des PME ou en freelance.

38 GOUADEC, Daniel. Responsabilités respectives du traducteur et du réviseur, 2005, (page consultée le 28 juillet 2008) < http ://www.qualitrad.net/volume_5/535_responsabilites_respectives.htm > 39 GOUADEC, Daniel. Procédures de révision, 2005, (page consultée le 28 juillet 2008)

< http ://www.qualitrad.net/volume_5/534_procedures_revision.htm > 40 Ibid.

Nous avons parlé du rapport dicile entre le temps dont dispose le réviseur et sa recherche de la qualité. Il en va de même, logiquement, de la rémunération du réviseur (le temps étant de l'argent !). Les quelques auteurs ayant écrit sur le sujet nous donnent des indications sur les tarications pratiquées, même si celles-ci restent vagues. Michel Rochard, par exemple, indique que  la tarication classique consistant à rémunérer la révision à la moitié du prix de la traduction n'est qu'un repère. Elle correspond rarement à la réalité. 41. Si l'on considère que la révision nécessite le tiers du temps consacré à la traduction, ce niveau de rémunération paraît, en eet, utopique. Le coût annoncé par Sedon-Strutt paraît plus proche de la réalité :  All in all it would be fair to say that any serious revision process is likely to add something like one-third to the cost of sending out the `raw' translation as it is received from the translator. 42. En révision comme en traduction, cependant, il devient dicile de se faire rémunérer à la hauteur de sa prestation, qui plus est dans une relation de sous-traitant à donneur d'ordre. Voici comment Künzli résume la situation :

Unlike translators, revisers are often paid by time unit. More and more translation agencies, however, seem to be switching to paying the reviser by textual units, with fees making it dicult for the reviser to do a good job and make a reasonable living at the same time. In other words, the fees tend to resemble what might be a reasonable nancial compensation in monolingual proofreading rather than bilingual translation revision.43

Le passage du tarif horaire au paiement au mot compromet la rentabilité de la révision comparative et peut-être, la solvabilité du réviseur à long terme.

Pour faire face à ces contraintes de temps et de réductions tarifaires, Gouadec propose, là encore, une solution qui requiert une gestion de projet compétente : elle consiste à rendre la prestation de révision solidaire de celle du traducteur. Voici comment cette rémunération solidaire s'articule :

 la prestation donne lieu à une rémunération globale ;

 le traducteur et le réviseur se partagent cette rémunération au prorata de leurs temps de travail respectifs, après pondération par leurs coecients respectifs (prise en compte des écarts de niveaux de rémunération).44

41 ROCHARD, Michel. Le réviseur : Achille ou Mentor ? Traduire, 2004, n°203, p. 59-69. 42 op.cit. Sedon-Strutt 1990

43 op.cit. Künzli 2007

44 GOUADEC, Daniel. Rémunération du réviseur, 2005, (page consultée le 28 juillet 2008) < http ://www.qualitrad.net/volume_5/537_questions_pratiques.htm>

Chaque prestataire a ainsi intérêt à réduire la part de l'autre et à produire le travail le plus complet possible. Cette formule est intéressante, mais elle requiert un bon contact et une attitude ouverte de la part du traducteur comme du réviseur.