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Une « réforme de la réforme » ?

Dans le document POUVONS-NOUS NOUS PASSER (Page 99-109)

trice d’elle-même, bloquant la voie d’un avenir mieux orienté. Maîtresse de posi-tions nombreuses, elle commence à secréter des structures d’autoconservation.23

C’est pourquoi aujourd’hui, d’autres dangers plus subtils guettent en-core la liturgie – c’est ce que nous allons aborder maintenant.

n’appartient pas à ceux qui entendent continuer dans une voie dont les résultats se sont avérés catastrophiques.28

Aujourd’hui, on peut constater – et l’on ne peut que s’en réjouir – une amorce de renouveau dans la manière de célébrer la liturgie, et une ten-dance nette à un retour au sens du sacré, en particulier dans les villes et chez les jeunes générations de prêtres et de fidèles. Pourtant, malgré ce re-tour à des formes plus traditionnelles, d’autres dangers, peut-être plus sub-tils, guettent encore la liturgie, telle que le concile Vatican II a voulu la res-taurer dans la continuité de la Tradition.

Le danger de la recherche du « senti »

Même parmi ceux qui reviennent à une plus grande fidélité à la liturgie de l’Église, un danger est réel aujourd’hui (notamment chez les jeunes) : la recherche du senti, de l’émotion dans la liturgie. Non que celle-ci doive être absente ; elle fait partie de notre nature humaine et comme telle doit être intégrée. Mais une recherche prioritaire ou excessive de l’émotion et du ressenti ne peut que nuire à l’authentique esprit de la liturgie. Par exemple, la recherche excessive de l’esthétique risque de détourner de l’essentiel, qui se déroule dans l’invisible. Ainsi, il doit exister dans la liturgie une

« noble simplicité » :

La liturgie est là pour tous. Elle doit être “catholique”, c’est-à-dire communi-cable à tous les croyants sans distinction de lieu, d’origine, de culture. C’est pour-quoi elle doit être “simple”. Mais être simple ne veut pas dire être au rabais. Il y a la simplicité du banal, et il y a la simplicité expression de la maturité. Dans l’Église, il ne peut s’agir que de la seconde, la véritable simplicité. L’effort le plus grand de l’esprit, la purification la plus grande, la maturité la plus grande en-gendrent la véritable simplicité. L’exigence bien comprise de simplicité s’identifie à celle de pureté et de maturité qui peut exister à bien des degrés, mais jamais s’il y a absence d’exigence spirituelle.29

28 Ibid., p.43 ; sur ce thème, cf. aussi Joseph RATZINGER, Les principes de la théologie catholique ; esquisse et matériaux, Téqui, Paris, 1985, p.423 et 436-438 ; BENOÎT XVI, Discours à la Curie ro-maine, 22/12/2005 ; BENOÎT XVI, Lumière du monde ; Le pape, l’Église et les signes des temps, en-tretien avec Peter Seewald, Montrouge, Bayard, 2010, p.93. Citons encore cette phrase signifi-cative : « Le véritable héritage du Concile réside dans ses textes. Si on les explique correcte-ment et à fond, on est garanti contre les extrémismes des deux bords ; ensuite s’ouvre réelle-ment un chemin qui a encore beaucoup d’avenir devant soi. » (Joseph RATZINGER, Le sel de la terre, Flammarion/Cerf, Paris, 1997, p.75).

29 Joseph RATZINGER, La célébration de la foi ; essai sur la théologie du culte divin, Paris, Téqui, 1985, p.117. Cf. aussi Sacramentum caritatis, 40 : « La liturgie possède de par sa nature une

va-Le danger d’une protestantisation

Un autre danger est de plus en plus grand aujourd’hui : celui d’une pro-testantisation de l’Église.30 Ce danger se manifeste en particulier par une in-sistance trop exclusive sur la Parole de Dieu au détriment de la Messe. En sont des signes par exemple la résignation anticipée de n’avoir plus de prêtres, donc plus la Messe, et le fait de s’y préparer déjà en remplaçant à certaines occasions la Messe par une célébration de la Parole. On peut citer le fait récent, dans un diocèse, où la confirmation des jeunes du diocèse a été donnée au cours d’une célébration de la Parole, pour éviter que l’Eu-charistie n’occulte le sacrement de la confirmation… L’estompement assez généralisé de la réalité du sacrifice de la Messe actualisant le sacrifice de la Croix est également très préoccupant :

Ainsi donc l’Eucharistie n’est pas simplement la Cène, et c’est en connaissance de cause que l’Église ne l’a pas appelée “Cène”, pour éviter cette fausse impres-sion. L’Eucharistie est présence du Sacrifice du Christ, de cet acte suprême d’ado-ration qui est en même temps acte suprême d’amour, de l’amour “jusqu’au bout”

(Jn 13,1), et donc partage de soi-même sous les figures du pain et du vin.31 Jean-Paul II avait dit dans sa dernière encyclique : « Ce sacrifice est telle-ment décisif pour le salut du genre humain que Jésus-Christ ne l’a accompli et n’est retourné vers le Père qu’après nous avoir laissé le moyen d’y parti-ciper comme si nous y avions été présents. »32

Le danger des divisions

Un autre danger nous guette aujourd’hui, celui que la liturgie, premier lieu de la communion avec Dieu et entre nous, soit au contraire un lieu de divisions.33 Ainsi, des disputes stériles entre tenants de l’ancien Missel, et

riété de registres de communication qui lui permettent de parvenir à intégrer tout l’être hu-main. La simplicité des gestes et la sobriété des signes, effectués dans l’ordre et dans les mo-ments prévus, communiquent et impliquent plus que le caractère artificiel d’ajouts inoppor-tuns. » ou encore le nº35 sur « Beauté et liturgie ».

30 Cf. https://www.infocatho.fr/un-entretien-avec-le-cardinal-muller-qui-denonce-la-protestantisation-de-leglise/.

31 Joseph RATZINGER, Le Ressuscité, Desclée de Brouwer, 1986, p.118-119.

32 JEAN-PAUL II, Ecclesia de Eucharistia, 11.

33 Cf. Joseph RATZINGER, Dieu nous est proche ; l’Eucharistie au cœur de l’Église, 2003, Parole et Si-lence, p.58 : « La réprimande que saint Paul fait à la communauté de Corinthe nous concerne car chez nous aussi une dispute autour de l’Eucharistie a éclaté ; chez nous aussi l’affronte-ment des partis menace d’obscurcir le cœur saint de l’Église ».

tenants de la liturgie de Paul VI sont regrettables à tout point de vue. Jo-seph Ratzinger s’adressait ainsi à tous :

Aux “tridentinistes”, il faut répondre que la liturgie est, comme l’Église, tou-jours vivante, et donc aussi toutou-jours engagée dans un processus de maturation, au cours duquel il peut y avoir des tournants plus ou moins brusques. Pour la li-turgie catholique, quatre cents ans d’âge seraient beaucoup trop peu : elle re-monte réellement au Christ et aux Apôtres et, de là, nous est parvenue à travers un processus unique et continu ; on ne peut pas plus momifier le missel que l’Église elle-même. Mais en même temps, il faut constater que le nouveau missel, quels que soient tous ses avantages, a été publié comme un ouvrage réélaboré par des professeurs et non comme une étape au cours d’une croissance conti-nue. […] Pour éviter tout malentendu, je dirai que je suis très reconnaissant au nouveau missel pour son contenu (mis à part quelques critiques !), pour avoir en-richi le trésor des oraisons, des préfaces, pour les nouveaux canons, pour avoir accru le nombre des formulaires de messes les jours de semaine, etc., sans par-ler de la possibilité d’utiliser les langues maternelles. Mais c’est un malheur, à mon avis, d’avoir donné l’impression qu’il s’agissait là d’un livre nouveau, au lieu de replacer l’ensemble dans l’unité de l’histoire liturgique.34

C’est en vue d’un apaisement et d’une unité que Benoît XVI a donné en 2007 le Motu proprio Summorum pontificum, permettant aux prêtres de cé-lébrer la Messe selon le Missel de 1962, et demandant aux évêques de per-mettre aux groupes de fidèles qui le désirent d’avoir accès à la Messe selon ce missel. Il proposait d’ailleurs un enrichissement mutuel des deux formes du rite romain :

D’ailleurs, les deux Formes d’usage du Rite Romain peuvent s’enrichir récipro-quement : dans l’ancien Missel pourront être et devront être insérés les nou-veaux saints, et quelques-unes des nouvelles préfaces. La Commission « Ecclesia Dei », en lien avec les diverses entités dédiées à l’usus antiquior, étudiera quelles

34 Joseph RATZINGER, La célébration de la foi ; essai sur la théologie du culte divin, Paris, Téqui, 1985, p.83-85. Il ajoute : « Je crois donc qu’une nouvelle édition devra montrer et dire claire-ment que le missel de Paul VI n’est rien d’autre qu’une version nouvelle du missel auquel avaient déjà travaillé saint Pie X, Urbain VIII, saint Pie V et leurs prédécesseurs en remontant jusqu’à l’Église primitive. La conscience de l’unité interne ininterrompue de l’histoire de la foi, unité qui s’exprime dans l’unité toujours présente de la prière issue de cette histoire, est es-sentielle pour l’Église. Cette conscience se volatilise tout autant si l’on accorde ses suffrages à un livre liturgique qui aurait été composé il y a quatre cents ans, que si l’on souhaite une litur -gie sortie aussi fraîche que possible d’une confection maison. Le schème de pensée est au fond le même dans les deux cas. Il me semble que là se trouve la cause du malaise dont vous parlez. Il s’agit de savoir si la foi naît d’ordonnances et de recherches érudites, ou bien si elle vient à nous au cours de l’histoire vivante de l’Église, identique à travers les siècles. »

sont les possibilités pratiques. Dans la célébration de la Messe selon le Missel de Paul VI, pourra être manifestée de façon plus forte que cela ne l’a été souvent fait jusqu’à présent, cette sacralité qui attire de nombreuses personnes vers le rite ancien. La meilleure garantie pour que le Missel de Paul VI puisse unir les communautés paroissiales et être aimé de leur part est de célébrer avec beau-coup de révérence et en conformité avec les prescriptions ; c’est ce qui rend vi-sible la richesse spirituelle et la profondeur théologique de ce Missel.35

B. Propositions pour un renouveau

Lors d’un colloque qui a eu lieu en juillet 2001 à l’abbaye de Fontgom-bault, Joseph Ratzinger résumait ainsi les trois points principaux en vue d’une « réforme de la réforme » pour améliorer le Missel de Paul VI et le rendre plus conforme à ce que le concile Vatican II a demandé.

— Tout d’abord « rejeter la fausse créativité qui n’est pas une catégorie de la liturgie. » Ainsi, dans le Missel, il est parfois proposé des formules comme :

« Le prêtre dira ceci… ou d’une autre manière… » Ces espaces de créativité

« ne répondent pas à la réalité profonde, à l’esprit de la liturgie. »36

— Un second point consiste en la révision des traductions, afin qu’elles soient réellement fidèles au texte latin. Cette réalisation est en cours de fi-nalisation. Jean-Paul II l’avait demandé en 2001, car des traductions n’étaient pas fidèles. Ainsi, par exemple, « ab aeterna damnatione », dans le Canon romain, était devenu « de la damnation » (l’adjectif « éternelle » avait simplement disparu…). En principe, la nouvelle traduction française, qui n’est pas parfaite mais très nettement améliorée, doit entrer en vigueur pour l’Avent 2021. Dans ce cadre, il est également important de conserver certaines parties régulièrement en latin.

— Enfin, un troisième point est l’orientation du prêtre dans la liturgie.

Soulignons d’abord que le concile n’en parle absolument pas. Si la célébra-tion face au peuple a été permise par la réforme liturgique, elle ne lui est pas nécessairement liée. Elle a sans doute permis une meilleure participa-tion des fidèles qui voient mieux les rites accomplis, mais elle présente une ambiguïté qui doit être levée.37 Le moment du canon n’est pas un

face-à-35 BENOÎT XVI, Lettre accompagnant le Motu proprio Summorum pontificum, 07/07/2007.

36 Joseph RATZINGERet alii, Autour de la question liturgique, Actes du colloque à Fontgombault (22-24 juillet 2001), Association Petrus a Stella, 2001, p.180.

37 Cf. Joseph RATZINGER, L’esprit de la liturgie, Ad solem, Genève, 2001, p.67 : « Le prêtre, ou plu-tôt ‘‘l’animateur liturgique’’, comme on préfère l’appeler maintenant, est devenu le véritable

face entre le prêtre et l’assemblée. Mais tous sont tournés vers le Christ dont le sacrifice est rendu présent. Joseph Ratzinger était personnellement favorable à la célébration versus orientem (vers l’orient). Cependant il écrit :

Comme je l’ai écrit dans mes livres, je pense que la célébration vers l’orient, vers le Christ qui vient, est une tradition apostolique. Cependant je suis contre la révolution permanente dans les églises ; on a restructuré maintenant tant d’églises, que recommencer de nouveau en ce moment ne me semble pas du tout opportun. Mais s’il y avait toujours sur les autels une croix, une croix bien en vue, comme point de référence pour tous, pour le prêtre et pour les fidèles, nous aurions notre orient, parce que finalement le Crucifié est l’orient chrétien ; et, sans violence, on pourrait – me semble-t-il – faire ceci : donner comme point de référence le Crucifié, la Croix, et ainsi une nouvelle orientation à la liturgie. Je pense que ce n’est pas une chose purement extérieure : si la liturgie se réalise en un cercle clos, s’il y a seulement le dialogue prêtre-peuple, c’est une fausse cléri-calisation et l’absence d’un chemin commun vers le Seigneur vers lequel nous nous tournons tous. Donc avoir le Seigneur comme point de référence, pour tous, le prêtre et les fidèles, me semble une chose importante et tout à fait fai-sable et réalifai-sable.38

CONCLUSION

La liturgie, et en particulier la liturgie de la Messe, est au cœur même de notre foi et de notre vie chrétienne. En ce sens, elle est « une question de vie ou de mort. »39

Pour le catholique, la liturgie est la Patrie commune, elle est la source même de son identité, c’est aussi pourquoi elle doit être “prédéterminée”, “invariante”, pour qu’à travers le rite se manifeste la sainteté de Dieu. Au contraire, la révolte contre ce qu’on appelle « la vieille rigidité des rubriques », accusée de bannir la

“créativité”, a entraîné la liturgie dans le tourbillon du do it yourself, la rendant ba-nale dans la mesure où elle l’a réduite à notre mesure médiocre.40

Nous devons donc retrouver une dimension essentielle : c’est que la li-turgie est un don. Elle nous est donnée par Dieu, à travers l’Église. On la re-çoit, mais on ne la fait pas. Elle nous dépasse. Le cardinal Ratzinger, dans son livre L’esprit de la liturgie, dit que « la grandeur de la liturgie tient à ce

point de référence de la célébration liturgique. Tout se rapporte à lui. Il faut le regarder, suivre ses gestes, lui répondre ; c’est sa personnalité qui porte toute l’action. »

38 Joseph RATZINGERet alii, Autour de la question liturgique, Actes du colloque à Fontgombault (22-24 juillet 2001), Association Petrus a Stella, 2001, p.181.

39 Joseph RATZINGER, Mon concile Vatican II, enjeux et perspectives, Artège, 2011, p.147-148.

40 Joseph RATZINGER, Entretien sur la foi, Fayard, 1985, p.151.

qu’elle échappe à l’arbitraire. »41 Il est très intéressant de voir la façon dont il interprète le passage du Livre de l’Exode qui nous rapporte l’épisode du veau d’or : la gravité du péché du peuple ne tient pas dans l’adoration d’un autre Dieu, puisque le veau d’or voulait représenter Yahvé. Mais le peuple s’est créé sa liturgie, ce qui a pour conséquence non plus d’élever l’homme vers Dieu, mais d’abaisser Dieu au niveau de l’humain, ce qui revient aussi à une apostasie. Cette auto célébration, très éloignée de l’adoration de Dieu, se termine, dit-il « en un acte de banale autosatisfaction […] À ce stade la liturgie n’est plus qu’un jeu vide de contenu. »42 La liturgie est sa-crée et nous vient de Dieu. On ne peut donc pas changer tel ou tel point, mais on doit être fidèles aux normes liturgiques données par l’Église. Le concile Vatican II lui-même est très clair sur ce point :

C’est pourquoi absolument personne d’autre [que le Siège apostolique et, selon les règles du droit, l’évêque ou les assemblées d’évêques], même prêtre, ne peut, de son propre chef, ajouter, enlever ou changer quoi que ce soit dans la liturgie.43

Jean-Paul II dans son encyclique sur l’Eucharistie évoquait ceci en disant : Le “trésor” est trop grand et trop précieux pour que l’on risque de l’appauvrir ou de lui porter atteinte par des expériences ou des pratiques introduites sans qu’elles fassent l’objet d’une vérification attentive des Autorités ecclésiastiques compétentes.44

Retrouver une ferveur eucharistique

L’oraison du sixième dimanche de Pâques est très belle : « Dieu tout-puissant, accorde-nous, en ces jours de fête, de célébrer avec ferveur le Christ ressuscité : que le mystère de Pâques dont nous faisons mémoire

41 Joseph RATZINGER, L’esprit de la liturgie, Ad solem, Genève, 2001, p.134. Cf. aussi Joseph RATZINGER, La célébration de la foi ; essai sur la théologie du culte divin, Paris, Téqui, 1985, p.74 :

« Ce que [la liturgie] a d’exaltant, c’est qu’elle nous conduit hors de la petitesse et nous fait participer à la vérité. »

42 Joseph RATZINGER, L’esprit de la liturgie, Ad solem, Genève, 2001, p.19-20. Ailleurs Joseph Rat-zinger décrit ainsi ce déplacement destructeur : « Aux yeux de la plupart, la liturgie apparaît plutôt comme une chose à réaliser par chaque communauté, tâche en vue de laquelle les groupes concernés bricolent de semaine en semaine leurs “liturgies” propres avec un zèle aus-si admirable que déplacé. Cette rupture dans la conscience liturgique fondamentale me paraît être ce qu’il y a ici de véritablement funeste. Les frontières entre liturgie et réunions estudian-tines, entre liturgie et convivialité disparaissent insensiblement. » (Joseph RATZINGER, La célé-bration de la foi ; essai sur la théologie du culte divin, Paris, Téqui, 1985, p.82).

43 Sacrosanctum concilium, 22.

44 JEAN-PAUL II, Ecclesia de Eucharistia, 51 .

reste présent dans notre vie et la transforme. » Ferveur. C’est un mot qui ne revient pas assez dans nos communautés, mais que l’Église nous fait de-mander à Dieu, pour nous rappeler la primauté de la prière, de l’intérieur, pour entrer dans ce mystère pascal. Lorsque nous avons des rassemble-ments, nous parlons de fraternité, de caractère festif, mais pas assez de ferveur. Or c’est ce qui doit caractériser en premier nos liturgies.

Pour cela, on doit développer aussi une prière personnelle, qui prépare et accompagne la prière liturgique, et en particulier la Messe :

L’Eucharistie sous-entend la prière personnelle, la prière familiale et la prière communautaire extra-liturgique. Je ne mentionnerai que deux des plus riches et des plus profondes prières de la chrétienté, qui continuent toujours à conduire au fleuve de la prière eucharistique : le chemin de croix et le chapelet.45

Faire vivre l’héritage de Vatican II

Ainsi donc, le concile Vatican II a voulu redonner un souffle à la liturgie, et en particulier à la célébration de la Messe, en rendant plus accessible ce tré-sor qu’est le « sacrifice eucharistique, source et sommet de toute la vie chré-tienne ».46 En ce sens, le concile Vatican II n’est pas un mérite, mais un ap-pel.47 Voilà pourquoi le cardinal Joseph Ratzinger faisait cette constatation,

45 Joseph RATZINGER, La célébration de la foi ; essai sur la théologie du culte divin, Paris, Téqui, 1985, p.144. Cf. aussi BENOÎT XVI, Angélus, 16/10/2005 : « En réalité, le Rosaire ne s’oppose pas à la méditation de la Parole de Dieu et à la prière liturgique ; il représente au contraire un complément naturel et idéal, en particulier comme préparation et action de grâce à la célébra-tion eucharistique. Avec Marie, nous contemplons le Christ rencontré dans l’Évangile et dans le Sacrement dans les divers moments de sa vie grâce aux mystères joyeux, lumineux, doulou-reux et glorieux. À l’école de la Mère, nous apprenons ainsi à nous conformer à son divin Fils et à l’annoncer à travers notre vie elle-même. Si l’Eucharistie est le centre de la journée pour le chrétien, le Rosaire contribue de façon privilégiée à élargir la communion avec le Christ et en-seigne à vivre en gardant le regard du cœur fixé sur Lui, pour faire rayonner sur tous et sur toute chose son amour miséricordieux. »

46 Lumen gentium, 11.

47 Cf. Joseph RATZINGER, Mon concile Vatican II, enjeux et perspectives, Artège, 2011, p.286-287 :

« Et il me semble important de dénoncer les dangers du nouveau triomphalisme auquel tendent précisément les adversaires de l’ancien. Tant que l’Église est en pèlerinage sur la terre, elle n’a aucun motif de se glorifier de son œuvre propre. Une semblable vanité pourrait être plus dangereuse que les éventails de plume ou la tiare qui, par ailleurs nous donnait plus envie de sourire que d’être fiers. Aussi, le Concile n’est-il pas un mérite de l’Église un, mérite dont elle pourrait se prévaloir et qu’elle pourrait opposer aux autres comme un titre de gloire ; il est un appel du Seigneur à marcher à sa suite… »

Dans le document POUVONS-NOUS NOUS PASSER (Page 99-109)