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3. REVUE DE LITTÉRATURE

3.3 Les chocs mondiaux affectent davantage les marchés boursiers

3.3.1 Qui sont les leaders sur les marchés boursiers?

Au niveau des marchés boursiers européens, c’est l’Allemagne qui exerce la plus grande influence selon Mylodinis et Kollias (2010). Parmi les quatre économies les plus développées de l’UE, soient la France, l’Espagne, l’Italie et l’Allemagne, les auteurs déterminent lesquelles contribuent le plus à leur convergence, et ce, en analysant le facteur de vitesse de retour à l’équilibre du modèle de correction d’erreur entre 2000 et 2009. Une valeur élevée de ce facteur indique un rapide retour à l’équilibre, suite à une importante déviation des indices boursiers étudiés causée par un choc exogène ; c’est le cas pour l’Allemagne et la France. C’est principalement imputable à l’importante intégration de leurs marchés boursiers au sein du continent ainsi qu’à leur accord bilatéral commercial.

Gentile et Giordano (2012) utilisent une méthodologie similaire à celle de Mylodinis et Kollias (2010) pour identifier les marchés boursiers européens les plus influents, au courant de la crise des subprimes ainsi que la crise européenne. Ils analysent le facteur de vitesse de retour à l’équilibre, mais ils effectuent aussi une causalité de Granger afin d’observer les relations à court terme entre les différents marchés. La figure 3 illustre les différentes relations entre les indices boursiers mondiaux étudiés, où les liens en gras indiquent la présence de relations à court et à long termes entre les pays alors que les liens en pointillés illustrent l’existence d’une relation à court terme et la ligne pleine démontre une relation à long terme. Tout comme Mylodinis et Kollias (2010), Gentile et Giordano (2012) affirment l’importante influence de l’Allemagne et la France entre mars 2008 et 2009. En effet, l’Allemagne a un rôle dominant sur la France et exerce une influence sur presque la totalité des pays étudiés, à l’exception de l’Italie et

43 Dans le cadre de l’étude de Yang et al. (2014), les marchés boursiers étudiés proviennent de pays

48 de l’Irlande, tandis que la France a seulement un impact majeur sur l’Italie et a une relation à court terme avec l’Allemagne, l’Espagne et le Portugal. Curieusement, la figure 3 démontre aussi que la Grèce a influencé la France et l’Espagne et que l’Irlande a eu un impact sur la Grande-Bretagne et la France. Notons que la Grèce et l’Irlande sont deux pays fortement endettés lors de la crise européenne.

De plus, Gentile et Giordano (2012) démontrent que la crise de la dette souveraine européenne a altéré les relations liant les marchés boursiers étudiés. En effet, l’Allemagne et la France ont perdu leur rôle dominant au détriment des pays périphériques qui entrent en scène pour exercer leur influence sur les marchés. La figure 4 démontre que la France a seulement eu un impact sur le Portugal et l’Irlande, alors que l’Allemagne ne détient aucune connexion sortante. De façon générale, ce sont les nations périphériques44 du réseau qui ont contribué à propager la contagion, mais ce sont la

Grèce, l’Italie et la Grande-Bretagne qui ont eu la plus grande influence.

Figure 3 : Les différentes relations entre les marchés boursiers lors de la crise des subprimes (mars 2008- juillet 2009)

Source : GENTILE, M., et L. GIORDANO, 2012, « Financial contagion during Lehman default and sovereign debt crisis ». Commissione Nazionale per la Società e la Borsa, Working Paper, n°72, 1-48

44 Dans le contexte de l’étude de Gentile et Giordano (2012), le noyau du réseau se compose de la France et

49

Figure 4 : Les différentes relations entre les marchés boursiers lors de la crise de la dette souveraine européenne (janvier 2012 – septembre 2012)

Source : GENTILE, M., et L. GIORDANO, 2012, « Financial contagion during Lehman default and sovereign debt crisis ». Commissione Nazionale per la Società e la Borsa, Working Paper, n°72, 1-48

Samarakoon (2014) abonde dans le même sens que Gentile et Giordano (2012) en affirmant qu’il y a bel et bien eu un effet de contagion sur les marchés boursiers mondiaux, à partir des pays endettés de l’Europe. Par contre, il apporte une nuance en affirmant que ces marchés boursiers ont été moins sensibles à la crise européenne. C’est en créant un portefeuille de marché regroupant les indices boursiers des pays les plus endettés tels que le Portugal, l’Irlande, l’Italie, la Grèce et la République de Chypre que l’auteur a mesuré la sensibilité des autres marchés boursiers. D’abord, il note que les bêtas (β) entre le portefeuille et ces derniers sont significativement plus faibles en temps de crise qu’en périodes plus calmes. De plus, il remarque que ces bêtas sont toujours significativement positifs, peu importe la période étudiée. De façon plus détaillée, il note que les bêtas de la Grande-Bretagne entre la période d’accalmie et le temps de crise ont passé de 0,78 à 0,50. Dans le cas du Canada, celui-ci a varié de 0,64 à 0,25. Ceci signifie que la relation entre ce portefeuille et les autres marchés est positive en temps normal, mais lors de la crise européenne les marchés boursiers sont moins sensibles aux fluctuations causées le portefeuille composé de pays endettés. L’auteur affirme que c’est la preuve que le phénomène de decoupling existe au sein de ces marchés face aux pays en crise. Notons que le decoupling survient lorsque deux actifs deviennent de moins en moins corrélés alors qu’habituellement leur relation est significativement positive. C’est ce s’est qui produit pour l’ensemble des 52 pays étudiés regroupant l’Amérique, l’Europe, l’Asie et le Moyen-Orient. Or, Ahmad et al. (2013) calculent la corrélation conditionnelle à la volatilité des pays émergents tels que le Brésil, la Russie, l’Inde,

50 l’Indonésie, la Chine, la Corée du Sud et l’Afrique du Sud (BRIICKS) ainsi que les nations du PIIGS et ne distinguent aucune relation négative entre les pays. Ils concluent donc que les marchés semblent être dépourvus de decoupling.

Bien que les études de Samarakoon (2014) et Gentile et Giordano (2013) confirment la présence de la contagion sur les marchés boursiers, Ahmad et al. (2013) ont voulu distinguer la contagion et l’interdépendance en s’inspirant de l’étude de Forbes et Rigobon (2002). Pour ce faire, ils ont recours à un modèle DCC-GARCH (Dynamic conditional correlation – GARCH). Ils observent que les pays du PIIGS ont bel et bien causé un effet de contagion au sein des marchés émergents. Selon eux, l’influence de la Grèce sur les autres nations a manifestement été exagérée, car c’est plutôt l’Irlande, l’Espagne et l’Italie qui ont le plus contribué à la transmission de la contagion. Par ailleurs, ils corroborent l’étude de Gentile et Giordano (2012) en attestant que la Grande- Bretagne a largement favorisé l’effet de contagion au sein des nations du BRIICKS en raison de ses importants liens financiers avec ceux-ci. Bien qu’ils répertorient les pays européens les plus contagieux, les auteurs admettent que l’effet combiné de ces cinq nations contribue davantage à propager la contagion sur les marchés émergents plutôt que leur influence individuelle. Seuls les cas de l’Indonésie et de la Corée du Sud démontrent la présence d’interdépendance. En effet, l’Indonésie est interdépendante avec la Grèce, le Portugal, l’Espagne et l’Italie alors que la Corée du Sud est interdépendante seulement avec l’Espagne et l’Italie.

L’étude de Kazi et al. (2014) réfute toutes les conclusions émises précédemment puisque les auteurs affirment qu’aucun effet de contagion en provenance de la Grèce n’est survenu pendant la période de turbulence. Pour arriver à cette conclusion, ils effectuent une régression AR(1) sur les corrélations conditionnelles des indices boursiers, entre la Grèce et les 14 autres pays de l’OCDE étudiés. Curieusement, seuls le Canada et l’Italie démontrent une corrélation conditionnelle significative entre leur marché et l’indice grec alors que les autres pays affichent des résultats non significatifs. Ces auteurs expliquent l’absence de contagion par la rapidité à réagir de la part de la BCE et le Fonds Monétaire International (FMI) pour limiter les dégâts que pourrait causer l’instabilité

51 financière de la Grèce sur les nations. Effectivement, c’est en octroyant d’importants prêts à la Grèce que celle-ci a pu respecter ses obligations financières envers ses contreparties et éviter sa défaillance jusqu’à l’été 2015. Kazi et al. (2014) affirment que l’unique cause de l’endettement colossal des autres nations, telles que l’Espagne, le Portugal, l’Irlande et l’Italie, est la mauvaise gestion de la dette de la part de leur gouvernement respectif. De plus, selon les auteurs, l’économie grecque est trop petite et n’est pas assez puissante pour influencer les autres marchés internationaux.

3.3.2 Impact des chocs mondiaux sur les rendements boursiers d’institutions