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La réestimation des recettes réalisées par le Pouvoir Législatif

CONCLUSION DU CHAPITRE

PRES IDENCE DE LA

B. La réestimation des recettes réalisées par le Pouvoir Législatif

L'estimation des recettes s'avère être un instrument important pour la gestion fiscale et budgétaire, puisqu'elle fournit au gestionnaire une notion des ressources dont il dispose pour faire face aux dépenses votées, cette question étant aussi strictement liée à l'équilibre budgétaire. Il s'agit, en outre, d'un élément de la transparence budgétaire, caractéristique essentielle de la bonne gouvernance financière publique, qui rend possible le contrôle tant du Parlement que de la population.

C'est pourquoi cet aspect du droit budgétaire ne peut pas échapper à l'appréciation du Parlement. Cette appréciation se fait par les amendements parlementaires, selon l'article 166, §3, III, a de la Constitution qui ouvre la possibilité d'amendement lié à la correction d'erreurs et d'omissions. En outre, le §1de l'article 12 de la Loi de responsabilité financière dispose que « la réestimation de la recette par le pouvoir législatif ne sera admise que s'il est démontré l'existence d'erreur ou d'omission d'ordre technique ou légale ».

Le rôle du congrès national dans l’estimation des recettes budgétaires est, donc, en principe, réduit. Toutefois, cette hypothèse finit par être largement utilisée par le pouvoir législatif, qui, chaque année, réestime les recettes budgétaires en augmentant le montant de ces recettes, qui seront employées pour faire face notamment aux amendements parlementaires au budget. Pour ce faire, les parlementaires doivent suivre la procédure prévue à la résolution nº 1, de 2006, du congrès national. Cette résolution248 prévoit la création d’un comité d’évaluation de la recette, auquel il appartient d’accompagner l’évolution du recouvrement des recettes, d’analyser l’estimation de recettes contenue dans les projets de loi budgétaire et d’analyser les informations fournies par la Cour des comptes de l’union concernant le recouvrement et les renonciations aux recettes. Par ailleurs, le paragraphe unique de l'article 23 détermine que le Comité réalisera, tous les deux mois, des réunions d'évaluation de leurs rapports avec les représentants du pouvoir exécutif responsables pour la prévision et le suivi de l’estimation des recettes.

La procédure d’évaluation de recette par le congrès national se déroule au sein de la

94 commission mixte du budget et relève de la compétence du rapporteur de la recette249, choisi parmi les membres de cette commission. Le rapporteur doit élaborer un rapport de la recette, qui sera voté avant la présentation du rapport préliminaire de la loi budgétaire250. En outre, dans le délai de dix jours à compter du vote du dernier rapport sectoriel, le rapporteur de la recette peut proposer une mise à jour de la recette approuvée, constatée par une évaluation du comité d’évaluation de la recette, si une révision des paramètres et de la loi fiscale est intervenue. Les ressources issues de cette mise à jour de l’estimation de recettes seront employées pour faire face aux amendements collectifs.

Les recettes estimées par le pouvoir législatif, y compris celles qui proposent la réduction de cette estimation en raison de l’approbation d’un projet de loi251, peuvent faire

l’objet d’amendements à la recette. Selon l’article 32 de la résolution nº 1 de 2006, les parlementaires peuvent présenter des amendements de renonce à la recette, découlant d’un projet de loi de l’initiative du congrès national, en cours d’appréciation dans une des deux chambres, dès que la proposition a reçu un avis favorable sur la compatibilité et l’adéquation budgétaire et financière. Cet amendement ne sera admis que si les ressources nécessaire pour compenser la renonce de recette sont indiquées. Le rapport de la recette doit être élaboré avec la participation du comité d’évaluation de la recette et la méthodologie pour son estimation doit être établie à la loi de directives budgétaires252.

De plus, selon l'article 34 de la Résolution n. 1, l'analyse de la recette doit prendre en compte : la conjoncture macroéconomique, l'endettement et son impact sur les finances publiques, l'évolution du recouvrement et son estimation dans le projet, en relevant la méthode et les paramètres utilisés, l'évaluation séparée des recettes propres des entités de l'administration indirecte, notamment celles appartenant aux agences régulatrices, le démonstratif des recettes estimées, en faisant la comparaison avec l’estimation présenté par l’exécutif, classées selon leur nature et leur source, le montant des éventuelles ressources additionnelles issues de la réestimation de recettes, le respect des normes constitutionnelles et légales concernant la recette, notamment par rapport à la compatibilité du projet avec la loi du plan pluriannuel, la loi de directives budgétaires et la loi de responsabilité financière .

249 Article 30 de la résolution nº1, de 2006- CN

250 Comme nous allons le voir dans le Titre II de cette première partie, le rapport préliminaire, élaboré par le rapporteur général du budget, pose les critères et les conditions pour la présentation des amendements parlementaires.

251 Article 31 de la résolution. 252 Article 33 de la résolution.

95 Enfin, il faut souligner que le rapport de la recette ne pourra pas proposer l’annulation, partielle ou totale, des dotations faisant partie du projet envoyé par le pouvoir exécutif.

Donc, cette résolution a ouvert aux parlementaires la possibilité de présenter des amendements à la recette face au constat d'une erreur de prévision de la part du pouvoir exécutif. D’une part, il s'agit d'une importante amplification de la participation du pouvoir législatif à la procédure budgétaire qui a le mérite de conférer plus de transparence à l'estimation des recettes, alors que d’autre part l’usage de cette prérogative pour assurer des ressources ayant pour but le financement des amendements parlementaires est critiqué.

Selon un rapport de l’OCDE253, les conclusions du pouvoir législatif concernant le

montant de recettes peuvent être regardées comme de nature plutôt politique, au lieu d’être le résultat d’une analyse purement technique des hypothèses économiques prévues par le gouvernement. Dans ce contexte : « A la difficulté de choisir entre le financement de propositions alternatives (par réallocation des fonds) on privilégie un processus plus facile d’augmentation de ressources pour les financer. »254.

Encore selon l’OCDE, cette situation est en grande mesure due au fait que le congrès national a très peu d’influence sur les décisions sur les dépenses, prises au cours de l’année, puisque, comme nous allons le voir255, l’exécutif emploie des mécanismes de flexibilité budgétaire que finissent par bouleverser les décisions prises par le parlement. À ce stade « demander au Congrès d’adopter les hypothèses économiques les plus prudentes revient à lui demander d’abandonner une partie de ses pouvoirs décisionnels en matière d’attribution de ressources supplémentaires qui peuvent se présenter au cours de l’année. »256, puisque

dans le cas où le budget est approuvé selon les estimations du pouvoir exécutif, l’excès de recouvrement sera librement employé par ce pouvoir, par le biais des crédits additionnels.

Face à ce constat, le rapport de l’OCDE257propose la mise en place d’une révision

budgétaire mi-annuelle, qui consoliderait l’ensemble des modifications au budget, en attribuant au congrès national un rôle plus égal à celui de l’exécutif au cours de l’année, car

253 BLÖNDAL, Jón R.; GORETTI, Chiara; KRISTENSEN, Jens Kromann. La budgétisation au Brésil. Revue de l'OCDE sur la gestion budgétaire, vol. 3, nº 1, p. 132-133.

254 BLÖNDAL, Jón R.; GORETTI, Chiara; KRISTENSEN, Jens Kromann. La budgétisation au Brésil. Revue de l'OCDE sur la gestion budgétaire, vol. 3, nº 1, p. 132-133

255 Voir le Chapitre 2 du Titre I de la Deuxième partie.

256 BLÖNDAL, Jón R.; GORETTI, Chiara; KRISTENSEN, Jens Kromann. La budgétisation au Brésil. Revue de l'OCDE sur la gestion budgétaire, vol. 3, nº 1, p. 132-133.

96 d’après certains observateurs, ce changement pourrait entraîner l’adoption d’hypothèses plus prudentes par le pouvoir législatif lors de la réestimation des recettes.

Il s’agit d’une proposition raisonnable, ayant le potentiel d'améliorer le système

budgétaire, toutefois son utilisation rencontrerait des obstacles considérables. D’abord en raison de l’absence d’une volonté politique de changer les mécanismes budgétaires existants et ensuite face à la difficulté de rendre l’action du parlement plus dynamique et plus rapide, sans pour autant perdre son caractère démocratique. Nous savons que les décisions relevant du pouvoir législatif souffrent d’un manque de dynamisme dû à son caractère collégial regroupant différents parties et intérêts, ainsi que de l’organisation des travaux législatifs,

qui confère la priorité à certains centres d’intérêt du pouvoir exécutif et de la majorité

parlementaire. Donc, une révision budgétaire au milieu de l’année risque de perdre son

efficacité, d’autant plus qu’elle coïnciderait avec le vote de la loi de directives budgétaires258.

Le manque de volonté politique pour procéder à un changement est, en grande

mesure, dû au fait que la fixation de la recette occupe une place centrale du jeu politique de

la prise décision budgétaire. En sachant que le pouvoir législatif augmentera la prévision de la recette, le pouvoir exécutif a tendance à envoyer au congrès une prévision sous-estimée, afin d’éviter qu’à l’occurrence de la réestimation de recettes par le congrès national les objectifs d’excédent primaire prévus par la loi de directives budgétaire ne soient méconnus.

De plus, le pouvoir exécutif évoque cette réestimation comme justification politique pour le

gel de la libération de ressources au début de l’année -l’exécutif évoque le fait que les recettes sont surestimées pour procéder, chaque année, au contingentement 259 des ressources260.

Par contre, en réalité, ce qui arrive tous les ans c’est un excès de recouvrement, dépassant toutes les prévisions, y compris celle réalisée par le pouvoir législatif. Dans ce

sens, le tableau suivant, fait la comparaison entre la proposition de l’exécutif dans les projets

de loi budgétaire annuelle des années 2004 à 2007 et les valeurs arrêtées par le pouvoir législatif et le montant effectivement recouvré :

258 Le projet de loi de directives budgétaires doit être présenté par le pouvoir exécutif jusqu'au 15 avril et voté par le pouvoir législatif jusqu'au 30 juin.

259 Sur le contingentement, vois le Chapitre 2 du Titre I de la Deuxième partie.

260 MENDES, Marcos José. Sistema Orçamentário Brasileiro : planejamento, equilíbrio fiscale e qualidade do gasto público. In: Cadernos de Finanças Públicas, n.9, p. 57-102. Brasília, décembre 2009, p. 70.

97 Recettes en milliards de reais Projet/ réalisé Loi/ réalisé

2004 Projet 342 96.00% 97.00% Loi 347 Réalisé 357 2005 Projet 388 94.00% 98.00% Loi 404 Réalisé 411 2006 Projet 440 97.00% 100.10% Loi 456 Réalisé 455 2007 Projet 502 97.00% 99.00% Loi 514 Réalisé 518

Source : MENDES, Marcos José. Sistema Orçamentário Brasileiro : planejamento,

equilíbrio fiscale e qualidade do gasto público261.

On observe, donc, que la recette fixée par le pouvoir exécutif reste toujours en

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dessous de ce qui est effectivement recouvré. En effet, la réestimation de recettes réalisée

par le congrès national n'est pas au-dessus du montant de recettes perçues, à l'exception de

l'année 2006.

Par conséquent, nous ne pouvons pas affirmer que le pouvoir législatif fait des réestimations irréelles de la recette, d’autant plus qu’elles se fondent sur des paramètres techniques fournis par le pouvoir exécutif. Au-delà du fait que la prévision du pouvoir

législatif est réalisée dans un moment postérieur -où l’inflation et le recouvrement réalisé

peuvent être plus élevés-, ce qui semble arriver c’est le jeu que nous avons décrit : sachant

que le législatif augmentera la prévision de recettes, l’exécutif les sous-estime. Face à ce

constat nous pouvons nous demander si le pouvoir législatif continuerait à réestimer les

recettes si l’exécutif adoptait une prévision plus élevée, ce qui, à notre avis, arriverait, car les parlementaires auront toujours intérêt à chercher plus de ressources pour leurs amendements au budget.

Les parlementaires utilisent les ressources issues des réestimations pour augmenter

les dépenses d’investissement. Le tableau numéro 2 montrel’augmentation vérifiée dans les

investissements prévus au sein du budget au cours de son appréciation par le congrès national :

Montants en milliards de reais Investissements Autres dépenses courantes sauf

transferts aux états fédérés et municipalités 2004 Projet 7.8 182 Loi 12.4 181 Exécuté 10.9 184 2005 Projet 11.5 206

99 Investissements Autres dépenses courantes sauf

transferts aux états fédérés et municipalités Loi 21.4 209 Exécuté 17.3 217 2006 Projet 14.3 236 Loi 21.2 245 Exécuté 19.6 246 2007 Projet 16.2 274 Loi 27.3 277 Exécuté (*) 8.3 241 (*) Jusqu'en novembre 2007.

Source : MENDES, Marcos José. Sistema Orçamentário Brasileiro : planejamento,

equilíbrio fiscale e qualidade do gasto público262.

Selon cette logique, l’exécutif envoie sa proposition de budget prévoyant moins de dépenses d’investissement en attendant que le législatif procède à une augmentation dans ce

type de dépense. Ensuite, comme nous allons le voir, lors de l’exécution du budget, le

gouvernement gèle les dépenses, de sorte qu’à la fin le volume d’exécution des

262 MENDES, Marcos José. Sistema Orçamentário Brasileiro : planejamento, equilíbrio fiscal e qualidade do gasto público. In: Cadernos de Finanças Públicas, n.9, p. 57-102. Brasília, décembre 2009.

100 investissements se retrouve au milieu -entre la proposition de l’exécutif et le budget

approuvé par le législatif, selon le tableau nº 2. Enfin, un autre constat qui ressort de ce

tableau est la variation des investissements selon le cycle électoral, les investissements étant

moins importants dans le premier mandat et plus élevés dans le dernier, comme c’est le cas

des années 2003 et 2006263.

SECTION

2.

LES PARTICULARITES RENCONTREES

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