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Les différents modèles utilisés de façon historique

Matériels et méthodes

III.1 Rationnel de note choix de modèle animal

III.1.2 Les différents modèles utilisés de façon historique

Les deux espèces animales es plus fréquemment utilisées pour les expérimentations sur la pathogénie de HSV-1 sont le lapin et la souris. Le cochon d’Inde est quant à lui la référence dans les études sur HSV-2. Ces trois modèles animaux ont fourni à la communauté scientifique la grande majorité des données actuellement disponibles sur la pathogénie des virus HSV-1 et 2, notamment au regard des mécanismes impliqués dans la latence et la réactivation virale.

96 Le lapin présente l’avantage d’être un animal de taille suffisamment conséquente pour une observation clinique aisée et pour la réalisation de gestes chirurgicaux, le cas échéant. En revanche, l’infection herpétique induite chez le lapin est marquée par une tendance à la réactivation quasi-permanente (absence d’infection latente proprement dite) et une reproductibilité limitée des signes cliniques et biologiques. Ce dernier point est notamment du à l’absence de souches consanguines permettant de limiter la variabilité interindividuelle. De même, les outils biologiques à disposition pour les études chez le lapin (anticorps monoclonaux par exemple) sont souvent moins fournis que pour d’autres espèces. Enfin, le lapin est un animal encombrant et couteux, ce qui limite rapidement le nombre d’individus incluables dans les expérimentations.

La souris présente des avantages et inconvénients en tous points opposés à ceux de lapin. Sa petite taille et le faible coût de son élevage permettent d’envisager des études avec un nombre d’individus satisfaisant pour les tests statistiques. De plus, les outils biologiques disponibles et l’existence de lignées consanguines faciclite nettement les protocoles expérimentaux. Enfin, l’infection herpétique chez la souris entraine rapidement une infection latente (mais potentiellement réactivable), à condition toutefois de faire le bon choix de la souche virale et des conditions d’inoculation (Crepin et al, Soumis). Pour toutes ces raisons, la souris est de loin l’hôte le plus communément utilisé dans les études sur les différentes phases de l’infection herpétique.

La première démonstration directe de la capacité de HSV-1 à établir et maintenir une infection latente dans les cellules neuronales a été démontrée chez des souris inoculées dans les coussinets plantaires. Après réplication virale au site d’inoculation, l’infection latente était observée dans les ganglions spinaux de la moelle épinière (Wagner EK, et Bloom DC. 1997). C’est aussi dans ce modèle qu’ont été effectuées les premières études sur le transport du virus le long des axones. Le modèle d’infection plantaire a donc permis de poser les bases de la compréhension des mécanismes impliqués dans la neurovirulence. Ce modèle est désormais plutôt utilisé pour l’étude de HSV-2, en raison du tropisme plus important de ce virus pour les ganglions spinaux que le virus HSV-1, dont le principal site de latence naturel est le ganglion trigéminé (TG), situé dans la base du crâne.

Le modèle murin le plus utilisé dans littérature est de loin est celui dit de scarification cornéenne (CS), dans lequel l’instillation du virus sur la cornée est réalisée après scarification

97 de l’épithélium. Grâce à cette manœuvre, les particules virales sont adsorbées par les cellules cornéennes et les terminaisons des fibres sensitives intracornéennes (d’origine trigéminale). Des antigènes viraux sont d’ailleurs détectables dans la cornée entre 2 et 8 jours post-inoculation (Crepin et al, Soumis). Après pénétration dans la terminaison des fibres nerveuses, la capside virale remonte le long de l’axone par transport rétrograde, à la vitesse d’au moins 1cm par jour, pour atteindre le noyau des neurones du TG homolatéral où débute un nouveau cycle viral. Des antigènes viraux sont détectables dans le TG dès le 4ème jour post-inoculation (pi), plus en abondance à partir du 6ème jour, puis cela décroit par la suite, preuve de l’entrée en latence du virus. Il existe aussi une réduction de la quantité d’ADN viral entre le 6ème et le 28ème jour, ce qui traduit aussi une réduction, voire une extinction du processus réplicatif. Cette période est aussi caractérisée par une augmentation de la quantité des LAT (Crepin et al, Soumis). Cependant, selon la souche virale utilisée, il peut persister au 28ème jour post-infection certains marqueurs de la réplication virale, notamment des ARN messagers codant des protéines virales précoces, voire tardives. Ces données concourent d’ailleurs à remettre en question la réalité d’une extinction complète de la réplication virale, donc d’un réel état d’infection latente, dans le modèle CS au 28ème jour post-inoculation, en particulier avec des souches virales comme KOS (Crepin et al, Soumis). Le modèle CS ne paraît donc pas le plus adapté pour avoir une idée précise de ce qu’il se passe réellement chez l’homme où les analyses de ganglion trigéminé post-mortem ont essentiellement retrouvé du l’ADN viral et des LAT, sans expression de transcrits codant pour des protéines virales (Mitchell et al, 2003). D’une façon plus générale d’ailleurs, une des principales limites des modèles animaux est la difficulté à reproduire ce qu’il se passe réellement chez l’homme. En particulier, de nombreux isolats cliniques de HSV-1 sont extrêmement neurovirulents et labiles lorsqu’ils sont inoculés chez l’animal, ou à l’inverse sont non pathogènes. Finalement, le nombre de souches de HSV-1 potentiellement à disposition en expérimentation animale courante est de l’ordre d’une quinzaine, ce qui est relativement faible si l’on compare à la diversité des génotypes réellement rencontrés chez l’homme.

Afin de disposer d’un modèle animal qui soit en mesure de reproduire un peu plus fidèlement la maladie herpétique telle qu’observée chez l'être humain, notre équipe a caractérisé dans les années 2000 un nouveau modèle murin dit « oro-oculaire » (Labetoulle et al, 2000, Son nom est lié au fait que la primo-infection est réalisée dans la lèvre (pour se rapprocher du principal site de primo-infection chez l’homme (Liesegang et al, 1989)), et qu’elle entraine rapidement une infection herpétique aiguë de l’iris et de la cornée de l’œil

98 homolatéral, avant d’induire une infection latente dans les ganglions trigéminés, les ganglions cervicaux supérieurs, la moelle, le noyau moteur facial (Labetoulle et al, 2003), autant de localisations décrites chez l’homme comme sites de latence herpétique (Mitchell et al, 2003). Même si l’infection oculaire chez l’homme n’est quasiment jamais concomitante de la primo-infection, mais plutôt retardée de quelques années (Liesegang et al, 1989), ce modèle murin reproduit en de nombreux points chez la souris les voie de propagation du virus dans le système nerveux, depuis le site de primo-infection le plus fréquent (les voies oro-pharyngées) jusqu’aux principaux sites de latence observés chez l’homme. Pour toutes ces raisons, nous avons privilégié l’utilisation de ce modèle pour nos travaux plutôt que celui de la scarification cornéenne.