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Quelques réflexions et objections

satisfai-sants dans le cas de processus déterministes chaotiques simples, comme cela est illustré en première colonne du tableau 6.3 et dans la figure 6.5(a) au travers de l’analyse d’une série de 30000 valeurs simulées à l’aide du modèle logistique :

(a) modèle logistique (b) modèle logistique bruité

Fig. 6.5 – Intégrales de corrélation pour m compris entre 2 et 10 (Gaume et al., 2006b). m ν logistique ν logistique bruité

1 0.90 0.93

2 0.95 1.10

3 0.97 1.18

5 1.00 1.36

10 1.01 3.91

Tab. 6.3 – Exposant de corrélation : modèle logistique (Gaume et al., 2006b).

6.3 Quelques réflexions et objections

6.3.1 Une précision de vocabulaire

Les méthodes exposées plus haut visent à déterminer la dimension d’un éventuel attracteur des trajectoires d’un processus. Pour des raisons numériques, les dimensions ”m” explorées pour l’espace de phase sont limitées, généralement moins de 10 ou 20. Ce n’est alors pas tant le caractère chaotique du processus sous-jacent que l’on souhaite mettre en évidence, mais la dimension limitée de l’attracteur de ses trajectoires. Le débat sur les résultats de recherches antérieures ne porte donc pas sur le caractère déterministe chaotique ou aléatoire des processus observés, mais sur la dimension limitée ou non des attracteurs de leurs trajectoires. Nous parlerons dans ce qui suit de processus chaotiques de faible

dimension (low-dimensional chaos). Que les séries de données observées disponibles en hydrologie, pluies ou débits, soient le fruit de processus déterministes chaotiques, beaucoup de chercheurs en sont probablement convaincus. Mais que ces processus soient simples au point que les attracteurs de leurs trajectoires aient une dimension très limitée, inférieure à 10, est le point discutable et discuté.

6.3.2 Processus hydrologiques discrets ”isolés”

Les processus hydrologiques ne sont pas des processus discrets mais généralement continus. Les variables discrètes que l’on étudie sont issues d’un échantillonnage temporel (hauteur d’eau instantanée mesurée à une fréquence donnée), et sont très généralement des variables recomposées (débit calculé à l’aide d’une courbe de tarage, valeurs d’intensités de pluie ou de débits moyennées sur un pas de temps fixé). Ce sous-échantillonnage et ces transfor-mations ne facilitent probablement pas l’identification de la dynamique du processus sous-jacent. Par ailleurs, l’hypothèse d’isolement du processus laisse perplexe. Notons qu’il est possible d’intégrer des variables de forçage dans la construction des vecteurs trajectoires pour tenir compte de l’effet possible de ces variables, mais la plupart des études antérieures, dont celles auxquelles nous nous comparerons dans ce qui suit, ne l’ont pas envisagé. Sup-poser que l’évolution temporelle des intensités de pluie ou des débits d’un cours d’eau n’est significativement influencée par aucune variable de forçage extérieure dont l’action n’est pas résumée dans les trajectoires passées ou totalement corrélée à celles-ci peut surprendre. La valeur d’intensité à venir serait totalement conditionnée par les valeurs passées et non influencée par la structure des champs de pression et de vitesse des masses d’air ou de la répartition spatiale de leurs propriétés par exemple. Si l’on considère que des variables de forçage ont une influence, il faut alors supposer que l’ensemble de ces variables sont le fruit de processus chaotiques de faible dimension dont les dynamiques sont elles-mêmes résumées dans celle de la variable étudiée : les mêmes causes produisant les mêmes effets. Compte tenu de la complexité de la dynamique atmosphérique à l’origine de la genèse des pluies, on peut douter qu’il s’agisse d’un processus chaotique de faible dimension. Mais la nature recèle souvent des surprises... Tentons donc, malgré nos a priori, de nous laisser surprendre.

6.3.3 Influence des incertitudes

La réflexion suivante concerne les incertitudes, en particulier les incertitudes de mesure et leurs conséquences sur l’efficacité des méthodes d’analyse du chaos. En effet, les mesures

6.3 Quelques réflexions et objections 111 disponibles en environnement sont généralement entachées d’erreurs dont on peut supposer qu’elles sont issues d’un processus aléatoire ou bien chaotique de dimension élevée, ce qui revient au même. Il n’existe pas à notre connaissance de résultats théoriques sur ce sujet. Quelques tests numériques conduits avec le modèle logistique donnent une idée de l’influence possible des erreurs de mesure lorsque la méthode de la dimension de corrélation est appliquée (figure 6.5(b) et tableau 6.3). Dans cet exemple, un bruit gaussien (écart-type égal à 5% de la donnée mesurée) a été ajouté à la série des valeurs xi simulées à l’aide du modèle logistique pour créer une série de valeurs xbi :

xbi = xi(1 + ei) (6.5)

ei étant une réalisation d’une variable aléatoire gaussienne N (0, 0.0025).

Fig. 6.6 – Trajectoires d’un processus logistique (a = 4) bruité dans l’espace de phase à deux dimensions.

L’évolution, avec m, de l’exposant ν (table 6.3) obtenue à partir de l’analyse de la série des xbi est très similaire à celle obtenue par analyse de la série générée par tirage aléatoire dans la loi Beta(0.3,0.3) (cf. tableau 6.2). La présence d’erreurs de mesure dans des jeux de données ”réelles” peut donc contrarier notablement l’identification d’un attracteur de petite dimension par la méthode de la dimension de corrélation.

6.3.4 Des méthodes d’identification non totalement discriminantes

Enfin, les méthodes de détection de processus chaotiques de faible dimension ne permettent pas de discriminer totalement les processus chaotiques et aléatoires. La méthode des plus proches voisins donnera des résultats très satisfaisants en prévision s’il existe une corrélation entre les variables successives d’une série de variables aléatoires. De plus, certains proces-sus stochastiques possèdent des attracteurs de trajectoires de dimension finie. Comme le souligne Schertzer et al. (2002b), l’attracteur de la trajectoire d’un mouvement brownien additif est de dimension 2.