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Faisant écho à l’image positive relativement consensuelle que leurs parents ont des quartiers gentrifiés, l’immense majorité des enfants enquêtés, qui s’avèrent être de fins connaisseurs de leur quartier, affirment, eux aussi, apprécier les quartiers gentrifiés. C’est ce que mettent en lumière les entretiens réalisés avec les enfants.

21 – Les Batignolles, Stoke Newington et Noe Valley : des « quartiers du bonheur »

Les quartiers gentrifiés ne sont pas des territoires inconnus dans lesquels les enfants seraient passivement guidés par leurs parents (ou d’autres relations), sans repères. Au contraire, il apparaît que les enfants connaissent globalement bien les trois quartiers, puisque 60,7 % des enfants interrogés ont reconnu l’ensemble des lieux représentés sur les photographies présentées lors de l’entretien, tandis qu’à l’opposé, seuls 11,4 % des enfants n’ont pas identifié au moins deux photos du quartier72. Les photos qui ont posé le plus de difficultés

sont celles des lieux situés à la limite des quartiers, que la plupart des enfants – y compris parmi ceux résidant au sein des quartiers gentrifiés – ne considèrent pas comme faisant partie de leur quartier (la place Clichy aux Batignolles, la mairie de Hackney à Stoke Newington et la rue Mission avec sa station de BART à Noe Valley). Mais dans l’ensemble, les enfants ont une bonne connaissance du quartier et ils sont nombreux à le revendiquer explicitement :

« Je sais très bien m’orienter !73 (Kaetlin, CMS, Noe Valley) ».

« Je connais tellement bien cet endroit !74 (Jack, CMS, Stoke Newington) ».

72

Pour rappel, ces données portent sur les enfants qui habitent dans les limites de la ville, soit un total de 125 individus (cf. chapitre 2).

73

« I can get around pretty well ! »

74

Habiter dans ou hors du quartier de Noe Valley

Si les enfants de Noe Valley affirment avec confiance qu’ils connaissent bien le quartier, la question de sa délimitation et de l’inclusion de leur logement dans le quartier leurs semble moins évidente. La conscience d’habiter dans les marges du quartier pour la majorité d’entre eux (7 sur 10) (cf. Figure 7) trouble en effet leur sentiment d’appartenance à Noe Valley :

« Je ne sais pas vraiment dans quel quartier j’habite, parce que je suis à la limite de Noe Valley et au bout de la Mission.75 (Joyce, CMS). »

« J’habite à Noe Valley parce que j’habite près de Dolores Heights.76 (James,

CMS). »

« [Ma maison] fait un peu partie de Noe Valley. C’est tout au bout du quartier.77

(Jay, CMS) ».

Les représentations des limites du quartier (neighborhood) peuvent en outre varier d’un enfant à l’autre. Ainsi, Elena (CMS) et Fiora (CMS), qui habitent à un block l’une de l’autre, estiment habiter à « Mission Dolores », tandis que Kaetlin (CMS), dont le logement est situé dans la même maison que celui de son amie Elena, considère qu’elle habite pour sa part le quartier de « Noe Valley ». Autrement dit, les enfants différencient nettement le cœur du quartier autour de la 24ème rue, qu’ils identifient sans ambiguïté comme « Noe Valley », et

ses marges, dont les limites sont mal définies.

Une autre explication de cette difficulté à saisir les limites de leur quartier réside dans l’échelle de référence. Par exemple, alors que Joyce (CMS), qui se déplace essentiellement à pied dans le quartier, estime qu’elle habite « à la limite de Noe Valley », elle assimile à plusieurs reprises son quartier à sa rue au cours de l’entretien, révélant l’importance de cette échelle intermédiaire entre le « grand quartier » et le logement. Son dessin ne tranche pas davantage entre les deux échelles : sur une face de la feuille, elle a dessiné son logement et les maisons qui l’entourent (cf. Figure 35), et sur l’autre, elle a réalisé un plan représentant la rue de son domicile et celle de la 24ème rue, avec un espace blanc entre les

deux, et des flèches symbolisant le parcours de l’une à l’autre (cf. Figure 36). Finalement, la figure du quartier de Noe Valley apparaît comme plus ambigüe qu’il n’y paraît à première vue, aux yeux des enfants eux-mêmes.

Au-delà de la question des marges et des échelles du quartier, il faut signaler que la moitié des enfants (sur dix) a une situation résidentielle relativement complexe. Deux enfants, issus des classes moyennes, sont de parents séparés et continuent de voir leur père les week-ends, dans un logement situé hors du quartier mais dans la ville : autrement dit, avec leur deuxième logement vient un deuxième quartier, même si tous les deux considèrent Noe Valley comme leur quartier principal.

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« I don’t really know what neighborhood I’m in, because I’m on the edge of Noe Valley and at the end of the Mission ».

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– 2012 Les trois autres enfants, tous issus des milieux populaires, habitent pour deux d’entre eux une partie de la semaine dans Noe Valley chez leurs grands parents qui y sont implantés depuis plusieurs décennies et le week-end avec leurs parents dans un autre quartier de la ville ou de la lointaine périphérie de San Francisco (Joselito et Carmen), tandis que la troisième est en train de déménager pour la banlieue (Grace). Leurs mobilités résidentielles, qui sont aussi quotidiennes, illustrent parfaitement les forces centripètes que le processus de gentrification fait peser sur les milieux populaires à Noe Valley.

Pour eux, la question de la délimitation de leur quartier apparaît encore plus nuancée :

« J’habite un peu à Noe Valley en quelque sorte.78 (Carmen, CP) ».

« C’est la maison de ma grand-mère… Ma maison parce que j’y vais tout le temps.79 (Joselito, CP) ».

Figure 35 - Le quartier de Joyce (recto)

78

« I sort of live in Noe Valley a little bit ».

79

Figure 36 - Le quartier de Joyce (verso)

Le degré de connaissance du quartier n’est cependant pas uniformément réparti entre les enfants. Ainsi, les enfants qui habitent le quartier sont plus nombreux, proportionnellement, à bien le connaître que ceux qui habitent ailleurs, mais plus de la moitié de ces derniers sont tout de même très familiers des lieux. Le milieu social, par ailleurs, joue un rôle très net : plus les enfants sont issus de milieux sociaux aisés, meilleure est leur connaissance du quartier. Ainsi aux Batignolles, si tous les enfants des couches moyennes et supérieures résidant aux Batignolles ont reconnu l’ensemble des photos, c’est le cas d’une moitié seulement des enfants des couches populaires habitant le quartier voisin des Epinettes. De plus, dans les trois quartiers, il apparaît que les garçons sont plus nombreux à en avoir une bonne connaissance que les filles. Enfin, à mesure que les enfants avancent en âge, leur connaissance du quartier s’affaiblit, un résultat qui peut paraître paradoxal. La connaissance du quartier varie donc nettement en fonction des différenciations sociales des enfants, et c’est à la lumière de leurs usages du quartier que ces variations prendront tout leur sens (cf. chapitre 4).

Territoires bien connus, les Batignolles, Stoke Newington et Noe Valley sont également des quartiers très appréciés par les enfants :

« J’aime bien, c’est sympa. (Antonia, CP, Batignolles) ».

« J’aime bien le quartier où j’habite.80 (Virginia, CM, Stoke Newington) ».

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« Mon quartier a beaucoup de succès. (…) Je l’aime vraiment vraiment bien.81

(Elena, CMS, Noe Valley) ».

Dans le quartier parisien, qu’un des enfants nomme sur son dessin « le quartier du bonheur », les enfants associent cette appréciation positive à la présence des parcs et des squares, et en particulier au parc Cardinet qui constitue le lieu préféré le plus souvent cité, à la présence des amis, à la présence parfois aussi de la famille élargie ou bien encore, à la proximité des commerces (et notamment du marché des Batignolles). À Stoke Newington et Noe Valley, on retrouve également ces lieux, avec une forte insistance, dans le quartier londonien, sur les maisons des amis, très fréquentées, au moins pour les enfants des classes moyennes et moyennes supérieures.

« On peut faire plusieurs choses, y a un nouveau parc, y a un deuxième parc pas très loin, on n’y va pas trop souvent, on a des magasins, c’est bien. (Paul, CMS, Batignolles) ».

« J’aime bien me promener, parce que des fois je vois des personnes que je connais donc c’est sympa. (…) J’ai beaucoup de copines qui sont à côté de chez moi, j’ai de la famille, donc c’est sympa. On se voit souvent, on s’amuse, voilà. (Antonia, MP, Batignolles) ».

« J’aime bien le fait qu’il y ait plein d’endroits, plein d’écoles, plein de restaurants, plein de boutiques et puis… J’aime bien tous les gens qu’il y a.82

(Virginia, CM, Stoke Newington) »

« Il y a plein de gens et c’est coloré. Toutes les boutiques sont en rose, en violet. Ouais, c’est pour ça que je l’aime bien.83 (Latifa, CP, Stoke Newington) ».

« J’aime bien Stoke Newington, le quartier, parce que tous mes amis habitent là. J’ai très envie d’un endroit où je peux voir mes amis quand je veux.84 (Kay, CP,

Stoke Neiwngton) ».

« Je l’aime bien parce qu’il y a plein de parcs et qu’il y a toujours des gens dans le parc qui jouent avec leurs chiens. Et si tu te fais mal, il y a toujours des gens pour t’aider.85 (Neils, CMS, Noe Valley) ».

« Ca (désignant le segment de la 24ème rue représenté sur la photo), c’est l’un de mes coins préférés de tout Noe Valley!86 (Jay, CMS, Noe Valley) ».

« Je l’aime bien parce qu’il y a plein de personnes âgées et de bébés, et plein de gens qui habitent là, que je connais.87 (Elena, CMS, Noe Valley) ».

81

« My neighborhood is very popular. (…) I really really like it ».

82

« I like the fact that it has lots of places, lots of schools, lots of food places, lots of shops and I don't know... I just... I like all the people there ».

83

« There is lots of people and it's bright. All the shops have that pink color, purple color. Yeah. That's why I like it ».

84

« I like Stoke Newington, the local area, because all my friends live there. I really wanted a place where I can always see my friends ».

85

« (I like it) because there are a lot of parks in it and there are always some people at the park playing with their dogs. That if you get hurt, there are always people to help you ».

86

Contrairement aux Batignolles, les enfants de Stoke Newington, et, plus encore, ceux de Noe Valley, mettent aussi en avant la dimension sécuritaire pour expliquer leur attachement au quartier, faisant ainsi référence, en creux, à la réputation de dangerosité des quartiers centraux (inner city) des grandes villes des Etats-Unis et du Royaume-Uni, encore fortement ancrée dans les représentations (voire dans le quotidien) des adultes… Et des enfants :

« Je le trouve chouette parce qu’il est sûr parce qu’ailleurs c’est pas vraiment sûr, parce qu’il y a des coups de couteaux des fois et tout. J’aime bien mon quartier.88

(Latifa, CP, Stoke Newington) ».

« Je dirais que je l’aime bien parce que ce n’est pas trop violent.89 (Neils, CMS,

Noe Valley) ».

« C’est vraiment un quartier agréable. Il n’y a jamais de problème.90 (Elena, CMS,

Noe Valley) ».

« Il n’y a jamais de problème et tout. Par exemple, si on va dans les parcs, il n’y a pas… Il n’y pas d’ados qui embêtent les enfants et tout.91 (Grace, CP, Noe

Valley) ».

Dans les trois quartiers, chez certains de ces enfants, cette appréciation positive est en même temps nuancée parfois par l’énoncé de quelques critiques. L’insécurité liée à la présence de jeunes en bandes est par exemple l’un des quelques (rares) reproches adressés par deux enfants (de milieu populaire) au quartier de Stoke Newington. Plus généralement, quelques enfants, dans les trois quartiers, regrettent parfois l’absence de lieux adaptés aux enfants de leur âge, la présence de personnes « peu agréables », la saleté du quartier, etc.

« Parce que ce qui est bien, c’est que j’habite tout à côté de l’école. (…) Mais je ne sors pas tellement de [ma maison], en fait je n’aime pas trop ça. Parce qu’en fait il y a plein de gangsters.92 (Ahmed, CP, Stoke Newington) ».

« Mais parfois je m’ennuie beaucoup. Alors peut-être que ce serait mieux s’il y avait plus de choses, pas seulement pour les bébés et les adultes, des choses pour le milieu, pour les enfants et les adolescents.93 (Maeva, CP, Stoke Newington) ».

« Il y a beaucoup de graffitis partout. (…) Je trouve que c’est embêtant.94 (Jack,

CMS, Stoke Newington) ».

87

« (I like it) because there’s a lot of old people and babies, and a lot of people who live there I know ».

88

« I find it nice because it's safe because some other places is not really safe because there's lots of stabbing going on and everything. I like my area ».

89

« I think I like it because it is not that violent ».

90

« It’s really nice. It’s really safe ».

91

« It’s really safe and stuff. Like the parks, if you go there, there won’t be any… like teens, talking to kids like that and stuff ».

92

« Because the good part is, I live next to it, right next to the school. (…) But I am not very often out of this place [sa maison], so I basically don’t like it that much. Basically, because there are a lot of gangsters ».

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« But sometimes, I just feel really bored. So, maybe they need to have more things. Not just for babies and adults. Something in the middle that's kids and teenagers. Where can they can have things for that ».

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« Sinon moi, j’ai pas beaucoup de choses dans mon quartier où j’aime bien aller. (Paul, CMS, Batignolles) ».

« Il y a des gens pas très agréables dans la rue (Lilian, CP, Batignolles) ».

« Il y a plein de bouteilles par terre. (…) Des fois, y a trop de bagarres dans la rue. (Jessica, CP, Batignolles) ».

Finalement, dans l’ensemble les quartiers gentrifiés apparaissent comme à la fois bien connus et très appréciés par les enfants des Batignolles, de Stoke Newington et de Noe Valley, qui ont notamment invoqué la présence des parcs, de la rue commerçante et des habitants (leurs amis, leurs connaissances – souvent des adultes -, ou encore l’animation du quartier en général). Sans surprise, certains de ces éléments apparaissent dans leurs dessins du quartier ; mais l’analyse de ces derniers, combinée à celle des entretiens individuels, permet de saisir plus finement les représentations du quartier des enfants.

22 – « Dessine-moi ton quartier » : les Batignolles vues par les enfants de Lemercier

En dessinant leur quartier lors des « Ateliers quartiers » organisés dans leur classe et en commentant ensuite leurs dessins, les enfants ont pu se saisir d’un autre moyen d’exprimer leurs représentations du quartier (cf. chapitre 2). Afin d’appréhender la richesse de ces productions graphiques et d’en faire ressortir les points forts, nous nous concentrons ici sur les dessins réalisés par les enfants de la classe de CM1 de l’école Lemercier aux Batignolles, soit 27 dessins au total.

Les dessins produits par les enfants ont été analysés en s’inspirant de la méthode décrite dans un article récent (Béneker et al. - 2010). La première étape a consisté à observer les dessins dans leur ensemble, à noter l’impression générale qui s’en dégageait, à identifier les thèmes généraux qui émergeaient et les exemples les plus révélateurs. Puis chaque dessin a été analysé dans le détail : il s’agissait, pour chaque thème identifié, d’étudier la façon précise dont il était traité (ou non traité) graphiquement. L’entretien individuel a alors permis de saisir l’articulation entre les thèmes du dessin et ceux de l’entretien. Enfin, les productions de l’enfant (graphiques et discursives) ont été mises en relation avec d’autres informations recueillies auprès de l’enseignante ou éventuellement du parent interrogé.

221 – Comment dessiner son quartier ?

Dès le premier regard, on est frappé par la grande disparité entre les vingt-sept dessins de quartier, pourtant réalisés par des enfants d’âge similaire et habitant le même espace urbain, et qui pose la question de la possibilité même d’analyser à travers eux les représentations du quartier des enfants.

Š Dessins « détaillés », dessins « sommaires »

En particulier, certaines productions graphiques, que l’on peut qualifier de « sommaires », semblent offrir une matière bien plus limitée pour l’analyse (simplicité du graphisme, rareté des détails et absence de dénominations), que d’autres que l’on peut, par opposition, qualifier de « détaillées». Les jeunes auteurs sont les premiers à reconnaître les insuffisances de leurs œuvres au cours des entretiens qui ont suivis. Représenter graphiquement un espace demande en effet de mobiliser un ensemble de compétences (mémoire et imagination, maîtrise de l’échelle et de l’outil graphique) que les enfants maîtrisent plus ou moins bien et auxquelles ils accordent plus ou moins d’importance. Le dessin produit par l’enfant résulte d’un filtrage considérable et ne laisse pas à lui seul approcher la richesse du rapport des enfants à leur quartier. Les entretiens individuels sont alors une source complémentaire précieuse : ils permettent à la fois aux enfants d’opérer eux-mêmes un retour réflexif sur leurs productions graphiques, et leur donnent l’occasion d’exprimer leurs représentations du quartier par un autre biais.

Enfin, on sait que les représentations de l’espace, qu’elles soient graphiques ou discursives, sont fortement influencées par l’expérience et les valeurs des individus ainsi que leur position sociale (Gould et White – 1974 ; Ramadier et Moser - 1998). Aussi les dessins et les entretiens pourraient-ils difficilement être interprétés en l’absence de données cernant les caractéristiques sociales (la profession de ses parents), familiales (statut familial, place dans la fratrie) et scolaires (performance individuelle). Par exemple, le dessin de Marc, qui indique la localisation du domicile de neuf de ses amis de la classe, pourrait laisser penser que, pour son jeune auteur, le quartier consiste en la spatialisation de ses relations sociales développées à travers l’école. L’entretien avec son enseignante, révélant que le jeune garçon avait « de gros problèmes relationnels » et n’avait pas d’ami dans l’école, invite à revoir cette interprétation. Au total, à condition de prendre en compte le contexte de production des dessins et d’offrir aux enfants d’autres moyens de s’exprimer, les dessins constituent une source très riche pour comprendre les représentations du quartier, et la diversité des dessins devient alors porteuse de sens en elle-même.

Š Plan ou dessin ?

La consigne laissait la possibilité aux enfants de représenter leur quartier sous la forme graphique de leur choix. Ils ont opté en grande majorité pour le dessin, rarement pour le plan (deux enfants seulement), et souvent pour une formule combinant à la fois certains éléments du dessin et du plan. On peut se demander si ces modes de représentations montrent un gradient dans la connaissance du quartier, et partant de là, dans les compétences spatiales des enfants. Cette question a fait l’objet de célèbres débats depuis Piaget, sur lesquels on ne s’attardera pas ici.95

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– 2012 Quoi qu’il en soit, parmi les enfants de notre échantillon, Marc est l’un des seuls à avoir choisi de représenter son quartier sous forme de plan (cf. Figure 37) et indiscutablement celui dont l’étendue, l’exactitude et la précision sont les plus poussées. L’espace représenté couvre 11 pâtés de maison ; il est nommé (c’est pour lui « le quartier des Batignolles »), ainsi que chacune des rues figurées. Les lieux importants de sa vie quotidienne sont précisément localisés : les deux parcs, l’école (avec un plan de sa cour de récréation, à une échelle certes démesurée par rapport à la réalité), le terrain d’éducation physique (avec là aussi le plan du terrain), ainsi que la localisation de son logement (« moi ») et de celui d’autres élèves de sa classe. Au cours de l’entretien, il justifie son choix de représentation :

« J’me suis dit c’est bien de faire un plan comme ça, je sais que c’est pour savoir un peu plus du quartier, comme ça on sait, par exemple on peut dire là la rue, genre ce qui se passe et tout ».

Ainsi, il voit dans le plan l’outil le plus approprié pour faire état (et transmettre) de sa connaissance du quartier. Sa représentation du quartier renvoie à une compréhension très fine de l’organisation de l’espace.

A l’opposé, Lilian (cf.Figure 38) a choisi de représenter son quartier sous la forme d’un dessin. Celui-ci consiste en une composition assez réussie esthétiquement : les éléments