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surface et des eaux souterraines par les résidus pharmaceutiques

Annexe 7 Résultats des concentrations en pharmaceutiques (ng/g) issus des prélèvements passifs (POCIS) en mars

Annexe 8 : Questionnaire d’enquête déployé auprès des ménages

Annexe 9 : Fiche type de description des puits

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I t odu tio g

ale

L’anthropisation concerne l’ensemble des activités liées à l’Homme qui transforme les milieux pour exploiter les ressources, établir et développer les sociétés humaines (Elissalde, 2014; Michon et al., 1996). Associées à une démographie croissante – les prévisions démographiques à l’échelle mondiale sont de 10 milliards d’individus en β056 selon les Nations-Unies (UNDESA/PD, 2017) –, les activités anthropiques peuvent engendrer des perturbations* des écosystèmes. Leurs impacts* s’illustrent globalement par la modification des habitats (destruction, fragmentation), la perte de la biodiversité associée (Caitano et al., 2018) et l’introduction de contaminants dans l’environnement. Ces derniers peuvent entrainer des effets délétères sur les organismes vivants (Arenas-Sánchez et al., 2016).

Des changements dans les cycles biogéochimiques (carbone, azote, phosphore, soufre, métaux, etc.) ont aussi été mis en évidence (Charlson et al., 1992; Chen et al., 2018; Petranich et al., 2018), témoignant de l’ampleur du phénomène d’anthropisation. La cartographie de l’empreinte humaine2 (Sanderson et al., 2002) indique qu’en β00β, plus de 80% de la surface de la Terre est sous l’influence de facteurs anthropiques liés à la densité de population, aux changements d’occupation du sol et aux accès par les routes et les voies navigables. Les aires éloignées des activités humaines se raréfient avec la densification des réseaux routiers et l’augmentation des zones habitées (Guetté et al., 2018). L’empreinte humaine sur Terre a pris une telle ampleur (Waters et al., 2016), que la communauté scientifique s’est globalement accordée sur la définition du terme « Anthropocène ». Il désigne une nouvelle ère géologique succédant à l’Holocène, aux alentours de la Révolution Industrielle à la moitié du XIXème siècle (Steffen et al., 2011). L’Anthropocène résulte des actions de l’Homme sur l’environnement et conduit par exemple à des marqueurs géologiques (e.g. modifications de la composition des strates sédimentaires), climatiques (e.g. augmentation globale des températures) et des perturbations écologiques (e.g. entrée dans la sixième extinction de masse des espèces) (Ceballos et al., 2015). Les capacités de résilience* des écosystèmes ne peuvent pas complètement faire face aux modifications intenses et rapides qu’ils subissent (Liu et al., 2018) et qui constituent les raisons majeures de la crise environnementale actuelle.

Parmi les multiples facettes de l’anthropisation des milieux, le phénomène d’urbanisation est prégnant et correspond à la croissance des populations urbaines et à l’extension des villes (CNRTL, 2012). Les projections des Nations-Unies indiquent que 68% de la population sera urbaine en 2060. En milieu urbain, le terme de « petite cycle de l’eau » désigne les systèmes mis en place par l’Homme pour s’approprier la ressource afin de desservir ses besoins en termes de quantité et de qualité d’eau. L’eau ressource (rivières, lacs, réservoirs, eaux souterraines) est pompée, traitée puis acheminée jusqu’aux consommateurs (habitants, industries, etc.) ou stockée dans des réservoirs ou des châteaux d’eau. Les eaux usées et parfois, les eaux pluviales, sont canalisées dans des stations de traitement des eaux usées (STEU). L’eau traitée est délivrée dans le milieu naturel ou réutilisée, par exemple pour l’irrigation des cultures. Les aménagements hydrauliques peuvent détourner, canaliser et assécher les cours d’eau et les zones humides ; des retenues, des bassins d’orage et des rigoles peuvent être créés pour contenir et drainer les eaux pluviales (Marsalek, 2008). Ces aménagements peuvent être établis à des échelles locales (commune, métropole) mais aussi à l’échelle d’une région toute entière (Mohamed et al., 2017) afin de permettre l’extension de la zone urbaine, modifiant profondément les milieux et les réponses hydrologiques des bassins versants (Ferreira et al., 2018; Marsalek, 2008; Matthews, 2016; Whitney et al., 2015). Les problématiques environnementales et sociétales d’accès à l’eau en ville font émerger des défis pour leur développement durable, notamment en termes d’approvisionnement, d’assainissement et de préservation de la ressource (Niemczynowicz, 1999).

En effet, les conséquences de l’urbanisation sur le milieu sont représentées par l’augmentation de la demande en eau potable, l’imperméabilisation des sols, la canalisation des cours d’eau ou la modification des zones humides et l’augmentation des effluents (eaux résiduaires urbaines, traitées ou non par les STEU). En termes d’hydrologie et d’hydraulique, ces conséquences se traduisent par une diminution des temps de réponse hydrologiques, des phénomènes de ruissellement intense (Poulard et al., 2015) et une augmentation de la fréquence des inondations. L’érosion des sols et le transport de sédiments s’ajoutent à la modification des

2 L’empreinte humaine est définie comme « la somme des empreintes écologiques* des populations humaines ». Elle est exprimée en

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écoulements (Whitney et al., 2015). Conjointement à la diminution de l’infiltrabilité des sols, la demande en eau peut contribuer à la diminution de la recharge des eaux souterraines (Marsalek, 2008).

L’entrée de contaminants dans l’hydrosystème (Mitchell and Diaper, 2006) découle de la concentration des activités anthropiques (industrielles, agricoles, développement de l’habitat, etc.) dans les zones urbaines et péri-urbaines (Archundia et al., 2017b; Duwig et al., 2014; Ferreira et al., 2018). Les effluents urbains (eaux résiduaires domestiques, industrielles et agricoles) traités ou non traités par les STEU, ainsi que les eaux de ruissellement sur les surfaces urbaines, atteignent le milieu aquatique et peuvent de fait, y introduire des contaminants organiques et inorganiques. Des contaminations peuvent se produire en plusieurs points du petit cycle de l’eau : lessivage* des sols et des décharges, fuite des réservoirs de station-service, retombées atmosphériques, effluents peu ou pas traitées, etc. Les sources de contamination sont multiples et complexes du fait de leurs variabilités spatio-temporelles. Elles peuvent être ponctuelles (e.g. : effluents de STEU) ou diffuses (e.g. : intrants agricoles). Le réceptacle final des contaminants sont les eaux de surface ; puis en fonction de différents processus de transferts, ils peuvent atteindre les eaux souterraines (Burant et al., 2018; Castiglioni et al., 2018).

Parmi la large gamme de contaminants urbains, sont distingués les nutriments, les contaminants microbiologiques, les métaux lourds et les polluants prioritaires comme les composés chimiques industriels et les hydrocarbures issus du pétrole, les pesticides et les polluants dits « émergents » (plastifiants, détergents perfluorés, pharmaceutiques, drogues, etc.). Les polluants « émergents » sont caractérisés par leur découverte relativement récente, leurs faibles concentrations dans l’eau (quelques nanogrammes à quelques microgrammes par litre) et par leur toxicité chronique* difficile à évaluer (Pal et al., 2014). Du fait du manque d’informations de leurs impacts sur l’environnement et la santé publique, et de leur omniprésence dans les milieux (contamination diffuse et continue), ils représentent un enjeu pour les décennies à venir (Matthews, 2016; Taheran et al., 2018).

Les pesticides et les résidus pharmaceutiques sont l’objet d’étude de cette thèse comme indicateurs des pressions anthropiques appliquées sur la ressource en eau en milieu urbain. D’une part, le modèle d’agriculture conventionnelle, dont l’emploi de pesticides est prôné comme essentiel à la sécurité alimentaire (UIPP, 2010) mais dont les conséquences néfastes, notamment sur le milieu aquatique, sont identifiées comme des impasses écologiques et économiques (Caplat, 2014). D’autre part, la concentration et la croissance des populations urbaines sont les sources d’émission des effluents (eaux usées, médicaments jetés dans les décharges, déchets biomédicaux, etc.) contenant des résidus de médicaments.

Les pesticides et les résidus pharmaceutiques sont deux catégories de contaminants appartenant à des familles chimiques très différentes d’un point de vue physico-chimique et donc ayant des propriétés et des comportements variés en termes de dispersion environnementale, de mobilité et de toxicité. Certaines molécules ont des groupements chimiques leur conférant un comportement apolaire et sont donc préférentiellement retrouvées dans les sols, les sédiments ou les organismes vivants. Ceci est particulièrement le cas pour les pesticides de la famille des organochlorés, comme par exemple la chlordécone accumulée dans le sol des Antilles après son utilisation massive contre le charançon du bananier au cours des années 1970- 1990. La population générale continue à être exposée à cette substance notamment via la consommation d’aliments contaminés (Crabit et al., 2016; Multigner et al., 2010). D’autres composés sont sujets à la volatilisation puis à l’interaction avec les particules dispersées dans l’air et peuvent être ainsi transportés sur de longues distances (Gong et al., 2015) ou, plus localement, induire une exposition de la population générale aux pesticides issus des cultures traitées proches des habitations (Wielgomas et al., 2013). Les pesticides les plus polaires et la majorité des résidus pharmaceutiques se retrouvent préférentiellement dans le compartiment eau. En fonction de leur mobilité (adsorption, transport, stockage) ils sont quantifiés fréquemment dans les eaux de surface continentales et marines et dans les eaux souterraines (Sousa et al., 2018; Wilkinson et al., 2017).

Le devenir de ces contaminants est fonction de leurs propriétés physico-chimiques (Grandcoin et al., 2017; Wilkinson et al., 2017), ce qui implique une diversité d’impacts sur les organismes vivants. Des effets délétères ont été, en effet, démontrés pour les organismes aquatiques (végétaux, invertébrés, poissons) du fait de la présence des pesticides et des résidus pharmaceutiques dans le milieu aquatique (Boscolo et al., 2018; Santos et al., 2010).

Chez l’Homme, si les effets des intoxications aigües par les pesticides sont assez bien connus, les conséquences de l’exposition chronique restent encore largement à démontrer. Toutefois, les effets cancérigènes, neurotoxiques ou de type perturbateurs endocriniens (Bloom et al., 2017; Multigner et al., 2016; Quandt et al.,

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2016; Rohlman et al., 2016) sont les plus évoqués et documentés. Le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) a déjà classé un certain nombre de pesticides comme cancérigènes certains (arsenic et ses dérivés inorganiques, oxyde d’éthylène comme l’oxacyclopropane), probables ou possibles (dichlorodiphényltrichloroéthane, DDT). De même, l’expertise conduite en β008 par l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Inserm) conclut à la responsabilité probable des pesticides dans la plupart des cancers d’origine environnementale (Bompays et al., 2010; Boulanger et al., 2016). Les doses de résidus pharmaceutiques présentes dans les eaux de consommation* sont en général très inférieures aux doses thérapeutiques et à ce jour, les effets sur la santé humaine n’ont pas été prouvés.

Du fait de leurs impacts potentiels, les pesticides sont soumis à plusieurs types de règlementations internationales, nationales et des plans de gestion intégrée de la qualité de la ressource en eau sont développés. Nombre d’entre eux ont été classés dans des listes de polluants dangereux par l’OMS (Organization and Safety, 2010). Ils figurent en outre dans la liste des Polluants Organiques Persistants (liste POP) qui doivent être éliminés ou d’usage restreint (Convention d’Aarhus, Convention de Stockholm (Stockholm, 2008), Règlement européen n° 850/β004) et font l’objet de surveillance dans les masses d’eau conformément à la Directive Cadre Eau (DCE), en respect aux Normes de Qualité Environnementales (NQE). Concernant les résidus pharmaceutiques, des études sont en cours pour évaluer leurs effets et mettre en place des plans de gestion. L’arrêt du 7 août β015 (modifiant l’arrêté du β5 janvier β010 établissant le programme de surveillance de l’état des eaux en application de l’article R. β01β-22 du Code de l’Environnement) inclut huit composés pharmaceutiques dans la liste des substances à surveiller dans les eaux de surface.

Ainsi, les pesticides et les résidus pharmaceutiques sont deux classes de contaminants issus principalement des activités agricoles et des rejets d’eaux usées, dont les variations de concentrations environnementales dépendant des activités anthropiques sur le bassin versant considéré et des conditions climatiques (Piel et al., 2012). L’emploi de pesticides s’est développé de façon à se positionner aujourd’hui comme un recours nécessaire au maintien de l’agriculture conventionnelle. Les médicaments, employés depuis des siècles, voient leur consommation augmenter conjointement à l’accroissement démographique et au vieillissement de la population. Du fait de leur occurrence dans les eaux de surface, souterraines et dans les eaux de consommation, des impacts environnementaux ont été mis en évidence et l’exposition des populations humaines soulève la problématique des risques* sanitaires. En particulier, les effets chroniques d’une multi-exposition restent encore inconnus et difficiles à documenter.

Dans le contexte de l’Afrique Sub-Saharienne, ces problématiques sont accrues. Les Nations-Unies prévoient une croissance démographique comprise entre 3% et 5% des agglomérations urbaines dans cette région du Monde, et en particulier dans le golfe de Guinée (UNDESA/PD, 2018). Les centres urbains en pleine expansion doivent faire face à la fois à une augmentation soutenue de la population urbaine et à un manque d’infrastructures liées à l’eau. Dans les villes, la place de l’agriculture est cruciale pour assurer la sécurité alimentaire, tandis que les usages de pesticides restent peu encadrés. L’absence de stations d’épuration fonctionnelles aboutit à des contaminations directes par les eaux usées contenant entre autres des résidus pharmaceutiques. Les enjeux de développement dans ces métropoles urbaines comprennent donc la préservation de la ressource face à la multitude et à l’ampleur des contaminations potentielles, mais aussi de par les usages particuliers de la ressource en eau en Afrique.

Face à ce constat, l’objectif de la thèse est de caractériser l’impact des activités humaines sur la qualité de la ressource en eau en milieu urbain Sub-Saharien à travers l’étude de la contamination par les pesticides et les résidus pharmaceutiques.

Le cas d’étude est constitué par le bassin versant de la Méfou dans lequel se situe la capitale du Cameroun (Afrique Centrale), Yaoundé. Ce site est emblématique des capitales africaines qui ont connu ces dernières années une très forte croissance démographique non accompagnée d'une gestion et d'un aménagement urbain adapté. Les modalités d'approvisionnement et d'usage des substances chimiques comme les pesticides et les médicaments sont spécifiques. Il apparaît donc essentiel de conduire des travaux pour pouvoir renseigner la présence de ces molécules dans l'environnement urbain tout en prenant conscience des modalités d'usage des différentes ressources en eau.

Le sujet de thèse se base donc sur une approche d’observation du milieu, afin de fournir les premières informations de base concernant la contamination et les enjeux sur le bassin versant d’étude. Une approche

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multidisciplinaire est privilégiée, permettant d’aborder plusieurs aspects complexes de la problématique, relatifs à la compréhension des usages des pesticides et des médicaments, aux usages de la ressource en eau, à la chimie de l’environnement et aux des transferts de contaminants.

La démarche de la thèse s’articule donc autour de trois étapes : l’identification des pressions anthropiques, la caractérisation des sources de pollution et des transferts potentiels des contaminants d’intérêt, le diagnostic de contamination* et enfin, la mise en évidence des enjeux sur la qualité de l’eau et les usages associés (Figure 1).

Figure 1 : Démarche de recherche générale adoptée pour répondre à la problématique de la thèse

La démarche de la thèse est détaillée à la fin du Chapitre 1.

Le manuscrit comprend ainsi trois chapitres :

- Le Chapitre 1 dresse un état de l’art sur la nature, les sources, les transferts et les impacts des contaminants d’étude et le contexte particulier en Afrique Sub-Saharienne ; au terme duquel la problématique, les hypothèses de recherche et la démarche adoptée pour y répondre sont présentées ; - Le Chapitre 2 présente le site d’étude à travers les caractéristiques du milieu physique et de son

anthropisation ; et identifie les sources et les transferts potentiels de contaminants ;

- Le Chapitre 3 établit un diagnostic de contamination et fait émerger les enjeux liés à l’usage de la ressource en eau.

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Chapit e : Etat de l’a t de la o ta i atio du ilieu