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IV. Propriétés électriques des dépôts

IV.2. Résistivités des dépôts

IV.2.1. Mesures de résistivités

Afin de déterminer la résistivité des dépôts réalisés, l’alumine a été placée entre deux électrodes d’après le montage décrit dans le chapitre II p.84. L’une est constituée par le substrat en inox, l’autre par une couche de peinture conductrice à base d’argent.

Lorsque l’on soumet l’échantillon à un champ électrique de l’ordre de 2.106 V/m − soit 500 V appliqué à un échantillon de 250 µm d’épaisseur − on observe toujours un courant transitoire qui s’amortit de plus en plus lentement [COE 93] (Figure IV.2). Dès la fin du XIXème siècle, ces courants transitoires en circuit fermé ont été étudiés. Ils semblent suivre des lois empiriques simples de la forme t-n, n étant compris entre 0,5 et 1,5 suivant le matériau étudié et les conditions expérimentales [CUR 89]. La valeur de n vaut 0,46 pour le dépôt plasma de la poudre Al2O3[-25 +10 µm] projetée en mode APS. La compréhension de ces courants de

polarisation est encore loin d’être satisfaisante car ils résultent de combinaisons de phénomènes de polarisations et de conduction.

Figure IV.2 : Evolution du courant et de la résistance d’un dépôt d’alumine Al2O3[-25 +10 µm] projetée en

mode APS, en fonction du temps de mesure.

Le courant décroissant continuellement, la valeur de la résistance R aux bornes des électrodes

0 50 100 150 200 I ( n A ) 1 10 100 0 30 60 90 120 t (min.) R ( M) I (nA) R (MΩ)

préconisent des mesures de courant après une durée déterminée de polarisation (arbitrairement choisie de 1 à 10 minutes) [BAR 87]. De telles normes permettent de comparer entre eux les matériaux mais ne permettent pas de donner la résistivité intrinsèque de ces matériaux. Afin de déterminer la valeur de la résistivité ρ à partir de celle de R (

d S R =

ρ où S est la surface et d l’épaisseur de l’échantillon), les mesures de R ont été effectuées après 5 minutes de polarisation. La qualité des interfaces ainsi que les conditions de mesure (comme le taux d’humidité dans l’air) influent beaucoup sur la reproductibilité des mesures (les variations peuvent être d’un ordre de grandeur). Les mesures ont donc toutes été effectuées le même jour et dans les mêmes conditions (20°C et 25 % d’humidité dans l’air). Malgré ces précautions, la dispersion dans les mesures est élevée (par exemple, sur les dépôts plasma de la poudre Al2O3[-25 +10 µm] projetée en mode APS, elle est de l’ordre de 40 %).

IV.2.2. Résultats et interprétations

La résistivité diminue sensiblement avec le taux de porosité (Figure IV.3). L’alumine est un meilleur isolant électrique que l’air (la résistivité de l’alumine α dense est supérieure à 1014 Ω.cm, celle de l’air au niveau de la mer par temps clair vaut environ 4.1011 Ω.cm

[LID 95]). Les dépôts sont des composites alumine/air, leur conduction est intermédiaire entre celles des deux constituants. De plus, l’humidité de l’air présent dans les pores favorise cette diminution de la résistivité globale du dépôt lorsque le taux de porosité augmente. Ce même phénomène a déjà été observé par L. PAWLOWSKI [PAW 88] et a même été proposé comme principe pour un détecteur d’humidité réalisé par projection plasma par M. FASCHING et al. [FAS 95].

Ce composite, de résistivité ρd, a une résistance électrique Rd = ρddd/Sd. Il est constitué de

deux éléments : l’alumine de résistivité ρa et de résistance Ra = ρada/Sa, et l’air de résistivité ρp

et de résistance Rp = ρpdp/Sp (S et d sont l’aire et l’épaisseur des éléments équivalents). La

résistance du dépôt peut être modélisée par l’association des deux résistances montées soit en série soit en parallèle.

0.E+00 1.E+12 2.E+12 3.E+12 8 10 12 14 16 18 20 22 taux de porosité (%) ρ (.c m)

Figure IV.3 : Evolution de la résistivité ρ des dépôts plasma en fonction de leur taux de porosité.

IV.2.2.1. Montage en série

Le dépôt est alors modélisé par la superposition de deux couches (Figure IV.4).

Figure IV.4 : Résistance à double couche et circuit équivalent.

Dans ce cas nous avons :

Sd = Sa = Sp

da = (1-x) dd et dp = x dd (x étant le taux de porosité)

Rd = Ra + Rp d’où : Équation IV.1 : ρd = (1-x) ρa + x ρp Rp Ra dp da Sa = Sp air alumine

Le calcul de la fonction ρd = f(x) d’après l’Équation IV.1 permet de déterminer ρa et ρp. Les

valeurs obtenues de ρa sont de l’ordre de 1012 Ω.cm (valeur assez proche de celle de l’alumine

dense) et celles de ρp sont négatives (ce qui n’a physiquement aucun sens) : la résistivité

diminue de manière trop importante lorsque la porosité augmente pour pouvoir être modélisée par un circuit équivalent de type « série » (même en excluant un, voire deux points expérimentaux susceptibles d’être trop imprécis).

IV.2.2.2. Montage en parallèle

Le dépôt est alors modélisé par une juxtaposition de deux éléments (Figure IV.5).

Figure IV.5 : Résistance à deux éléments juxtaposés et circuit équivalent.

Dans ce cas nous avons :

dd = da = dp Sa = (1-x) Sd et Sp = x Sd p a p a d R R R R R + = d’où, Équation IV.2 : x) (1 x p a p a d = ρ +ρ ρ ρ ρ Rp Sp Sa Ra da =dp alumine air

Le calcul de la fonction ρd = f(x) d’après l’Équation IV.2 permet de déterminer ρa et ρd. Les

valeurs obtenues, en excluant les points expérimentaux extrêmes (ce qui correspond à la fonction continue de la Figure IV.3) afin d’obtenir une meilleure approximation, sont :

ρa = 2,2.1012 Ω.cm

ρp = 3,9.1011 Ω.cm

Ces valeurs sont beaucoup plus proches des valeurs de résistivité réelles que lors de l’approximation du montage en série. Celle de l’air est d’environ 4.1011 Ω.cm, celle de l’alumine est supérieure à 1014 Ω.cm. Cependant, cette dernière valeur est celle de l’alumine α-Al2O3 dense obtenue par frittage et non celle de l’alumine γ-Al2O3 obtenue par projection

plasma. Cette dernière est susceptible d’être plus conductrice car elle est plus hygroscopique [PAW 88].

Le fait que le modèle « résistances en parallèle » reflète mieux le comportement réel des dépôts tend à montrer que la conduction électrique, à travers le revêtement, s’effectue à la fois dans des colonnes d’alumine et dans des colonnes d’air de même épaisseur que le dépôt. Ces colonnes d’air modélisent la porosité interconnectée des dépôts plasma.

Cependant, cette interprétation est à prendre avec précaution car cette technique de caractérisation est peu précise, très dépendante des conditions atmosphériques et ne permet qu’un classement très approximatif des dépôts réalisés. Elle n’apparaît pas comme suffisamment fine pour mettre en évidence le rôle joué par les pores et les fissures du dépôt dans la conduction du courant électrique.