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Quelle intensité concurrentielle dans les différents pays ?

2 Un nouvel environnement pour le transport ferroviaire ferroviaire

2.1 Évolutions institutionnelles et environnementales

2.1.3 L’ouverture à la concurrence en Europe

2.1.3.4 Quelle intensité concurrentielle dans les différents pays ?

Nous sommes ainsi confrontés au problème de la réalité des possibilités d’accès aux marchés. Or, ces causes peuvent être multiples et les pays européens évoluent vers des configurations disparates selon les pays. Pour ces questions à la fois spécifiques et techniques, nous nous en remettons aux contributions de l’IBM Business Consulting Services qui a produit en 2002 et 2004 des études sur l’avancement des réformes du transport ferroviaire en Europe66. Nous nous basons dans notre travail sur les résultats

66 Rail Liberalisation Index 2002, Comparison of the Market Opening in the Rail Markets of the Member States of the European Union, Switzerland and Norway, Étude réalisée pour le compte de la Deutsche Bahn, 2002 ; Rail Liberalisation Index 2004, Comparison of the Market Opening in the Rail Markets of the Member States of the European Union, Switzerland and Norway, Étude réalisée pour le compte de la Deutsche Bahn, 2004.

de l’étude 2004. La démarche consiste à évaluer le degré d’ouverture des pays en construisant plusieurs indices et en les classant en fonction des résultats. Un indice final donne une appréciation globale. Le premier indice « LEX » mesure les avancées en terme législatif. Il s’intéresse aux textes, notamment aux transpositions des directives européennes. Un décalage peut néanmoins exister entre une situation théorique telle que prévue juridiquement par les textes législatifs et la réalité de l’accessibilité à un marché sur le terrain. Le second indice « ACCESS » étudie de façon pratique les conditions d’accès au marché et les obstacles pour obtenir l’accès au réseau. Son objet est de mesurer l’efficacité opérationnelle des mesures d’ouverture des marchés ferroviaires nationaux. Il étudie les barrières à l’entrée tangibles. Le dernier indice « COM » calcule la réalité de la pression concurrentielle sur les marchés en fonction du niveau effectif de compétition intramodale.

Figure 16 : la méthodologie de l’étude

D i s p o s i t i o n s l é g a l e s

N i v e a u d e s b a r r i è r e s à l ’ e n t r é e

d e f a c t o

I n t e n s i t é c o n c u r r e n t i e l l e

I n d e x

L E X I n d e x

A C C E S S

I n d e x C O M

I m p a c t d e l a l i b é r a l i s a t i o n

Figure 17 : La situation en matière de législation (Indice LEX)

L’indice LEX classe les pays en fonction de l’évolution de leurs législations nationales.

Ceux qui sont les plus avancés au niveau législatif sur le chemin de la déréglementation sont les mieux notés. Le barème retenu est le suivant :

LI Structure de (l’ancien) opérateur historique (25 pour cent) 1. Indépendance par rapport à l’État (5 pour cent)

2. Degré de séparation verticale (80 pour cent) 3. Degré séparation horizontale (15 pour cent)

LII Ouverture du marché (45 pour cent)

1. Possibilité d’accès pour les opérateurs étrangers (50 pour cent)

2. Possibilité d’accès pour les nouveaux opérateurs nationaux (50 pour cent)

LIII Autorité de régulation (30 pour cent)

1. Éxistence d’une autorité de régulation (50 pour cent) 2. Objectifs des mesures réglementaires (25 pour cent) 3. Compétences de l’autorité de régulation (25 pour cent)

Le premier poste LI Structure de (l’ancien) opérateur historique qui compte pour 25 % correspond aux réformes menées par rapport à l’ancien système. L’élément le plus important est le degré de séparation verticale entre infrastructure et exploitation (80 %).

Une simple séparation comptable est nécessaire selon les directives européennes mais selon les auteurs de l’étude, une désintégration plus importante est en mesure de faciliter la libéralisation. Les pays sont donc notés plus ou moins favorablement en fonction de l’organisation qui a été choisie qui peut aller du statu quo à une séparation organique et capitalistique complète comme en Grande-Bretagne ou en Suède.

L’indépendance vis-à-vis de l’état (5 %) et le degré de séparation horizontale (15 %) ont des importances moindres.

Le second poste LII Ouverture du marché, qui compte pour 45 % est le plus important.

Il se décompose pour moitié entre les possibilités légales d’accès au marché pour les opérateurs étrangers et pour les opérateurs nationaux. Cela rend compte dans les deux cas des dispositions permettant explicitement l’accès de la concurrence. Les pays sont ainsi notés en fonction de la présence ou non de textes réglementaires allant dans ce sens et, le cas échéant, de leurs qualités.

Le troisième poste, LIII Autorité de régulation (30 pour cent), rend compte de la présence ou non d’une entité faisant respecter les lois de la concurrence. La sous partie la plus importante (50 %) est liée à son existence. Le poste prend également en compte les objectifs que se fixe l’autorité de régulation (25 %). Plus ceux-ci sont conformes à l’instauration d’une saine concurrence, plus cette note sera élevée. Enfin, il importe de prendre en considération les moyens dont dispose l’autorité de régulation pour mener à bien ses objectifs (25 %). Si elle n’a pas la possibilité d’intervenir par manque de pouvoirs ou de moyens, la note sera faible dans ce domaine.

Figure 18 : Possibilité d’accès au réseau (Indice ACCESS)

La législation fournit un cadre théorique légal pouvant s’éloigner des aspects pratiques de la réalité. Ainsi, l’entrée de nouveaux opérateurs peut être autorisée par le cadre législatif mais rendue impossible par des barrières à l’entrée autres. L’indice ACCESS mesure la possibilité concrète d’accès aux réseaux des différents pays.

AI Barrières liées à l’information (5 pour cent) 1. Durée d’obtention de l’information (40 pour cent)

2. Qualité de l’information impersonnelle disponible (30 pour cent) 3. Qualité de l’information disponible (30 pour cent)

AII-Barrières administratives (20 pour cent) 1. Licence (35 pour cent)

2. Certificat de sécurité (25 pour cent)

3. Approbation du matériel roulant (40 pour cent)

AIII Operational barriers (50 per cent)

1. Conditions d’obtention des sillons (25 pour cent) 2. Tarification de l’infrastructure (50 pour cent)

3. Accès aux autres services et facilités prévues par la Directive 2001/14/EC, Annexe II (25 pour cent)

AIV-Proportion du marché accessible par segments (25 pour cent) 1. Transport de fret (50 pour cent)

2. Transport de voyageurs de longue distance (25 pour cent) 3. Transport de voyageurs régional et local (25 pour cent)

Le premier poste AI Barrières liées à l’information représente une faible partie de la note finale de l’indice ACCESS. Il représente la qualité de la diffusion de l’information sur le marché.

Le second poste AII-Barrières administratives (20 %) rend compte de la barrière à l’entrée constituée par les démarches légales devant être accomplies par les nouveaux opérateurs sur un marché. Selon que les démarches sont longues et complexes la note sera faible. La licence d’opérateur ferroviaire est un document indispensable pour démarrer une activité ferroviaire. Cela constitue une barrière à l’entrée plus ou moins importante en fonction de la durée d’obtention. Un nouvel opérateur doit également être détenteur d’un certificat de sécurité attestant de la sûreté de ses transports. La possibilité d’obtention est également une barrière à l’entrée. Le matériel des opérateurs ferroviaires doit être certifié apte à rouler sur le réseau concerné. Cela demande des procédures d’expertise et des tests. Il faut par exemple que le matériel soit détectable par les circuits de voie. Plus les délais de certification seront courts et impartiaux et meilleure sera la note dans ce domaine.

Le troisième poste AIII Barrières opérationnelles qui est le plus important, concerne essentiellement l’accès au domaine des facilités essentielles. Pour circuler, les nouveaux opérateurs doivent pouvoir obtenir des sillons (25 %). Le pays sera noté selon la possibilité d’obtention rapide de sillons non dégradés. C'est-à-dire que les nouveaux opérateurs doivent être en mesure d’obtenir des sillons de même qualité que ceux des opérateurs historiques. Il serait en effet inéquitable que les trains des nouveaux entrants soient soumis à des vitesses inférieures et à des arrêts. Le mode de tarification de l’infrastructure (50 %) rend compte de la barrière à l’entrée qui peut être induite par la fixation des péages. Si le coût d’entrée sur le réseau est important et que le prix par sillons est ensuite faible cela constitue une barrière à l’entrée. En effet, dans ce cas les opérateurs historiques qui ont un volume d’activité important seront avantagés. Un nouvel opérateur devra payer un accès élevé au réseau important qui compromettra sa viabilité économique puisqu’il opérera au départ sur un petit nombre de lignes. Le troisième sous-poste concerne l’accès aux autres services et facilités prévues par la Directive 2001/14/EC présentées dans le tableau ci-dessous.

Le quatrième poste Proportion du marché accessible par segments compte pour un quart de la note globale de l’indice Com. Il prend en compte la proportion du marché qui est accessible à de nouveaux opérateurs et se divise pour moitié entre le transport de fret et le transport de voyageurs.

Figure 19 : L’intensité de la concurrence (Indice Com)

0 100 200 300 400 500 600 700

Grande-Bretagne Suède Allemagne Pays-Bas Danemark Portugal Belgique Italie Autriche Finlande Norvège France Luxembourg Espagne Grèce

L’indice COM se donne pour objectif de mesurer l’efficacité du marché. Le processus concurrentiel amené par les déréglementations est supposé améliorer les performances du mode ferroviaire.

Le barème est le suivant :

CI Évolution de la part modale du mode ferroviaire 1991-2001 (5 pour cent)

1. Évolution de la part modale du mode ferroviaire dans le transport de fret (50 pour cent) 2. Évolution de la part modale du mode ferroviaire dans le transport de voyageurs (50 pour cent)

CII Apparition de nouveaux opérateurs en 2003 (45 pour cent)

1. Nombre de nouveaux opérateurs autorisés en fonction de la taille des réseaux (40 pour cent) 2. Nouveaux opérateurs actifs en fonction de la taille des réseaux (50 pour cent)

3. Ratio entre les opérateurs actifs et les opérateurs autorisés (10 pour cent)

CIII Part de marché des opérateurs étrangers en 2003 (50 pour cent) 1. Part de marchés des opérateurs étrangers en 2003 (75 pour cent)

2. Croissance de la part de marché des opérateurs étrangers depuis 2001 (25 pour cent)

Le premier poste, CI Évolution de la part modale du mode ferroviaire 1991-2001 est relativement modeste puisqu’il représente 5 % de la note totale de l’indice COM. Il est conditionné par moitié par les évolutions de la part modale du mode ferroviaire dans le fret et dans le transport de voyageurs. Pour les rédacteurs de l’étude, l’ouverture à la concurrence est supposée redynamiser le chemin de fer. Une évolution favorable des parts de marché est donc associée à une libéralisation réussie.

Le second poste CII Apparition de nouveaux opérateurs en 2003 qui compte pour 45

% de l’indice COM concerne l’arrivée effective de la concurrence. Il tient compte du nombre de nouveaux opérateurs autorisés sur le réseau en fonction de sa taille à hauteur de 40 %. Ceux-ci peuvent dans les faits posséder une licence leur donnant un droit d’effectuer des missions ferroviaires mais cela peut ne pas se traduire par une activité réelle sur le marché. Ce second poste tient compte des nouveaux opérateurs actifs (50

%). Un certain nombre d’opérateurs peuvent être autorisés sur un même réseau national. Il existait avant les phénomènes de libéralisation différents opérateurs locaux dans les différents pays. En France, la CFTA qui opère des transports ferroviaires locaux de voyageurs sur l’étoile de Paimpol en est un exemple. Il est tenu compte de la part des nouveaux opérateurs dans le total des entreprises ferroviaires pour évaluer le taux de pénétration des entrants.

Le troisième poste, CIII Part de marché des opérateurs étrangers en 2003 évalue les parts de marché des opérateurs des autres pays qui rentrent sur le marché du pays noté. 75 % de la note provient des parts de marché des opérateurs étrangers sur l’année 2003. Les 25

% restant s’intéresse ont un aspect davantage dynamique en notant les pays en fonction de l’évolution de la pénétration des opérateurs étrangers.

Selon les résultats de ce travail, les pays dans lesquels il existe le moins de barrières à l’entrée et où le marché est donc le plus accessible sont donc la Grande-Bretagne, la Suède et l’Allemagne. L’étude de ces trois pays ne doit donc pas occasionner de biais

lié à des difficultés pour rentrer sur le marché qui fausserait notre analyse des rapports concurrentiels entre opérateurs historiques et nouveaux entrants.

2.1.4Conclusion

L’environnement dans lequel évoluent les opérateurs ferroviaires s’est transformé selon trois axes qui sont distincts mais qui s’entrecroisent.

Le premier axe est un déclin des parts de marché du transport ferroviaire en Europe.

Cela tient au développement d’une concurrence des autres modes de transport, et notamment de la route qui apparaît comme davantage compétitive et flexible. Un certain nombre de voix issues de la Commission européenne, des utilisateurs du transport ferroviaire et d’universitaires avancent que le déclin est en partie intrinsèque en raison des caractéristiques du chemin de fer mais que les opérateurs en sont en partie responsables pour deux raisons principales. La première est une organisation trop rigide et pas assez commerciale qui ne conviendrait plus à la demande du marché, sauf peut-être dans le transport grande ligne de voyageurs. La seconde est une structure de coût trop lourde. Les pertes de marché du chemin de fer seraient ainsi liées au fait que la réglementation a éloigné les opérateurs ferroviaires du modèle de l’entreprise traditionnelle.

Le second axe est qu’une série de mesures initiée par la Commission européenne et par différents pays européens vise à replacer les systèmes ferroviaires dans un fonctionnement davantage marchand et concurrentiel. La concurrence sur le marché vise à permettre l’arrivée de nouveaux opérateurs en réduisant le niveau des barrières à l’entrée et la concurrence pour le marché consiste à préserver un monopole modal dont la gestion est soumise régulièrement à des procédures d’appel d’offres.

Le troisième axe est que les mouvements développés à l’initiative des pays, la latitude et le caractère pour le moment incomplet des directives sont à l’origine d’une grande variété de configurations qui devraient avoir tendance à s’harmoniser sous l’impulsion des directives européennes. La concurrence pour le marché est pressentie pour le transport régional et local de voyageurs tandis que les transports de fret et de voyageurs

grande ligne devraient être concernés par un développement de la concurrence sur le marché.