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Analyse d’une série pluviographique

5.3 Analyse de séries pluviographiques et calage d’un modèle de cascade multi-

5.3.1 Analyse d’une série pluviographique

La série analysée est constituée de 8 années d’enregistrements sans lacunes d’intensités de pluie au pas de temps d’une minute, effectuées sur le site du bassin versant expérimental de Rézé, site géré par le Laboratoire Central des Ponts et Chaussées de Nantes (Berthier et al., 1998). Afin de tester si un modèle de cascade multiplicative stochastique IID peut

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reproduire des séries similaires à cette série observée, vérifions qu’elle possède les proprié-tés d’invariance d’échelle que nous venons de décrire. Pour être plus précis, nous allons vérifier si les relations linéaires décrites plus haut peuvent raisonnablement être ajustées aux observations. La cohérence des résultats obtenus lors de l’analyse des moments d’ordre q, de la fonction de répartition et du spectre d’énergie sera aussi vérifiée.

5.3.1.1 Invariance d’échelle des moments d’ordre q

Nous cherchons à vérifier si une relation du type suivant peut être ajustée aux données mesurées et plus précisément aux moments empiriques de cette série de données :

E [Rq(∆t)] ∝ ∆tζ(q) (5.24)

La figure 5.2.a montre l’évolution des moments empiriques d’ordre q de la série, en fonction du pas de temps en coordonnées log-log. Pour les ordres supérieurs à 5, une relation linéaire unique ne peut pas être ajustée sur l’ensemble de la gamme des pas de temps testée. L’ajustement linéaire fait apparaître deux gammes d’échelles : 8 minutes à 4 heures et 4 heures à 5 jours. Les fonctions exposant d’échelle empiriques correspondant à ces deux gammes d’échelles sont tracées dans la figure 5.2.b. Une conclusion identique avait été tirée d’études précédentes de séries pluviométriques (Deidda, 2000; De Lima & Grasman, 1999) : l’invariance d’échelle des moments d’ordre q n’est observée, ou plus précisément une relation linéaire ne peut ajustée que sur une gamme limitée d’échelles temporelles. Cependant, le nombre de gammes d’échelles identifiées et leurs limites varient d’une étude à l’autre. Ceci suggère que les résultats de l’analyse dépendent de la série de données et donc du climat local et/ou comme nous l’illustrerons par la suite, qu’ils sont sensibles à la fluctuation d’échantillonnage.

5.3.1.2 Propriétés des fonctions de répartition

Une série de données est dite multifractale si la relation suivante est vérifiée :

P (Iλ≥ λγ) ∝ λ−C(γ) (5.25)

La fonction de codimension C (γ) peut-être évaluée par la méthode PDMS - probability distribution multiple scaling (Toma et al., 1992; De Lima, 1998). Cette méthode consiste simplement à calculer les probabilités empiriques P (Iλ≥ λγ) comme suit :

P (Iλ ≥ λγ)= Nλ,γ

(a) moments empiriques d’ordre q (b) Fonctions exposant d’échelle empiriques Fig. 5.2 – Evolution des moments empiriques d’ordre q avec le pas de temps

(coordon-nées log-log) et fonctions exposant d’échelle empiriques pour les deux gammes d’échelles identifiées (Gaume et al., 2006a).

Avec Nλ,γ, le nombre de pas de temps où Iλ ≥ λγ) et N le nombre total de pas de temps. Les évolutions de la probabilité empirique de dépassement de la valeur λγ en fonction de λ, obtenues pour des valeurs de γ comprises dans l’intervalle [−0.2, 0.85] sont reportées dans la figure 5.3.a. Comme dans le cas des moments d’ordre q, ces courbes, en coordonnées logarithmiques, peuvent être approchées par des droites sur certaines gammes d’échelles. Rappelons que dans le cas de la désagrégation temporelle λk = 4tT

k. La fonction de codi-mension C (γ) reconstituée pour la gamme d’échelles temporelles allant de 8 minutes à 4 heures (cf. figure 5.3.b) a un comportement anormal pour γ < 0.2. En effet, cette fonction doit être convexe et strictement croissante. Ce résultat est lié à la nature discrète des don-nées étudiées : mesures d’un pluviographe à augets basculants. Un cumul sur un pas de temps est nécessairement égal à un nombre entier de volumes d’augets. Le comportement anormal de la fonction C (γ) est observé pour des valeurs de λγ proches de la résolution de l’appareil de mesure : un basculement d’auget (0.2 mm).

On remarque, pour le reste, que les résultats d’analyse des moments d’ordre q et de la fonc-tion de répartifonc-tion sont cohérents. A titre d’exemple, pour la gamme d’échelles 8 minutes - 4 heures et pour une valeur de γ = 0.25 on obtient C(γ) = 0.24 par la méthode PDMS et C(γ)Leg = 0.25 en appliquant la transformée de Legendre. De même, pour γ = 0.65, on obtient C(γ) = 0.99 et C(γ)Leg= 0.90.

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(a) Empirical probabilities of exceedance (b) Empirical codimension function Fig. 5.3 – Probabilités empiriques de dépassement d’une valeur d’intensité λγ en fonction du facteur d’échelle λ et fonction de codimension empirique correspondante C(γ)

5.3.1.3 Invariance d’échelle du spectre d’énergie

Le spectre d’énergie de la série de données étudiée est présenté dans la figure 5.4. Ce spectre empirique a été calculé à partir des données disponibles au pas de temps d’une minute. On observe de nouveau qu’une fonction linéaire unique ne peut être ajustée sur l’ensemble de la gamme des échelles. Deux gammes d’échelles peuvent cependant être identifiées où la forme spectre d’énergie en coordonnées log-log peut être approchée par une droite. Mais les limites des gammes d’échelles diffèrent de celles précédemment identifiées : 8 minutes à 1.5 heures et 1.5 heures à 1.5 jours. De plus, la pente du spectre d’énergie (figure 5.4) et les pentes calculées à partir de l’équation 5.23 (µ = 1 − K(2)) ne sont pas totalement cohérentes. Elles sont proches pour les échelles de temps élevées (0.52 versus 0.49), mais non pour les petites échelles temporelles (0.91 versus 0.6).

Les résultats de l’analyse des moments d’ordre q et du spectre d’énergie ne sont pas totale-ment cohérents. Deux explications peuvent être invoquées pour expliquer que les résultats de ces deux approches qui portent deux regards différents sur la structure d’une série temporelle.

– Les estimateurs sont incertains et sensibles à la fluctuation d’échantillonnage : i.e. les différences observées ne sont pas significatives compte tenu de l’effectif du jeu de données étudié.

– Ces différences révèlent que la structure temporelle des données étudiées n’est pas celle d’une série produite par un processus de cascade multiplicative stochastique IID.

Fig. 5.4 – Spectre d’énergie de la série pluviographique de Réze

Nous testerons ces deux hypothèses de travail dans la suite.