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Le défaut d'initiative entraînant le contrôle de constitutionnalité

DU POUVOIR LEGISLATIF SUBISSANT BEAUCOUP

SECTION 2. L'INFLUENCE DU POUVOIR EXECUTIF SUR LA PROCEDURE LEGISLATIVE

B. Le défaut d'initiative entraînant le contrôle de constitutionnalité

La question de l'initiative acquiert beaucoup d'importance vis-à-vis du contrôle de constitutionnalité, le défaut d'initiative étant susceptible d'entraîner l'inconstitutionnalité formelle des lois. Ce défaut est spécialement censuré quand il s'agit du non-respect des règles d'initiative exclusive, qui a souvent été le fondement des déclarations d'inconstitutionnalité, en raison de l'usurpation d'une compétence constitutionnellement établie395.

Cette question a été largement discutée sous le régime de la Constitution de 1946, la question étant de savoir si la sanction du président de la république était en mesure d'entraîner la revalidation de la loi dont l'initiative n'a pas respecté les déterminations de la Constitution396. Pendant des années, la thèse la plus acceptée était pour la revalidation de la loi ayant un vice d'initiative, cette position étant inscrite dans une orientation de jurisprudence du Tribunal Suprême Fédéral397.

Il faut souligner que cette revalidation s'opérait uniquement pour les lois relevant de l'initiative exclusive du pouvoir exécutif, et n'était bien entendu pas applicable aux lois d'initiative exclusive du pouvoir judiciaire. Dans ce cas, la procédure valable de formation de la loi exige le concours de trois volontés, c'est-à-dire l'initiative du pouvoir judiciaire, l'approbation par le pouvoir législatif et la sanction par le président de la république398.

Cette théorie de la revalidation a subi plusieurs critiques de la part de la doctrine et a cessé d'être appliquée par le Tribunal Suprême Fédéral, qui a revu son orientation de jurisprudence sous la Constitution de 1967, avec l'amendement de 1969, selon l'arrêt suivant : « Augmentation de la rémunération par un amendement au projet d'initiative du

Fernando Facury. Orçamentos públicos e direito financeiro. São Paulo : RT, 2011, p. 292, traduction libre. 395 SILVA, José Afonso da. Processo constitucional de formação das leis. 2ème édition. São Paulo : Malheiros,

2007, p. 346. 396 Ibidem.

397 BRASIL. Supremo Tribunal Federal. “Súmula” (orientation de jurisprudence) nº 5 : “La sanction du projet revalide l'absence d'initiative du pouvoir exécutif”.

159 gouverneur de l'état fédéré de Guanabara. La sanction ne revalide pas l'absence d'initiative vis-à-vis du dispositif de l'article 57, paragraphe unique, de la Constitution399, qui a modifié le droit antérieur. »400

Ensuite, avec la Constitution de 1988, cette nouvelle position a été consolidée, comme l’on l'observe dans l'arrêt suivant :

« Action directe d'inconstitutionnalité. Policier militaire. Régime juridique des fonctionnaires. Procédure législative. Instauration dépendante de l'initiative constitutionnellement réservée au chef du pouvoir exécutif. La loi de l'état fédéré issue de l'initiative parlementaire. Inconstitutionnalité formelle. Mesure d'urgence concédée.

Les principes qui orientent la procédure législative s'imposent aux états fédérés. Le modèle structuré de la procédure législative, tel que prévu par la Constitution de la république, s'impose comme un standard obligatoire pour les états membres. Précédents. Le non-respect de la prérogative d'initier la procédure législative, avec l'usurpation du pouvoir assujetti à la clause de réserve, entraînant un vice juridique de gravité incontestable, dont l'occurrence reflète une hypothèse typique d'inconstitutionnalité formelle (…). La sanction postérieure du chef du pouvoir exécutif n'a pas le pouvoir de remédier à ce défaut juridique. L'orientation de jurisprudence n° 5 n'est plus applicable en raison de la promulgation de la Constitution de 1988. Doctrine. Précédents. (...) »401

Cette orientation jurisprudentielle a entraîné aussi l'inconstitutionnalité de quelques dispositifs faisant partie des constitutions des états fédérés n'ayant pas respecté l’exclusivité de l'initiative des lois, à l'instar de la décision suivante :

« ACTION DIRECTE D'INCONSTITUTIONNALITÉ. CONCESSION DE LA MESURE D'URGENCE.

399 « Ne seront pas admis des amendements portant augmentation de la dépense prévue :

a) dans les projets dont l'initiative relève de la compétence exclusive du président de la république ; ou b) dans les projets concernant l'organisation des services administratifs de la chambre des députés, du sénat fédéral et des tribunaux fédéraux »

400 BRASIL. Supremo Tribunal Federal. Représentation 890-GB, rapporteur ministre Oswaldo Trigueiro, jugé le 27/03/1974, DJU 07/06/1974, RTJ 69-03/625.

401 BRASIL. Supremo Tribunal Federal. MC ADI 1.381-AL, rapporteur ministre Celso de Mello, jugé le 07/12/1995, DJU 06/06/2003).

160 (…) la Constitution de l'état prévoit les réajustements des salaires des fonctionnaires civils et militaires de l'administration directe et indirecte de l'état fédéré, au travers de l'application automatique d'un indice de prix. La Constitution fédérale apporte, comme le principe basique à observer par les constitutions des états fédérés, selon l'article 11 de l'acte des dispositions constitutionnelles transitoires402, l'initiative du pouvoir exécutif des lois augmentant la rémunération des fonctionnaires, (…), tout avantage ou devant, par ailleurs, être autorisée par la loi de directives budgétaires (…). »403

La question de la compétence exclusive pour l'initiative des lois concernant les budgets publics a été aussi analysée par le Tribunal de Justice de l'État fédéré de São Paulo, par rapport à l'ouverture des crédits supplémentaires, à l'occasion d'une action directe d'inconstitutionnalité (ADIn) nº 121.766.0/8404. Cette action a été proposée par le maire de la

ville d'Itaí, qui cherchait la reconnaissance de l'inconstitutionnalité de la loi municipale nº 1366, du 18 mars 2005.

La loi municipale a autorisé la Direction de la Chambre Législative Municipale à ouvrir un crédit supplémentaire pour compléter la dotation budgétaire concernant la construction du bâtiment de la Chambre. La constitutionnalité de cette loi a été remise en cause, non seulement vis-à-vis de la Constitution Fédérale, mais aussi de la Constitution de l’État de São Paulo. La Constitution de l’État apporte, dans son article 47, alinéas XI et XVII, la compétence privative du Gouverneur de l’État pour déclencher le processus législatif selon la forme et les cas prévus par la Constitution de l’État et envoyer à l'Assemblée Législative les projets de loi relatifs au plan pluriannuel, les directives budgétaires, le budget annuel, la dette publique et les opérations de crédit. L'article 174 de la Constitution de l’État recopie l'article 165 de la Constitution Fédérale qui a attribué au pouvoir Exécutif l'initiative pour les lois budgétaires.

Le Tribunal de Justice de São Paulo a déclaré que la loi de la municipalité était

402 Art. 11 Chaque assemblée législative, investie des pouvoirs constituants, élaborera la Constitution de l'état, dans le délai d'un an, à compter de la promulgation de la Constitution Fédérale, en observant les principes de cette Constitution.

Paragraphe unique. Promulguée la Constitution de l'état, il revient à la chambre municipale, dans le délai de soixante mois, de voter la loi organique, en deux tours de discussion et vote, en respectant les dispositions de la Constitution Fédérale et de la Constitution de l'état fédéré respectif.

403 BRASIL. Supremo Tribunal Federal. ADI 541 MC / DF, rapporteur ministre Marco Aurelio Mello, jugé le 25/10/1991, DJ14-02-1992PP-01165 EMENTVOL-01649-01PP-00193 RTJ VOL-00140-01 PP-00026. 404 BRASIL. Tribunal de Justiça do Estado de São Paulo. ADIn nº 121.766/8, rapporteur juge Celso Limonge,

161 entachée d'inconstitutionnalité. Le vote du rapporteur a réaffirmé le caractère exclusif de l'initiative d'ouverture des crédits supplémentaires, qui est uniquement de la compétence du pouvoir Exécutif. Pour ce faire, le rapporteur a évoqué l'extrait suivant, issu de l'ouvrage de Celso Ribeiro Bastos et Ives Gandra Martins : « Le principe se justifie. Les chambres législatives ne sont pas préparées pour l'exercice des fonctions appartenant à l'administration. Ces chambres connaissent les questions administratives à distance, en exerçant d'un côté un rôle de contrôle et de l'autre la représentation populaire, mais en étant incapables de connaître des besoins quotidiens de l'administration, y compris en ce qui concerne les problèmes qui leur sont particuliers. » 405.

Par ailleurs, le rapporteur de ADIn, M. Limongi, argumente que la promulgation de la loi municipale attaquée a porté atteinte à l'indépendance des pouvoirs, ainsi que à l'article 176, alinéa V, de la Constitution de l'État -qui reproduit l'article 167, alinéa V, de la Constitution Fédérale- qui prévoit le besoin d'indication des ressources qui seraient employées pour l'ouverture des crédits supplémentaires.

En ce qui concerne la durée, les crédits supplémentaires auront leur durée limitée à l'exercice financier pendant lequel ils ont été ouverts, indépendamment du mois d'ouverture. S'il y a un solde de crédits supplémentaires, ce solde, ainsi que le solde des crédits budgétaires, seront considérés comme économie de ressources. La limitation de la durée à un exercice financier est justifiée par l'observance du principe de l'annualité budgétaire.

II. Le contrôle exercé par le pouvoir exécutif sur l'agenda des

travaux législatifs

Au-delà de la maîtrise de l'exclusivité de l'initiative des lois budgétaires, le pouvoir exécutif détient, en outre, la compétence de promulguer des mesures ayant force de loi. Il s'agit de l'attribution des vrais « pouvoirs législatifs » au président de la république, ce qui,

405BASTOS, C.R. et MARTINS, I.G. Comentários à Constituição do Brasil. São Paulo, Saraiva, 1988, v. 6º, t. II, p. 176- 7 ; traduction libre.

162 en face du besoin d'appréciation urgente de ces propositions par le pouvoir législatif, a pour effet de verrouiller l'ordre du jour des travaux législatifs (A). De plus, les sollicitations d'urgence qui peuvent être formulées par le président de la république et par les membres du congrès national contribuent aussi au contrôle de l'agenda des travaux législatifs par le pouvoir exécutif (B).

A. Les pouvoirs législatifs conférés au président de la république

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