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Chapitre III. Reconstitution et caractérisation cinétique du relai

A. Caractérisation cinétique du cycle peroxydase de Orp1

2. Résultats et interprétations

Les tracés expérimentaux évoluent selon deux régimes en fonction de la

concentration de H2O2. Pour des concentrations inférieures à 1 mM, la vitesse apparente des

cinétiques augmentent de manière proportionnelle à la concentration en substrat H2O2,

suggérant que l’étape limitante est associée à la réaction entre Orp1 et H2O2 (Figure 44 A,

p.79). À des concentrations en substrat supérieures à 1 mM, les cinétiques deviennent

indépendantes de la concentration en H2O2, indiquant que le processus limitant est une

réaction de premier ordre qui correspond à la formation du pont disulfure intramoléculaire

(Figure 44 B et Figure 43, p.79).

Figure 44. Cinétiques réactionnelles de Orp1 en absence de réducteur (état pré-stationnaire).

La réaction est suivie par la variation du message d’émission de fluorescence de l’enzyme Orp1,

mesurée avec un appareil de cinétique rapide « stopped flow » SX20 (Applied photophysics).

Les mesures sont réalisées à 25°C dans le tampon D. La longueur d’onde d’excitation est fixée à 295

nm et l’émission de fluorescence est détectée pour des longueurs d’onde supérieures à 320 nm grâce à

un filtre. Les cinétiques expérimentales sont représentées en noir et les courbes de régression obtenues

par ajustement global des données par le logiciel KinTek Global Kinetic Explorer sont présentées en

rouge.

A. La cellule réactionnelle contient Orp1 (2 μM) et H2O2 (de 5 μM à 800 μM), B. La cellule

réactionnelle contient Orp1 (2 μM) et H2O2 (de 1 mM à 20 mM).

A. B.

[H

2

O

2

] de 5 à 800 µM [H

2

O

2

] de 1 à 20 mM

Figure 43. Modèle du cycle peroxydase de Orp1.

Les paramètres kSOH, kSS et kSO2 correspondent aux constantes de vitesse de chaque étape. Les étapes

conduisant à la formation de l’acide sulfénique et de l’acide sulfinique sont de nature bimoléculaire

(impliquant l’enzyme Orp1 et le substrat H2O2), les constantes de vitesses associées kSOH et kSO2 sont

donc de second ordre et sont exprimées en M-1

.s-1

. Par contre, l’étape correspondant à la formation du

pont disulfure intramoléculaire, de constante de vitesse kSS est monomoléculaire et donc est de

premier ordre et exprimée en s-1.

Le modèle minimal comprend deux étapes : l’étape peroxydasique caractérisée par la

constante de vitesse kSOH et l’étape de formation de Orp1SS caractérisée par la constante de

vitesse kSS. Une étape de suroxydation de l’intermédiaire Orp1SOH par H2O2 caractérisée par la

constante de vitesse kSO2a également été envisagée (Figure 43, p.79). Dans un premier temps,

les paramètres du modèle complet, à savoir kSOH, kSS et kSO2 ont été ajustés aux données

expérimentales. Avec ce modèle, l’ajustement converge, la ligne d’ajustement dévie peu par

rapport aux points expérimentaux ce qui signifie que l’ajustement représente correctement les

données (Figure 44, profils en rouge, p.79). Les valeurs des paramètres du modèle sont

présentées dans le Tableau 4 (Ajustement 1).

Néanmoins, la convergence de l’ajustement et l’obtention de paramètres associés à

des erreurs standard raisonnables ne sont pas des critères suffisants pour affirmer la validité

du modèle cinétique utilisé. En effet, les erreurs standards calculées sur chaque paramètre

sont en général sous-estimées par rapport à l’erreur réelle à cause du processus d’ajustement

qui suppose que toutes les erreurs expérimentales sont indépendantes et distribuées de façon

homogène sur l’ensemble du jeu de données, ce qui souvent n’est pas le cas. L’analyse des

contours de confiance à l’aide de la fonction « Fitspace » du logiciel permet d’obtenir une

évaluation bien plus robuste des limites de chaque paramètre (330). Cette fonction

« Fitspace » permet d’explorer l’espace dans lequel les paramètres peuvent varier tout en

conservant un ajustement correct des données expérimentales et de tester si chaque paramètre

est bien défini de façon indépendante des autres. La fonction « Fitspace » nous permet ainsi

d’obtenir les limites de confiance basses et hautes de chaque paramètre qui sont présentées

dans le Tableau 4 (Ajutement 1). De plus, le logiciel représente graphiquement le calcul des

contours de confiance, ce qui permet une évaluation directe du niveau de contrainte de chaque

Tableau 4. Valeurs des paramètres kSOH, kSS et kSO2 déterminées à l’aide du logiciel KinTek

Global Kinetic ExplorerTM

.

L’ajustement 1 corespond à l’ajustement des données expérimentales au modèle complet comprenant

l’étape de suroxydation. L’ajustement 2 correspond à l’ajustement des données expérimentales au

modèle minimal n’incluant pas l’étape de suroxydation. Les limites hautes et basses de chaque

paramètre ont été calculées grâce à la fonction « Fitspace » du logiciel.

kSOH (M-1.s-1) kSS (s-1) kSO2 (M-1.s-1)

Ajustement 1 Valeur 1,6.105 ± 2,2.102 492 ± 6 2.103 ± 1.103

Limite basse 1,5.105 324 0,107

Limite haute 1,6.105 633 1,2.104

Ajustement 2 Valeur 1,6.105 ± 2,2.102 507 ± 3 -

Limite basse 1,5.105 507 -

Limite haute 1,6.105 633 -

Alors que les paramètres kSOH et kSS sont correctement contraints, le paramètre kSO2

peut varier sur une gamme de valeur de plus de cinq ordres de grandeur (Tableau 4, p.80,

ajustement 1 et Figure 45). Si un paramètre n’est pas correctement contraint, comme c’est le

cas ici pour kSO2, alors le modèle postulé doit être trop complexe. Par conséquent, nous avons

testé dans un deuxième temps le modèle minimal n’incluant pas l’étape de suroxydation. Les

données fournies par ce nouvel ajustement, comprenant seulement les deux paramètres kSOH et

kSS sont présentées dans le Tableau 4, p.80 (Ajustement 2).

La prise en compte de l’étape de suroxydation correspond à un modèle

« surparamétré », ne permettant ni d’améliorer l’ajustement, ni de définir une valeur de

constante de vitesse de suroxydation kSO2 avec une précision raisonable. Ceci signifie que dans

les conditions expérimentales utilisées, l’enzyme Orp1 n’est pas significativement suroxydée

et que le modèle minimal suffit à décrire les cinétiques réactionnelles de Orp1 avec H2O2.

Ainsi selon l’ajustement 2 (Tableau 4, p.80), pour des concentrations de H2O2 faibles de

l’ordre de 100 μM, la formation de l’acide sulfénique est limitante (kSOH*[H2O2] = 1,6.105 *

100.10-6 = 16 s-1) alors que la formation du pont disulfure est un processus très rapide

(kSS = 507 s-1).

Figure 45. Représentation graphique du calcul des contours de confiance de chaque paramètre

par la fonction « Fitspace » du logiciel KinTek Global Kinetic ExplorerTM

.

La fonction « Fitspace » à une dimension (Fitspace 1D) explore l’espace dans lequel chaque

paramètre peut évoluer tout en assurant un ajustement acceptable des données. Alors qu’un paramètre

donné est maintenu constant, tous les autres paramètres sont autorisés à varier en cherchant le

meilleur ajustement des données expérimentales. Le processus est répété sur la gamme de valeurs des

paramètres afin de générer une courbe de valeurs de chi2 normalisées en fonction des valeurs du

paramètre considéré.

A. Représentation du Chi2 normalisé en fonction du paramètre kSOH. B. Représentation du Chi2

normalisé en fonction du paramètre kSS. C. Représentation du Chi2 normalisé en fonction du

paramètre kSO2.