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Le cours naturel de l’infection au HSV-1 est influencé à la fois par la réponse immunitaire non spécifique (innée) et spécifique (acquise) de l’hôte infecté (Whitley, 2001). L’importance relative des diverses composantes de la réponse immune varie également selon que l’infection est initiale ou récurrente. Suite à une infection initiale, il y a rapidement apparition d’une réponse inflammatoire non spécifique incluant l’interféron (IFNs), les macrophages activés et les cellules tueuses (NK), Cette première ligne de défense limite l’extension de l’infection en inhibant significativement la réplication virale (Stanberry et al., 2000). D’un autre côté, les anticorps neutralisants, les lymphocytes T spécifiques sécrétant les cytokines antivirales (CD4+), et/ou activées pour tuer les cellules infectées (CD8+) (réponse immunitaire spécifique) prennent plusieurs jours à se développer. D’un modèle animal à l’autre, cette réponse peut varier significativement (Whitley et al., 1998). Par exemple, chez la souris, les lymphocytes T cytotoxiques et les immunoglobulines IgM et IgG spécifiques

46 apparaissent de 4 à 6 jours après le début de l’infection, alors que chez l’homme, l’immunité spécifique se développe 7 à 10 jours plus tard. De façon classique, les anticorps IgM apparaissent de façon transitoire, suivis des IgG et des IgA qui persistent sur une plus longue période (Whitley & Roizman, 2001). Les anticorps neutralisants sont dirigés contre les principales glycoprotéines de l’enveloppe (gB, gD, gH/L), alors que les lymphocytes T peuvent être dirigés contre une panoplie de protéines virales (Stanberry et al., 2000). Les protéines et leurs épitopes antigéniques sont généralement bien conservés entre le HSV-1et -2 mais des anticorps dirigés contre des épitopes type-spécifique ont été identifiés pour les glycoprotéines gB, gD, gC, et plus spécialement gG. Des épitopes T type-spécifiques ont également été identifiés chez ces glycoprotéines ainsi que chez la protéine virale VP16 (Koelle et al., 1998a).

Face à un système de défense immunitaire efficace, le HSV-1 réussit tout de même à se réactiver de sa latence et à entraîner une infection récurrente. Ce phénomène demeure toujours aussi énigmatique malgré de nombreuses recherches effectuées sur ce sujet. Cependant, les infections récurrentes sont généralement moins sévères et plus brèves que les infections initiales. En effet, lors d’infections récurrentes, les mécanismes de l’immunité spécifique sont activés beaucoup plus rapidement (Cunningham & Mikloska, 2001). En fonction des individus, la sévérité de l’infection et la fréquence des récurrences peuvent être significativement différentes et reflètent peut-être la sélection préférentielle de l’une des composantes de la défense immunitaire. Les études effectuées chez les animaux suggèrent que l’immunité humorale et cellulaire sont toutes deux importantes dans le contrôle de l’infection initiale et des récurrences (Stanberry et al., 2000).

La réponse humorale semble efficace pour réduire le titre viral au site d’infection et dans les tissus nerveux durant l’infection initiale. En effet, le transfert passif d’anticorps spécifiques du HSV-1 semble protéger l’animal contre une infection disséminée ou une infection du système nerveux (Bravo et al., 1996, Mitchell & Stevens, 1996, Morrison & Knipe, 1997, Sanna et al., 1996). Chez l’humain, le transfert d’anticorps de la mère au fœtus joue également un rôle important dans la protection contre l’herpès néonatal, mais ne semble pas totalement efficace (Kohl et al., 1989, Sullender et al., 1987). Par ailleurs, l’immunité humorale est moins efficace dans la protection contre les récurrences ou contre l’infection exogène (Whitley et al., 1998). Le HSV-1 a développé plusieurs stratégies afin de déjouer cette composante de la réponse immune (Favoreel et al., 2000). Par exemple, les

47 glycoprotéines gE et gI de l’enveloppe virale forment un complexe pouvant lier la fraction Fc des immunoglobulines, bloquant ainsi l’activation de la cascade du complément. De plus, la gC lie plusieurs composantes du complément. L’établissement de la latence virale dans les cellules du système nerveux, comprenant très peu de cellules impliquées dans la défense immunitaire, de même que l’absence d’expression de protéines virales pendant la phase d’infection latente demeure l’un des mécanismes les plus efficaces d’évasion du système immunitaire.

Plusieurs études suggèrent que la réponse à médiation cellulaire joue un rôle central dans le contrôle de la sévérité de l’infection et du nombre de récurrences (Cunningham & Merigan, 1983, Posavad et al., 1996,). En effet, les infections mucocutanées sont beaucoup plus sévères chez les patients ayant une immunité à médiation cellulaire défective (Posavad et

al., 1996, Siegel & McCracken, 1981) comparativement aux patients

agammaglobulinémiques. Plusieurs études effectuées chez l’humain incriminent les lymphocytes T CD8+ et T CD4+ dans la protection contre l’infection par HSV-1 (Jennings et al., 1991, Manickan & Rouse, 1995, Posavad et al., 1996). Lequel de ces deux types de cellules est le plus important pour contrôler les infections récurrentes demeure un sujet bien débattu surtout lorsqu’on considère le développement d’un vaccin efficace contre l’infection au HSV-1 (Cunningham & Mikloska, 2001). Une étude a rapporté que des individus séropositifs pour le VIH et souffrant d’infections génitales au HSV-1 sévères, présentaient des niveaux de lymphocytes T CD8+ précurseurs plus faibles que chez les patients VIH positifs avec des infections génitales herpétiques modérées (Posavad et al., 1997). Une autre étude a démontré que la présence de lymphocytes T CD8+ locaux est associée à la clairance du HSV-1 des lésions herpétiques cutanées (Koelle et al., HSV-1998b). De façon intéressante, un des mécanismes d’évasion du HSV-1 (Favoreel et al ., 2000) contre les défenses immunitaires de l’hôte est en fait d’inhiber l’efficacité des lymphocytes T CD8+ cytotoxique en réponse à l’infection virale. La protéine virale ICP47 exprimée précocement dans l’infection, se lie à la protéine cellulaire TAP (transporter associated with antigen processing) qui permet la translocation de peptides dans le RE et leur association au complexe majeur d’histocompatibilité (CMH) de classe I. Ainsi ICP47 inhibe le transport et la présentation des antigènes associés au CMH de classe I. D’un autre côté, pour contrecarrer cet effet, les cellules T CD4+ sécrètent de l’INF-γ qui restaure partiellement l’expression du CMH de classe I par une stimulation de la production de la protéine TAP (Koelle et al., 1993, Mikloska et al., 1998, Posavad et al., 1996). Des modèles animaux montrent que les

48 lymphocytes CD8 sont directement impliqués dans le contrôle des réactivations herpétiques, leur déplétion entrainant une sensibilité particulière des animaux aux stimuli de la réactivation du virus.

De façon générale, les lymphocytes T CD4+ peuvent sécréter des cytokines de la réponse de type Th1 (spécialement l’IFN-γ ainsi que le TNF-α et l’interleukine (IL)-2 et -12) ou de type Th2 (IL-4, IL-5, et IL-10). Au sein d’une population de lymphocytes, les deux types de réponse peuvent cohabiter. La réponse de type Th2 mène à la sécrétion d’anticorps neutralisants par les cellules B, alors que la réponse de type Th1 entraîne la production de cytokines antivirales et à l’activation des lymphocytes T CD8+ cytotoxiques. La réponse de type Th1 semble prédominante pour le contrôle de l’infection par HSV-1, alors que la réponse de type Th2 préviendrait la transmission du virus d’une cellule à l’autre (Cunningham & Mikloska, 2001).

Des études comparatives entre des individus ayant ou non des infections récurrentes ont démontré que des altérations dans la production des cytokines de la réponse de type Th1 sont corrélées avec le développement des infections récurrentes (Manickan & Rouse, 1995, Posavad et al., 1998, Spruance et al., 1995a). En effet, l’IFN-γ semble critique pour conférer une protection contre l’infection au HSV-1. Certains travaux ont permis de démontrer que les cellules mononucléées du sang périphérique (PBMC) prélevées chez des patients subissant des épisodes d’herpès labial fréquents ont une production d’IFN-γ inexistante en culture (Green et al., 1985, Kuo & Lin, 1990, Sheridan et al ., 1987). De plus, ces PBMC produisent des titres élevés d’anticorps contre le HSV-1. D’un autre côté, les PBMC prélevés chez des patients séropositifs pour le HSV-1 mais sans histoires d’infections récurrentes, présentent des concentrations plus élevées d’IFN-γ et d’IL-2 et des titres plus faibles d’anticorps contre le HSV-1 (Spruance et al ., 1995b). Une meilleure compréhension de la réponse immunitaire spécifique dirigée contre l’infection causée par le HSV-1 permettra de prédire plus efficacement le type de réponse qui devrait être favorisé pour le développement de vaccins efficaces.